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à un curé (1). Morellet le croyait-il sérieusement, lui qui avoue que le Systême de la nature est « un catéchisme d'athéisme complet où, chemin faisant, les gouvernements et les rois sont fort mal traités (2) ! » Si les philosophes de ce temps-là étaient innocents à ce point, quelle était donc leur légèreté, leur imprévoyance d'insulter ainsi froidement les rois, de traîner la religion dans la boue, et de poser des principes de désordre et de bouleversement? La révolution a-t-elle fait autre chose qu'appliquer les maximes du baron d'Holbach, de Diderot et des autres ? Comment peut-on trouver innocents des systêmes qu'on a vus se réaliser d'une si effroyable manière (3) ? Il n'est pas besoin que les philosophes descendent dans la rue et fassent le coup de feu ; nous savons que ce courage cruel ne leur est pas toujours donné, mais ne sont-ils pas responsables des excès qui se commettent au nom de leurs principes par les hommes de pique et de carmagnole ?

Dans la lettre d'un théologien à son fils, le marquis de Condorcet se moqua tour à tour fort gaîment de la religion et des prêtres; son Commentaire des Pensées de Pascal renfermait les principes les plus subtils d'un

(1) Mémoires, tom. F, pag. 134,

(2) Ibid., pag. 133.

(3) Ami de la Religion, tom. XXXII, pag. 326.

athéisme décidé. Voilà ce que l'on trouve écrit en toutes lettres dans la Correspondance littéraire de Grimm et de Diderot (1). Et à propos du même Condorcet élu membre de l'Académie française, il est dit : « J.a cour venait de nommer un archevêque d'une piété, d'une dévotion extraordinaire; n'était-il pas de la sagesse de ces messieurs de balancer un pareil choix par celui d'un confrère plus athée encore que de coutume (2)? » L'athée donc, émerveillé des progrès et des lumières du sièele, prononça, le 24 janvier 1782, un discours de réception dans lequel il disait avec une ridicule emphase: * Témoins des derniers efforts de l'ignorance et de l'erreur, nous avons vu la raison sortir victorieuse de cette lutte si longue, si pénible, et nous pouvons nous éerier enfin La vérité a vaincu! le genre humain est sauvé (3)! » On sait aujourd'hui comment il le fut dix ans après, et Condorcet avec lui.

Naigeon, qui s'était montré dans la société de d'Holbach, comme un athée très-décidé, fit une Adresse à l'Assemblée nationale sur la liberté des opinions religieuses. Cet écrit n'était qu'une philippique sanglante contre Dieu et les prêtres. Suivant Naigeon, Dieu est un mot

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vide de sens, un rouage de luxe. Tous ceux qui ont cru en Dieu sont des imbéciles ou des fripons. Les prêtres sont des espèces de bêtes féroces qu'il faut enchaîner et emmuseler, et il est de l'intérêt général qu'ils soient avilis. Morellet (1) expose et tourne en ridicule ces assertions violentes et insensées, mais sans rien dire qui s'applique au christianisme proprement dit. L'abbé théiste ne pouvait aller jusque là, et la philosophie était arrivée à sa conclusion naturelle, après quoi il ne restait plus que les massacres des Carmes, ou les pontons de Brest et de Rochefort.

(1) Mémoires, tom. II, pag. 27.

CHAPITRE XIX.

DOCTRINE DU TYRANNICIDE.

Accusation de La Chalotais et moyen de justification proposé aux Jésuites. Noms des Jésuites qui ont écrit en faveur de l'inviolabilité de la personne royale. Sentiments des PP. Raynaud, Pétau, de Bussière, Jouvency, Daniel, Griffet, Bourdaloue, Gibalin, Auger, d'Origny, Verjus, D'Avrigny, Berruyer, Catrou et Rouillé, d'Orléans, Longueval, Brumoy, Berthier, Bougeant. — Arrêt de 1761 contre divers livres des PP. Jésuites. - Tolet et Lessius; opinion de Bossuet sur le premier, de saint François-de-Sales sur le second. — Bellarmin, Suarez, Mariana, Santarelli et Busembaum. — Décret du P. Acquaviva, à la date de 1610.-Diderot reproche aux Jésuites leur ferveur de royalisme. La Convention abolissant la royauté et justifiant les Jésuites, s'il eût été besoin de justification. Doctrines des philosophes du XVIIe siècle sur la royauté. Montesquieu, Rousseau, Helvétius, Raynal, Condorcet, Naigeon, d'Holbach, Diderot, Grimm - Marie Chénier. Les révolutionnaires et les régicides: Volney, Dulaure, Grégoire. Le poète Barthé lemy et le journal le Siècle. — Lakanal et la feuille démocratique le National.. Des régicides de tous les temps. Ceux de 1831. à 1846.-M. Thiers ac

cusé de complicité morale dans l'attentat de Lecomte. -Réflexions du National à ce sujet.

La Société de Jésus se vit accusée par les Parlements d'enseigner le tyrannicide, et ce fut un des plus formidables griefs entre tous ceux qu'on imagina pour ameuter les passions contre un Ordre religieux que 1793 s'est chargé de venger sur ce point.

La Chalotais, donc son Compte-Rendu, marquait luimème aux Jésuites le moyens qu'ils devaient employer pour arriver à une éclatante justification. Il y a, disaitil, des règles connues pour examiner les faits, et pour savoir si on doit ousi on ne doit pas attribuer un sentiment à un Corps. Il suffit de produire des livres et des passages authentiques. Les Jésuites croient-ils, ou ne croientils pas la doctrine meurtrière ? croient-ils qu'il n'y a aucun cas où l'on puisse attenter à la vie des rois ? voilà de quoi il s'agit. S'ils ne le croient pas, qu'ils le disent ils le peuvent, ils le doivent. Des Religieux qui font imprimer tant de livres, n'ont pas besoin d'être appelés en jugement pour répondre par écrit à des accusations qui sont imprimées. Qu'ils enseignent clairement, nettement, sans détour, que leur doctrine est qu'il n'y a aucun cas où cela soit permis. Qu'on le lise dans leurs thèses, dans leurs écrits, dans leurs livres; personne

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