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peuvent enfin brifer leurs chaînes, des contradictions que les vérités de toute efpece ont effuyées parmi nous; éclairées par notre exemple, elles franchiront en un inftant la carriere immenfe d'erreurs & de préjugés, où mille obftacles nous ont retenus durant tant de fiecles, & pafferont tout-à-coup de l'obscurité la plus profonde à la vraie Philofophie que nous n'avons rencontrée que lentement & comme à tâtons. Mais des quatre grands objets que nous venons de préfenter à nos Lecteurs, & qui font la matiere importante de l'Encyclopédie, il n'en eft point qui puiffe nous éclairer davantage, & qui par conféquent foit plus digne d'être tranfmis à nos defcendans, que le tableau de nos connoiffances réelles; il eft l'histoire & l'éloge de l'efprit humain; le refte n'en eft que le roman ou la fatyre. Ce tableau eft le feul que l'empreinte de la vérité rend immuable. tandis que les autres changent ou s'effacent. Il femble même que les trois autres objets, quoique très-utiles, ne foient qu'une espece de reffource à laquelle nous avons recours, au défaut d'un bien plus folide. Plus on acquiert

de lumieres fur un fujet, moins on s'occupe des opinions fauffes ou douteufes qu'il a produites; on ne cherche à favoir l'Hiftoire de ce qu'ont pensé les hommes, que faute d'idées fixes & lumineufes auxquelles on puiffe s'arrê ter: par cette apparence vraie ou fauffe de favoir, on tâche de fuppléer autant qu'il eft poffible à la fcience véritable. C'est pour cela que l'Hiftoire des Sophifmes eft fi courte en Mathématique, & fi longue en Philofophie.

Rien ne feroit donc plus utile qu'un Ouvrage qui contiendroit, non ce qu'on a pensé dans tous les fiecles, mais feulement ce qu'on a pensé de vrai. Ce plan bien approfondi, eft moins immenfe qu'il ne paroît. Il ne s'agit point ici de raffembler cette foule de connoiffances particulieres, ifolées, & fouvent ftériles, que les hommes ont acquifes fur chaque matiere; il ne s'agit point de montrer en détail le chemin long, pénible & tortueux que les Inventeurs ont fuivi; il s'agit de fixer & de recueillir les principes de nos connoiffances certaines; de préfenter fous un même point de vue les vérités fondamentales; de réduire les objets de chaque Science

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particuliere pour les parcourir plus aifément, à des points principaux & bien diftincts; d'éviter également dans cette décompofition, l'efprit minutieux & borné qui laiffe le tronc pour les branches, & l'efprit trop avide de généralités, qui perd & confond tout en voulant tout embrasser & tout réduire.

Dans le Difcours préliminaire de l'Encyclopédie, Difcours dont nous fuppoferons ici tous les principes, nous nous fommes contentés d'expliquer comment les différens objets de la nature confidérés d'abord féparément & fucceffivement, unis & rapprochés enfuite, combinés, approfondis, décompofés & recompofés, ont mené les hommes d'une Science à l'autre. Obligés de nous tenir dans une efpece de lointain pour embraffer cette perspective immenfe, & compofée de parties fi nombreuses & fi difparates, nous n'avous pu y jeter qu'un coup d'oeil rapide & général; dans des élémens de Philofophie on doit fe placer à cette juste diftance qui permettra d'examiner fucceffivement les parties principales du tableau, celles qui peuvent être faifies à la vue fimple par un Obfervateur atten

tif, les maffes & les objets principaux.

Notre deffein dans cet Effai n'eft point de parcourir en détail les différentes matieres qui doivent entrer dans les élémens dont nous parlons; nous ne voulons que les expofer fommairement, & en faire comme une efpece de table; nous nous bornerons à indiquer l'ordre fuivant lequel il nous paroît qu'on doit difpofer ces matieres, & les principes par lefquels on doit les traiter. Ce n'eft ici que le fimple projet d'un Ouvrage que nous aurons peut-être le courage d'entreprendre, fi le Public donne fon approbation à l'efpece d'efquiffe que nous allons lui en offrir

III.

Objet & Plan général.

A Philofophie n'eft autre chofe que

rens objets fur lefquels elle peut s'exercer. Des élémens de Philofophie doivent donc contenir les principes fondamentaux de toutes les connoiffances hu maines; or ces connoiffances font de

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trois efpeces, ou de faits, ou de fentiment, ou de difcuffion. Cette derniere efpece feule appartient uniquement & par tous fes côtés à la Philosophie, mais les deux autres s'en rapprochent par quelques-unes des faces fous lefquelles on peut les envisager. La Science des faits de la nature eft un des grands objets du Philofophe; non pour remonter à leur premiere caufe, ce qui est prefque toujours impoffible, mais pour les combiner, les comparer, les rappeller à différentes claffes; expliquer enfin les uns par les autres, & les appli quer à des ufages fenfibles. La Science des faits hiftoriques tient à la Philofophie par deux endroits, par les principes qui fervent de fondement à la certitude hiftorique, & par l'utilité qu'on peut tirer de l'Hiftoire. Les hommes placés fur la fcene du monde, font appréciés par le fage comme témoins, ou jugés comme acteurs; il étudie l'univers moral comme le phyfique, dans le filence des préjugés; il fuit les Ecrivains dans leur récit avec la même circonfpection que la nature dans fes phénomenes; il obferve les nuances qui diftinguent le vrai hiftorique du vraifem

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