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multitude qui prétend avoir jugé légale ment. « L'envie eft plus animée que ja» mais contre vous, dit-il à Ménécrate. » Votre condamnation eft irrévocable: » mais mon amitié fe roidit & s'augmen »te avec votre in fortune: venez, daignez » me fuivre.» Ménécrate accompagne Zénothémis qui le conduit à fam aifon. Le vieillard ne peut s'empêcher de soupirer, en confidérant cette demeure & les richeffes qu'elle renferme. Cette image lui rappelle fa première fituation; il veut fe retirer. «Nous ne nous quitterons plus, lui dit le jeune homme en le retenant » avec transport, & en le ferrant dans les » bras; vous voyez votre afyle, votre » fortune; du moins nous partagerons » l'un & l'autre. Que me propofez-vous, » interrompt Ménécrate? je fens tout le » le prix de cette offre ; mais votre deffein » ne feroit pas d'ajouter à mes peines?Qa'entends-je ? —Mon ami, les bienfaits,quelle que foit la main qui les dif» penfe, traînent toujours l'humiliation après eux; notre exiftence perd de fa dignité quand nous la devons au fe» cours d'autrui. L'amitié.... » moins pure dès l'inftant que la recon» noiffance vient mêler fon tribut à des

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» fentimens libres; je veux vous aimer » fans intérêt. Quoi! l'indigence... » Penfez vous que je n'aie pas appris à la fupporter? Tous les hommes naiffent indigens: la richeffe leur eft une fituation étrangère. L'adverfité n'eft point » le malheur véritable; confervez moi » cet honneur qu'on veut m'enlever; impofez filence à la calomnie: voilà les maux auxquels le courage le plus ferme » a de la peine à réfifter. Encore une fois, » que m'importent des biens, des palais? » Jeune homme, je n'ai befoin que de » mourir ; c'est un cercueil qu'il me faut; » c'est l'unique préfent qu'il me foit permisd'accepter de votre amitié généreufe; je vous le redis : tout autre me bleffe»roit... Je n'afpire qu'à marier ma fille, » & je fuivrai après ce que m'ordonnent » mon cœur & ma deftinée.» Cydipe, c'eft le nom de la fille du malheureux fênateur, avoit été demandée depuis longtems en mariage par Myfias pour fon fils Eudimaque. Mais ce Myfias reffembloitan commun des hommes. Lorfqu'il eut appris l'infortune de Ménécrate, il ne s'occupa qu'à chercher des prétextes pour retirer fa parole. Cette froideur de Myfias mit le comble aux chagrins de Ménécrate. «Le

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» malheur ne m'a que trop éclairé, difoit-il à fon cher Zénothémis dans l'effufion de fon cœur: Myfias n'eft plus >> mon ami; ma fille ne fera point l'époufe d'Eudimaque ; je ne verrai » point former ces nœuds, la feule espérance, l'unique confolation qui puffent » m'attacher à la vie; je mourrai; & qui eft-ce qui restera à ma fille? mon infor» tune, le fouvenir de ce qu'elle a été, le » tableau effrayant de ce qu'elle fera; » mən nom, ma race s'éteindront avec Cydipe. Mon ami, l'homme demande » des fucceffeurs, & l'on ne s'accoutume point à l'idée affligeante qu'on ne revivra point dans une poftérité qui femble » tromper la mort & perpétuer notre » exiftence; Ménéctate fera détruit tout » entier. Et qui aujourd'hui voudroit » être l'époux de ma fille? Tout me » trahit, m'abandonne... Peut-être fui»vrez-vous l'exemple de Myfias... Ah! pardonnez mon cher Zénothémis pardonnez. Voilà où conduit la difgrace! on offenfe l'ami le plus cher... Ménécrate, en achevant ces mots, étoit tombé dans le fein du jeune homme & pleuroit amèrement. «Mon père, lui dit Zénothémis comme revenu d'une pro

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» fonde rêverie, calmez cette douleur qui m'accable; vos larmes portent la inort dans mon ame. Oui, l'adverfité nous rend foupçonneux, défians, injuftes; Myfias vous aura paru différent » de ce qu'il peut être; vous me difiez qu'il vous aimoit : le cœur change-t'il » en fi peu de tems? Je vous quitte pour vous rejoindre bientôt. Ménécrate

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le comble du malheur, eft de perdre » l'efpérance.» Zénothémis, impatient d'exécuter fon deffein, fe rend chez Myfias. Mais que peuvent les fentimens d'honneur fur une ame foible & pufillanime? Zénothémis le quitte brufquement & va retrouver Ménécrate qu'il embrafle avec tranfport. « Mon refpec n table ami, oublions la terre, les hom»mes; efforçons-nous de nous fuffire à nous mèmes. Que Zénothémis vous » tienne lieu de tout.»

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Le vertueux jeune homme reçoit une nouvelle bleffure dans la perfonne de fon ami. Il apprend qu'Eudimaque, pour s'excufer de manquer à fa parole, répand des bruits injurieux à celle qui lui avoit été promise. Ah! fi Zénothémis eût été libre, avec quel empreffement n'auroit-il pas cherché à remplacer Eudymaque !

avec quelle fatisfaction n'auroit - il pas calmé l'inquiétude de fon ami fur le fort de fa fille! mais il avoir donné fa foi à Agathée, niéce du fénateur Hermogène. Leur mariage avoit été préparé, en quelque forte, dès le moment même de leur naiffance. Les deux familles s'étoient engagées réciproquement à cette union qui devoit refferrer leur intimité. La jeune perfonne méritoit tous les vœux de Zénothémis, qui reflentoit le pouvoir de fes charmes, & en effet c'étoit la vertu même fous les traits de la beauté. Zénothémis, quelle que fût fon ardeur, aimoit peut être encore moins qu'il n'étoit aimé. Agathée s'attachoit tous les jours davantage à fon amant. Les rares qualités de Zénothémis, fon ame fenfible & fublime fortifioient cet amour dont cette femme, l'honneur de fon fexe, s'applaudiffoit; elle n'héfitoit point à faire l'aveu de fa paffion; un fentiment noble & pur ne connoît pas ces déguifemens que le vice a imaginés & qu'il a décorés du ton impofant de bienféances. Agathée voyoit d'un œil fatisfait s'approcher le terme prefcrit pour fon hymen ; loin de s'offen. fer des larmes que Zénothémis donnoit au fort de Ménécrate, elle le pleuroit

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