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clauses avec le chevalier de Caillères, ouvrait aux Jésuites cette terre hostile, ils y entrèrent la Croix à la

main

Les Iroquois, que le marquis de Tracy et Courcelles avaient vaincus en 1666, ne pardonnèrent jamais ce triomphe aux Français. Indépendants par nature, sanguinaires par besoin ou par plaisir, ils se faisaient un jeu de la cruauté et du parjure. Ils voulaient conserver leur liberté entre les trois puissances européennes qui se disputaient l'empire du Canada, et, toujours en garde, tantôt contre les Hollandais, tantôt contre les armées britanniques ou contre la France, ils ne laissaient jamais violer leurs frontières. Les Anglais néanmoins parvinrent, à force de ruses et de présents, à gagner les principaux chefs; ils s'en créèrent des alliés, ils excitèrent leur farouche instinct, ils fournirent des armes à leurs colères. Cette situation était pleine de dangers pour les chrétientés; les Jésuites crurent que, pour conjurer le péril, il fallait le braver au centre même de l'ennemi. De l'année 1667 à 1688, les Pères Frémyn, Pierson, Brugas, Carheil, Garnier, Milet, Vaillant, de Gueslis, Boniface, les deux Lamberville et le Frère Meigueray affrontèrent toutes les douleurs du corps, toutes les souffrances de l'âme, afin d'apprivoiser les Iroquois. Les Hollandais et les Anglais avaient compris qu'il im– portait à leurs calculs protestants et politiques de rendre les Jésuites impossibles. Pour réussir dans leur dessein, ils développèrent chez ces tribus la passion des liqueurs fortes; ils l'alimentèrent' par toute espèce de

On remarqua cependant quelques officiers anglais qui ne s'associèrent pas à ce calcul d'intempérance. Le 18 novembre 1668, François Lovelace, commandant du fort James, à la Nouvelle-Orange, promettait au Jésuite Pierson de mettre un terme à de parei's abus, dont quelques chefs iroquois, plus prudents que les autres, demandaient eux-mêmes la suppression.

sacrifices; puis, après qu'elle fut devenue incurable, ils se mirent à spéculer sur le rhum et l'eau-de-vie, dont ils avaient fait un besoin.

Les Anglais, voisins des Iroquois, n'avaient qu'un but; à tout prix, ils voulaient chasser les Jésuites de ce pays, bien assurés qu'ils en seraient un jour les seuls maîtres si, par l'ivresse d'un côté et par leurs prédicants de l'autre, ils arrivaient à le dominer. Les Pères ne se laissèrent ni intimider par les outrages, ni tromper par l'astuce. Ils avaient à cœur de régénérer le peuple; ils bravèrent ses fureurs, ils tinrent tête aux émissaires de la Grande-Bretagne. Après de longs tourments, ils virent qu'il leur serait permis d'espérer un meilleur avenir. Ils consolaient les prisonniers enlevés par les Iroquois, ils les faisaient Chrétiens dans la souffrance, ou ils leur administraient le Baptême au moment du supplice. Ils adoucissaient aux autres une mort qui, à chaque heure, planait sur leurs propres têtes. Du SaultSaint-Louis au fond de ces régions, ils avaient à combattre les vices les plus ignobles et les corruptions de l'Angleterre.

Les Iroquois parlent de manger les Robes Noires, le colonel Dungan, qui dirige les troupes et la politique de la Grande-Bretagne, menace à chaque instant de les faire pendre: les Pères ne s'effraient point de ces périls. On les prive de la liberté, on les traîne captifs à la suite des hordes vagabondes; ils marchent avec elles, cherchant en tous lieux à répandre des germes de Christianisme. Cependant, en 1708, au plus fort des guerres, les Jésuites furent contraints de renoncer à ce sol ingrat. Les Iroquois proclamaient leur neutralité et ils préparaient un armement contre les Français. Le Père Pierre de Mareuil était sous les tentes des Sauvages, il

avertit le marquis de Vaudreuil, gouverneur du Canada, que l'Angleterre les a encore décidés à attaquer. Les Anglais saisissent le Missionnaire, ils le conduisent prisonnier à New York: ce fut le dernier Jésuite qui posa le pied sur le territoire iroquois.

Ils étaient en même temps au nord et au midi; ils occupaient les postes les plus difficiles et les passages les plus importants; car les chefs militaires se servaient d'eux comme d'un drapeau que les Néophytes n'abandonnaient jamais dans la mêlée. Mais, en dehors des combats, ils exerçaient un ascendant qui plus tard devait porter d'heureux fruits. Dans le centre du Canada, ils formaient une colonie qui n'eut rien à envier aux réductions du Paraguay. Les Abénakis, tribu de la rive droite du fleuve Saint-Laurent, reçurent, en 1646, la parole de Dieu, que le Père Dreuillette leur annonça; les Pères Pierson, Richard et Morain s'avancèrent sur la rivière Saint-Jean. Au mois de juin 1676, Jacques Vaultier fonda définitivement les chrétientés que Bigot, Gassot, Aubry, d'Auverjot, de la Chasse et Sébastien Rasle étendirent des deux côtés du fleuve. Plusieurs réductions furent ainsi créées dans les forêts, car il fallait mettre à l'abri des hostilités les femmes, les vieillards et les enfants, afin de conserver le germe catholique. Les Abénakis, plus voisins de Boston que de Québec, avaient intérêt à lier des relations commerciales avec les Anglais; le désir de conserver intact le dépôt de la Foi, leur fit repousser comme une mauvaise pensée toute démarche qui les rapprocherait des ennemis de l'Église et de la France. Les Anglais accusaient les Jésuites de cet éloignement; le Père Rasle surtout leur était odieux. Le 23 août. 1724, ils tombent à l'improviste sur la bourgade de Narantsoak, où le Jésuite réside. Rasle

sait que les Anglais en veulent à sa vie, il s'offre à leurs coups, afin de préserver ses Néophytes; il périt dans les tourments. Cet attentat aurait exaspéré des hommes civilisés, les Abénakis étaient encore à demi sauvages, ils n'écoutent que leur vengeance. Peu d'heures après, l'incendie et la mort descendent sur les habitations anglaises. Les Abénakis virent s'écouler de longs jours dans les joies de la primitive Église; sous la houlette des Jésuites, ce troupeau ne connut ni les passions ni le besoin. Lorsque, en 1756, le marquis de Montcalm vint tenir tête à l'armée de lord Loudon et combattre les généraux Wolf et Abercromby, il trouva toujours au premier rang les intrépides Néophytes, dont le Père Charles Germain excitait le courage.

Le Haut et Bas-Canada était livré aux enfants de Loyola; ils en firent une contrée heureuse par la pureté de ses mœurs et par un charme d'innocence qui étonna toujours les chefs militaires de la colonie. Pour acclimater la vertu chez ces peuples, voyageurs par goût et par nécessité, les Missionnaires se condamnaient à des courses sans terme, à toutes les misères de la vie sauvage, à toutes les intempéries des saisons. Ils précédaient ou ils accompagnaient le drapeau de la France. En 1700, d'Iberville fonde un établissement vers l'embouchure du Mississipi, le Père Paul du Rhu élève un grand Calvaire sur les rives du fleuve. Les Français prenaient possession du pays en y bâtissant une forteresse, les Jésuites s'emparaient des âmes en leur révélant les mystères de la Croix. Le Père Marquette avait découvert ce sol fécond, d'autres Jésuites y apportèrent la semence de l'Évangile. Paul du Rhu, à la Basse-Louisiane, commence une réduction; les Pères Joseph de Limoge et Dongé accourent partager ses labeurs. La confiance que les

Sauvages accordaient aux Missionnaires était un éternel sujet d'anxiété pour les directeurs de la Compagnie des Indes occidentales; on force les Jésuites à déserter leurs résidences du Mississipi. Quelques années s'écoulèrent ainsi; mais l'absence des Robes Noires causait de vifs regrets aux naturels. En 1725, le Père de Vitré rentre à la Nouvelle-Orléans avec une colonie de Jésuites, dirigée par Beaubois, de Ville et Le Petit. Leur sang devait fertiliser cette terre; le 28 novembre 1729, le Père du Poisson, qui évangélise les Akansas, pénètre chez les Natchez, sa tête tombe sous la hache d'un des chefs de cette tribu. Le 11 décembre de la même année, le Père Souel, qui a reproché à d'autres leurs crimes et leurs excès, périt par leurs mains dans un jour de colère.

Les Jésuites accompagnaient les Catéchumènes dans leurs guerres; ils se constituaient prisonniers pour escorter les vaincus dans la captivité; ils partageaient leurs bûchers afin de les aider à bien mourir. En 1736, le Père Sénat fut brûlé par les Chicachas, parce qu'il n'avait pas voulu cesser d'exhorter à la mort les victimes que le feu allait dévorer. La Louisiane arrosée du sang des Missionnaires ne tarda pas à devenir chrétienne. Les Jésuites étendirent leurs conquêtes pacifiques sur l'Ohio; peu à peu ils assouplirent au joug de la famille et des lois ces peuplades errantes. Ils les avaient trouvées sauvages, ils en firent des hommes.

De terribles, de glorieuses révolutions ont achevé leur œuvre. L'Angleterre d'un côté, les États-Unis d'Amérique de l'autre, ont changé la face du pays. Il n'y avait plus de Jésuites pour lutter à armes égales contre les diverses sectes qui envahissaient le Canada; le Catholicisme s'éteignit dans les coeurs. La guerre et la liberté,

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