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à tout et sous toutes les formes. Certes, parmi les hommes dont la presse nous va retracer le portrait, il y en a plus d'un qui a invectivé contre les Jésuites avec moins de fondement que les journaux n'invectivent ici contre lui.

Avec quelle majesté l'on se drape dans sa vertu ! De quelles fières et saintes indignations l'on fait parade · contre les corrupteurs de la morale! Avec quelle bravoure on attaque en masse quelques centaines de Religieux qui ne peuvent confondre le calomniateur, parce que le mensonge repose sur d'odieuses généralités ! Pourtant, s'il faut s'en tenir aux décisions presque journalières de la presse, que de citoyens d'une austérité fort équivoque! combien de gouvernants peu irréprochables! combien de philosophes absurdes et ruineux pour l'Etat combien de patriotes accessibles aux séductions de l'or!

Voilà les ennemis, voilà les juges de la Compagnie de Jésus. Encore une fois, ce n'est pas nous qui retraçons de telles figures, qui faisons de pareilles révélations; tout cela s'entasse dans nos journaux et court l'Europe. Nous prenons ici les hommes tels qu'on nous les a faits, avec leurs misères et leurs passions, avec leur vénalité, leur rapacité et leur manque d'entrai!les.

A Jove principium.

M. Thiers, historien passionné d'une Révolution qui a payé en richesses et en honneurs ce qu'il lui avait accordé de sympathies habilement calculées, possède à un remarquable degré l'art de se présenter en toute occurrence comme un fidèle enfant de cette Révolution et un homme que tourmente le sentiment de la dignité

de son pays. Les panégyristes de cet audacieux parvenu le présenteraient volontiers comme le type du patriotisme le plus pur, et lui-même ayant avancé, à la Chambre des Députés, dans la séance du 29 janvier 1846, que les Jésuites de Fribourg, de Brugelette ne font pas de bons Français, prétend sans doute valoir beaucoup par son amour pour la France. M. Thiers ayant, en outre, rajeuni les doctrines de Danton, et prétendu que les enfants doivent être moulés à l'effigie de l'Etat, n'est pas fort éloigné, sans doute, de se regarder comme le type d'après lequel on devra façonner les jeunes générations. Or, pour mieux connaître les idées de l'homme, il importe de le connaître lui-même. Toutefois, on n'entendra ici que des juges pris dans la presse démocratique ou bien dans les rangs des Conservateurs. Il appartient aux uns par ses livres et par ses discours; aux autres par ses discours encore, mais surtout par ses actes et ses divers ministères.

Nous n'allons pas chercher nos jugements à une date très-reculée, et nous ne glanons même que peu de chose dans un sujet si riche.

Le Siècle se prend à s'écrier sur tous les tons que M. Thiers est un homme de progrès et de liberté. Sans s'épuiser en dissertations, on se contente de placer sous ses yeux l'énumération suivante :

• Loi contre les crieurs publics, loi contre les associations, loi contre les détenteurs d'armes de guerre ; état de siége de Paris et des départements,

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refus

de l'amnistie guerre acharnée contre la gauche jusqu'en 1837, corruption savamment organisée, scanlales de Bourse, ordres impitoyables de Lyon, massacre de la rue Transnonain, loi de septembre,

forts détachés en 1833, de 1840.

fortifications par ordonnance

M. Thiers a commis ou voté toutes ces mesures; voilà de singuliers titres pour un homme de liberté!

L'antienne serait monotone, si on ne la variait parfois; et, dans ce but, le Siècle reprend : M. Thiers est un homme de nationalité. On lui répond, les faits à la main. On lui nomme l'Espagne, la Pologne, la Belgique, l'Italie dont son grand- homme a demandé ou plaidé l'abandon. On rappelle les traités sur les droits de visite en 1831 et 1833,- les vingt-cinq millions honteusement payés aux Etats-Unis, à qui on ne les devait pas, le blocus hermétique de la Suisse, et plus récemment, en 1840, l'affaire des souffres de Sicile, - le traité du 15 juillet, le rappel de l'amiral Lalande, — les génuflexions devant l'Angleterre, les invocations à la générosité de lord Palmerston, les platitudes du traité Mackau avec Rosas, et enfin, pour immortel couronnement de tant de gloire, la note du 8 octobre, après laquelle il ne restait plus qu'à tomber pour aller se cacher.

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« Pensez-vous que la nomenclature fidèle et naïve soit de nature à déconcerter le Siècle? Non, il se taira pendant quinze jours, et puis nous entendrons sortir de son gosier reposé le refrain qu'on croyait à jamais enseveli dans la pudeur et l'embarras du Siècle : M. Thiers est un grand homme de nationalité (1)! »

Après avoir élégamment dit que M. Guizot alla gratler à Gand la porte de Louis XVIII, on ajoute, au sujet de M. Thiers et de M. Molé :

(1) L'Esprit public, 14 février 1846.

• Mon Dieu, on sait bien qu'ils sont Anglais, Russes, Prussiens, tout ce que l'on voudra, et tout autant qu'il est nécessaire pour devenir ministre de France, l'an de grâce 1844, le 15° du règne de Louis-Philippe ler; mais M. Guizot, sur ce point, ne leur cède en rien (2). » - En fait de liberté, M. Thiers vaut encore moins, bien moins que M. Guizot, Il est vrai que lorsqu'on déjeûne de Napoléon, et qu'on couche tous les soirs avec le gouvernement impérial, on doit avoir fort peu de goût pour les droits du peuple. M. Thiers persiste à s'envelopper de la capote grise du maître; il ne perdrait assurément rien, s'il voulait bien ajouter la lorgnette, qui est aussi dans le costume de l'emploi, et certainement l'aiderait peut-être à voir un peu plus clair. National du 19 décembre 1845.

« Le National, reprend le Charivari du 20, est dans l'erreur. M. Thiers a bien aussi la lorgnette de Napoléon. Seulement, il y a pour lui deux manières de s'en servir.

S'agit-il d'envisager les prétendues nécessités qui inspirent les gros emprunts, les immenses bâtisses, les fortifications de Paris, les lois de septembre; M. Thiers se sert de la lorgnette impériale par le petit bout, le bout qui grossit et rapproche.

• S'agit-il d'examiner les nécessités qui amènent à consacrer les droits populaires; M. Thiers regarde dans la lorgnette impériale par le gros bout, le bout qui rapetisse et éloigne.

Voilà tout. ▸

- M. Thiers demande la permission de faire de la

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(1) National du 27 nov. 1844.

politique terre à terre, et, il faut lui rendre justice, il s'en acquitte à merveille. Alors comme alors, c'est son mot, et c'est, en effet, le mot qui représente le mieux sa politique (1). »

« Ah! combien M. Thiers a été conséquent, en demandant pour son pays une politique modeste, en ne souhaitant que des évènements médiocres! Voilà jusqu'où ils nous ont fait descendre, ces hommes d'Etat au coupd'œil si profond! Voilà jusqu'à quel degré d'abaissement ils ont réduit notre pays si orgueilleux jadis de son initiative! A ces aveux de l'impuissance, à cette négation du nom de la France, reconnaîtriez-vous quelque trace de ces sentiments généreux que la révolution de juillet avait révélés (2) ? »

-Personne ne joue avec la parole comme M. Thiers, ce qui est un grand défaut dans un homme d'État, parce qu'on peut toujours raisonnablement penser qu'il ne traite pas mieux les principes (3). »

— « Le Constitutionnel publie tous les matins une ou plusieurs tartines pleines d'injures contre M. Guizot et d'éloges emphatiques pour M. Thiers. Malheureusement ces injures retombent sur l'ex-président du 1er mars, et les éloges ne sont que des contre-vérités fort maladroites, qui ne contribueront jamais à réhabiliter la politique fanfaronne et les pasquinades des hommes d'affaires qui, après avoir failli mettre l'Europe en feu, se sont bravement retirés devant le danger, en vantant leur courage et leur désintéressement (4). ▾

(1) Journal des Débats, 21 janv. 1846.

(2) National, 22 janv. 1846.

(3) Rhône, journal de Lyon, 15 mai 1845.

(4) Rhône, 29 et 20 juillet 1811.

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