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plusieurs années. On dit qu'ils lui témoignèrent mille amitiés. Le serment effaçait tous les péchés (1).

Dès ce moment, la révolution voua une haine implacable à M. de Pansemont et aux membres de sa communauté. Ceux-ci en étaient amplement dédommagés par l'estime et l'attachement que leur portaient leurs paroissiens et tous les catholiques de la ville. La municipalité, craignant les suites fâcheuses d'un changement subit, ne se pressa pas de les remplacer; elle pria même M. de Pansemont et ses vicaires de continuer leurs fonctions jusqu'à nouvel ordre, ce qu'ils firent avec un redoublement de zèle, et avec toute la prudence qu'exigeait leur position critique. Ils l'auraient fait sans l'avis de la municipalité, car ils étaient bien décidés à ne quitter la paroisse que quand ils en seraient chassés par la force (2).

Après le refus du serment éprouvé à Saint-Sulpice, on s'attacha à la paroisse de Saint-Roch, où il y avait une communauté semblable et non moins édifiante, dirigée par le curé Marduel. Tous les moyens de séduction furent mis en œuvre pour gagner le clergé de cette communauté. Bailly lui-même alla trouver le curé, dans la semaine du 9 au 16 janvier, et discuta avec lui sur la constitution civile du clergé. Mais ses efforts furent inutiles, M. Marduel était inébranlable dans sa foi. Bailly le quitta avec humeur, en lui disant: << Il est donc bien vrai que les décrets sur la constitution civile du clergé sont contraires à la religion catholique? Oui, cela est bien vrai,» répliqua le curé.

(1) Hist. parlem., t. V, p. 340.

(2) Mémoires d'Auribeau, t. II, p. 502.

Bailly, ne pouvant plus contenir son dépit, lui dit : << Eh bien! en ce cas, s'il dépendait de moi, demain la religion catholique n'existerait plus en France (1). » Le dimanche suivant (16 janvier), le curé monta en chaire avec toute l'intrépidité d'un confesseur de la foi. L'église était pleine; le club voisin des Jacobins y avait envoyé une troupe d'affiliés. Le curé motiva son refus de serment; mais au moment où il disait que les évêques étaient les seuls juges de la foi, mille cris se firent entendre: Plus d'évéques! plus d'évéques! A bas! ou le serment! Le curé fut obligé de descendre de chaire, et il traversa la foule non sans danger. Trentesix prêtres, sur quarante-deux dont se composait la communauté, refusèrent le serment avec la même fermeté. Parmi les six qui le prêtèrent se trouvait l'abbé Fauchet, le prédicateur de la révolution (2).

Une scission scandaleuse éclata dans le clergé de Saint-Germain l'Auxerrois, comme dans celui de plusieurs autres paroisses. Le curé Ringard, malgré les cris qu'on entendait dans l'église, refusa le serment avec deux de ses vicaires et huit prêtres administrateurs; mais le premier vicaire, nommé Corpet, s'attacha les autres prêtres de la paroisse, prêtres sans pouvoirs ou sans autres fonctions que celles de veiller les morts, et fit le serment avec eux; ce qui lui valut l'honneur d'être nommé curé intrus de la paroisse, et c'est à quoi il visait peut-être en prêtant le serment (3).

Ces scandaleuses divisions, que les ennemis de l'É

(1) Barruel, Hist. du Clergé, t. I, p. 74. (2) Hist. du Serment, p. 115 et 189. beau, t. II, p. 481.

(3) Hist. du Serment, p. 99 et 142.

Mémoires d'Auri

glise avaient provoquées par leurs lois antichrétiennes, et dont ils faisaient leur joie, se voyaient dans presque toutes les paroisses de Paris. Il n'y eut, après SaintSulpice, que celles de Saint-Jean en Grève, de SaintNicolas du Chardonnet et de Saint-Hippolyte, petite paroisse à l'extrémité du faubourg Saint-Marceau, où tout le clergé refusa le serment (1). Dans les autres paroisses, il y eut plus ou moins de défections, et par conséquent bruit et scandale. Les ennemis de l'Église les suscitaient surtout dans les paroisses où les curés refusaient le serment. Elles furent au nombre de vingtsix (2).

A côté de cés beaux exemples de fermeté, on eut à déplorer des prévarications auxquelles on ne devait pas s'attendre. Sur cinquante-deux paroisses qui existaient alors à Paris, vingt-trois curés se rendirent prévaricateurs. La proportion des vicaires fut moins considérable. A Saint-Eustache, la prestation du serment se fit avec une grande solennité. Le curé Poupart, oratorien et confesseur du roi et de la reine, homme d'un grand mérite, et jusque-là prêtre ver

(1) Hist. du Serment.

(2) Ce sont celles de Saint-Benoît, de Bonne-Nouvelle, de Saint-Côme, de Saint-Germain l'Auxerrois, de Saint-Gervais, de Saint-Hilaire, de Saint-Hippolyte, de Saint-Jacques l'Hôpital, de Saint-Jean l'Évangéliste, de Saint-Jean et Denis, de SaintJean en Grève, de Saint-Louis aux Invalides, de Sainte-Madeleine Ville-l'Évêque, de Sainte- Marine, de Sainte-Marie du Temple, de Saint-Nicolas des Champs, de Saint-Nicolas du Chardonnet, de Saint-Pierre aux Bœufs, de Saint-Pierre des Arcis, des Quinze-Vingts, de Saint-Roch, de Saint-Severin, de Saint-Sulpice, de Saint Symphorien dans l'enclos de SaintGermain, de Sainte-Marguerite. Treize de ces paroisses n'existent plus.

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tueux et charitable, monta en chaire et prêta le serment avec trente-six prêtres attachés à la paroisse, parmi lesquels on voyait le premier vicaire. C'était l'ouvrage de Mirabeau qui, d'après les Mémoires de madame Campan, avait passé une nuit entière chez le curé pour le décider. La révolution y tenait beaucoup, parce qu'elle voulait donner au roi un confesseur assermenté; mais elle n'y réussit pas. Le roi et la reine se choisirent un autre confesseur (1). M. de Laleu, deuxième vicaire, répara tant soit peu le scandale en se mettant à la tête de quatorze ecclésiastiques de la paroisse, et en refusant le serment avec eux (2).

Deux paroisses situées dans une même rue, celle de Saint-Martin, offrirent un singulier contraste. M. Parent, curé de Saint-Nicolas des Champs, refusa le serment avec ses trois vicaires, et quinze ecclésiastiques employés dans le ministère. Quelques prêtres seulement, sans nom comme sans pouvoirs, si l'on n'en excepte un seul, confesseur des malades, se conformèrent aux vœux de la municipalité; tandis que le curé de Saint-Merry, M. Viennet, prêta le serment avec ses deux premiers vicaires et la majeure partie de son clergé; le troisième et quatrième vicaire, avec quatre autres ecclésiastiques, restèrent seuls fidèles à l'Église. Le troisième vicaire, M. Vitalis, obligé de quitter à cause de son refus, emporta les regrets de toute la paroisse (3).

L'exemple du curé de Sainte-Marguerite, vieillard octogénaire, qui avait également résisté aux douce

(1) Hist. parlem., t. IV, p. 339.

(2) Hist. du Serment, p. 99 ct 135. (3) Ibid., p. 111 et 175.

reuses paroles de Bailly (1), n'exerça aucune influence sur le clergé de la paroisse. Le premier et le second vicaires, Le Maire et Mahieu, firent le serment, et entraînèrent dans leur chute vingt-six prêtres demeurant sur la paroisse et y exerçant diverses fonctions. On voyait dans ce nombre un nommé Aubert, prêtre normand, qui, ne sachant que devenir, s'était réfugié à Paris, où il aura une plus triste célébrité encore que dans son pays. On ne compta dans cette paroisse que cinq prêtres qui suivirent l'exemple du curé (2). La paroisse qui scandalisa le plus par sa défection fut celle de Saint-Étienne du Mont. Curé (3), vicaires, administrateurs des sacrements, tous prêtèrent le serment, à l'exception d'un seul, dont le nom mérite d'être consigné dans les annales de l'histoire ecclésiastique : c'est M. Duval, administrateur des sacrements (4). Le scandaleux exemple de cette paroisse contrastait d'une manière frappante avec ce qui se passait dans son voisinage. Le clergé de l'église de Saint-Nicolas du Chardonnet, dont le curé Gros, autre saint Vincent de Paul, était membre de l'Assemblée nationale, donna l'exemple le plus édifiant de fidélité. Aucun prêtre ne prêta serment, car il ne faut pas compter, dans ce clergé, deux chanoines réguliers de Saint-Victor, Mulot et Poissonnier, qui, étant sortis de leurs abbayes, étaient restés sur cette paroisse, qu'ils ont scandalisée par une double prévarication (5).

(1) Mémoires d'Auribeau, t. II, p. 499, note.

(2) Hist. du Serment, p. 107 et 169.

(3) Le curé était du chapitre de Sainte-Geneviève, où le jansénisme avait de chauds partisans.

(4) Hist. du Serment, p. 97 et 133.

(5) Ibid., p. 113 et 181.

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