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Il engagea le combat avec les Anglais, & fit 1782. pendant une heure un feu terrible fur cette avantgarde, qui fe défendit néanmoins avec beaucoup de courage, contre des forces fi inégales, jufqu'à ce que la brife permît à la divifion du centre de la joindre. Il y eut un vaiffeau de foixante-quatorze de l'arriere-garde Française, qui combattit avec tant de valeur vis-à-vis la baie du Prince-Rupert, qu'il excita l'étonnement & l'admiration des Anglais. Il foutint fucceffivement le feu du Sandwich & de fes deux matelots de quatre-vingt-dix canons, & leur répondit par un feu fort vif, fans quitter fon pofte dans la ligne. Le Marquis de Vaudreuil fe distingua auffi dans cette journée. Quoique l'armée, navale de France fût encore beaucoup fupérieure, puifque l'arriere-garde Anglaise étoit toujours retenue fous la Dominique; elle tâcha de s'éloigner, & d'éviter un combat décifif. L'action continua encore de cette manière pendant deux heures, après quoi elle ceffa. Il y a peu de combats navals qui aient été mieux foutenus de part & d'autre, & où on ait fait un feu fi vif; plufieurs vaiffeaux Français furent fort endommagés, & il y en eut deux qui relâchèrent à la Guadeloupe.

Les Anglais pafsèrent la nuit à réparer leur dommage, qui etoit auffi confidérable, & le lenTome IV.

E

1782. demain l'Amiral Rodney ordonna à fon arrièregarde, qui n'avoit pas encore combattu, de prendre la place de l'avant-garde.

Les deux armées navales continuèrent à remonter au vent dans le canal qui fépare la Dominique de la Guadeloupe, & le 11, les Français étoient à une telle diftance des Anglais, que ces derniers avoient peine à les appercevoir du haut des mâts. Il fut même mis en délibération fi on. continueroit la poursuite, ou fi on fe laifferoit abfolument tomber fous le vent, afin d'arriver aux atterrages de Saint-Domingue avant la flotte de France. Dans ce moment d'incertitude on apperçut deux vaiffeaux Français qui fe trouvoient confidérablement en arrière de leur armée navale, & qui ne pouvoient pas la fuivre. Rodney remit auffi-tôt le fignal de chaffe, & l'Agamemnon & d'autres navires de fon avant-garde s'approchèrent avec tant de rapidité, qu'ils auroient certainement coupé ces deux vaiffeaux, fi le Comte de Graffe n'étoit pas venu à leur fecours : ce mouvement rendit un combat inévitable. La place où étoient les flottes peut être confidérée comme un vafte baffin entre les Ifles de la Guadeloupe, de la Dominique, des Saints & de Marigalante, &a, au vent & fous le vent, une côte très-dangereufe. Les deux flottes s'approchèrent à bord oppofé. Le combat commença à fept heures du

matin, & continua fans intermiffion jufqu'à 1782. fept heures du foir, avec la plus grande furie. Le Chevalier Rodney avoit mis le fignal de combattre de près, & fut ce jour-là bien obéi. M. Drake, qui conduifoit fon avant-garde, fe diftingua dans cette action. Les Français répondirent au feu formidable des Anglais par un feu qui n'étoit pas moins vif, &, malgré leur infériorité, foutinrent le combat avec beaucoup d'opiniâtreté jufqu'à midi. A-peu-près dans ce temslà le Chevalier Rodney & fes deux matelots, fuivis du Canada, forcèrent de voiles pour rompre la ligne Française vers le centre où étoit le Comte de Graffe, dans la Ville de Paris, & réuffirent. Ils furent bien foutenus par les autres vaisseaux qui étoient les plus près, & fépatèrent entièrement l'armée navale de France. Cette manœuvre décida du fort de la bataille. Dès que l'Amiral Anglais eut reviré de bord après avoir passé à travers la ligne Françaife, il fit fur le champ fignal à fon avant-garde de virer auffi, &, par ce moyen, la flotte Anglaise eut l'avantage du vent. Les Français continuèrent de combattre avec courage; mais leur armée étoit alors dans la plus grande confufion; leur avant-garde tomba entiè rement fous le vent en s'efforçant de former de nouveau la ligne, & ne fut plus capable de regagner fon pofte durant l'action. Le Chevalier Hood

1782. arriva dans ce moment avec fa division vers le

centre, & commença un feu violent. Chaque navire Français eut alors à combattre contre trois ou quatre vaiffeaux Anglais; mais, malgré cette infériorité de la part des Français, ils combattirent avec une intrépidité qui excita l'admiration de leurs ennemis. Le Céfar, aux ordres de M. de Marigny, fe défendit contre quatre vaiffeaux pendant un tems confidérable; ce brave Capitaine avoit fait clouer fon pavillon au mât de fon navire, réfolu de vaincre ou mourir; il perfifta dans fa résolution, & fon vaiffeau ne fut pris qu'après fa mort quand il fe rendit, toutes fes voiles étoient en lambeaux, & fon grand mât tomba. Le Glorieux combattit aufli avec intrépidité, & ne fe rendit qu'après avoir perdu tous fes mâts & fon beaupré : l'Ardent & l'Hector furent auffi pris. Quoique la ligne eût été rompue, le Comte de Graffe fut bien foutenu jufqu'au foir par les vaiffeaux qui étoient près de lui. Le Languedoc & la Couronne se distinguèrent, & le dernier penfa être pris en voulant fauver le Général. Il femble que le Comte de Graffe avoit deffein de fe laiffer couler à fond plutôt que de mettre pavillon bas; il se battit en désespéré jusqu'au foir contre quatre vaiffeaux. A la fin le Chevalier Hood arriva avec le Barfleur, qui n'avoit pas beaucoup fouffert, & lâcha une bordée à la Ville

de Paris, qui lui tua foixante hommes. M. de 1782. Graffe fouffrit encore le feu de ces cinq navires pendant un quart-d'heure avant de baiffer pavillon. Quand la Ville de Paris fe rendit, il n'y avoit que trois hommes fur le premier pont qui n'étoient pas bleffés, & le Comte de Graffe en étoit un. Le Céfar prit feu, & fauta la nuit d'après l'action; cinquante Anglais, qui étoient à bord, & quatre cens prifonniers, périrent par l'explosion. Les Français perdirent beaucoup plus d'hommes que les Anglais, puifqu'ils avoient toujours.combattu contre des forces inégales; mais leur défaite ne fit aucun tort à leur réputation. Il fut dit qu'ils avoient été malheureux, mais qu'ils s'étoient battus en Héros. Il eft vrai que fi la flotte Française avoit pu se réunir, les Anglais n'auroient point remporté la victoire, puifque les deux tiers des navires Français furent capables de se soutenir depuis une heure jufqu'à fept contre toute leur flotte. Il y eut à bord de la Ville de Paris quatre cens hommes de tués fans compter les bleffés. Les Français perdirent dans ce combat plufieurs Officiers de diftinction, entr'autres le Baron d'Efcarres, MM. du Pavillon, de la Clocheterie, Saint-Cefaire & de Lavicomté. Les Anglais eurent auffi deux Capitaines de tués, qui furent fort. regrettés; M. Blair & Mylord Robert Manners,

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