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illuftres fucceffeurs. On peut le regarder comme un chef de conjurés, qui a eu courage de s'élever le premier contre une puiffance defpotique & arbitraire, & qui en préparant une révolution éclatante, a jetté les fondemens d'un gouvernement plus jufte & plus heureux qu'il n'a pû voir établi. S'il a fini par croire tout expliquer, il a du moins commencé par douter de tout; & les armes dont nous nous fervons pour le combattre ne lui en appartiennent pas moins, parce que nous les tournons contre lui. D'ailleurs quand les opinions abfurdes font invétérées, on eft quelquefois forcé, pour défabuser le genre humain, de les remplacer par d'autres erreurs, lorsqu'on ne peut mieux faire. L'incertitude & la vanité de l'efprit font telles qu'il a toujours befoin d'une opinion à laquelle il fe fixe: c'eft un enfant à qui il faut préfenter un jouet pour lui enlever une arme dangereufe; il quittera de luimême ce jouet quand le tems de la raison sera venu. En donnant ainfi le change aux Philofophes, ou à ceux qui croient l'être, on leur apprend du

cette difpofition eft le premier pas vers la vérité. Auffi Defcartes a-t-il été perfécuté de fon vivant, comme s'il fût venu l'apporter aux hommes.

NEWTON, à qui la route avoit été préparée par HUYGHENS, parut enfin, & donna à la Philofophie une forme qu'elle femble devoir conferver, Ce grand génie vit qu'il étoit tems de ban nir de la Phyfique les conjectures & les hypothéfes vagues, ou du moins de ne les donner que pour ce qu'elles valoient, & que cette Science devoit être uniquement foûmife aux expériences & à la Géométrie. C'eft peut-être dans cette vûe qu'il commença par inventer le calcul de l'Infini & la méthode des Suites, dont les ufages fi étendus dans la Géométrie même, le font encore davantage pour déterminer les effets compliqués que l'on obferve dans la Nature, où tout femble s'exécuter par des efpeces de progreffions infinies. Les expériences de la pefanteur, & les obfervations de Képler, firent découvrir au Philofophe Anglois la force qui retient les planetes dans leurs orbites. Il enfeigna tout enfemble & à diftinguer les caufes de leurs mouvemens, & à les

calculer avec une exactitude qu'on n'auroit pû exiger que du travail de plufieurs fiecles. Créateur d'une Optique toute nouvelle, il fit connoître la lumiere aux hommes en la décompofant. Ce que nous pourrions ajouter à l'éloge de ce grand Philofophe, feroit fort au-deffous du témoignage univerfel qu'on rend aujourd'hui à fes découvertes prefque innombrables, & à son génie tout à la fois étendu, jufte & profond. En enrichiffant la Philofophie par une grande quantité de biens réels, il a mérité fans doute toute fa reconnoiffance; mais il a peut-être plus fait pour elle en lui apprenant à être fage, & à contenir dans de juftes bornes cette efpece d'audace que les circonftances

avoient forcé Defcartes à lui donner. Sa Théorie du monde (car je ne veux pas dire fon Systême) eft aujourd'hui si généralement reçue, qu'on commence à difputer à l'auteur l'honneur de l'invention, parce qu'on accufe d'abord les grands hommes de fe tromper, & qu'on finit par les traiter de plagiaires. Je laiffe à ceux qui trouvent tout dans les ouvrages des Anciens, le plaifir de

tion des planetes, quand elle n'y feroit pas; mais en fuppofant même que les Grecs en ayent eu l'idée, ce qui n'étoit chez eux qu'un systême hasardé & romanefque, eft devenu une démonstration dans les mains de Newton : cette démonstration qui n'appartient qu'à lui, fait le mérite réel de fa découverte ; & l'attraction fans un tel appui feroit une hypothese comme tant d'autres. Si quelqu'Ecrivain célebre s'avifoit de prédire aujourd'hui fans aucune preuve qu'on parviendra un jour à faire de l'or, nos defcendans auroientils droit fous ce prétexte de vouloir ôter la gloire du grand oeuvre à un Chimifte qui en viendroit à bout? Et l'invention des lunettes en appartiendroit, elle moins à fes auteurs, quand même quelques anciens n'auroient pas cru impoffible que nous étendiffions un jour la sphere de notre vûe?

D'autres Savans croient faire à Newton un reproche beaucoup plus fondé, en l'accufant d'avoir ramené dans la Phyfique les qualités occultes des Scholaftiques & des anciens Philofophes. Mais les Savans dont nous parlons font-ils bien sûrs que ces deux mots,

vuides de fens chez les Scholaftiques, & destinés à marquer un Être dont ils croyoient avoir l'idée, fuffent autre chofe chez les anciens Philofophes que l'expreffion modefte de leur ignorance? Newton qui avoit étudié la Nature, ne fe flattoit pas d'en favoir plus qu'eux fur la caufe premiere qui produit les phénomenes; mais il n'employa pas le même langage, pour ne pas révolter des contemporains qui n'auroient pas manqué d'y attacher une autre idée

que

lui. Il fe contenta de prouver que les tourbillons de Defcartes ne pouvoient rendre raifon du mouvement des planetes; que les phénomenes, & les lois de la Méchanique s'unif foient pour les renverfer; qu'il y a une force par laquelle les planetes tendent les unes vers les autres, & dont le principe nous eft entiérement inconnu. Il ne rejetta point l'impulfion; il se borna à demander qu'on s'en fervît plus heureusement qu'on n'avoit fait jufqu'alors pour expliquer les mouvemens des planetes: fes defirs n'ont point encore été remplis, & ne le feront peutêtre de long-tems. Après tout, quel mal

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