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D

DACHSTUL, feigneurie immédiate d'Allema du foleil ou d'une lumiere quelconque ne le tou

gne. Elle eft bornée, d'un côté, par le bailliage chaffent: on eût regardé comme un crime de lui allemand du duché de Lorraine, & de l'autre par couper la barbe & les ongles. On lui préparoit les bailliages de Saarbourg & de Grimbourg, qui fes repas dans une vaiffelle qui ne pouvoit fervir appartiennent à l'électeur de I rèves, dont elle rele- qu'une fois. Il prenoit douze femmes, qu'il épouve. Elle appartenoit anciennement à la ligne Rodol- foit en grande pompe: fon château offroit deux phine des dynaftes de Fleckenftein: le dernier de ces rangs de maifons, où elles logeoient fix de chaque princes la vendit en 1644 à Philippe-Chriftophe côté. Il avoit de plus un férail pour fes concubide Soetern, archevêque de Trèves, fon feigneur nes. On apprêtoit tous les jours un magnifique direct, qui la donna à fa famille à titre de fidéi- fouper dans chacune de ces douze maisons : il forcommis. Marie Sidoine fa fille, & l'héritière de toit porté fur un palanquin magnifique, dont les Philippe-François, comte de Solms, la porta en colonnes d'or maffif étoient entourées d'une ef mariage à Notger Guillaume: la famille de ce pèce de jaloufie, afin qu'il pût voir tout le monde dernier la poffède encore. Son titulaire ne fiège fans être vu de perfonne. Ce palanquin repofoit pas aux affemblées de l'Empire, mais il a voix & fur les épaules de quatorze gentilshommes des plus féance à celles du cercle du haut-Rhin. Sa taxe qualifiés de fa cour. Il étoit alors précédé de fes matriculaire eft d'un cavalier & d'un fantaffin, ou foldats, & fuivi d'un grand cortège, en particude 16 florins par mois; & fa contribution pour lier d'une voiture tirée par deux chevaux, dont l'entretien de la chambre impériale eft de 10 rix-les houffes étoient couvertes de perles & de diadalles & 73 kr. par mois.

DAIRI ou DAIRO, fouverain pontife des japonois.

Kaempfer l'appelle le monarque héréditaire eccléfiaftique du Japon. On fait que l'empire du Japon a deux chefs; l'un eccléfiaftique qu'on nomme dairo, & l'autre féculier qui porte le nom de kubo. Ce dernier eft à proprement parler l'empereur, & le premier eft l'oracle de la religion du pays.

Les grands prêtres, fous le nom de dairis, ont été long-temps les maîtres du Japon, tant pour le fpirituel que pour le temporel. Ils ufurpèrent l'autorité plenière & abfolue, par les intrigues d'un ordre de bonzes venus de la Corée, dont ils étoient les chefs. Ces bonzes facilitèrent à leur dairi le moyen de foumettre toutes les puiffances de ce grand Empire. Avant cette révolution, il n'y avoit que les princes du fang ou les enfans des rois, qui puffent fuccéder à la monarchie; mais après la mort d'un des empereurs, les bonzes ambitieux élevèrent à l'Empire un de leurs grands prêtres, qui jouiffoit de la réputation d'un faint, Les peuples, qui le croyoient defcendu du Soleil, le prirent pour leur fouverain. Leurs idées religieufes étoient très-abfurdes. Ils rendirent à cet bomme des hommages idolâtres ; ils fe perfuadèat que s'opposer à fes commandemens, c'étoit refifter à Dieu même. Lorfqu'un des rois particuliers ou des chefs du pays avoit quelque démêlé avec un autre, ce dairi connoiffoit de leurs différends, avec la même autorité que fi Dieu l'eût envoyé du ciel pour les décider.

Quand le dairi régnant marchoit, dit l'auteur de l'Ambaffade des hollandois, il ne devoit point toucher la terre ; il falloit empêcher que les rayons Econ. polit. & diplomatique. Tom. II.

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mans deux gentilshommes tenoient les rênes des chevaux, pendant que deux autres marchoient à côté ; l'un d'eux agitoit fans ceffe un éventail pour rafraichir le pontife, & l'autre portoit un parafol. Cette voiture appartenoit à la premiere de les femmes ou de fes concubines, &c.

Nous fupprimons d'autres détails de cette efpèce dont parlent les voyageurs; il nous fuffit de remarquer que le peuple rendoit au dairo un culte peu différent de celui qu'ils rendoient à leurs dieux.

Les bonzes, dont le nombre eft immenfe, montroient l'exemple, & gouvernoient defpotiquement fous leur chef. C'étoit autant de tyrans répandus dans les villes & dans les campagnes : leurs vices & leurs cruautés aliénérent à la fin les efprits des peuples & des grands; un prince, feul refte de la famille royale, forma un fi puiffant parti, qu'il fouleva tout l'Empire contre eux. Une feconde révolution acheva d'enlever aux dairos la fouveraineté qu'ils avoient ufurpée, & les fit rentrer avec les bonzes dans leur état naturel. Le prince royal remonta fur le trône de fes ancêtres, & prit, vers l'an 1600, le titre de kuto. Ses defcendans ont laiffé au dairo fes immenfes revenus, quelques hommages capables de flatter fa vanité, avec une ombre d'autorité pontificale & religieufe pour le confoler de la véritable autorité qu'il a perdue. Méaco eft fa demeure; il y occupe une espèce de ville à part avec les femmes, fes concubines, & une très-nombreufe cour. L'empereur ou le kubo réfide à Yedo, capitale du Japon & jouit d'un pouvoir abfolu fur tous fes fujets. Voyez JAPON. L'article du dairo, qu'on lit dans le Dictionnaire de Trevoux, a befoin d'être rece

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Le nom de dalai-lama fignifie prêtre univerfel. On prétend que ce pontife eft le même, auquel on donna autrefois le nom de prêtre - Gehan, ou prêtre-Jean; car le mot de Gehan, dans la langue des peuples de la partie feptentrionale de l'Inde, fignifie univerfel. Ainfi prêtre-gehan & dalai-lama ont la même fignification. Ce dieu prétendu fait fa réfidence ordinaire près de Potala, vers les frontières de la Chine. Il habite un célèbre couvent fitué fur le fommet d'une montagne très-élevée. Vingt mille prêtres de cette divinité habitent les environs on les nomme lamas. Ils demeurent plus ou moins près du grand-lama, felon qu'ils font plus ou moins diftingués par leur dignité & par leur mérite. On dit que le dalai-lama réunit puiffance fpirituelle & la puiffance temporelle; & que, par une modération qu'on n'a guère vu, Ani & fes prêtres fe mêlent feulement des affaires fpirituelles; mais il y a lieu de croire que des circonftances particulieres lui font une néceffité de ce facrifice de fes droits. Le dalai-lama a fous lui deux kans des calmouks, chargés de l'adminiftration de l'autorité temporelle & des dépenfes néceffaires à l'entretien de fa maison. On ajoute que le grand-lama a foin de ne pas expofer fa divinité au grand jour ; qu'il ne fort prefque jamais de fon palais, & fe tient toujours renfermé dans le fond d'un temple, entouré de fes prêtres, qui lui Tendent tous les hommages dus à l'Etre fuprême. Lorfque les dévots viennent l'adorer, on ne leur permet pas d'approcher de trop près. Le refpect qu'on porte à ce dieu va fi loin, que fes excrémens même font regardés comme facrés. Cette inconcevable folie paroît certaine, car elle eft atteftée par tous les écrivains; & on ne fera pas difpofé à la révoquer en doute, fi on fonge à toutes les extravagances humaines. On conferve précieusement fon urine, comme un remède divin contre toutes les maladies. On fait fécher fes excrémens les plus groffiers: on les réduit en poudre qu'on enferme précieufement dans des boîtes d'or enrichies de pierreries, & on les envoie aux plus grands princes comme des préfens d'un prix ineftimable. Ces monarques fe font honneur de les porter fufpendues à leur cou. Les peuples font convaincus que le grand lama ne meurt point; -& pour entretenir cette erreur, lorfque les prêtres s'apperçoivent que fa mort n'eft pas éloignée, ils font chercher de tous côtés un homme qui lui reffemble, & le fubftituent adroitement à fa place.

On vient en foule, des pays les plus éloignés, pour visiter le temple du grand lama. Il y a tou

jours à fes pieds un baffin deftiné à recevoir les offrandes des devots.

DALMATIE, ( DALMATIA) hung. Dalmatiai Arffag. contrée d'Europe.

La Dalmatie actuelle, qui appartient à la Honblique de Ragufe, s'étend depuis le fleuve Arfo grie, à Venife, à l'Empire ottoman & à la répujufqu'au fleuve Drin; mais il y en a une portion comprife fous le royaume d'Iftrie, & une autre fous celui d'Albanie. Les habitans de cette contrée ont la même langue & la même manière de vivre que les efclavons, & leur religion eft la catholique romaine.

Précis de l'hiftoire politique de Dalmatie. La Dalmatie, felon les monnoies & les infcriptions, tire fon nom de l'ancienne ville de Delmium ou Delminium que les romains prirent & détruifirent l'an de Rome 597. Ils établirent leur domination dans la Dalmatie, qui fecoua cinq fois le joug & leur fufcita bien des embarras jufqu'au règne d'Augufte. Lorfque cet empereur partagea les provinces avec le fénat, la Dalmatie fut une des onze provinces proconfulaires que devoient gouverner les fénateurs; mais le fénat la lui rendit de fon plein gré, & il la fit régir par un gouverneur. Après la mort de Conftantin le grand, cette province fut regardée comme un des diftricts de l'Illyrie occidentale: elle eut beaucoup à fouffrir, de même que les royaumes voifins de l'inondation des peuples barbares; & les goths ayant créé un empire en Italie, fubjuguèrent la Dalmatie: Juftinien, empereur d'Orient, vainquit les goths & les dalmates. Les esclavons pénétrèrent en Dalmatie l'an 640; ils s'y maintinrent vers la fin du règne d'Héraclius, & ils eurent leurs rois particuliers. Le dernier de ces rois, nommé Slodomir, &, felon d'autres, Saromyr, n'ayant point d'enfans, laiffa le royaume à fon époufe, qui le légua à fon frère Ladiflas, roi de Hongrie, qui l'a tranfmis à fes fucceffeurs. Les vénitiens cependant occupèrent les côtes ; ce qui détermina les rois de Hongrie à déclarer aux vénitiens & aux dalmates rebelles plusieurs guerres dont le fuccès fut d'abord heureux mais, au quinzième fiècle, les vénitiens fe rendirent maîtres de tout le royaume de Dalmatie. Depuis cette époque, les turcs leur en ont enlevé une partie, & la Hongrie eft rentrée en poffeffion de quel ques diftri&ts; ou plutôt ce que poffède la Hongrie fait partie de l'ancien royaume de Liburnie, plutôt que de celui de Dalmatie. Nous donnerons à l'article VENISE quelques détails fur les reffources qu'offre la Dalmatie aux vénitiens.

Remarques fur la Dalmatie. Les fleuves de la Dalmatie ont peu de longueur; mais ils font prefque tous navigables. Au nord, le pays eft montueux & froid, & il n'eft propre qu'à la nourriture des beftiaux ; mais d'autres diftricts offrent des plaines ou des collines très-fertiles. En général, la Dalmatie produit beaucoup de bois. C'eft de la Dal

macie que Venife tire la plupart de fes bois de chauffage & de conftruction; elle produit auffi de l'huile, du vin & du miel, de la cire & du bétail, (fur-tout des chevres & des brebis). Elle exporte en Italie une quantité affez confidérable de laine. L'air y eft tempéré & pur.

Ce qu'on appelle la Dalmatie hongroife eft fitué au haut de la mer Adriatique, & fait une partie de l'ancienne Liburnie. Avant de la décrire, il eft à propos de dire un mot des ufcofes & de la Morlaquie.

du foin du bétail; la plupart fuivent la religion grecque. Aujourd'hui ils font fous la protection de la Hongrie, ou fous celle des vénitiens, & il n'y a prefque point de place forte en Dalmatie, on ne trouve des morlaques en garnifon.

La Dalmatie hongroife confifte en cinq diftricts, qui obéiffent au gouvernement de Carlstadt. Nous en parlerons plus en détail à l'article ILLYRIE HONGROISE.

Ragufe eft la capitale de la Dalmatie ragufienne. Voyez RAGUSE.

Ce que nous avons à dire fur la Dalmatie tur

DANEMARCK, contrée de l'Europe, dont il n'eft pas befoin d'indiquer ici la pofition.

Cet article contiendra, 1°. un précis de l'hif toire politique du Danemarck, entremêlé de remar ques fur fon gouvernement; 2°. la defcription des provinces de ce royaume & des remarques fur le climat; 3°. des détails fur la population, les payfans. & les nobles; 4°. des obfervations fur l'agriculture, les manufactures, la navigation & le commerce; 5o. des remarques fur les établissemens de commerce ou les colonies que le Danemarck poffède en Afie, en Afrique & en Amérique; 6. des détails fur les impôts, les revenus, les dépenfes, les dettes & les loix fomptuaires; 7°. des détails fur l'armée & fur la marine; 8°. d'autres détails fur les loix & les tribunaux ; 9°. enfin des obfervations fur les intérêts & les rapports politiques du Danemarck. SECTION

Les ufcofes abandonnèrent autrefois la Dalmatie pour échapper au joug des turcs. Leur déno-que, fe trouvera à l'article OTTOMAN (EMPIRE). mination vient du mot fcoco, qui fignifie un fugitif; & comme ils fautent avec agilité, plutôt qu'ils ne marchent, dans le pays rude & inégal qu'ils habitent, on les a appellés fauteurs. Lors de leur fuite, ils s'établirent en foule à Cliffe; mais les turcs ayant acquis ce canton en 1537, ils fe retirèrent à Zengh que l'empereur Ferdinand leur céda. Comme ils y exerçoient trop de brigandages, on leur affigna en 1616 les montagnes de la Carniole, qui ont quatre grands milles d'Allemagne de longueur, & qui font fituées entre les rivières de Kulp & de Brigana. Le château de Sichelberd fe trouve au milieu de ces montagnes. Tous les ufcofes dépendent du capitaine du château de Sichelberg; ils demeurent dans des maifons éparfes, ou près de Feyenthum, Wenitz, & aux environs, dans de gros villages. C'eft un peu ple groffier & fauvage, d'une haute taille, courageux, enclin aux défordres & au vol, & qui tire fa principale fubfiftance du produit de fes troupeaux. Il parle la langue valaque. Sa religion ap- Précis de l'histoire politique du Danemarck, & rem proche beaucoup de la religion grecque; mais il y a parmi les ufcofes quelques catholiques romains. Ils ont un archevêque, des évêques, des popes ou prêtres, & des coluges ou moines.

On donne le nom de Morlaquie à la portion de la Liburnie, qui s'étend depuis Saint-Georges dans le territoire de Zengh jufqu'au comté de Sara; ou, felon d'autres, depuis Binodok jufqu'à Nowogrod; elle a quinze milles géographiques de longueur, & cinq à fix de largeur: elle eft remplie de hautes montagnes. Le nom de morlaques a été introduit par les vénitiens, & il eft enfuite devenu ufité chez les autres peuples d'Italie. Il vient de mauro ulachi, terme moitié grec & moitié efclavon, qui défigne des italiens maures ou noirs, ou des valaques. On a appellé morlaques tous ceux qui demeurent fur les montagnes, & qui mènent la vie paftorale des valaques, quoiqu'à proprement parler ils ne faffent point partie des valaques : les italiens appliquent cette dénomination à tous les habitans des montagnes de la Rafcie, de la Bofnie & de la Croatie, dont la langue n'a abfolument point de rapport avec l'italienne. Ce font dés hommes grands & robuftes, dont le tempérament s'eft fortifié par l'habitude de vivre dans les montagnes. Ils s'occupent de la nourriture &

PREMIERE.

marques fur fon gouvernement.

C'eft une opinion affez généralement reçue que les cimbres occupoient, dans les temps' les plus reculés, à l'extrémité de la Germanie, la Cherfonèfe cimbrique, connue de nos jours, fous le nom de Holftein, de Slefwick, de Jutland, & que les téutons habitoient les ifles voisines. Que l'origine des deux peuples fût ou ne fût pas commune, ils fortirent de leurs forêts ou de leurs marais ensemble & en corps de nation, pour aller chercher dans les Gaules, du butin, de la gloire & un climat plus doux. Ils fe difpofoient même à paffer les Alpes, lorfque Rome jugea qu'il étoit temps d'oppofer des digues à un torrent qui entraînoit tout. Ces barbares triomphèrent de tous les généraux que leur oppofa cette fière républi que, jufqu'à l'époque mémorable où ils furent exterminés par Marius.

Leur pays prefque entiérement défert après cette terrible catastrophe, fut de nouveau peuplé par des fcythes qui, chaffés par Pompée du valte efpace renfermé entre le Pont-Euxin & la mer Cafpienne, marchèrent vers le nord & l'occident de l'Europe, foumettant les nations qui fe trouvoient fur leur paffage. Ils mirent fous le joug la

!

Ruffie, la Saxe, la Weftphalie, la Cherfonèfe cimbrique, & jufqu'à la Fionie, la Norwege & Ja Suède. On prétend qu'Odin, leur chef, ne parcourut tant de contrées, ne chercha à les affervir qu'afin de foulever tous les efprits contre la puiffance formidable, odieufe & tyrannique des romains. Ce levain, qu'en mourant il laiffa dans le nord, y fermenta fi bien en fecret, que, quelques fiècles après, toutes les nations fondirent, d'un commun accord, fur cet Empire ennemi de toute liberté, & eurent la confolation de le renverfer, après l'avoir affoibli par plufieurs fecouffes réitérées.

Le Danemarck & la Norwege fe trouvèrent fans habitans, après ces expéditions glorieuses. Ils fe rétablirent peu-à-peu dans le filence, & recommencèrent à faire parler d'eux vers le commencement du huitième fiècle. Ce ne fut plus la terre qui fervit de théatre à leur valeur; l'Océan leur ouvrit une autre carrière. Entourés de deux mers on les vit fe livrer entiérement à la piraterie, qui eft toujours la première école de la navigation pour des peuples fans police.

Ils s'effayèrent d'abord fur les états voifins, & s'emparèrent du petit nombre de bâtimens marchands qui parcouroient la Baltique. Ces premiers fuccès enhardirent leur inquiétude, & les mirent en état de former des entreprises plus confidérables. Ils infeftèrent de leurs brigandages les mers & les côtes d'Ecoffe, d'Irlande, d'Angleterre, de Flandre, de France, même de l'Espagne, de 'Italie & de la Grèce. Souvent ils pénétrèrent dans l'intérieur de ces vaftes contrées, & ils s'élevèrent jufqu'à la conquête de la Normandie & de l'Angleterre. Malgré la confufion qui règne dans les Annales de ces temps barbares, on parvient à démêler quelques-unes des caufes de tant d'évènemens étranges.

D'abord, les danois & les norwégiens avoient pour la piraterie un penchant violent, qu'on a toujours remarqué dans les peuples qui habitent le voifinage de la mer, lorfqu'ils ne font pas contenus par de bonnes mœurs & de bonnes loix. L'habitude dut les familiarifer avec l'Océan, les aguerrir à fes fureurs. Sans agriculture, élevant peu de troupeaux, ne trouvant qu'une foible reffource à la chaffe dans un pays couvert de neiges & de glaces, rien ne les attachoit à leur territoire. La facilité de conftruire des flottes, qui n'étoient que des radeaux groffrers affemblés pour naviguer le long des côtes, leur donnoit les moyens d'aller par-tout, de defcendre, de piller & de fe rembarquer. Le métier de pirate étoit pour eux ce qu'il avoit été pour les premiers héros de la Grèce, la carrière de la gloire & de la fortune, la profeffion de l'honneur qui confiftoit dans le mépris de tous les dangers. Ce préjugé leur inf piroit un courage invincible dans leurs expéditions, tantôt combinées entre différens chefs, & tantôt féparées en autant d'armemens que de na

tions. Ces irruptions fubites, faites en cent endroits à la fois, ne laiffoient aux habitans des côtes mal défendues, parce qu'elles étoient ma gouvernées, que la trifte alternative d'être mas facrés, ou de racheter leur vie en livrant tout ce qu'ils avoient.

Quoique ce caractère deftructeur fût une fuite de la vie fauvage que menoient les danois & les norwégiens, de l'éducation groffière & militaire qu'ils recevoient, il étoit particuliérement l'ouvrage de la religion d'Odin. Ce conquérant impofteur exalta, fi l'on peut s'exprimer ainfi, par fes dogmes fanguinaires, la férocité naturelle de ces peuples. Il voulut que tout ce qui fervoit à la guerre, les épées, les haches, les piques, fût déifié. On cimentoit les engagemens les plus facrés par ces inftrumens fi chers. Une lance plantée au milieu de la campagne attiroit à la prière & aux facrifices. Odin lui-même, mis par fa mort au rang des immortels, fut la première divinité de ces affreufes contrées, où les rochers & les bois étoient teints & confacrés par le fang humain. Ses fectateurs croyoient l'honorer, en l'appellant le dieu des armées, le père du carnage, le dépopulateur, l'incendiaire. Les guerriers qui alloient fe battre, faifoient vou de lui envoyer un certain nombre d'ames qu'ils lui confacroient. Ces ames étoient le droit d'Odin. La croyance univerfelle étoit que ce dieu fe montroit dans les batailles, tantôt pour protéger ceux qui fe défendoient avec courage, & tantôt pour frapper les heureuses victimes qu'il deftinoit à périr. Elles le fuivoient au féjour du ciel, qui n'étoit ouvert qu'aux guerriers. On couroit à la mort, au martyre, pour mériter cette récompenfe. Elle achevoit d'élever jufqu'à l'enthousiasme, jusqu'à l'ivreffe du fang, le penchant de ces peuples pour guerre.

la

Le chriftianifme renverfa toutes les idées qui formoient la chaîne d'un pareil fyftême. Les miffionnaires avoient befoin de rendre leurs profélytes fédentaires, pour travailler utilement à leur inftruction; & ils réuffirent à les dégoûter de la vie vagabonde, en leur fuggérant d'autres moyens de fubfifter. Ils furent affez heureux pour leur faire aimer la culture, & fur-tout la pêche. L'abondance du hareng que la mer amenoit alors fur les côtes, y procuroit un moyen de fubfiftance trèsfacile. Le fuperflu de ce poiffon fut bientôt échangé contre le fel néceffaire pour conferver le refte. Une même foi, de nouveaux rapports, des befoins mutuels, une grande fûreté encouragèrent ces liaisons naiffantes. La révolution fut fi entière, que, depuis la converfion des danois & des norwégiens, on ne trouve pas dans l'hiftoire la moindre trace de leurs expéditions, de leurs brigandages.

Le nouvel efprit qui paroiffoit animer la Norwege & le Danemarck, devoit étendre de jour en jour leur communication avec les autres pen

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