صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني
[ocr errors]

»tement déclaré, quelque plaifir que j'eufle à jouir de l'aimable confufion qu'il produiroit. Je ferai chez vous dans » trois jours. Si vous recevez ma vifite, »nous ne nous féparerons plus; fi vous » la refufez, je ne vous verrai jamais.

Flavilla reçut cette lettre, la lut, en fut indignée, & donna ordre de ne plus laiffer entrer Clodion. Mais cette lettre fervoit de trophée à sa vanité : elle fut empreffée de la faire lire à fa mère & plufieurs femmes de fa connoiffance, & elle témoignoit toute l'alegreffe d'unhéros, qui du haut de fon chat de triomphe, promène pompeufement un ennemi vaincu Elle n'avoit fuivi qne fon devoir; elle crut donner une preuve de fa vertu; reprocher à la cenfure fon injuftice paffée, & lui impofer filence pour l'avenir.

Les fêtes publiques, les bals, les fpectacles emportèrent bientôt jufqu'au fouvenir de ces petits événemens. L'on donna quelque tems après une pièce nou→ velle; il fallut la voir, & y être vue. Fla villa attita plus particulièrement les re gards d'un jeune homme qui étoit,depuis peu, de retour de fon premier voyage au Eevant. Travello, c'est le nom du gen1 ilhomme, avoit cinq frères,dont il étoir

le plus jeune. Son père lui avoit acheté un vailleau, & ménageoit à fes enfans une fortune immenfe qu'ils devoient tous partager également. Travello vit Flavilla & connut l'amour, mais l'efpérance n'ofoit le fuivre. L'éclat qui environnoit Flavilla l'éblouiffoit trop, peur qu'il fe flattât d'en approcher, & la curiofiré feule Jui confeilla de s'informer de fon nom & de fa naiffance. Il apprit bientôt fa firmation. L'efpoir tentra dans fon ame, & il vit bien qu'il lui étoit permis de prétendre au bonheur qu'il defiroit.

La difficulté étoit de s'introduire fans titre dans une maifon où il étoit inconnu.. Ses intentions étoient pures; & bien différent de celui de Clodion,fon amour étoir trop fincère pour n'être pas honnête. Dans l'ardeur de fa paffion, il l'avoua par une lettre à la mère de Flavilla. Il lui fit un récit exact de fa fortune & de les efpéFances, lui demanda la permiffion de rendre vifite à fa fille & de briguer l'avantage de lui plaire. Cette mère prudente fit des informations qui fe trouvèrent conformes à la lettre, & elle invita Travello à venir s'expliquer lui-même. Il vint avec tout l'empreffement d'un amant. On lui repréfenta que Flavilla n'avoit point de

fortune, & que la fienne dépendoit de la volonté de fon père; qu'il s'expofoit à la perdre par un mariage qui cependant la rendoit encore plus néceffaire qu'il falloit donc obtenir fon confentement avant que les vifites fréquentes, & une convenance récipropre ferraffent inutilement des liens qu'il feroit plus difficile de rompre. Ce confeil étoit falutaire : Travello' héfitoit pour y répondre, lorfque Flavilla' entra dans l'appartement. Sa préfence augmenta encore le trouble du jeune homme. Flavilla le reçut avec politeffe. Lx converfation s'anima, & le plaifir de fe' voir s'accrût avec l'efpérance de plaire. Les formalités d'une première entrevue étoient remplies, & Travello ne perfa plus,que les aufpices de la mère fuffent nécellaires à fon fuccès.

Ses vifites furent fouvent répétées, & chaque moment lui rendoit les délais plus infupportables. I penfoit bien que fon' père feroit contraire à fes defirs; & cette' idée l'affligeoit : mais étant déterminé à fe fatisfaire, ilconclut, avec la prudence ordinaire dans ces circonftances, que de deux malheurs, celui de fe marier fans le confentement de fon père étoit moins affligeant que celui de fe marier contre

fon confentement. Un foir, après avoir paffé la journée dans toute la chaleur du fentiment, nos deux amans exécutèrent ce projet que Travello avoit propofé dans l'excès de fa paffion, & auquel Flavilla confentit dans l'excès de fon imprudence, & ils furent mariés dans les premiers jours de Mai.

Lorfque le froid de la réflexion eut fuccédé aux premiers feux de l'amour, Travello fentit qu'il devoit être le premier à inftruire fon père de fa nouvelle alliance; mais il n'eut pas le courage d'aller lui-même lui avouer fa faute & fon bonheur. 11 lui écrivit dans les termes les plus propses à l'attendrir, & lui demanda la permiffion de lui préfenter fon époufe, & de recevoir à fes genoux la bénédiction paternelle qui pouvoit feule mettre le comble à fa félicité.

Ce vieux gentilhomme avoit aimé le plaifir, & connoiffoit très bien fa ville. Il avoit fouvent entendu proner Elavilla par des libertins de qualité, & l'avoit vue dans les promenades publiques. Sa beauté, l'élégance de fa parure, la foule de fes admirateurs, la légéreté de la conduite, & toutes les circonftances de fa fituation avoient concouru à rendre fon caractère

fufpect, & il étoit difpofé à en juger avec d'autant moins d'indulgence qu'elle l'avoit offenfé. Il regarda fon fils comme un homme perdu; & bien loin de foulager un malheur irréparable, il résolut de l'angmenter encore. Telle eft la conduite des pères. Il croient donner des preuves de leur fageffe & de leur amour, en punif fant des fils, lorfqu'ils ne devroient plus que les plaindre, & ils ceffent d'être pèa res parce que leurs enfans ceffent d'être fages. Auffior qu'il eut lu la lettre de Travello, il s'écria; dans les tranfports de fa colère,que fon fils étoit un infenfé, qui s'étoit laiffé féduire par les artifices d'une' femme fans mœurs; qu'elle n'avoit même daigné le tromper que pour mafquer fon déshonneur & fe garantir de la prifon, en le chargeant de fes enfans & de fesdettes. Dans une courte réponfe qu'il ne fit, qu'afin d'exhaler fa fureur,il lui dit que s'il n'eût pris Flavilla que pour fa maîtreffe, il auroit fermé les yeux; & qu'il auroit même payé les folles dépenfes, s'il s'étoit dérangé pour elle; mais qu'il ne lui pardonneroit de fa vie un mariage fi ridi cule; qu'il ne lui laifferoit pas un fchel ling de fon bien, & qu'il étoit déterminé ele voir jamais. Travello; plus irrité

By

« السابقةمتابعة »