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prennent des trompettes harmonieufes, Jericho va périr; les trompettes fonnent fa ruine, fes tours chancellent, le Seigneur parle, les murs tombent " Jericho a été.

Mais franchiffons le vaffe intervale des tems, hâtons-nous d'arriver aux jours de David, époque la plus magnifique des honneurs de l'Harmonie: c'eft par ce Roi que nous la verrons introduite dans les tabernacles du Seigneur ; elle y entre fuivie des filles de Sion, pour foutenir la Majesté du lieu faint, pour augmenter la pompe des Sacrifices, pour rélever le fpectacle de la Réligion? David lui-même précéde en dansant l'Arche augufte, il régle ses pas légers fur les fons de fa harpe raviffante ; dans tous ses cantiques, monumens éternels de fon amour, il demande que fes accords foient mille fois répétés fur la cithare, fur la cimbale, fur l'orgue, fur la trompette; il réveille tous les échos du Jourdain, il invite la nature entiére à chanter fon auteur, à ne faire de toutes fes voix qu'un concert de louanges, de gratitude & d'adorations unanimes; auffi les foins & les bienfaits de ce Prince réligieux avoient ils rendu les Lévites les premiers Muficiens de l'Univers: ainfi le publioit la Renommée. C'est par-là, que pendant les jours de la captivité, les Peuples de l'Euphrate invitoient les triftes Hébreux à leur apprendre quelques-uns de leurs airs fi vantés : mais

Ifraël exilé ne peut chanter loin des champs de Solime, il ne peut que gémir, fes harpes en filence font fufpendues aux faules du rivage: tel l'oifeau captif néglige fon chant, ou fi fon gofier s'ouvre quelquefois, ce n'eft qu'aux foupirs, fa voix eft. morte aux délectables accens. Enfin, Meffieurs parcourez toutes les pages de la Loi antique, par→ tout vous rencontrerez ou des concerts de lcuanges, ou des cantiques de victoires, ou des chants de funérailles; il femble qu'aucune voix mortelle n'estdigne de l'oreille du Seigneur, fi elle n'eft portée au trône de la Toute-Puiffance fur les aîles de l'Harmonie, au travers des nuages d'encens. Dans des Sacrifices plus parfaits, la Loi nouvelle, a confervé à la Mufique fa place dans les Sanctuaires : oui, dit l'Oracle de l'Afrique le Pafteur & l'ornement d'Hippone : „ Je ne puis trop approuver les chants dont rétentiffent nos Temples; par ces auguftes » accords je me fens vivement émû, pénétré de cette horreur facrée qu'infpire la demeure de Dieu, » frappé d'un respect profond, faifi d'une fainte yvreffe, nouveau Paul, je fuis dans les Cieux, ,, mon efprit eft enlevé au-deffus de lui-même, il s'élance jufqu'au triple Trône du Très-haut, il fe croit admis aux Concerts éternels des intelligen» ces fuprêmes, & mon cœur embrasé va se perdre dans le fein de la Divinité.

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Dans cette uniformité de fuffrages acquis à l'Harmonie, peut-il être une vénération plus marquée, plus fuivie, plus inconteftable? Cette gloire de l'Art a toujours rejailli fur fes Artiftes; fouvent les favoris de l'Harmonie furent illuftrés par les Couronnes, par les Lauriers, par les Pompes triomphales, par les applaudiffemens des Théatres, par des Statuës érigées, par des Mausolées, par des Infcriptions mémorables, par les honneurs même de l'Apothéose, enfin, par tous les monumens publics inventés chez les Peuples divers, pour immortalifer les talens de-là ils font encore une Nation chére & facrée aux mortels; avantage souvent refusé aux Nourriffons des autres fciences; on évite un Sophifte, on néglige un Géométre, on fuit un Critique, on fifle un Chimiste, à peine remarque-t'on un Grammairien ; on aimé au contraire, on recherche un éléve de l'Harmonie, il eft le Citoyen de toutes les contrées, l'homme de toutes les heures, l'égal de tous les hommes de goût & de fentiment, le monde entier eft fa patrie : de-là vient encore que le fouvenir des Muficiens illuftres des fiécles fupérieurs eft beaucoup plus aimable & plus précieux à l'efprit & à l'humanité, que le souvenir des conquérans les plus renommés ; faux héros réels, les conquérans étoient nés pour la perte du monde, les Muficiens illuftres

, tyrans

pour fon bonheur ;

les uns, avides de funérailles, ont porté les larmes, la difcorde, la mort ; les autres, toujours bienfai fans, toujours applaudis, ont porté par-tout la paix, la concorde, le plaifir; la terre consternée s'eft tûe devant ceux-ci; par ceux-là la terre raffurée a retenti de fons pacifiques; les conquérans couronnés de fanglans lauriers, font fortis de la vie fouvent par une fin précoce, toujours chargés de la haine des peuples indignés, perdus fans être pleurés; les Muficiens fameux couronnés de myrthe & de rofes, & paisiblement expirés, ont emporté chez les morts les regrets des Nations. Oüi, le nom d'un tendre Orphée fera toujours plus chérement gardé au Temple de mémoire, que le nom d'un fougueux Alexandre.

Telle eft la nobleffe de la Mufique, noblesse fondée fur l'antiquité de fon origine, illustrée par sa puiffance fuprême, confirmée par la vénération de tous les tems & de tous les peuples; mais aux preuves de fa dignité, joignons celle de fon utilité, louange pour cet art plus délicate encore que la premiére.

SECONDE

PARTIE.

U AND la Mufique ne feroit qu'un Art en

Qjoué, qu'une & de par gré

ment; par-là même ne feroit-elle pas une fcience.

utile, un Art même néceffaire? Car eft-il rien de plus néceffaire à l'homme qu'un plaifir innocent? Le plaifir n'eft-il pas chaque jour un des befoins de Phumanité ? Mais allons à la conviction par des routes moins détournées. La République doit à P'Harmonie de plus folides bienfaits que des plaifirs infructueux. Je fçais, Meffieurs, que j'avance un Paradoxe, difons mieux, une vérité peu développée, mais à qui il n'a manqué que l'occafion d'éclore; ofons donc l'amener à la lumjére, lui donner fes couleurs, & la revêtir de toutes les preuves que la réfléxion & l'expérience offrent de nous en fournir; au refte, je ne hafarde point un fentiment ifolé & fans auteurs, quand je foutiens que le mérite de la Mufique ne fe borne point au gracieux, & qu'il s'étend jufqu'à l'utile, je ne fais que me ranger au fentiment reçû chez la fage antiquité; en effet, fr l'importance de cet Art n'avoit été dès-lors reconnue, les Legislateurs de l'Egypte, de la Perfe, d'Athénes, les Maîtres des nations auroient-ils fait une loi de l'Harmonie? S'ils n'avoient jugé fa durée néceffaire aux deftins heureux des Empires, l'auroientils fait marcher de front avec la Réligion; l'auroientils muni de ce fceau confacré par la main de l'immortalité même ? Licurgue, en voulant former une République de Héros, auroit-il infcrit l'Harmonie dans le livre auftére des loix de Lacédémone? Au

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