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nos femmes, de nos enfants, de nos propriétés, de la liberté, de notre industrie, de nos opinions, de nos paroles et de nos pensées. L'homme qui nous menace avait tout envahi. Il enlevait les bras à l'agriculture, il faisait croître l'herbe dans nos cités commerçantes, il traînait aux extrémités du monde l'élite de la nation, pour l'abandonner ensuite aux horreurs de la famine et aux horreurs des frimas; par sa volonté, douze cent mille braves ont péri sur la terre étrangère, sans secours, sans aliments, sans consolation, désertés par lui après l'avoir défendu de leurs mains mourantes. Il revient aujourd'hui, pauvre et avide, pour nous arracher ce qui nous reste. Les richesses de l'univers ne sont plus à lui, ce sont les nôtres qu'il vient dévorer. Son apparition, qui est pour nous le renouvellement de tous les malheurs, est pour l'Europe un signal de guerre. Les peuples s'inquiètent, les puissances s'étonnent. Les souverains, devenus nos alliés par son abdication, sentent avec douleur la nécessité de redevenir nos ennemis. Aucune nation ne peut se fier à sa parole; aucune, s'il nous gouverne, ne peut rester en paix avec nous.

« Du côté du Roi est la liberté constitutionnelle, la sûreté, la paix; du côté de Buonaparte, la servitude, l'anarchie et la guerre. Nous jouissons, sous Louis XVIII, d'un gouvernement représentatif, nous nous gouvernons nous-mêmes. Nous subirions, sous Buonaparte, un gouvernement de Mamelouks; son glaive seul nous gouvernerait....

« On a parlé, dans nos journaux, de la clémence que promettait Buonaparte, et l'on s'est indigné de cette clémence. Mais cette promesse n'existe pas. J'ai lu ces proclamations d'un tyran déchu qui veut ressaisir le

sceptre. Les mots de clémence ou d'amnistie ne s'y trouvent pas plus que ceux de constitution ou de liberté. Quelques paroles, jetées dédaigneusement sur les écrits qui ont paru depuis le 31 mars, semblent, il est vrai, offrir à ceux qui ont attaqué la tyrannie renversée, la garantie du mépris; mais ces paroles ne contiennent aucun engagement; elles laissent le champ libre à toutes les vengeances.

« Les proclamations de Buonaparte ne sont point celles d'un prince qui se croit des droits au trône; elles ne sont pas même celles d'un factieux qui s'efforce de tenter le peuple par l'appât de la liberté : ce sont les proclamations d'un chef armé qui fait briller son sabre pour exciter l'avidité de ses satellites, et les lancer sur les citoyens comme sur une proie. C'est Attila, c'est Gengis-kan, plus terrible et plus odieux, parce que les ressources de la civilisation sont à son usage; on voit qu'il les prépare pour régulariser le massacre et pour administrer le pillage. Il ne déguise pas ses projets ; il nous méprise trop pour daigner nous séduire....

« J'ai voulu, disait encore le publiciste, j'ai voulu la liberté sous ses diverses formes; j'ai vu qu'elle était possible sous la monarchie, j'ai vu le roi se rallier à la nation. Je n'irai pas, misérable transfuge, me traîner d'un pouvoir à l'autre, couvrir l'infamie par le sophisme, et balbutier des mots profanés pour racheter une vie honteuse (1). Quelques jours après, Benjamin Constant se réconcilia avec l'Empereur, et siégea au Conseil d'Etat. Une profonde conviction des services

(1) Journal des Débats, 19 mare 1815.

qu'on croit pouvoir rendre, n'a jamais suffi pour excuser une si rapide métamorphose (1). Nous ne demanderons pas comment il se fait que Benjamin Constant soit un grand citoyen, et le P. Loriquet un misérable, à peine digne du titre de français.

Louis-Philippe d'Orléans, quand il accepta le commandement de l'armée de Catalogne destinée à agir contre les Français, répondait à la régence espagnole, le 7 mai 1810 : « En prenant ce commandement, je remplis ce que mon honneur et mon inclination me dictent. Je suis éminemment intéressé aux succès de l'Espagne contre le tyran qui a voulu ravir tous ses droits à l'auguste maison dont j'ai l'honneur d'être issu. Heureux si mes faibles efforts peuvent contribuer à relever les trônes renversés par l'usurpateur, à maintenir l'indépendance et les droits des peuples qu'il foule aux pieds depuis si long-temps! .

En face de pareilles imprécations sorties de toutes les bouches, que sont les pages accusatrices du P. Loriquet? Mais voyez comme M. Passy, ex-ministre de S. M. Louis-Philippe, est heureusement inspiré, comme il est délicat, lorsqu'il vient parler de ceux qui ont traité Napoléon de tyran et d'usurpateur!

C'est encore à la Chambre des Pairs qu'un écrivain dont la théodicée sera bientôt appréciée par différents juges, venait, en superbe représentant de la philosophie universitaire, traduire la philosophie des Jésuites devant la France, devant le monde entier, comme laissant de côté, quoi donc? toutes les questions sur

(1) Thibaudeau, loc. cit., pag. 327.

Dieu! Il semble que le chef d'une Ecole philosophique, un homme revêtu de dignités considérables, et qui est quelque chose aux yeux de la science et du pays, devait ne porter de jugement qu'en connaissance de cause; on devait pour le moins attendre d'un si grand philosophe ce qu'on serait en droit de demander au premier venu qui se mêlerait d'agiter de pareilles questions; oui, sans doute, mais les Jésuites sont-ils habitués à tant de justice? Voici donc les reproches de M. Cousin ; nous les ferons connaître par les termes dans lesquels un de ses collègues, M. le comte de Montalembert, y répondit alors :

«La première accusation est celle que j'ai été stupéfait de retrouver sous la plume de M. Cousin : il a dit, l'autre jour, devant vous, non plus dans la chaleur de l'improvisation, mais dans son discours écrit, que les Constitutions des Jésuites prescrivaient, en fait d'études philosophiques, de passer toutes les questions sur Dieu (prætereantur quæstiones de Deo).

:

« Or, savez-vous ce qui se trouve dans le texte même des Constitutions invoqué par M. Cousin? Le voici je le prends dans un exemplaire qui n'est pas suspect, car c'est celui même qui a servi au Parlement de Paris pour dresser son arrêt de 1762. Non pas du tout: Qu'on passe toutes les questions sur Dieu, et rien de plus; mais que, dans la métaphysique, on passe celles des questions sur Dieu et sur les esprits, qui dépendent en tout ou en partie de la révélation (1). C'est-à-dire que l'on suive la règle

(1) In metaphysica, quæstiones de Deo et intelligentiis, quæ om. nino aut magnopere pendent ex veritatibus divina fide traditis, prætereantur. Instit. Soc. Jesu, tom. II, pag. 194.

tračée, vantée, défendue par l'honorable M. Cousir lui-même, tous ces jours-ci devant vous que l'on enseigne une métaphysique, non pas contraire à la révéFation, mais en dehors d'elle, indépendante d'elle, et apportant au secours de la vérité révélée les démonstrations auxquelles on arrive par la seule raison.

« A coup sûr, j'absoudrai l'honorable M. Cousin du soupçon même d'avoir voulu mutiler ou falsifier des textes pour combattre ses adversaires; mais je lui reprocherai, à lui, qui n'est pas seulement un éloquent philosophe, mais encore un très-habile philologue, je lui reprocherai d'avoir emprunté, sans la vérifier, pour la porter à votre tribune, une citation à un pamphlet calomnieux, où presque tous les textes cités sont falsifiés, comme vous venez de le voir. Et, puisque nous en sommes sur le terrain d'Escobar, on m'avouera qu'ici du moins l'escobarderie n'est pas du côté des Jésuites (1).

Au reste, dans cette œuvre d'ignorance inexcusable ou d'odieuse falsification, comme l'on voudra, le Pair de France avait été devancé par le professeur, par M. Quinet, servile copiste lui-même des anciennes diatribes contre les Jésuites. M. Quinet avait dit, en effet, avec toute la pompe d'un préambule qui promettait de savantes révélations :

Je vois de longues ordonnances sur la philosophie; e suis curieux de savoir ce que peut être la philosophie du jésuitisme; je m'attache à cette partie qui résume la pensée de toutes les autres; et que trouvé-je? la con

(1) Journal des Débats, 9 mai 1844.

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