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1783. La marche rétrogade du Comte de Rochambeau pour fe rendre à bord de la frégate l'Emeraude, n'avoit pas pu être ignorée à New-York; en conféquence l'Amiral Anglais fit fortir le Lion, vaiffeau de ligne, & deux frégates, pour croifer à l'entrée des caps de la Chesapeak. Le Comte de Rochambeau en fut inftruit, mais il espéra pouvoir fortir à l'entrée de la nuit, à la faveur d'une brife forte qui auroit éloigné les croifeurs. La frégate fortit le 14 Janvier, par une brife fraîche de N. O. A peine avoit elle débouqué, qu'elle apperçut à deux lieues au large un vaiffeau croifeur. On fit fauffe-route pendant la nuit, & Fon mit le cap au Sud. Dans un instant le vent fit un faut de huit quarts, & devint Nord-Eft. Une heure après le vaiffeau croifeur arriva vent arrière par la hanche de bas-bord, ferrant l'Emeraude entre la côte & lui; il fe mit en travers pour lâcher fa bordée. La frégate ne put prendre, après l'avoir reconnu pour un vaiffeau de ligne, que le parti de forcer de voiles, en arrondiffant la côte pour ne pas échouet. Il fe mit dans fes eaux,& favorifé par le clair de lune, il appuya une chaffe de trente heures, pendant laquelle il approcha deux fois la frégare à portée de canon. A la feconde fois, le vent ayant molli gaghoit la hanche. M. de Quemi prit alors le feul

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parti qui reftoit, il s'allégea des mâts & vergues 17837 de rechange, & de quelques canons des gaillards: cela lui rendit la fupériorité de marche, & on perdit de vue le vaiffeau ennemi dans la nuit, après avoir fait quatre-vingt lieues au Sud.

Le 16, au foir, on fut accueilli d'un coup de vent des plus violens, qui fit regretter plus d'une fois les mâts & les vergues de rechange: cependant les mâts réfiftèrent, aidés de doubles cordages, jufqu'à la hauteur du cap Finisterre, où le tonnerre, tombant à bord, brifa le petit mât d'hune; ce même coup de vent accompagna la frégate jufqu'à l'entrée de la rivière de Nantes, où elle mouilla, après avoir heureufement traversé tous les brifans qui la bordent, fans avoir pu ob tenir l'arrivée d'un Pilote à bord.

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Le Comte de Rochambean y apprit la nouvelle de la fignature de la paix. Ce Général fut reçu, à fon arrivée à Verfailles, avec les marques les plus diftinguées de la bonté du Roi de France; Sa Majesté lui dit que la prife de l'armée de Mylord Cornwallis avoit été l'action de la guerre qui avoit le plus contribué à déterminer la paix. Le Comte de Rochambeau demanda la permiffion de partager cet éloge avec un autre de fes fujets, dont les malheurs poftérieurs ne lui étoient connus que par les papiers publics; mais qu'il

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1783. n'oublieroit jamais, & qu'il fupplioit Sa Majesté de ne point oublier que le Comte de Graffe avoit arrivé avec tous les moyens qu'il lui avoit demandés, & que fans le concours de cet Amiral Mylord Cornwallis n'auroit pas été pris. Le Roi lui répliqua qu'il fe fouvenoit très-bien des fervices du Comte de Graffe, que le malheur, qui lui étoit depuis arrivé, étoit une affaire à juger, & qu'il ne pouvoit que fufpendre fon opinion jufqu'à ce jugement.

Dès le lendemain, le Roi accorda les entrées de la Chambre au Comte de Rochambeau, le nomma Chevalier de fes Ordres à la promotion fuivante, ainfi que le Marquis de Bouillé & le Comte de Guichen. Le premier fut enfuite fait Commandant en chef en Picardie, après la mort du Maréchal de Croy, & le fecond, Gouverneur de Douai. J it ab oruingg

Le Baron de Viomenil, après avoir conduit l'armée à Porto-Cabello, où étoit le rendez-vous des Efpagnols, y reçut la nouvelle de la Paix, & la ramena en France. A fon retour il fut fait Lieutenant-Général; MM: de Choify & de Beville, le Comte de Cuftine, le Duc de Lauzun, le Duc de Laval, M. de Roftaing le Comte d'Autichamp, furent faits Maréchauxde-Camp, MM. d'Aboville, Defandrouin, de

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la Valete, le Baron de l'Eftrade, M. du Portail, 1781. le Comte de Muy & le, Marquis des DeuxPonts, furent faits Brigadiers. Il y eut beaucoup d'autres graces de diftribuées dans cette armée à tous les Officiers : les fimples foldats ne furent pas même oubliés. Sa Majefté Très - Chrétienne leur accorda deux mois de paie d'Amérique en gratification.

Le Marquis de la Fayette avoit déjà été fait Maréchal-de-Camp à fon retour en France, après le fiège d'York.

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Cette paix fi glorieufe & fi intereffante l'Amérique, lui fut annoncée peu de tems après. Le Général Washington, à la tête d'une armée à laquelle il étoit dû près de fept années de sa paie, ne fut pas peu embarraffé, quand il fut queftion de la licencier avec des reconnoiffancès en papiers. Les troupes avoient deffein de refter en corps, jusqu'à ce que chaque Etat eût liquidé sa juste dette; mais le Général Washington confervant ce caractère noble & patriotique qui a toujours fait la bafe de fa conduite, ramena les efprits aux fentimens d'honneur qui les avoient animés pendant le cours de la révolution. Il fit propofer l'inftitution de la Société de Cincinnatus, comme un lien éternel de leur confraternité, & une marque honorable de leurs services, & afin de perpétuer le fouvenir de leur

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1782. alliance avec les Français. Après avoir licencié fon armée, il prit congé de la vie publique, par une lettre qui peint le caractère de ce grand homme, & qui doit être confervée à la postérité.

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