صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

Les auteurs du Journal de Paris ont rêpondu à ce doux compliment un billet dont voici à peu près le contenu. « Les auteurs » du Journal de Paris font très-furpris que

M. de la Harpe qui juge tout le monde, » ne veuille pas être jugé à son tour. Ils font » encore furpris que M. de la Harpe voie » feul avec chagrin un petit morceau qui a » amufé tout le monde. Il n'y a dans l'ana» lyfe qu'ils ont donnée de fa piece, rien de » perfonnel. Le cenfeur l'a jugé ainfi. Quant » au nom de l'auteur de cette critique, ils fe »bornent à dire, que c'est le même qui fait "tous les extraits imprimés dans leur Jour"nal, & ils ajoutent qu'ils adoptent tout ce » qui y a été dit fur les Barmécides. »

M. de la Harpe a ripofté fur le champ une lettre que je tranfcris ici. « Seroit-il vrai, » Meffieurs, que M. Sautereau feroit l'auteur » de l'infame diatribe que vous avez publiée » dans votre Journal contre ma tragédie? il "fied bien à un pareil écrivailleur de juger » un homme comme moi. Mais je vous ré» ponds que je l'en punirai. J'ignore quels » font les autres qui contribuent à la rédac>tion de ce Journal. Je fais que M. Cadet, "Apothicaire, en eft un. Mais je ne fais ce » que l'art des Corneille des Racine, des » Voltaire, des.... (pardonnez, j'allois écrire » des la Harpe) peut avoir à démêler avec

[ocr errors]

la chymie de cet Apothicaire. Je fais en» core que M. d'Uffieux eft un des princi"paux je ne fais ce qu'il a fait on m'a » dit qu'il avoit fait des nouvelles Françoises

» qui ne font ni Françoifes ni Allemandes, » & des drames dont on n'a pu fe rappeller » les noms. Son nom n'est connu qu'au car» can. Signé de la Harpe. »

Muni de cette piece, M. d'Uffieux, homme bien né, homme de mérite & généralement eftimé, est allé la dépofer entre les mains de M. le Lieutenant criminel, a formé une plainte. contre M. de la Harpe avec la ferme réfolution de le poursuivre, & d'en obtenir une réparation authentique. M. de la Harpe a eu vent du projet de M. d'Uffieux, & il a envoyé aux auteurs du Journal de Paris une rétractation par laquelle il avoue qu'il s'eft trompé en écrivant au carcan, qu'il vouloit mettre au caveau. On ne lui a fait aucune réponfe. Mais le lendemain il a envoyé la même rétractation par écrit. Les chofes en font là, au moment où je vous écris.

[ocr errors]

Les petits fpectacles fe multiplient à l'infini dans cette Capitale. Indépendamment dé Nicolet & d'Audinot nous avons encore depuis peu, le théâtre de l'Eclufe, ancien acteur de l'opéra comique, établi à la foire St. Laurent, un autre dans le bois de Boulo, gne, près du château de la Muette, & celui des éleves de la danfe pour l'opéra, bâti fur les grands boulevards du Temple. Tous les acteurs de ces fpectacles font des enfans, mais ce qui nous manque effentiellement, ce qu'on defire avec ardeur depuis long-temps, c'eft un fecond théâtre François. Il eft plus néceffaire que jamais dans une ville où le goût de la comédie Françoife n'a jamais été

plus généralement répandu. Cet établiffement ranimeroit les talens des auteurs, & redonneroit aux acteurs une activité, une émulation dont ils ont grand befoin. Croiriez-vous qu'avec un répertoire chargé de quarante pieces nouvelles, nos comédiens n'ont encore donné depuis Pâques, que les Barmécides & l'Impatient?

Cette petite piece de l'Impatient a difparu, comme je l'avois prédit, après la feconde représentation.

Un jeune homme plein de talent, mais qui n'eft pas encore connu, s'avifa d'adreffer fans fe nommer il y a fix ou fept mois les vers fuivans à M. le Comte de Maurepas. Ces vers dont il a couru quelques copies, ont été trou vés fi bien que généralement ont les a attribués à M. de Voltaire. Aucun Journal ne les a imprimés, parce qu'ils ne le pouvoient dans. un pays où les écrits font foumis aux cifeaux de la cenfure. C'étoit à l'occasion de la fête du Miniftre.

Ne vous flattez jamais que Rome vous difpenfe,.
Comme à votre Patron, le Ciel pour récompense.
Trop bien favez pourquoi n'entrerez dans ce lieu?
Pour trop plaire aux humains vous déplaifez à Dieu ?
Mais fi l'Eglife un jour inftituoit la fête
De ceux qui, comme vous, élevés fur le faîte,
Encouragent les arts, font refpecter les loix,
Et font l'amour du Peuple & la gloire des Rois;
En Paradis dès-lors tout changeroit de face.
Parmi les bienheureux bientôt prenant leur place

Les Sulli, les Colbert verroient tous les mortels.
Dans des temples, fans nombre, encenfer leurs images,
Maurepas au milieu recevroit nos hommages,
Et dès fon vivant même, il auroit des autels.

On vient de publier des Lettres patentes portant établiffement d'une Société Royale de Médecine. Vous feriez effrayé, Monfieur, en voyant la lifte de tant de doctes conjurés contre la fanté & la vie de nos concitoyens.

Un Sr. d'Ambach, de Manheim, a fait ici une plantation de rhubarbe qui promet beau coup de fuccès.

Le cinquieme volume des Annales poétiques vient de paroître. Il contient la vie & la plus grande partie des poéfies de Ronfard. Ce poëte a joué de fon vivant un rôle fi brillant fur notre Parnaffe qu'on eft bien aife de juger par foi-même ce qui lui a mérité une fi grande célébrité, & aujourd'hui un fi profond oubli.. 11 manqua de périr peu après fa naissance. II naquit au château de la Poiffonniere dans le Vendômois, de Louis Ronfard, Chevalier del'Ordre, & Maître-d'hôtel du Roi. Sa mere: étoit auffi de noble extraction. Une femme qui le portoit de ce château à l'église de la paroiffe où il devoit être baptifé, le laiffa tomber imprudemment, & pour furcroît de malheur, renverfa, fur la tête de l'enfant, l'aiguiere qu'elle tenoit, & dans laquelle étoit de l'eau rose pour ce baptême, fuivant la coutume de ce temps-là. Mais l'enfant ne mourut point de cette double catastrophe. Il fut page

de Charles, Duc d'Orléans, qui l'affectionna toute fa vie. A l'âge de feize ans, il fut chargé de quelques affaires fecretes en Ecoffe. Il accompagna enfuite Lazare de Baïf, envoyé par le Roi à la diete de Spire, & peu de temps après, fuivit M. de Langey, dans le Piémont De tous les différens voyages qu'it fut obligé de faire, il a rapporté des connoiffances dans l'hiftoire & dans les langues, & une furdité qui, en le rendant moins propre à la fociété, le détermina à fe livrer entiérement à l'étude & au travail. On lui décerna le prix des jeux floraux, fans qu'il fe fût mis au nombre des concurrens. Les Magiftrats de Toulouse lui donnerent même une Minerve d'argent maffif, & par un décret rendu en fon honneur, ils le proclamerent par excel fence le Poëte François. Charles IX le combla de bienfaits & d'honneurs. Les plus favans hommes, les plus grands poëtes & les meil leurs critiques de fon temps le placent à côté d'Homere & de Virgile. On lui rendit après fa mort les plus grands honneurs. Et cet hom me qui faifoit l'admiration de fon fiecle, qui étoit recherché par les plus grands Seigneurs, & admis dans la familiarité des Souverains, n'eft plus aujourd'hui qu'un écrivain barbare dont la langue eft fouvent inintelligible, moins par la vétufté du langage que par fon affectation à ne pas fe fervir du langage ufité alors. Des poëtes plus anciens que lui ont plus de goût & écrivent plus purement. Malherbe a témoigné pour fes vers beaucoup de mépris, & tout le monde fait le jugement

« السابقةمتابعة »