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les catholiques, errant sur la surface de l'empire, suivre dans les cavernes, dans les déserts, leurs ministres persécutés, afin de recevoir d'eux des sacrements valides; alors, dans tout le royaume, les catholiques seront réduits à cet état de misère et de persécution dans lequel les protestants avaient été plongés par révocation de l'édit de Nantes, de cet acte dont votre justice a été indignée et dont votre humanité a gémi. Jusqu'ici êtes-vous insensibles à la résistance passive d'un clergé fidèle? Mais si des factieux, prenant le masque de la religion, cherchaient à soulever les peuples; s'ils répandaient des brandons de fanatisme au milieu des hommes avides à les saisir; s'ils s'armaient de l'énergie que produit toujours l'alliance des choses religieuses qui ne serait effrayé, qui ne condamnerait pas des législateurs cruels et impolitiques qui auraient produit tant de maux, pour le vain orgueil de ne pas revenir sur un de leurs décrets? Si vous êtes des législateurs sages et humains, si vous êtes les véritables pères du peuple, vous ne sacrifierez pas tant de victimes à votre fol orgueil; alors la nation reconnaîtra des législateurs sages; alors elle sentira la sagesse du gouvernement de ses représentants... Et quand il serait démontré que l'Église de France se trompe, oseriezvous balancer à retirer un décret que l'Église réprouve, et dont l'exécution doit amener tant de malheurs? Il est des lois qui, bonnes en elles-mêmes, peuvent être funestes par la circonstance où elles sont rendues: si vos lois ne peuvent être exécutées sans violence, craignez des convulsions qui ensanglanteraient la France... Si vous vouliez sentir les malheurs incalculables que vous attirerez sur notre patrie; si vous vouliez mon

trer votre amour pour le peuple, vous temporiseriez, vous attendriez l'adhésion de l'Église de France. La question qui nous divise est une vile question de forme et d'orgueil. Pourquoi craindriez-vous de dire que vous vous êtes trompés? Pourquoi refuseriez-vous de revenir sur un décret, quand vous voyez qu'une folle obstination vous perd, et que l'Église de France vous a montré l'erreur dans laquelle vous êtes tombés? Avouez, avec une soumission digne de véritables catholiques, que l'Église vous a éclairés... »

Cazalès termina en demandant de nouveau de suspendre l'exécution de la loi du serment, et en protestant, en son nom et en celui de ses collègues, de son attachement inviolable aux anciens pasteurs reconnus par l'Église.

Mais tout fut inutile: le décret proposé fut adopté, malgré les concessions de Mirabeau, qui voulait accorder le délai de deux mois non-seulement aux absents, mais à tous les ecclésiastiques réfractaires (1). L'orateur comprenait le danger de la précipitation avec laquelle on exécutait la loi du serment. Mais le lendemain, 27 janvier, sur un discours éloquent de Guillaume, appuyé par Martineau, les fiers représentants, qui ne voulaient pas changer une syllabe à la formule du serment, annulèrent le décret de la veille pour revenir à celui du 27 novembre, qui accordait aux absents un délai de deux mois. Ils étaient tellement déconcertés par la résistance du clergé, qu'ils ne savaient plus ce qu'ils faisaient. Le même jour, et par le même décret, ils changèrent un article important de

(1) Moniteur, séance du 26 janvier 1791.

la constitution elle-même, celui qui concerne l'institution canonique. Car, d'après les articles 16 et 19 (tit. ) de la constitution civile du clergé, l'évêque élu ne pouvait recourir au pape pour lui demander l'institution canonique; il devait la demander en personne au métropolitain, ou, s'il était élu pour le siége métropolitain, au plus ancien évêque de l'arrondissement. Ces articles ont été modifiés en ces termes :

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« Les évêques qui ont été élus jusqu'à ce jour, et «< ceux qui le seront dans le courant de la présente << année (1791), ne pourront s'adresser à leurs métropolitains, ou à tout autre évêque de leur arrondisse«< ment, qu'autant que ceux-ci auront prêté le ser<< ment prescrit par le décret du 27 novembre dernier; «<et, dans le cas où aucun des évêques de l'arron<< dissement n'aurait prêté le serment, ils s'adres<< seront au directoire de leur département, pour leur « être indiqué l'un des évêques de France qui aura prêté le serment, lequel pourra procéder à la confir«<mation et à la consécration (1). » Tel est le changement proposé et adopté par l'Assemblée nationale. Il fallait être aveugle pour ne pas s'apercevoir que l'Assemblée prétendait disposer à volonté de la juridiction ecclésiastique car en vertu de quel droit un évêque, premier venu, pouvait-il donner l'institution canonique à un nouvel élu? N'était-ce pas évidemment en vertu du droit qu'accordait l'Assemblée nationale ? L'Église n'y était pour rien, c'était donc l'État qui donnait la juridiction. Nous verrons pour quel motif on a fait ce changement.

(1) Moniteur, séance du 27 janvier 1791.

On n'attendit pas le retour de M. de Juigné pour l'organisation des paroisses, dont un grand nombre furent supprimées, ni pour l'élection des nouveaux pasteurs qui devaient remplacer les anciens. Déjà les électeurs, parmi lesquels on comptait des comédiens, des protestants et des juifs, s'étaient assemblés à NotreDame pour procéder à la nomination des curés de Paris. C'était le dimanche 30 janvier 1791. Ils ne pouvaient pas se dissimuler l'illégitimité de l'acte qu'ils allaient faire. Les évêques et les bons écrivains leur avaient envoyé à tous des avis imprimés sur les élections. Les choix tombèrent sur ceux qui s'étaient montrés les plus ardents dans la prestation du serment. Le père Poirée fut choisi curé de Saint-Sulpice par la majorité des suffrages.

Il serait difficile de dire quelle rumeur et quel étonnement excita cette élection. Le père Poirée était supérieur de l'Oratoire à Paris, rue Saint-Honoré. Il avait atteint l'âge de soixante et onze ans, et avait mené jusque-là une vie honorable. Il appartenait à une congrégation qui avait fourni des orateurs et des savants de tout genre. Bourgoin loué par Bossuet, Malebranche, Lami, Massillon, Thomassin, Cabassut, le Brun, Houbigaut, etc., étaient sortis de cette maison, fondée en France par le pieux cardinal de Bérulle. Par respect pour son âge et l'honneur de son corps, il aurait dû rejeter loin de lui l'élection qu'on venait de faire; mais non, il accepta. Le jansénisme, qui avait pénétré dans cet ordre, nous en donne l'explication; car du jansénisme à la constitution civile du clergé il n'y avait qu'un pas. Le père Poirée l'a franchi facilement, et plusieurs de ses confrères ont fait malheureu

sement comme lui. Poupart, curé de Saint-Eustache et confesseur du roi, membre de ce corps, avait prêté le serment. La paroisse de Saint-Thomas d'Aquin, nouvellement érigée, eut pour curé un oratorien, Latyl, supérieur de Nantes. Dans le nombre des évêques intrus, on a vu plusieurs membres du même ordre: Lalande, à Nancy; Servan, à Luçon; Périer, à Clermont; Primat, à Cambrai. Le seul séminaire qui eût donné à Paris le scandale d'une abjuration, était celui de SaintMagloire, dirigé par les oratoriens. Hâtons-nous de dire que si cet ordre illustre a eu des prévaricateurs, il a eu aussi des confesseurs et des martyrs, et que ces derniers ont formé une grande majorité. A Paris même, où il y a eu le plus de défections, 49 membres sur 53 sont demeurés inébranlables dans leur foi, et ont protesté énergiquement contre la prévarication de leurs confrères, et surtout de leur supérieur (1).

Le dimanche 6 février 1791, l'assemblée électorale se rendit à Notre-Dame. Là, M. de Pastoret, président, proclama, avant la messe, curé de Saint-Sulpice, Poirée, assistant général de la congrégation de l'Oratoire et supérieur de la maison de la rue Saint-Honoré, le seul prétre de ce chef-lieu, dit-il, qui ait juré. Le président, dans son discours, se permit différentes diatribes contre les élections ministérielles, et contre le clergé qui ne voulait pas prêter serment.

Le père Poirée, répondant à M. de Pastoret, prononça cet incroyable discours :

<< Vous le voyez, messieurs, mes chers et bien-aimés «< frères, la voix du ciel se fait entendre, la primitive

(1) Mémoires d'Auribeau, t. II, p. 502, 507.

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