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pour se faire instruire. Arlet fonde la bourgade de SaintPierre au quatorzième degré de latitude australe. Par une patience et une douceur à toute épreuve il apprivoise ces natures rebelles: il abolit la pluralité des femmes. En soignant, en aimant leurs petits enfants, il révèle à leurs cœurs le sentiment de la maternité; quand il s'est entouré d'un certain nombre de néophytes fervents, il les dissémine chez les autres tribus pour préparer la voie au Christianisme.

Cette même année 1697 vit encore s'ouvrir la Mission de Californie. Les Pères Picolo et Salvaterra y abordent sans autres armes que la Croix. Les Californiens les repoussent d'abord comme ennemis de leur indépendance; la première fureur calmée, ils se laissent gagner par les enseignements des Jésuites. A peine ces derniers ont-ils réuni autour d'eux quelques catéchumènes qu'ils se dirigent l'un vers le nord, l'autre vers le midi, et qu'ils courent à la découverte de nouvelles tribus. Le Ciel bénit leurs travaux. Le Père d'Ugarte, qui a rejoint Salvaterra, assouplit de son côté les naturels de Trippué et de Loppu. Enfin les trois Pères formèrent de la Californie quatre Missions. Ils firent là ce qu'ils faisaient partout ils civilisèrent les Sauvages par le Christianisme; ils leur apprirent le secret de l'agriculture et du travail. Le succès couronna encore leur œuvre; mais l'outrage vint à sa suite, et Robertson, dérogeant à ses habitudes d'impartialité, prétend que les Missionnaires 'de Californie', « afin de conserver sur leurs néophytes une autorité absolue et sans partage, avaient grand soin de laisser une mauvaise idée du pays en représentant le climat comme si malsain, le sol comme si stérile, que

'Histoire de l'Amérique, par Robertson.

le seul zèle de la conversion des Indiens avait pu les déterminer à s'y établir.

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Pour donner plus de poids à ses assertions, l'écrivain anglican s'appuie sur le Père Vénégas, l'un de ces Jésuites à qui la géographie doit tant de lumières; mais les travaux du Père sont inédits, et c'est seulement sur ses notes qu'en 1757 la Compagnie de Jésus fit paraître à Madrid l'Histoire de la Californie et de sa conquête temporelle et spirituelle. Robertson se trompait en s'étayant du témoignage de Vénégas; il se trompe encore lorsqu'il affirme que les Pères de l'Institut écartaient les Européens par des récits mensongers; car, en mettant de côté la version des Missionnaires, il n'en reste pas moins établi que la Californie était une terre stérile. Le baron de Humboldt, dans son Essai politique sur la Nouvelle-Espagne, n'ose pas, quoique Protestant luimême, se prêter à cet esprit d'injustice. Il a vu les lieux, et il raconte':

& Les établissements que les Jésuites firent dans la vieille Californie depuis l'année 1683 donnèrent occasion de reconnaître la grande aridité de ce pays et l'extrême difficulté de le cultiver. Le peu de succès qu'eurent les mines qu'on exploita à Sainte-Anne, au nord du cap Palmo, diminua l'enthousiasme avec lequel on avait -préconisé les richesses métalliques de la presqu'île. Mais -la malveillance et la haine qu'on portait aux Jésuites firent naître le soupçon que cet Ordre cachait aux yeux du gouvernement les trésors que renfermait une terre .si anciennement vantée. Ces considérations déterminėrent le visitador don José de Galvez, que son esprit che

Essai politique sur la Nouvelle-Espagne, par M. de Humboldt, t. 11, p. 261. M. de Humboldt place la date de l'entrée des Jésuites en Californie, tantôt en 1642, tantôt en 1683. Il y a erreur, car, d'après les manuscrits de l'Ordre, ce n'est qu'en 1697 que commença cette Mission.

valeresque avait engagé dans une expédition contre les Indiens de la Sonora, à passer en Californie. Il y trouva des montagnes nues, sans terre végétale et sans eaux; des roquettes et des mimoses arborescentes naissaient dans les fentes des rochers. Rien n'annonçait l'or et l'argent que l'on accusait les Jésuites d'avoir tiré du fond de la terre; mais partout on reconnut les traces de leur activité, de leur industrie et du zèle louable avec lequel ils avaient travaillé à cultiver un pays désert et aride. Les voyages intéressants de trois Jésuites, Eusèbe Kulin, Maria Salvatierra et Jean Ugarte, firent connaître la situation physique du pays. Le village de Loretto avait déjà été fondé, sous le nom de Présidio de San-Dionisio, en 1697. Sous le règne de Philippe V, surtout depuis 1744, les établissements espagnols en Californie devinrent très-considérables. Les Pères jésuites y déployèrent cette industrie commerciale et cette activité auxquelles ils ont dû tant de succès, et qui les ont exposés à tant de calomnies dans les deux Indes. En très-peu d'années ils construisirent seize villages dans l'intérieur de la presqu'île."

Tandis que les Jésuites portaient la bonne nouvelle du salut à tant de nations, et qu'il les façonnaient à la véritable liberté en les initiant aux bienfaits de la morale chrétienne, les Pères Bohm, Doctili et Sepp s'avancent vers le pays des Tscharos. Là, comme dans beaucoup de ces contrées, l'homme avait perdu jusqu'à la dernière trace de l'humanité. Tout était barbare en lui; mais les Tscharos avaient, par respect pour leurs morts, introduit une coutume qui les signalait à l'attention des Missionnaires. Quand ils perdaient un de leurs proches, ils se coupaient les extrémités des mains et des pieds. Cet usage faisait loi. A peine les Jésuites se furent-ils

assis au foyer de l'hospitalité qu'ils s'aperçurent de la surveillance inquiète dont ils étaient l'objet. Ils ignoraient l'idiome du pays: leur interprète les trahissait en dénaturant le sens de leurs paroles et en les rendant odieux. Les Pères ainsi exposés surent se soustraire à la première fureur des Tscharos; mais ils ne tardèrent pas à revenir: alors ces tribus se laissèrent peu à peu gagner à l'Évangile. La peste sévit vers le même temps. Sepp réunit les malades dans une maison qu'il ouvre à toutes les douleurs. Il révèle ce que c'est que la charité: il calme leurs souffrances; et, quand son dévouement a neutralisé le fléau, la gratitude fait encore plus de Chrétiens que la parole. Le nombre des néophytes s'accrut en de telles proportions que, la résidence de SaintMichel ne pouvant les contenir tous, Sepp en décida une partie à le suivre. Une autre réduction fut fondée dans un pays fertile à l'est de Saint-Michel. Sous la direction du Jésuite, les hommes commencèrent à bâtir des maisons et à ensemencer les terres. Une année ne s'était pas écoulée que les femmes et les enfants accouraient s'installer dans leurs demeures. Ces nations étaient industrieuses, mais peu intelligentes; elles imitaient avec une dextérité admirable tous les objets d'art. Sepp les applique à ces travaux sédentaires qui lui permettent de développer leur raison abâtardie et de les amener aux idées de la famille et du Catholicisme.

Vers le commencement du dix-huitième siècle, l'Amérique méridionale était sillonnée en tout sens par les Missionnaires; mais chaque année on découvrait quelque peuple qui n'avait pas pu recueillir leurs enseignements. Sur la fin de 1708 les Pères Lombard et Ramette s'ouvrent les déserts de la Guyane, ils en parcourent les points habités. Afin de se populariser parmi les indigè

nes, ils s'attachent à leur rendre les services les plus humiliants: ils se font leurs esclaves, ils les suivent dans. leurs courses vagabondes, ils s'efforcent de saisir leur idiome pour le maîtriser et arriver à leur inculquer les principes de l'Évangile. Après plus de trente mois passés dans de si pénibles labeurs, Lombard et. Ramette s'aperçoivent que l'esprit de ces nations est impossible à fixer, et que de la veille au lendemain elles ont complétement oublié tout ce qu'ils imposent à leur mémoire. Les voyages et les maladies avaient altéré les forces de Ramette le Père Crossard le rappelle à Cayenne. Lombard était seul, sans appui, presque sans espérance; il ne se décourage cependant pas. Pour faire fructifier son apostolat, il forme le dessein de réunir autour de lui les Sauvages au lieu de se jeter dans d'éternelles pérégrinations. Avec deux nègres et quelques naturels, dont il fait ses premiers catéchumènes, il défriche la terre afin qu'elle produise du manioc, du blé des Indes et du maïs qui assureront la subsistance de ses futurs disciples. Il construit une chapelle et une grande case. Lorsque tout est disposé, le Jésuite se met en route: il va demander aux diverses peuplades de lui confier quelques-uns de leurs enfants. Lombard était aimé de ces tribus éparses: chacune d'elles se montra favorable à son vou. Le Père avait des élèves : il leur enseigna la langue française; il leur apprit à connaître, à servir Dieu; il les façonna peu à peu; il les enflamma du zèle dont il était animé. Il les avait reçus sauvages, il les rendait à leurs familles chrétiens et apôtres; il en redemandait d'autres. A peine de retour dans les tribus, ces enfants, que l'éducation transformait en hommes, devinrent pour tous, un objet d'admiration. Ils dominaient par la supériorité de leur intelligence, ils se firent chérir par leur modestie.

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