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Le poète Barthélemy disait, le 29 mai 1831, dans une Némésis adressée aux Electeurs :

Mais rejetez bien loin ces noms que vous indique

La feuille de Bertin, courtisane impudique,
Qui, livrant ses faveurs aux hommes les plus bas,
Publie effrontément ses ignobles débats.

Oh! qu'ils soient à jamais flétris dans tout collége,
Les hommes qu'exalta la feuille sacrilege!

Est-il honteux ou honorable pour des Religieux de compter de tels adversaires?

Le résultat de ces romans par lesquels tant d'écrivains recherchent le bruit et le gain, ce n'est pas seulement d'amollir les ames, d'énerver les caractères, mais encore de nous déconsidérer aux yeux de l'Europe, et c'est ce que déclare un des amis les plus passionnés de cette agitation stérile où nous allons consumant nos forces.

I importerait, dit-il, d'examiner si ces livres français qui ont tant de popularité en Europe, tant d'autorité, représentent réellement, vraiment la France; s'ils n'en ont pas montré certaines faces exceptionnelles, trèsdéfavorables; si ces peintures où l'on ne trouve guère que nos vices et nos laideurs, n'ont pas fait à notre pays un tort immense près des nations étrangères. Le talent, la bonne foi des auteurs, la libéralité connue de leurs principes, donnaient à leurs paroles un poids accablant. Le monde a reçu leurs livres comme un jugement terrible de la France sur elle-même.

Ses défauts incontestables, que l'activité infinie, le choc des intérêts, des idées, expliquent suffisamment, ont grossi sous la main de ses puissants écrivains, et

sont devenus des monstres. Et voilà que l'Europe toutà-l'heure la voit comme un monstre elle-même.

Rien n'a mieux servi, dans le monde politique, l'entente des honnêtes gens. Toutes les aristocraties, anglaise, russe, allemande, n'ont besoin que de montrer une chose en témoignage contre elle les tableaux qu'elle fait d'elle-même par la main de ses grands écrivains, la plupart amis du peuple et partisans du progrès. Le peuple qu'on peint ainsi, n'est-ce pas l'effroi du monde? Y a-t-il assez d'armées, de forteresses pour le cerner, le surveiller jusqu'à ce qu'un moment favorable se présente pour l'accabler?...

« Ce n'est pas que nos grands peintres aient été toujours infidèles; mais ils ont peint généralement des détails exceptionnels, des accidents, tout au plus, dans chaque genre, la minorité, le second côté des choses. Les grandes faces leur paraissaient trop connues, triviales, vulgaires. Il leur fallait des effets, et ils les ont cherchés souvent dans ce qui s'écartait de la vie normale. Nés de l'agitation, de l'émeute, pour ainsi dire, ils ont eu la force orageuse, la passion, la touche vraie parfois aussi bien que fine et forte; généralement il leur a manqué le sens de la grande harmonie..... L'amour errant leur a semblé plus poétique que la famille, et le vol que le travail, et le bagne que l'atelier (1). »

Voilà bien l'explication de ce qui s'est fait, mais sera-ce une justification et une excuse? On ne met guère sur le papier que ce qu'on a dans le cœur ; si donc les pensées, les sentiments que l'on verse sur le

1) Michelet, le Peuple, pag. x1-XVI.

papier valent si peu, quelle grande idéc faudra-t-il avoir du cœur et de l'intelligence?

Le 7 mars 1845, un dîner réunissait dans un restaurant de Paris dix-huit à vingt personnes, hommes de lettres, journalistes, femmes de théâtre. Les tristes. incidents de cette soirée amenèrent un duel entre un gérant de la Presse et un feuilletoniste du Globe. Le premier resta mort sous le coup de feu de son adversaire. De là, procès devant la Cour d'assises de la SeineInférieure (1), et comparution, dits et contredits de ce monde joueur et viveur, de cette fleur du célibat parisien (2), qui ressuscite chez nous de véritables scènes de la régence, avec la différence toutefois qu'il y a d'un siècle à un autre. Nous ne voulons ni ne pourrions entrer dans les détails; c'est assez des conséquences à tirer de ces débats judiciaires. Quelques journaux s'abstinrent de les reproduire, et de ce nombre était le National, qui résume ainsi le procès :

« Cette rouerie permanente qu'on nomme la grande politique, elle s'est montrée débraillée dans ces roués de lansquenet. Vous les avez vus et entendus! Ils sont marquis, issu de négresse, artistes en pistolets, gentilshommes surtout, oh! très-gentilshommes! On prouve à celui-ci qu'il a volé une montre; l'autre, qui a paru suspect à la justice, apporte un brevet de capitaine au service d'Espagne; celui-là, qui est le beau-frère, attaque à corps perdu des gens à qui il doit 6,000 francs; les autres saisissent les meubles, et ils font faire opposition chez un délégué des colonies, et même à la

(1) Voir le Journal des Débats, 27-30 mars 1846. (2) Expressions de l'avocat d'une des parties.

vre,

caisse des fonds secrets. Enfin, pour couronner l'œula maîtresse de l'homme tué vient déclarer que cette société était indigne de lui; mais elle donne, en revanche, un brevet de gens comme il faut !

« A la bonne heure! voilà un monde élégant, raffiné, coquet! Les gentilshommes de notre temps, les voilà ! ils savent par cœur le Code du duel, ils en discutent comme des amateurs consommés, et, dans la chose la plus grave et la plus sérieuse du monde, ils trouvent le moyen d'être bouffons comme des saltimbanques.... «Il a fallu faire descendre la justice dans les mystères des alcôves, écouter les propos de ces femmes à tant par mois, suivre des négociations très-peu claires, entendre les explications de l'artiste dramatique, s'il n'était pas dans la patrie de Corneille; et quand tout a été dit, il reste encore le témoignage de l'homme tué, déclarant, de vive voix et par écrit, qu'il va se battre sans savoir pourquoi (1). »

Une autre feuille s'exprimait ainsi sur la même affaire :

«

.....

S'il est vrai que la presse est aujourd'hui une puissance, il importe de savoir qui l'exerce; nous le savons maintenant, du moins en partie. Ce que ce procès nous a appris est effrayant, quand on mesure l'étendue du pouvoir déposé en de telles mains; humiliant, quand on songe au pays qui en accepte le joug (2). D

(1) National, 31 mars.

(2) Le Semeur, cité par la Gazette de France, 2 avril.

V. On juge les Jésuites sur les pamphlets publiés contre eux, sur de vieilles ca⚫ lomnies cent fois réfutées. Ce que l'on serait conduit à penser des principaux hommes polítiques de nos jours et de certains écrivains, ennemis des Jésuites, si l'on s'en rapportait aux jugements de la presse. Portrait de M. Thiers par les journaux,- -Portrait de M. Barrot, de M. Guizot, de M. Cousin, de M. Villemain, de MM. Rossi et Libri, — de M. Dubois, de M. Salvandy, - de M. Dupin, — de M. Martin (du Nord), — de M. Nisard › -de M. Lerminier, -de M. Pierre Leroux, de MM. Quinet et Michelet.

Nos hommes d'Etat et nos grands politiques, ceux qui sont hostiles à la Société de Jésus, comme ceux qui se bornent envers elle à l'indifférence; la foule des écrivains et des libellistes; les masses qui répètent niaisement ce qu'elles ont lu çà et là ou entendu dire; les plus habiles et les plus médiocres, tout ce monde s'en tient en définitive aux satires et aux accusations diverses dont les Jésuites ont été ou sont encore l'objet. En partant de cet équitable raisonnement, nous ne savons plus quel personnage resterait debout sur son piédestal, ni quel homme se verrait à l'abri des conséquences avec lesquelles on croit accabler les Jésuites. Il nous a semblé utile et piquant de montrer aux plus aveugles ce que l'on serait conduit à penser de certains hommes qui jouent chez nous un rôle, si l'on voulait adopter sur leurs actes et leur valeur morale les jugements quotidiens de la presse; si enfin l'on s'en rapportait à ce tribunal passionné, comme ils s'en rapportent euxmêmes trop souvent à un tribunal aussi passionné pour le moins, celui d'écrivains doués d'une verve sarcastique, d'un esprit habilement détracteur, ou bien à ce flot toujours grossissant de calomnies, qui s'attaquent

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