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1781. dans laquelle le Baron de Rullecourt fut mor tellement bleffé. Celui qui lui fuccéda pria alors le Député-Gouverneur de reprendre fon autorité, & fe rendit fon prisonnier de guerre. Au moment de la victoire le Major Pierfon reçut une balle au travers du cœur, qui termina fa carrière. La jeuneffe de cet Officier, qui n'avoit pas encore vingt-cinq ans, le courage & l'habileté qu'il avoit montrés dans ce premier effai, firent que fa perte fut également regrettée à Jerfey & en Angleterre. Pendant cette action les Grenadiers du 83eme Régiment reprirent la redoute fur le rivage, & ainsi tous les Français qui avoient débarqué dans l'Ifle, au nombre de huit cens, furent ou tués, ou faits prifonniers.

Pendant ce tems-là les Efpagnols conduifoient le blocus de Gibraltar avec beaucoup de vigilance, & empêchoient qu'il n'y entra aucune efpèce de provifions. Les Anglais étoient trop occupés d'ailleurs pour pouvoir porter du fecours à cette Place, & fembloient l'avoir abandonnée à fon fort; les misères qu'endura cette brave garnifon font inexprimables; les denrées de première néceffité s'y vendoient à un prix exhorbitant. Ils étoient au moment de manquer de tout, & de fuccomber à leurs maux, lorfque la GrandeBretagne penfa enfin à fecourir la place. Elle n'avoit pu cependant raffembler pour ce fervice

que vingt-huit vaiffeaux de ligne, aux ordres 1781. des Amiraux Darby, Digby & du Chevalier Lockhart Rofs. Don Louis de Cordova étoit dans le port de Cadix avec trente vaiffeaux de ligne, pour s'oppofer à ce fecours. Vers le milieu de Mars la flotte Anglaise fit voile de Saint-Helen, prenant fous fon efcorre les convois des Indes Orientales & Occidentales. Elle fut obligée de s'arrêter fur les côtes d'Irlande pour y prendre des provifions.

Les convois des Indes, au nombre de trois cens voiles, ayant quitté l'Armée navale Anglaife à une certaine latitude, elle dirigea fa courfe vers Gibraltar avec quatre-vingt-dix-fept vaisseaux de provifions, & arriva à la hauteur de Cadix au milieu d'Avril. Elle trouva que la flotte Efpagnole étoit rentrée dans le port, & ne penfoit point à en fortir. Inftruit de fa fituation, l'Amiral Darby envoya le convoi à Gibraltar & à Minorque, fous l'efcorte de quelques vaiffeaux de guerre, & croifa avec le refte de la flotte à l'embouchure du détroit. Quelque tems avant cette époque, les Efpagnols avoient conftruit à Algefiras, un grand nombre de chaloupes canonnières, qui, à caufe de leur petitesse, n'étoient point dans le cas d'être aifément détruites par feu de la Place. Ces chaloupes contenoient vingt rameurs, & un canon de vingt-fix livres de

le

1781. balles en proue. Elles s'approchoient tous les foirs de la Place, & donnoient de continuelles alarmes à la garnifon. Les Espagnols firent un grand nombre de bombardes fur la même conftruction. Pendant que le convoi refta dans la baie, ces chaloupes s'en approchoient tous les matins à la faveur des calmes, fous la conduite de Don Moreno, le canonnoient & le bombardoient, & lorfque le vent commençoit à fouffler, elles fe retiroient à Algefiras.

Ces attaques devinrent à la fin fi dangereuses, que l'Amiral Anglais fut forcé de détacher le Chevalier Lockhart Rofs avec toute fa divifion pour le protéger. Comme on ne voyoit que la proue de ces petits bateaux, il n'étoit guère poffible de les toucher quand ils venoient même à portée du canon, & on ne put jamais les intercepter dans. leur retraite. Les Efpagnols ne réuffirent cependant pas à détruire le convoi par la vigilance des chaloupes armées du Chevalier Lockhart. Le ravitaillement de Gibraltar devoit être d'autant plus humiliant pour l'Espagne, que depuis long-tems toutes les forces & toutes les reffources de cette Nation étoient dirigées de ce coté-là. Les Troupes de terre avoient élevé des ouvrages immenfes qui étoient par-tout munis de l'artillerie la plus formidable qu'on eut encore vu dans aucun fiège, & leur grande armée navale paroiffoit n'avoir eu

d'autre deftination que de coopérer à la prise de 1781. cette Place.

Voyant qu'il n'étoit plus poffible de réduire Gibraltar par famine, les Efpagnols ouvrirent alors leurs batteries, & deux cens trente bouches à feu vomirent à la fois la deftruction & la mort fur cette roche efcarpée. Ce bombardement furieux & cette canonnade terrible continuèrent pendant un tems confidérable, nuit & jour fans intermiffion. Les Anglais cependant ne perdirent, depuis le 12 Avril jufqu'à la fin de Juin, qu'un feul Officier & cinquante-deux Soldats, & n'eurent que deux cens foixante-trois hommes de bleffés. Mais cette furieufe canonnade détruifit la ville, & tua un grand nombre de fes habitans. Ceux qui ne furent pas enfevelis fous les ruines de leurs maifons, la première nuit de l'attaque, fe réfugièrent à la hâte fur la partie du rocher la plus éloignée.

Les richeffes de Saint-Eustache n'étoient point deftinées à refter entre les mains des Anglais. La France, fachant que l'on attendoit en Angleterre un convoi chargé du butin de cette Ifle, ainsi qu'une grande flotte marchande de la Jamaïque, réfolut de profiter de l'abfence de l'Amiral Darby pour tâcher de les intercepter. En conféquence elle équippa à la hâte fept à huit vaiffeaux de ligne, dont elle donna le comman

1781. dement à M. de Lamotte - Piquet. Ce Chefd'efcadre rencontra le convoi de Saint-Eustache, fous l'efcorte de quatre vaiffeaux de ligne, aux ordres du Commodore Hotham, en prit quinze navires, & obligea le refte à fe réfugier dans quelques ports d'Irlande. M. Darby fut inftruit de cet accident en revenant de Gibraltar, & détacha une forte Efcadre pour pourfuivre M. de Lamotte - Piquer; mais il avoit déjà gagné les côtes de France avec fes prifes, Les richesses de ce convoi étoient fi confidérables, que ces vaiffeaux étoient affurés à Londres pour feize millions huit cens mille livres tournois.

B.

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