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pables dans tous les genres, dans tous les temps, dans tous les pays quelques gens de loi, quelques magistrats, quelques avocats-généraux; s'il rangeait par ordre alphabétique, le nom, la qualité des soi-disants ministres de la justice qui ont été proscrits, exilés, emprisonnés, punis du dernier supplice; s'il rassemblait les arrêts iniques, ridicules, absurdes, contradictoires qui ont été portés par quelques Parlements et souvent par le même; si, après cela, de ce travail pénible et long, il concluait que le Code, le Digeste, les Pandectes, les lois en un mot, dont les magistrats sont ou devraient être les vengeurs, ne présentent qu'un systême abusif, contraire au droit naturel, au droit divin, à toutes les autorités, nous ne savons trop ce que pourraient dire contre cette manière de faire, ceux qui montrent un zèle si vif à défendre et à faire revivre les arrêts de proscription dont la Compagnie de Jésus a été la victime.

Ces arrêts sont encore exhumés contre les Jésuites, et l'on veut ériger en lois de l'Etat ces tyranniques édits. Peut-être, pour montrer quelle estime, quelle confiance et quel respect sont dus à ces Parlements derrière lesquels s'abritent les philosophes et d'hypocrites amis de la liberté, y aura-t-il quelque profit à consulter l'histoire sur le passé de ces hommes qui exilaient si bravement, et à demander aux écrivains du xviie siècle

ce qu'il faut penser de ces bourreaux qu'on voudrait transformer en législateurs. C'est avoir fait beaucoup pour s'assurer du degré d'équité ou d'iniquité d'un jugement, que de connaître la vie et les passions du juge. Nous ne pouvons entrer dans de très longs détails, mais quelques faits généraux suffiront à répandre assez de lumière sur la question présente.

Les Parlements, s'ils se fussent maintenus dans leurs attributions, pouvaient rendre au pays d'éminents services et être un contre-poids aux caprices ou aux fautes de la royauté. Nul doute que, en plus d'une rencontre, ils n'aient pris vivement les intérêts du peuple. Mais avec le temps, les hommes parlementaires en vinrent à dépasser leurs pouvoirs légitimes; à se placer au dessus de la couronne, dont ils étaient primitivement les conseillers et les mandataires dans les seules affaires de justice; à s'immiscer avec passion aux questions religieuses, et à introduire une jurisprudence qui fut si souvent en opposition avec les lois de l'Eglise, l'autorité de ses pontifes et la juridiction de ses évêques.

Dans la lutte engagée pour la ruine de la Compagnie de Jésus, s'il eût été libre aux accusés de retourner contre leurs accusateurs ces violentes charges qui reposaient sur de misérables raisons, qui étaient empruntées à des temps éloignés, à des pays gouvernés par d'autres mceurs et d'autres lois, le Parlement ne se fût pas donné

ces airs de sainteté et de patriotisme qu'il affichait pompeusement dans les discours de ses procureurs et de ses avocats-généraux.

Si la magistrature prétendait que la Compagnie de Jésus devait être solidaire de toutes les opinions ou de toutes les fautes personnelles de ses membres, les Parlements du XVIIIe siècle avaient à porter aussi la responsabilité des actes de leurs devanciers, et le fardeau était onéreux. Il y avait, par exemple, une déraison et une injustice des plus criantes à représenter les Jésuites comme ayant été Ligueurs ou ayant professé la doctrine du tyrannicide, car on sait jusqu'où le Parlement avait poussé l'amour des rois et l'esprit de patriotisme.

Charles Villers, auteur d'un écrit que l'Institut couronna en 1802, représente les cours parlementaires comme ayant été un foyer permanent de républicanisme. Il se peut qu'aujourd'hui ce soit pour elles un mérite aux yeux de bien des gens; mais en se reportant à l'époque de la lutte contre les Jésuites, et en se plaçant au point de vue monarchique des Parlementaires eux-mêmes, c'est un acte de sédition. Voici, du reste, les propres paroles de Villers : « Depuis l'édit de Nantes jusqu'aux temps qui précédèrent sa révocation, et où l'on commençait déjà à le violer ouvertement, les Parlements avaient été en partie composés de Huguenots. Durant cette période, il est naturel que ces corps se

soient montrés récalcitrants, et aient été animés d'un certain esprit de républicanisme et d'opposition contre Ja Cour. Quand les Huguenots en furent éliminés, ce même esprit n'en sortit point avec eux; les Parlements étaient fiers de leur influence et de l'essai qu'ils avaient fait quelquefois de leurs forces. Cette cause n'est pas la seule de la conduite ultérieure des Parlements, mais elle y contribua. C'est donc au milieu d'eux que se réfugia l'esprit d'indépendance qui était resté dans la nation, et c'est là qu'elle le retrouva en 1788, quand des finances épuisées, une cour amollie, les principes de la liberté républicaine prêchés par quelques écrivains d'après les livres des Anglais Protestants, ou apportés de la Pensylvanie par l'armée française; quand mille circonstances enfin lui donnèrent l'impulsion qu'il prit alors, et qui se communiqua rapidement à toute la nation (1). »

En 1422, le Parlement de Paris prêta serment de fidélité au roi d'Angleterre. En 1429, il fit écarteler des sujets fidèles à Charles VII, seul roi légitime depuis près de huit ans.

Les membres de la Compagnie de Jésus ne devaient pas trouver fort étrange que les Parlements leur donnassent la dénomination de soi-disants Jésuites; cette expression n'avait pas été créée pour eux elle était

(1) Essai sur l'esprit et l'influence de la Réformation de Luther; Paris, 1808, in-8°, pag. 167.

presque aussi ancienne que le Parlement de Paris, et, dans l'arrêt qu'il porta contre Charles VII, il ne l'appela que Charles, soi-disant roi de France, soi-disant Dauphin de Viennois, le déclarant indigne de toutes successions, nommément de la couronne de France, et banni à perpétuité (1).

« Le malheur des temps, écrit Voltaire, fit que le premier arrêt que rendit la chambre du Parlement contre un pair, fut contre le premier des pairs, contre l'héritier nécessaire de la couronne, contre le fils unique du roi. Cet arrêt violait, en faveur de l'étranger et de l'ennemi de l'Etat, toutes les lois du royaume et celles de la nature: il abrogeait la loi Salique, auparavant gravée dans tous les cœurs (2). » Ripert de Monclar n'avait-il pas raison de dire que les Jésuites étaient au dessus des têtes couronnées, eux qui osaient trouver mauvais que le Parlement de Paris les traitât comme il avait traité ses rois ?

L'histoire a conservé les noms des magistrats que le fanatisme arma les premiers contre Henri III. Parmi ces noms, on voit figurer ceux de Bussi le Clerc, Emonet, La Chapelle, Louchard, La Morlière, Crucé, d'Orléans, tous gens de robe. A ces noms, l'histoire ajoute encore

(1) Bayle, Dictionnaire historique, art. Philippe-le-Bon, duc de Bourgogne, tom. I, pag. 636.

(2) Histoire du Parlement, page 38, tom. XXII des Œuvres.

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