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me. Le Pape, effrayé à la vue de cette armée, entra en accommodement. On convint que l'Empereur rendroit au fouverain Pontife l'inveftiture de toutes les Églifes, à condition que les Evêques rendroient à l'Empereur & à l'Empire les Villes, Duchés, Marquilats, Comtés & Principautés qu'ils tenoient de la piété de fes prédéceffeurs, & perdroient toutes leurs Régales, c'eft-à-dire, le droit de battre monnoie, d'avoir des péages, de mettre des impôts, d'établir des foires, de jouir des avoueries de Ï'Empire, & d'entretenir des troupes (a).

Ce traité, ratifié & confirmé par le Pape, fut prefqu'auffi-tôt rompu. Pascal s'imaginant que l'Empereur ne pouvoit plus refter en Italie, & informé que fon armée s'affoibliffoit tous les jours, protefta contre cette tranfaction qu'il avoit approuvée & confirmée folemnellement. L'Empereur, irrité, revint à Rome, attaqua le Pape, le fit prifonnier avec une partie de fa Cour, & l'envoya en Ombrie, dans un Château dont il étoit le maître. Après quelque temps de prifon, le Pape ennuyé de ne voir personne fe remuer pour venir à fon fecours, renonça à toutes fes prétentions, pour obtenir fa liberté.

Cette démarche lui attira de grands reproches de la part de fon Clergé. Le Pape craignant d'être déposé, défavoua fa conduite, fous prétexte qu'il avoit été forcé, & recommença à pouffer l'affaire des inveftitures.

Sa mort ne procura que la paix. Le Cardinal Cajetan, qui lui fuccéda fous le nom de Gelafe II, renouvella la guerre. Ayant refufé de ratifier le traité fait avec Pascal, l'Empereur l'obligea à s'enfuir d'Italie. Ce ne furent qu'excommunications d'un côté & dépofitions de l'autre. Cela continua fous le Pontificat de Calixte II.

Dans cet état de trouble & de confufion, les Papes fe rendirent maîtres de la meilleure partie de l'Italie, au grand préjudice de l'Empereur & de l'Empire d'Allemagne. Mais une perte encore plus grande pour Henși V & pour ses Succeffeurs, fut celle de leur autorité en Allemagne même. Les Princes & les Evêques Allemands, qui jufqu'alors s'étoient reconnus Vaffaux de l'Empereur, commencerent à fe regarder comme des Etats Affociés au Gouvernement Général de l'Empire, conjointement avec le Chef. Ils changererent leurs droits régaliens en Souveraineté. Leurs armes, appuyées du prétexte de la religion, forcerent les Empereurs à renoncer à des droits qu'ils ne pouvoient plus défendre.

Henri V, défefpérant enfin de recouvrer fon droit par la force, & craignant de tout perdre, eut recours à la négociation. Il affembla une Diete Worms (b). Les Agens du Pape s'y trouverent, & l'Empereur accepta

(a) Chron. Magd. in vitâ Henrici V, apud Meibomium ad ann. 1110. Palla conventa, p. 550. ad ann. 552.

(6) Au mois de Septembre 1122.

l'accommodement qui lui avoit déjà été propofé auparavant; favoir, qu'il fe défifteroit des inveftitures par l'anneau & le bâton paftoral; qu'on pour voiroit aux dignités Eccléfiaftiques, par des élections libres & canoniques, auxquelles l'Empereur pourroit affifter pour empêcher toute fimonie; que l'Elu recevroit du Souverain Pontife l'inveftiture par l'anneau & la croffe, & de l'Empereur l'inveftiture par le fceptre, pour les régales & le temporel de l'Evêché, Archevêché ou Abbaye; qu'il reftitueroit à l'Eglife de Rome les terres & les régales de Saint Pierre, qui lui avoient été ôtées durant les troubles, & qu'il lui prêteroit fecours toutes les fois qu'elle l'exigeroit.

Ces articles furent couchés dans un écrit que l'Empereur figna, & qui fut échangé avec celui du Pape. Calixte déclare, dans le fien figné de fa main, qu'il confent que l'élection des Evêques & des Abbés du Royaume Teutonique fe faffe en préfence de l'Empereur, fans violence ni fimonie; & que s'il arrive quelque différend, ce Prince protege la plus faine partie, fuivant le jugement des Métropolitains & des Comprovinciaux ; que I'Elu reçoive de l'Empereur l'inveftiture des régales par le fceptre, excepté ce qui appartient à l'Eglife de Rome; qu'il s'acquitte envers ce Prince des devoirs auxquels il eft tenu de droit; qu'il foit accordé l'efpace de fix mois à celui qui aura été facré dans les autres parties de l'Empire, c'eftà-dire hors de l'Allemagne, pour recevoir l'inveftiture des régales; enfin le Pape promet aide & fecours à l'empereur, & lui donne fa paix (a). Ce fut là l'époque de l'afcendant que les Papes prirent fur les Empereurs, & que ceux-ci tenterent en vain de furmonter. Depuis cet accord, on vit les Papes difpofer de l'Empire en maîtres, oppofer Empereur à Empereur, dépofer l'un, élever l'autre; prefcrire une forme de ferment à celui-ci, condamner celui-là à une fatisfaction ignominieuse, la lui faire fubir avec la derniere rigueur, enfin fe les rendre prefque entiérement dépendans. Tel fut, pendant plufieurs fiecles, le fort des Empereurs ou Rois d'Allemagne.

Je rapporterai ici un paffage d'un Auteur Allemand, un peu long, mais qui donne une jufte idée de cette conteftation des Papes & des Empereurs d'Allemagne.

» Ces deux décrets, dit-il, renverfoient la Majefté & la Dignité de » l'Empire Romain; & ce qu'il y avoit de pis, c'eft qu'on fappoit fon pou>> voir de maniere à le ruiner entiérement. En effet, c'étoit alors la cou» tume, qu'une infinité de perfonnes de diverfes conditions fe rendoient, » de toutes les parties de la Chrétienté, à la Cour Impériale. On y voyoit » des Moines de tous les Ordres, des Prêtres, des Docteurs, des Gens

(a) Les copies de ces deux Ecrits fe trouvent dans divers Recueils de Droit Public, dans Goldaft, Schmaus, &c.

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» de Lettres, des Nobles, des Roturiers qui venoient folliciter des béné»fices, comme on fait aujourd'hui à la Cour de Rome: car l'Empereur » conféroit alors non-feulement tous les Evêchés, les Abbayes & les au» tres bénéfices moins confidérables, comme Prébendes, Canonicats » Doyennés, Prévôtés, &c. mais même défignoit le Pontife Romain qu'il jugeoit à propos qu'on élût (a). Or en cédant aux prétentions de Gré» goire & à fes décrets, il eft clair que tout cet éclat de la Cour Impé»riale difparoiffoit dans le moment, & que ceux que l'efpoir d'obtenir » quelque bénéfice y attiroit, l'abandonneroient auffi-tôt qu'ils verroient » qu'on ne pourroit obtenir ces bénéfices que par voie d'élection. Mais ce » qui faifoit le plus de peine à l'Empereur, c'eft qu'en renonçant aux in» veftitures (c'eft ainfi qu'on appelloit la collation des bénéfices) il per» doit la meilleure & la plus confidérable portion de fes droits, le plus » beau fleuron de fa Couronne, & expofoit l'Empire à un déluge de » maux. En effet, lorfque l'Eglife accorda à Charlemagne & à Othon I, » le privilege des inveftitures, les Evêques étoient pauvres, peu confidé» rables, & prefque fans revenus fixes. Mais dès que les élections com» mencerent à fe faire fous les aufpices des Empereurs, & que ces Prin» ces eurent acquis le droit de confirmer les Elus ou de les rejetter, on » vit les Empereurs, à l'envi des autres Princes qui vouloient bien mériter » de l'Eglife, accabler les prélats de bienfaits, les enrichir, les confidérer comme les premiers Membres de l'Empire, doter leurs Eglifes, leur accorder des Fortereffes, des Villes, des Duchés, des Provinces, les » droits d'impôts, de péages, & diverfes autres prérogatives réfervées à » l'Empire & à lui appartenantes comme biens particuliers du fifc, ou » comme fiefs caducs; car dès qu'un Prince Laïc venoit à mourir fans » héritier légitime, fes pays & poffeffions revenans de droit à l'Empire → étoient auffi-tôt donnés à quelqu'Evêque; & voilà de quelle maniere » tous les Prélats d'Italie, des Gaules, de Germanie, & de toute la Chré» tienté, fans en excepter le Pontife de Rome, devinrent en peu de temps, » de pauvres & humbles Prélats qu'ils étoient, de riches & de très-puiffans

» Princes. «

» Les Empereurs ne croyoient point par-là diminuer les droits de l'Empire, étant bien affurés qu'ils étoient maîtres de la nomination des Pré» lats, & que perfonne n'obtiendroit ces bénéfices que par leurs ordres » & felon leur bon plaisir (b). Or Grégoire par fes décrets, enlevoit à

(a) Imperator enim non folùm Epifcopatus omnes & Abbatias, minoraque omnia Sacerdotia, at Prabendas, Canonicatus, Præpofituras, Decanatus, & hujufmodi conferebat, fed etiam Romanum ipfum Pontificem defignabat.

(b) Ex eis fcilicet opibus quæ antea Imperii juris erant, in nullá re, Imperialia jura minui exiftimantes, quippe quod certi effent, eos omnes Pralatos à fe defignandos fore, & non nif juffu fuo & voluntate, Sacerdotia ipfa obtentures.

» l'Empereur la moitié de l'Empire: car quelle apparence d'obliger les » Evêques à reftituer à l'Empire tout ce qu'ils avoient reçu des Empereurs, > non en qualité d'Evêques, mais comme Membres de l'Empire? Si donc ⚫ on privoit l'Empereur de la nomination aux Prélatures, & que les Prélats retinffent & confervaffent leurs bénéfices, & tous les autres biens › dont les Empereurs les avoient pourvus, n'etoit-il pas clair que c'étoit » dépouiller l'Empereur de la moitié de fa Puiffance? a

» L'Empereur voyoit bien que, puifque les Evêques d'Italie & de Germanie, quoique défignés & pourvus par lui, ne laiffoient pas de pren» dre des engagemens contraires à fes intérêts, & de fe révolter fréquem>>ment contre lui, ce feroit bien autre chose, lorsqu'ils croiroient ne lui > rien devoir. Il fentoit que fi chaque Chapitre, chaque Eglife Collégiale acquéroit le droit d'élire fon Evêque, bientôt fes plus cruels ennemis » feroient pourvus des plus beaux & des plus puiffans Evêchés de l'Empire; ce qui animeroit les factieux & décourageroit les biens intentionnés, d'où s'enfuivroit infailliblement la ruine de l'Empire. «<

» Telles furent les raifons qui aigrirent l'Empereur & divers autres Princes de l'Empire contre le Pape Grégoire. Il ne s'agiffoit entr'eux & lui, » de rien moins que du falut ou de la ruine entiere de l'Empire «

» D'un côté, l'Empereur perfiftoit à vouloir défendre fes droits & ceux » de l'Empire envers tous & contre tous. De l'autre, le Pape prétendoit » rétablir l'Eglife dans fa liberté, fans fe foucier du fort de l'Empire. Il publioit qu'il étoit indigne que le Sacerdoce dépendît des Laïcs, fans » confidérer que ceux-ci avoient pour eux une poffeffion de trois cents ans, » continuée fans interruption depuis Charlemagne, fous plus de foixante Papes ou Pontifes Romains (a).

Le droit de l'Empereur étant réduit à l'inveftiture par le fceptre pour les Eccléfiaftiques, on inventa l'inveftiture du drapeau pour les Laïcs. Cette derniere confiftoit à donner autant de drapeaux que l'on conféroit de fiefs. Au refte, l'inveftiture par le fceptre eft fort ancienne, & l'on en trouve un exemple dans le fixieme fiecle, lorfque Theodebert, Roi des François. toucha Ladrana de fon fceptre, & lui donna en même-temps tous les fiefs que Florus fon oncle avoit poffédés.

Aujourd'hui il n'y a en Allemagne qu'une maniere de donner l'inveftiture de toute forte de fiefs, tant Eccléfiaftiques que Laïcs; elle confiste à faire baiser au Prince, ou à celui qui le repréfente, le pommeau d'une épée. L'Empereur pendant cette cérémonie eft debout & couvert; celui qui reçoit l'inveftiture eft découvert & à genoux.

Les Papes ne fe mirent guere en peine d'obferver le Traité de Calixte II,

(a) Hiftoire de Gregoire VII, écrite par Onuphre Panvin, Moine de l'Ordre de faint Auguftin. Edit. Cretz. p. 262.

avec Henri V. Innocent II décida (a) qu'à l'avenir le Pontife Romain ne feroit plus élu que par le Clergé à l'exclufion du peuple. Alexandre III, fit une conftitution (b), par laquelle l'élection du Souverain Pontife fut réservée aux feuls Cardinaux, à l'exclufion des autres Eccléfiaftiques. Enfin, Honorius III, ordonna que les Prélats des autres Eglifes, ne feroient plus élus que par les Chanoines, & que les autres Capitulaires ni le peuple n'auroient aucune part à fes élections.

Peu contens de tous ces changemens, les Papes inventerent encore les réserves, les graces expectatives, les annates; & c'eft au milieu des excommunications, des guerres, des troubles, des mouvemens, que s'eft formé le Droit Public-Eccléfiaftique d'Allemagne. A peine le Corps Germanique a-t-il confervé quelques-unes de fes loix primitives. Les Dietes ont empêché que les Allemands ne fuffent moleftés par de fréquentes citations hors de l'Empire; elles fe font oppofées à l'abus des réserves & des graces expectatives, & elles ont affuré l'obfervation du Concordat Germanique. Il faut néceffairement tracer ici en peu de mots l'hiftoire de ce Concordat, peu favorable affurément au Chef de l'Empire.

Le concile de Conftance ordonna qu'il fût célébré des conciles généraux pour la ceffation des fchifmes; que le premier feroit tenu dans cinq ans à Pavie, & le fecond fept ans après en un lieu qui feroit réglé par le Concile de Pavie; que les conciles fe tiendroient enfuite de dix en dix ans, & que le dernier marqueroit toujours le lieu où feroit célébré celui qui feroit prochainement attendu.

Le concile de Pavie fut transféré à Sienne à caufe de la pefte. Martin V, pour conjurer l'orage qui menaçoit fon autorité, diffipa le concile & en fit l'indiction à Bafle. Il étoit queftion de réunir les peuples de Bohême à l'Eglife, & de faire la guerre aux Huffites. Le fchifme que l'élévation au fouverain Pontificat de Felix V, connu auparavant fous le nom d'Amedée de Savoye, avoit fait dans l'Eglife entre lui & Eugene, ceffa par l'abdication de Felix, & par fon accommodement avec Nicolas V, fucceffeur d'Eugene, procuré par l'autorité de Charles VII, Roi de France, qui avoit envoyé à ce fujet une ambaffade à Felix. Nicolas V approuva tous les actes (c) du concile de Bafle.

Le réglement fait à Bourges par le Roi & le clergé de France, fous le nom de Pragmatique-fanction, & qui fut approuvé par le concile de Basle, renouvella toutes les plaintes des Allemands. Quoi! difoient-ils, fommes-nous de pire condition que les François ? Cette nation sera à l'abri de toutes les exactions de la cour de Rome, tandis que les Allemands

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