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mise au milieu d'eux; ils ne savaient quel parti prendre; ils essayaient de plates et ridicules séductions, en annonçant que l'intention de l'Assemblée n'a pas été de toucher au spirituel. Nous demandons que cette explication soit convertie en décret, et la mauvaise foi se démasque par un refus.

« Le tumulte et l'indécision de ces messieurs allongent la séance, et aucun ecclésiastique ne montre ni faiblesse ni inquiétude. Alors ils abandonnent la forme d'appel individuel, qui aurait allongé leur tourment d'être témoins du triomphe de la vérité. Ils ont ordonné une interpellation générale à ceux qui n'avaient pas encore prêté le serment; elle a été faite, et personne ne s'est présenté. Enfin, notre immuable fermeté les a forcés, à leur grand regret, de décréter contre nous; et nous sommes sortis fiers de notre glorieuse pauvreté. Les deux ou trois cents brigands employés dans ces occasions majeures entouraient la salle, et y faisaient même retentir le cri de A la lanterne ! Nous y avons souri dédaigneusement, et demandé qu'on ne s'occupât pas de ces vaines clameurs. Point de vrai et bon peuple autour de la salle, pas le moindre mouvement dans Paris contre nous, et l'estime publique nous a suivis dans notre retraite. Le roi est prié de faire nommer à nos places. Il est curieux d'observer que ce décret, fait fait pour introduire le schisme en France, s'il est exécuté, a été rendu sous la présidence d'un juif (Emmery était un juif de Metz) et sur la motion d'un protestant (Barnave). Je ne puis vous rendre mille détails qui seraient intéressants; mais le temps me manque voilà l'essentiel. Nous avons soutenu la première épreuve d'une manière digne du devoir que nous

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avions à remplir; nous soutiendrons de même toutes les épreuves jusqu'à la dernière, si l'on ose y aller. Ce n'est pas de notre côté qu'est la crainte et l'embarras; nous les laissons à ceux qui n'écoutent pas leur conscience et qui ne suivent pas les principes. Nous pleurons sur 98 de nos confrères trompés ou entraînés: C'est beaucoup, sans doute, sur 268 (1) que nous sommes ; mais une grande majorité nous reste. L'évêque d'Autun est seul; nous ne comptons pas l'évêque de Lydda, étranger, et qui a mis des restrictions qu'on a laissé passer, parce qu'il siége du côté gauche. Montrez ma lettre; je ne crains jamais quand j'écris, parce que la vérité est mon guide, et il est essentiel qu'elle soit connue sur cette fameuse séance. L'apprends à l'instant que 12 ou 15 ecclésiastiques de l'Assemblée ont retiré leur serment, et l'on assure que plusieurs autres encore suivront leur exemple (2). »

L'Assemblée constituante ne s'était pas attendue à une opposition aussi vive ni aussi générale. Elle avait cru qu'il suffirait de menacer le clergé de destitution, et de lui faire peur d'une émeute, pour l'amener à une prompte soumission. Elle s'est étrangement trompée dans son attente; plus de trois quarts des membres ecclésiastiques de l'Assemblée s'étaient refusés au serment; les évêques, à l'exception de deux, l'avaient repoussé avec horreur. Leur courageuse fermeté n'a pas été sans effet dès le lendemain et surlendemain

(1) Ces chiffres ne sont pas exacts. Le nombre des députés ecclésiastiques était de plus de trois cents. L'évêque parle peutêtre seulement de ceux qui se trouvaient présents, ou qui assistaient à la séance.

(2) Moniteur, séance du 22 février 1791. Hist. du Clergé de France depuis la convocation, etc., t. III, p. 191.

du 4 janvier, plus de vingt ecclésiastiques sont venus se rétracter; mais on a repoussé leurs lettres avec humeur. Un des secrétaires se permit même d'en jeter une à la figure de celui qui venait de la déposer sur le bureau; un représentant, par un sarcasme d'excellent goût, proposa de les renvoyer au comité d'aliénation. Barnave plus sérieux, mais non moins irrité, renvoya les ecclésiastiques qui voulaient rétracter leurs serments aux municipalités, où ils devaient, selon lui, non se rétracter, mais donner leur démission. Un ecclésiastique assermenté demanda qu'on accélérât l'exécution du décret, et qu'on destituât immédiatement ceux qui n'ont pas eu soin de s'y conformer. Un autre, l'abbé Gouttes, voulant chasser les évêques de l'Assemblée, demanda qu'on fit exécuter la loi sur la résidence (1). La rage était dans le cœur des révolutionnaires.

Il était facile de prévoir que, malgré la suppression d'un grand nombre de paroisses, le clergé de la nouvelle Église allait être insuffisant pour le ministère pastoral. L'épiscopat était à renouveler presque en entier, puisque quatre évêques seulement seront dans le cas de rester. On prévoyait que la position des nouveaux évêques serait très-difficile, et qu'il fallait des hommes capables de soutenir la lutte. Mais où les trouver, si l'on s'en tient aux conditions d'éligibilité prescrites par la constitution civile du clergé? D'après l'art. 7 du titre II de cette constitution, il fallait, pour être éligible à un évêché, avoir exercé au moins pendant quinze ans le ministère pastoral dans le même

(1) Moniteur, séances des 5 et 6 janvier 1791.

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diocèse; pour être élu à une cure, il fallait avoir été vicaire ou aumônier pendant cinq ans (art. 32). Où trouver assez d'évêques capables remplissant les conditions voulues? Il fallait donc laisser les siéges vacants, ou rendre l'épiscopat plus accessible; mais on ne pouvait prendre ce dernier parti qu'on changeant la constitution. Or, comment se résoudre à changer une constitution qu'on avait prônée comme un chef-d'œuvre de sagesse? On avait résisté à l'évêque de Clermont, à la pressante argumentation de Cazalès, qui, dans l'intérêt de la paix, avaient demandé une légère modification à la formule du serment, et maintenant on irait jusqu'à toucher à la constitution elle-même! Qui osera le proposer à l'Assemblée ? Les membres du côté' gauche n'étaient point embarrassés, quand il s'agissait de changer quelque chose au gré de leurs désirs. Mirabeau, pressé de décatholiser la France et de substituer un clergé civil au clergé catholique, proposa de modifier, pour l'année 1791, quelques articles de la constitution, ceux qui réglaient les conditions d'éligibilité, de réduire pour les évêques les quinze années d'exercice à cinq, et de n'exiger, pour les curés, que cinq ans de prêtrise, dans quelque diocèse que ce fût. Il appuya sa motion sur des raisons politiques et religieuses :

« Il craint que le fanatisme ne s'empare de l'interruption du ministère pastoral pour exciter les peuples à la révolté, en leur représentant la constitution comme la mort du christianisme, comme la préparation du renversement des sanctuaires, comme l'odieux monument d'une constitution impie, qui achèverait bientôt de détruire l'Église et son sacerdoce. »><

En exposant les raisons religieuses, il se montrait animé d'un faux zèle qui n'avait rien de réel dans son

cœur :

<< Sans examiner plus en détail, dit-il, cette situation des choses sous son aspect politique, vous serez touchés de la nécessité urgente et indispensable d'assurer à un peuple, dont vous êtes les libérateurs et les pères, la jouissance de sa foi, de son culte et de ses espérances. Il a un droit sacré et journalier à toutes les consolations et à tous les secours de la religion. Il serait trop douloureux pour vous d'apprendre qu'au milieu de vos cités, la portion chrétienne de ceux qui les habitent cherche en vain autour d'elle son pontife, son guide, son pasteur, et que, dans les campagnes, l'agriculteur agonisant est forcé de descendre au tombeau, privé de la douceur, si chère à sa piété naïve, d'avoir vu la religion bénir son dernier soupir (1). »

Mirabeau n'avait pas besoin de se tant inquiéter du sort religieux des peuples : les pasteurs légitimes ne quitteront pas leur troupeau, du moins ils ne le quitteront que quand ils seront chassés par la violence et la persécution. Mais enfin sa motion, appuyée sur de si beaux motifs, fut adoptée sans la moindre difficulté le 7 janvier (1791), trois jours après qu'on eut exigé le serment. Avec ce décret, on se croyait en mesure de pouvoir facilement remplacer les anciens évêques, et fournir des pasteurs aux nouvelles cures.

Il ne suffisait pas d'avoir des évêques et des curés dans la nouvelle Église, il fallait encore trouver des fidèles, et ceci était le plus difficile; car la France était

(1) Moniteur, séance du 7 janvier 1791.

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