صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

Ne me laissez point oublier de votre cousin, ni de milady, je la trouve charmante et je n'oublierai jamais toutes ses bontés.

LETTRE CCCIV.

Lundi, 27 Février, 1775.

Vos parens ont grand tort; je leur pardonnois leur empressement à vous aller retrouver; mais je trouve très-mauvais qu'ils ne nous aient pas donné le tems qu'ils passent loin de vous. Quel plaisir trouvent-ils à visiter la Flandre; ne valoit-il pas mieux rester pour voir nos fêtes ? Les bals de Versailles, celui d'avant-hier chez Mad. de Cossé (1), où la Reine est venue avec ses beaux-frères. La fête qu'il y aura aujourd'hui que Monsieur donne à la Reine, à la Grande Ecurie; elle doit être superbe. Je compte qu'on en imprimera la description, ce qui épargnera la peine de la raconter; tout cela méritoit leur curiosité.

L'Ambassadeur soupa Mercredi chez moi ; il me dit qu'il regrettoit beaucoup de ne les

(1) Daughter of the Duc de Nivernois, married to the. Duc de Cossé Brissac, Governor of Paris.

avoir pas suivis jusqu'à Calais; je ne sais pas ce qu'il pensera de leur course en Flandre, il vint hier chez moi, il ne ne me trouva pas; j'étois à la comédie de Beaumarchais, qu'on représentoit pour la seconde fois; à la première elle fut sifflée; pour hier elle eut un succès extravagant; elle fut portée aux nues, elle fut applaudie à tout rompre, et rien ne peut être plus ridicule, cette pièce est détestable; vos parens regrettoient beacoup de n'avoir pu l'entendre, ils peuvent s'en consoler. Comment va le goût en Angleterre ? pour ici il est enrement perdu; et grâces à nos philosophes qui raisonnent sur tout, nous n'avons plus le sens commun; et s'il n'y avoit pas les ouvrages du siècle de Louis XIV, plusieurs de ceux de votre pays, et les traductions des anciens, il faudroit renoncer à la lecture. Ce Beaumarchais, dont les mémoires sont si jolis, est déplorable dans sa pièce du Barbier de Séville.

Le grand-papa va ce soir à Versailles, à la fête de Monsieur; il donna hier une fête chez lui à toutes les femmes et valets de chambre de ceux qui ont été à Chanteloup; il y avoit plus de quatre cents personnes; l'appartement fut éclairé comme pour les maîtres;

[blocks in formation]

le repas splendide à trois services, des vins de toutes sortes; mes gens m'en firent le récit hier au soir. J'irai souper ce soir avec la grand'maman et sa belle-sœur; nous serons très-petite compagnie; je dois leur donner un ou deux petits soupers avant leur départ, qui sera le neuf d'Avril; le grand-papa reviendra le premier de Juin; il assistera au Sacre, et restera en tout un mois à ce voyage, et ne reviendra qu'à Noël avec la grand'maman qui restera constamment à Chanteloup jusqu'à ce tems-là.

L'Archiduc part Jeudi prochain. La visite qu'il a rendue ici paroît l'avoir plus fatigué qu'amusé; elle a produit de grandes tracasseries à la cour. Vous savez qu'il y étoit incognito; nos Princes ont prétendu qu'il leur devoit rendre la première visite; la Reine ne l'a pas jugé à propos, et leur a marqué son mécontentement en ne les invitant point à aucune fête. M. le Duc d'Orléans est à Ste. Assisse chez Mad. de Montesson, et le Prince de Condé à Chantilly. Voilà ma gazette ainsi que les quatre pages finies.

LETTRE CCXV.

Mercredi, 1er. Mars, 1775. JE suis fort aise de l'arrivée de vos parens et fort satisfaite du bien qu'ils vous ont dit de. moi; comme ils vous aiment beaucoup, je juge qu'ils ont cru vous faire plaisir.

[ocr errors]

Je reçois une lettre de votre cousin (1) en même tems que la vôtre; il ne me parle point de celle qu'il a dû trouver de moi en arrivant, qui étoit en réponse à celle qu'il m'avoit écrite de Calais; elle étoit, s'il m'en souvient, de quatre pages et à l'adresse qu'il a laissée à Wiart en partant; informez-vous, je vous supplie, s'il l'a reçue.

Il est vrai que je vous trouve un homme fort singulier. Vous avez grande raison de dire que nos caractères ne se ressemblent point; le vôtre m'est incompréhensible; je ne puis me faire une idée des plaisirs que vous goûtez dans la solitude, et du charme que vous trouvez dans tous les objets inanimés, de la préférence que vous donnez au grand monde à la société particulière. Je conviens que la société ne satis

(1) General Conway.

fait guères, mais on a toujours l'espérance qu'elle satisfera, et je crois vous avoir déjà dit que je regardois l'amitié comme le grand œuvre: on ne fait jamais de l'or, mais on trouve quelques productions qui ont quelque valeur, et qui laissent quelques espérances. Vous me

serviriez de preuve je n'ai point trouvé en vous ce que j'aurois désiré, mais j'ai trouvé ce qui vaut encore mieux que tout ce que je connois, et dont les protestations d'indifférence ressemblent plus à l'amitié que les protestations d'attachement de tous ceux qui m'environnent. Je ne serai point surprise du refroidissement de vos parens auquel vous me préparez, j'ai trouvé en vous un exemple qui ne peut me permettre de m'étonner de rien. Comment avez-vous pu douter que je n'acquiescerois pas à vos volontés? Je suis ravie de vous avoir tranquillisé. Je sais très-bon gré à Milady (2) des bons offices qu'elle m'a rendus ; il n'est pas douteux que je ne désire de vous revoir, mais la joie que j'en aurai ne sera pas sans inquiétude; je prévois que vous vous ennuierez beaucoup, et l'ennui est comme la gelée qui fait

(2) Lady Ailesbury, in persuading Mr. Walpole to make another visit to Paris.

« السابقةمتابعة »