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tille, y célébra un service pour le vertueux Dauphin de France, mort en 1765; des pièces de vers et des inscriptions pleines de goût suppléèrent à la pompe que des bannis ne pouvaient pas apporter à la cérémonie, et le général français qui commandait les troupes envoyées en Corse, adressa à sa Cour une relation dans laquelle il louait le zèle de ces Jésuites étrangers (1).

Les réclamations du Pape en leur faveur n'eurent aucun succès. Charles III était trop circonvenu pour qu'on pût espérer de l'adoucir. Le 16 avril 1767, Clément XIII avait rompu le silence par un Bref, qui devint public. Il y était dit, avec une sainte liberté, que la conduite de Charles III envers les Jésuites mettait évidemment le salut du roi en danger; le Pape, après avoir invoqué Dieu et consulté l'Esprit-Saint, assurait le roi que le corps, l'institut, l'esprit de la Compagnie de Jésus était pieux et saint dans son objet, ses lois et sa morale; que lors même que quelques Religieux se seraient rendus coupables, on ne pouvait les punir avec tant de sévérité sans les avoir auparavant accusés et convaincus (2). Tout fut inutile; ce Bref n'attira au Pape qu'une trèscourte réponse du roi, en date du 2 mai, réponse qui

(1) Caballero, loc. cit., pag. 160.

(2) Guerra, Epitome Bullar., tom. III, pag. 362.-Novaes, Elementi della Storia de' Sommi Pontefici, tom. XV, pag. 113.

ne laissait aucune espérance (1). On publia même sur ce Bref un rapport du conseil de Castille, et il y était dit que le Pape, en intercédant pour les Jésuites, se mèlait de ce qui ne le regardait point; que si le roi avait fait part à Sa Sainteté de la mesure prise contre les Jésuites, c'était simplemenl un acte de politesse, et que le Bref du 16 avril aurait mérité d'être renvoyé. On n'était pas fort accoutumé, en Espagne, à ce ton envers le Saint-Siége, et c'était une prétention bien bizarre que de vouloir faire regarder comme une politesse l'obligation où l'on mettait le Pape de recevoir cinq mille proscrits (2); mais le conseil de Castille était présidé par le comte d'Aranda, un des provocateurs de l'expulsion des Jésuites.

Le même Conseil rendit, le 16 septembre et le 21 octobre 1767, deux ordonnances au sujet des Jésuites. La première commandait d'arrêter de nouveau et de reconduire jusqu'aux frontières ceux qui, après s'être fait séculariser à Rome, avaient quitté la Corse, et étaient rentrés en Espagne. S'ils y remettaient encore les pieds sans permission, ils devaient être traités comme criminels d'Etat. Par la seconde ordonnance,

(1) Novaes, ibid., pag. 115.

(2) Le rapport du Conseil de Castille se trouve dans la cinquième suite du Recueil des pièces concernant les Jésuites d'Espagne, publié à Paris, en 1767 et 1768.

qui fut criée publiquement, tout Jésuite qui rentrait en Espagne sans l'autorisation du roi, encourait, comme proscrit, la peine de mort, s'il n'était pas dans les Ordres sacrés; et, s'il y était, la prison à perpétuité. Ceux qui auraient coopéré à faire rentrer un Jésuite devaient être punis comme perturbateurs du repos public, et l'on réputerait tel quiconque, étant instruit du retour d'un Jésuite, ne le dénoncerait pas aux magistrats. Législation douce et tolérante, qui fait le plus grand honneur à la philosophie!

La Corse ayant été définitivement cédée par Gênes à la France, les Jésuites espagnols furent brutalement renvoyés de l'île, et partirent de San-Bonifacio le 6 et le 7 septembre 1767 (1). « La manière dont eut lieu cette nouvelle expulsion, dit Schoell, montra sous un triste jour la prétendue philanthropie des coryphées de la philosophie. On avait été injuste envers les Jésuites français; mais la conduite qu'on tint envers les Jésuites espagnols, auxquels la République génoise avait accordé asile dans l'île de Corse, fut barbare. On jeta les Religieux dans des vaisseaux où, par une chaleur étouffante, ils étaient entassés sur le tillac, couchés les uns sur les autres, exposés aux ardeurs du soleil. Ce fut ainsi qu'on

(1) Monçon, Vita del P. Pignatelli, pag. 65.

les transporta à Gênes, d'où ils furent envoyés dans l'Etat ecclésiastique (1). »

Cependant, le Saint-Siége avait long-temps hésité à recevoir les Jésuites espagnols. Outre les difficutés sérieuses qui entravaient le gouvernement pontifical, il était justement blessé de ce qu'on prétendait l'obliger à recevoir les proscrits. Et, en effet, cet ordre impérieusement donné aux Jésuites de ne pas sortir des Etats du Pape, semblait aussi peu révérencieux pour son gouvernement que rigoureux pour les Jésuites, qui auraient de la peine à trouver des ressources dans un territoire pauvre et circonscrit. Jusque-là, on avait du moins laissé aux bannis le choix du lieu de leur exil, et le souverain qui pouvait les expulser de ses Etats, n'avait pas encore prétendu forcer un autre souverain à les recevoir et à les garder. Toutefois, le Saint-Siége ayant plus égard à la position des Jésuites qu'à des procédés hautains, résolut de recevoir ces Religieux, et les dispersa dans les différentes villes de l'Etat ecclésiastique. Il y avait parmi eux des théologiens, des savants et des littérateurs fort distingués, qui ont honoré, par leurs écrits, la religion et les lettres. Leur conduite, dans l'Etat de l'Eglise, donna le plus éclatant démenti à leurs accusateurs; ils se firent estimer de tous les ha

(1) Cours d'Histoire des Etats européens, tom. XL, pag. 58.

bitants par leur piété, leur modestie et leur charité. Jusque dans leur exil, ils s'occupaient des intérêts de leur patrie et d'investigations relatives à son histoire. Plusieurs d'entre eux se sont fait une réputation dans toute l'Europe par des ouvrages d'un haut mérite. Il faut nommer surtout Jean Andres, Faustin Arevalo, François Gusta, Laurent Hervas, François-Joseph Isla, Jean-François Masdeu, Jean de Osuna, Joseph Pons, Charles de la Serna-Santander, etc.

La révolution française n'avait que trop fait éclater les vues des ennemis de l'autel et du trône, et on ne pouvait plus se dissimuler le but secret des promoteurs de l'expulsion des Jésuites. Charles IV sembla donc vouloir réparer, du moins en partie, le mal qu'avait fait son père. La proscription des Jésuites durait depuis trente ans, et la plupart d'entre eux étaient déjà descendus dans la tombe. Ceux qui restaient encore obtinrent la permission de rentrer en Espagne, en 1799. Presque tous profitèrent de cette liberté ; mais leur retour importunait d'irréconciliables ennemis ; la présence de ces vieillards était un perpétuel reproche pour quelques personnages en crédit. Ajoutez à cela les plaintes d'un parti qui, depuis cinquante ans, cherchait à prévaloir en Espagne, dans la direction des affaires ecclésiastiques. Les Jésuites furent donc expulsés de nouveau, et le pouvoir sembla ne les avoir

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