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1

MERCURE

DE FRANCE.

AOUST, 1773.

PIECES FUGITIVES

EN VERS ET EN PROSE.

REPONSE de M. de la Harpe aux vers de M. L. C. de **, inférés dans le Mercure de Juillet.

VOUS

ous avez, fur un noble ton,
Chanté l'aftre de notre Europe, *
Et jusqu'à mon humble horizon
Vous baillez votre télescope.
Vous êtes comme Salomon,

Vous allez du cèdre à l'hyfope.

*M. de Voltaire, à qui le mênie auteur avait

adreflé une épître.

A iij

Ainfi le peintre des héros,
Apelle, au vainqueur de l'Afie,
Confacrait fes premiers travaux,
Et deffinait de fantaifie

Un

page à la mine étourdie
Qu'immortalifoient les pinceaux.
Quand Pierre vint dans cet Empire
Du fond de vos climats glacés,
A peine en faviez-vous aflez
Pour nous connoître & pour nous lire,
Et déjà vous nous furpaflez.
Chantez. Vous êtes à la fource
Des grands exploits, du grand talent.
La Gloire au plus haut de sa course
Roule fon char étincelant

Au tour des fept aftres de l'Ourfe. ⠀
Vous voyez l'Ottoman cruel
Trembler devant votre Génie,
Le pavillon de la Ruffie

Commande aux mers de l'Archipel.
L'Amour qu'à Bizance on enchaîne
Sous le plus lugubre attirail,
Croyant fa vengeance prochaine,
Entend le canon d'une Reine
Tonner fous les murs du Sérail.
Célébrez tout ce que vous faites ;
Chantez la gloire & vos grandeurs.
Avec les lyres des neuf Sœurs
Mars peut accorder fes trompettes;

Et ces exploits des Souverains,
Qui troublent un peu les humains
Font les héros & les poëtes.
Pour moi, fi je lavais toucher
Le luth de Tibulle & d'Horace,
Si, comme l'Albane ou Boucher,
J'étais né pour peindre une Grace,
De ces artistes excellens,

Si, par une faveur divine,
Je réuniflais les talens,

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Je vous peindrais notre Dauphine.
Je voudrais chanter dignement
Ces traits, cet éclat de jeuneffe,
Cet air de nymphe ou de déefle,
Ce port & ce maintien charmant,
Ce front où la candeur tracée
S'unit à l'aimable enjoûment
Ces yeux où brille également
La finefle de la penféé
Et la douceur du fentiment.
Je peindrais la publique ivreffe,
Et ces cris, ces transports fi doux
Au tour de l'augufte Princefle,
Et les larmes de son époux
Larmes de joie & de tendrelle,
Larmes qui du bonheur de tous
Sont la plus touchante promeffe;
Et, fi vous pouviez comme nous
Voir ce fpectacle d'alegreffe,
Quoique le fort ait fait pour vous
Sur le Danube & dans la Gréce,
Vous pourriez être encor jaloux.

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