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l'illustre et galant auteur des Lettres persanes, ouvrage <<< si contraire aux lois et maximes de la religion de l'Etat (1), » car il travestit indignement les croyances évangéliques, et, pour nous borner à un seul trait, représente les chrétiens comme des imbéciles qui croient que trois ne font qu'un.

Le 18 février 1762, jaloux « de faire observer les lois aussi sages que justes, qui proscrivent du royaume tout ministre de la religion prétendue réformée, » disait le procureur-général, le Parlement de Toulouse condamnait à mort le ministre François Rochette et quelques protestants avec lui (2).

A peu de semaines d'intervalle, le gibet du jeune pasteur et la roue d'un vieillard, de Jean Calas, se dressèrent dans la même ville. L'arrêt du 9 mars 1762 fut annulé le 9 du même mois 1765 (3).

Ces parlementaires qui étourdissaient le royaume da bruit de leur royalisme et de leur zèle à maintenir les servitudes de l'Eglise de France, déguisées sous le beau nom de libertés, se faisaient les dociles instruments des persécutions religieuses. D'Aguesseau et Joly de Fleury,

(1) Expressions de l'arrêt d'avril 1758.-Voir sur cet arrêt l'Histoire des Eglises du désert, par Ch. Coquerel, tom. II, pag. 259. (2) Ch. Coquerel, Histoire des Eglises du Désert, tom. II, liv. IV,

ch. 1.

(3) Ibid., chap. 2.

par exemple, prirent part au cruel édit de 1724 contre les Protestants. Un écrivain qui appartient à la Réforme, leur rend cette justice que « tous deux se montrèrent vigilants gardiens des maximes gallicanes, dont la profession, dit-il, est voisine de l'esprit janséniste (1). »

Les philosophes, pour le compte de qui travaillaient les Parlements, nous ont laissé la plus gracieuse idée de cette bénigne magistrature, et nous donnent conséquemment la mesure de ce qu'elle put faire contre les Jésuites, pour servir ses rancunes jansénistes.

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Damilaville, très-fervent adepte du philosophisme, regrettait que Jean-Jacques, dans sa lettre à Christophe de Beaumont, n'eût pas démasqué ce sénat de Midas aux yeux de l'Europe qui en était la dupe, et qui les croyait des hommes d'Etat, des républicains, des philosophes, des pères de la patrie, lorsqu'ils n'étaient que de plats jansénistes et des sots importants (2). »

Le même philosophe écrivait encore à d'Alembert cette longue apothéose des Parlements : « Il ne faut pas croire que ces parlements, devenus si redoutables en France, obtiennent de la part des hommes sensés les éloges qu'une partie de la nation leur prodigue. Aussi superstitieux que les capucins, et plus ignorants

(1) Ch. Coquerel, Histoire des Eglises du Désert, tom. I, p. 158 et 161.

(2) OEuvres de d'Alembert, tom. V, pag. 407.

que la Sorbonne, on les a vus, dans ces derniers temps, persécuter les Protestants en Languedoc et en Dauphiné; supprimer, sur des rapports infidèles, des ouvrages estimables et utiles aux progrès de la raison; prendre pour oracles de leurs décisions des écrivains méprisés et ridicules; s'occuper avec beaucoup plus de chaleur de l'Eucharistie refusée à une tourrière de couvent, que de la grande affaire des impôts; refuser à tort et à travers d'enregistrer des édits bursaux, qu'ils vérifiaient quelques mois après sans résistance; ne rejeter constamment que ceux de ces édits qui étaient contraires à leurs intérêts personnels; se mêler de tout sans se connaître à rien, et vouloir gouverner à la fois l'Eglise et l'Etat, sans aimer ni l'un ni l'autre. On a trèsbien défini les parlements : « Un corps qui ne s'embarrasse guère que le peuple ait du pain, pourvu qu'il ait la communion, et qui est beaucoup plus occupé de le faire enterrer que de le faire vivre. »

Il faut ajouter que, de tous les Parlements, celui de Paris, composé pour la plus grande partie de bourgeois élevés dans les absurdités du Jansénisme, qui ne connaissent de fléau dans l'Etat que la bulle Unigenitus, est sans comparaison le moins éclairé, et celui dont les idées et les connaissances en tout genre sont les plus étroites; en voici un exemple sensible. Le Parlement de Toulouse, au commencement de ce siècle, ordonna

que le testament de Bayle serait exécuté, quoique fait hors de France, un tel homme ne devant pas être regardé comme étranger; ce sont les termes de l'arrêt. Le Parlement de Paris, au milieu de ce même siècle, après cinquante ans de nouvelles lumières, condamna au feu, il y a quelques années, l'Analyse de Bayle; et, dans l'arrêt qu'il rendit à ce sujet, flétrit la mémoire de ce grand homme par les plus odieuses qualifications. Toulouse, le berceau de l'Inquisition, avait donc, en 1700, des magistrats plus éclairés que Paris, le siége de la philosophie, n'en avait en 1750; et qu'on vienne après cela nous parler des progrès de l'esprit humain!...

« On ose avancer que, de toutes les Compagnies du royaume, séculières et régulières, le Parlement de Paris est le plus nuisible aux progrès des lumières, et par l'ignorance qui est son apanage, et par la nature des peines qu'il peut infliger à ceux qu'il voudra perdre. Les Théologiens excommunient, la Cour exile, mais le Parlement fait pendre et brûler.

e Aussi ennemi de la raison que les Jésuites, il n'est presque aucun ouvrage favorable à la tolérance, contraire à la superstition, ou même à quelque préjugé que ce puisse être, qui n'éprouve de la part de ce corps une opposition marquée, et quelquefois une persécution ouverte. On l'a vu, en dernier lieu, rendre un arrêt pour demander sur l'inoculation l'avis de la Sorbonne,

qu'il se garde bien de consulter sur l'acceptation de la Bulle, quoique l'une semble un peu plus que l'autre du ressort de la Théologie; et cette Sorbonne, que le Parlement opprime et méprise, plus sage en cette occasion qu'en beaucoup d'autres, a eu le bon sens de répondre, toute Sorbonne qu'elle est, que ce qui concernait la santé du corps ne la regardait pas. On a vu ce même Parlement, qui n'a pas les premières notions d'administration ni de commerce, s'opposer à la libre circulation des grains dans l'intérieur de la France, tandis que d'autres Parlements plus instruits demandaient même la libre exportation des grains hors du royaume, et MM. du Parlement de Paris n'ont enfin consenti au commerce des blés de province à province que lorsqu'ils ont vu, sans en pouvoir douter, que leur résistance à ce sujet les rendait la fable de l'Europe. En un mot, pourvu que la Société soit détruite, et que les Jansénistes communient à leur appétit, peu leur importe d'ailleurs que les ministres soient des tyrans, les citoyens malheureux, la France opprimée au dedans et avilie au dehors.

Tels sont, dans la plus exacte vérité, les hommes qui se disent l'appui de l'Etat, qui, pour avoir acheté

(1) Voir aussi les OEuvres de d'Alembert, tom. XV, pag. 256. Ibid., pag. 266.

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