صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

voir des Jésuites, voulut décharger sa colère sur les Jésuites portugais, les seuls qui fussent en son pouvoir. Il débute donc par expulser de la cour les trois confesseurs, et par faire défense à tout Jésuite de mettre les pieds au palais. Il répand dans toute l'Europe des manifestes qui représentent les Jésuites comme coupables de révolte contre Sa Majesté Très-Fidèle et les accusent d'avoir ouvertement soutenu la guerre contre les armées réunies des deux couronnes. L'innocence des accusés ayant été reconnué à Madrid, le libelle du ministre portugais fut condamné à être brûlé par la main du bourreau, comme faux et séditieux. Ainsi, Pombal préludait aux vengeances par les calomnies, et la honte d'une flétrissure politique ajoutait à sa malveillance contre les Ordres religieux en général, un motif particulier de cuisante rancune contre la Société de Jésus (1).

Les accusations de Pombal ont été recueillies par des hommes graves, et un écrivain moderne, qui tourne en dérision dans les Jésuites leurs conceptions mesquines, leurs vues étroites, leurs allures de sacristie (2), n'hésite pas, lorsqu'il sort des généralités et qu'il aborde la question présente, à blâmer en eux la

(1) P. Lamache, pag. 67.

(2) Saint-Priest, dans l'Avant-Propos.

puissance et la hardiesse du génie politique. Il reconnaît que la prétendue résistance des Jésuites aux volontés du Portugal et de l'Espagne, à une mesure oppressive (1), fut un acte courageux et honorable (2), puis il déclare que les rigueurs exercées contre la Compagnie ne furent qu'une juste expiation de cette résistance.

Quant aux Jésuites, ils sont en droit de n'accepter ni un blâme direct, ni ces éloges accusateurs. L'historien Schoell a dit : « Lorsque les Indiens de la colonie du Saint-Sacrement, attroupés au nombre de 10 ou 14,000, exercés dans les armes et pourvus de canons, refusèrent de se soumettre à l'ordre d'expatriation, on ajouta difficilement foi aux Pères qui affirmaient avoir employé tout leur pouvoir pour les engager à l'obéissance. Il est cependant prouvé que les Pères firent, extérieurement du moins, toutes les démarches nécessaires pour cela. Néanmoins, on peut supposer que leurs exhortations, dictées par le devoir, mais répugnant à leurs sentiments, n'avaient pas toute la chaleur qu'ils leur auraient donnée dans une autre occasion. » Ils n'étaient pas tenus d'approuver au fond de l'ame une mesure oppressive, qu'ils présagaient bien devoir ruiner le fruit de tous leurs travaux et amener la perte

(1) Saint-Priest, pag. 9. (2) Ibid.

des pauvres Indiens. On peut donc supposer qu'ils ne prêchèrent la soumission qu'à contre-cœur ; « mais, continue Scholl, une pareille supposition ne suffit pas pour échafauder une accusation de révolte. Que deviendrait l'histoire, que deviendrait la justice, s'il était loisible, sur les assurances d'un ministre, destituées de preuves, de flétrir la réputation d'un homme ou d'une corporation (1)? »

Ce fut quelquefois au péril de leur vie que les Jésuites exécutèrent les déplorables injonctions de Lisbonne et de Madrid. Des commissaires avaient été choisis dans la Compagnie pour favoriser les échanges de populations. « Les Indiens allèrent jusqu'à douter que ces commissaires fussent Jésuites, et ils marchèrent même contre l'un d'eux, Altamirano, qui ne put leur échapper qu'en se réfugiant à Buenos-Ayres...... Le procureur des missions donna, au nom de son provincial le désistement de toute son autorité sur les villages qui refusaient d'obéir (2). Peu de temps après, lorsque le gouvernement espagnol et le gouvernement portugais eurent prononcé l'abolition de la Compagnie, la confiscation de ses biens, c'était le cas

[ocr errors]

(1) Cours d'histoire des Etats européens, tom. XXXIX, pag. 51. (2) Alcide d'Orbigny, Voyage dans l'Amérique méridionale, tom. 1, pag. 275.

ou jamais, pour les Jésuites des missions américaines, d'obéir aux instincts de révolte. Ils avaient à venger leurs propres griefs, les griefs de leurs frères, les griefs des Indiens. Des peuplades nombreuses, braves et dévouées n'attendaient qu'un signal pour laisser éclater de nouveau les sentiments d'indépendance refoulés avec tant de peine. Que firent les Pères ? « Ils ne firent aucune résistance, partout ils obéirent sans murmurer (1). »

Pombal s'était posé en réformateur, non pas toutefois qu'il épousât les théories des encyclopédistes français. • Il était peu lettré, et n'entretenait pas de relations avec eux..... Il n'essaya pas même de balbutier le mot de liberté...... Son esprit limité, mais opiniâtre, ne voulut admettre aucune précaution oratoire (2). »

Sûr du Patriarche de Lisbonne et débarrassé du Nonce, il avait trouvé dans l'Inquisition une arme commode et prompte.....; aussi n'en parlait-il qu'avec enthousiasme (3).» Pombal se proposait simplement de faire du clergé un instrument d'absolutisme, et de suivre Henri VIII dans cette voie tortueuse où la rébellion religieuse et la tyrannie politique se donnent la main. Il faut dire aussi que les grands biens de la

(1) D'Orbigny, Ibid.—et Lamache, page 68.

(2) Saint-Priest, pag. 44.

(3) Ibid, pag. 29.

Compagnie affriandaient singulièrement le réforma

teur.

« On voit dans toute la conduite du gouvernement portugais, dit l'historien Scholl, l'intention manifeste d'offenser le Saint-Siége, et de le pousser à bout par des manques d'égards, afin d'avoir un motif de se brouiller avec lui. Et pourquoi Pombal voulait-il que le Roi Très-Fidèle, prince attaché, comme toute la nation, à la religion catholique, très-dévoué comme elle au Chef de l'Eglise, offensât la cour de Rome qui montrait tant de complaisance à son égard? En vérité, on n'en découvrit d'autres raisons que la vanité du ministre, qui voulait placer son nom à côté des hommes à caractère qui ont résisté à la puissance pontificale. Mais, s'il est honorable de s'opposer à l'usurpation, il l'est fort peu de descendre à des tracasseries (1). Schoell dit ailleurs que Pombal introduisit dans les Universités du Portugal des professeurs protestants, et il l'en blâme lui-même, tout protestant qu'il est. Il aurait pu ajouter que Pombal y introduisit aussi un grand nombre de professeurs jansénistes.

Cependant, il y avait des tempéraments à garder envers un peuple aussi religieux que le peuple portugais. Pombal commença par solliciter contre la Compagnie

(1) Cours d'histoire, tom. XXXIX, pag. 66.

« السابقةمتابعة »