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bre des laboureurs & des artifans groffiers que fuppofe la culture, se proportionne toujours au nombre des confommateurs, l'exil des ouvriers de luxe entraînera donc à fa fuite celui de beaucoup d'agriculteurs. Les hommes opulens fuyant avec leurs richeffes chez l'étranger, feront fuivis dans leur exil d'un certain nombre de leurs concitoyens & d'un grand nombre de domeftiques. La France alors fera déferte. Quels feront fes habitans? Quelques laboureurs dont le nombre depuis l'invention de la charrue fera bien moins confidérable qu'il l'eût été lors de la culture à la beche. Or dans cet état de dépopulation & d'indigence, que deviendroit ce Royaume? Porteroit-il la guerre chez fes voifins? Non il feroit fans Argent. La foutiendroit-il fur fon territoire? Non: il feroit fans hommes. D'ailleurs la France n'étant pas comme la Suiffe défendue par des montagnes inacceffibles, comment imaginer qu'un Royaume dépeuplé, ouvert de toute part, attaquable en Flandre & en Allemagne, pût repouffer le choc d'une Nation nombreufe? 11 faudroit, pour y réfifter, que les François par leur courage & leur difcipline, euffent fur leurs voifins le même avantage que les Grecs avoient jadis fur les Perfes, ou que les François confervent encore aujourd'hui fur les Indiens. Or nulle Nation Européenne n'a cette fupériorité fur les autres.

La France dévaftée & fans Argent feroit donc expofée au danger prefque certain d'une invafion. Eft-il un Prince qui voulût à ce prix bannir les richeffes & le luxe de fon Etat?

Il n'eft point de pays où les richeffes fe fixent & puiffent à jamais se fixer. Semblables aux mers qui tour-à-tour inondent & découvrent différentes plages, les richeffes après avoir porté l'abondance & le luxe chez certaines Nations, s'en retirent pour se répandre dans d'autres contrées. Elles s'accumulerent jadis à Tyr & à Sydon, pafferent enfuite à Carthage, puis à Rome. Elles féjournent maintenant en Angleterre. S'y arrêterontelles? Je l'ignore. Ce que je fais; c'eft qu'un peuple enrichi par fon commerce & fon induftrie, appauvrit fes voifins & les met à la longue hors d'état d'acheter fes marchandises.

C'eft que dans une Nation riche l'Argent & les papiers représentatifs de l'Argent, fe multipliant peu-à-peu, les denrées & la main d'œuvre enchériffent. La main d'œuvre devenue très-chere chez une Nation riche, cette Nation tire plus de l'étranger qu'elle ne lui porte. Elle doit donc s'appauvrir en plus ou moins de temps.

C'eft que, toutes chofes d'ailleurs égales, la Nation opulente ne pouvant fournir fes denrées & marchandifes au prix d'une Nation pauvre, l'argent de la premiere doit infenfiblement paffer aux mains de la feconde, qui devenue opulente à fon tour, fe ruine de la même maniere.

Telle eft peut-être la principale caufe du flux & du reflux des richesses dans les Empires. Or les richeffes en fe retirant d'un pays où elles ont féjourné, y dépofent prefque toujours la fange de la baffeffe & du defpo

tifme. Une Nation riche qui s'appauvrit, paffe rapidement du dépériffement à fa deftruction entiere. L'unique reffource qui lui refte, feroit de reprendre des mœurs mâles, les feules convenables à fa pauvreté. Mais rien de plus rare que ce phénomene moral. L'hiftoire ne nous en offre point d'exemple. Une Nation tombe-t-elle de la richeffe dans l'indigence? Cette Nation n'attend plus qu'un vainqueur & des fers. Il faudroit, pour l'arracher à ce malheur, qu'en elle l'amour de la gloire pût remplacer celui de l'Argent. Or des peuples anciennement policés & commerçans font peu fufceptibles de ce premier amour, & toute Loi qui refroidiroit en eux le défir des richeffes, håteroit leur ruine.

Dans le corps politique comme dans le corps de l'homme, il faut une ame, un efprit qui le vivifie & le mette en action.

ARGENT

C'EST l'argent que

DE BAN QUE.

'EST l'argent que les Négocians ou autres dépofent dans les tréfors publics que l'on nomme Banques. Cet argent eft ordinairement plus cher que l'Argent courant, par la facilité qu'il y a de faire des paiemens confidérables avec les reconnoiffances de la Banque, ou les écritures en Banque comme à Amfterdam, fans être fujets aux frais de transport d'Argent, & fans en courir les rifques; & parce qu'auffi ces Banques ne recevant que les pieces d'or & d'argent du meilleur alloi, on eft für que l'on fera payé avec ces mêmes efpeces; au lieu que les lettres de change payables en Argent courant, font fouvent foldées avec toutes fortes de monnoies fur lefquelles il y a à perdre.

Voyez BANQUE.

ARGENT DE PERMISSION.

C'EST ainfi que l'on nomme l'Argent de Change dans la plupart des

Pays-Bas François ou Autrichiens. Cet Argent differe de l'Argent courant. Les cent florins de Permiffion valent huit cens florins & un tiers courant. C'est à cette mesure que fe réduisent toutes les remifes qu'on fait en Pays étrangers.

ARGENT EN FEUILLES, celui qui s'emploie dans diverfes compofitions de Pharmacie, dans des poudres compofées, dans les confections d'Hyacinthe & d'Alkermès.

L'ARGENT

ENT en feuilles fert encore communément à couvrir ou envelopper les pilules & les bols, ce qui diminue le dégoût & en facilite la déglutition. C'est un crime puniffable, & de la plus grande conféquence de fubftituer à ces feuilles d'Argent, des feuilles d'étain battu. Nous par

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lons ici de cette fraude, digne de l'attention de la Police, parce qu'elle a été plufieurs fois découverte dans la confection d'Hyacinthe & autres remedes femblables qui fe débitent dans les campagnes à vil prix, comme compofition foraine; parce que, dit-on, le commerce s'en fait librement dans les foires. Cet abus devient encore plus terrible, lorfque les feuilles d'or d'Allemagne, ou d'auripeau, qui ne font autre chofe que du cuivre battu, y font employées au lieu d'or fin pour en faciliter l'abondance & la vente. Ce font-là, dit le célébre Rouelle, de ces abus qu'il faut crier jufques fur les toits pour se faire entendre au loin. Bien plus, je fuis peutêtre le premier qui ai remarqué que le féjour de trois à quatre mois que fait ordinairement un colporteur, ou droguifte ambulant, dans huit à dix lieues de pays pour y vendre une charretée de pareilles drogues foraines, fuffit bien pour y répandre le germe de ces fievres colliquatives, de ces coliques d'entrailles, de ces flux de fang, & autres maladies prétendues épidémiques, qui ravagent en peu de temps tout un pays, & contre lefquelles les Médecins les plus zélés, les plus vigilans, les plus habiles, font d'autant moins aguerris, que la caufe primitive en eft incertaine ou inconnue, & s'attribue le plus fouvent foit aux farines & autres alimens, foit à l'air qu'on y refpire. On aura peine effectivement à fe perfuader, fi on n'eft pas Chymifte, jufqu'à ce qu'on y ait fuffifamment réfléchi, que les moyens les plus louables d'abondance & d'utilité publique, & le prétexte de faciliter le commerce, tournent ainsi, plutôt même par l'ignorance que par la mauvaise foi des vendeurs, au préjudice de tant de citoyens utiles, qui en font les victimes d'autant plus à plaindre en ces cas, que, conduits par l'appas du bon marché, ils paient toujours bien cher des remedes qui ne font que des poifons, & qu'ils n'appellent, ou plutôt qu'ils n'invitent à leur fecours, que lorfque le mal eft à fon dernier période. Ce que je viens de dire, étant appuyé fur des faits non équivoques, mérite toute l'attention des Médecins ; & ce n'eft pas du tout l'intérêt de l'Apoticaire qu'on doive ici apprécier ou balancer, lorfqu'il s'agit d'un point auffi effentiel, & qui tient de fi près à l'honneur de la Médecine, à fes progrès, & à la confervation des peuples. Si les Grands font moins expofés à fe reffentir de ces abus pernicieux, que font-ils en comparaison de ce peuple immenfe dont les campagnes fourmillent, & dont la vie eft également chere au Souverain? On ne peut trop fe récrier fur la facilité qu'il y a à imiter la couleur, la confiftance, l'odeur même des médicamens, & à les falfifier fécretement, foit hors des villes, foit dans les lieux privilégiés, & dans l'enceinte même des Capitales; & quand les peines afflictives pourroient obvier à ces fraudes multipliées, les raifons d'abondance, & la multiplicité de gens de tout fexe & de tous états, qui, fans talens & fans études, & pour de l'Argent, exercent la Pharmacie même fans être affujettis à aucuns examens ni vifites, feront toujours de grands obftacles contre la réforme de ces abus funeftes. Enfin en admet

tant la probité & la droiture la plus exacte chez les prétendus droguiftes ou colporteurs, il est toujours certain que la feule impéritie dans la préparation & la compofition des remedes, dans le choix des ingrédiens, & des inftrumens néceffaires pour opérer, que cette ignorance, dis-je, fuffit pour empoisonner en peu de temps de la meilleure foi du monde, & par le faux appas du vil prix, une Province entiere.

COMME

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IME il a plu aux Géometres de divifer le cercle en 360 parties, il a plu aux fondeurs de divifer l'Argent en douze parties, appellées Deniers, chacun de vingt-quatre grains. L'Argent qui a une douzieme partie d'alliage eft à onze deniers de fin : c'eft le titre ou loi des écus en France. L'Argent au deffous de fix deniers de fin s'appelle Billon, c'est la matiere des fous de France. Ce Billon fe nomme auffi Argent bas. L'Argent fin eft l'Argent à douze deniers ou au plus haut titre auquel il puiffe être. porté. L'Argent faux n'eft que du cuivre rouge couvert de feuilles d'Argent. Argent-le-Roi eft celui qui eft au titre auquel les Ordonnances de France Pont fixé pour les ouvrages d'orfevrerie & de monnoyage. Par l'article III de l'Edit de Henri II, Roi de France, il fut défendu de travailler de l'argent qu'il ne fût à onze deniers douze grains de fin au remede de deux grains. Aujourd'hui on appelle Argent-le-Roi celui qui passe à la monnoie & dans le commerce à cinquante livres un fou onze deniers, & qui eft au titre d'onze deniers dix-huit grains de fin.

LE

ARGO S.

E Royaume d'Argos, un des premiers qui fe foient formés dans la Grece, doit fa fondation à Inachus. L'ancienne tradition faifoit ce Prince fils de l'Océan & de Thétis: cela veut dire qu'il étoit venu par mer dans la Grece. Il y a bien de l'apparence qu'Inachus fortoit de Phénicie; fon nom l'indique affez. Ce Prince s'établit dans le Péloponefe 1822 avant Jesus-Chrift. Les fuites de cet événement ne nous font pas bien connues. On voit feulement qu'Inachus eut de fon mariage, avec Meliffa, fa fœur, deux enfans, Phoronée & Egialée. Le premier, à titre d'aîné, hérita du

Royaume d'Argos. Egialée fonda, dans le Péloponefe, un petit Etat, que depuis on a appellé le Royaume de Sicyonne. Il ne paroît pas, au reste, qu'Inachus ait formé aucun établiffement fixe. Ce Prince vivoit, fans doute, fous des tentes, ainfi que les Titans.

Inachus n'avoit fait que jetter les fondemens du Royaume d'Argos; Phoronée, fon fils, s'appliqua à perfectionner ce nouvel établiffement. II raffembla les peuples des environs, difperfés dans les bois & les montagnes, leur perfuada de quitter ces triftes retraites, & de bâtir des maisons les unes proche les autres. Ce Prince parvint de cette maniere à former des Bourgs & une Ville. Ce n'étoit pas affez d'avoir raffemblé ces hommes fauvages, & de les avoir engagés à vivre en fociété, il falloit encore leur enfeigner & leur procurer les moyens de fubfifter après leur réunion. C'est à quoi travailla Phoronée. Il commença par apprendre à fes nouveaux fujets l'art de fe fervir du feu d'une maniere commode & facile. Il montra auffi les moyens de faire des provifions, & leur enfeigna, fans doute, quelques autres arts dont le détail nous eft inconnu. Pour affurer davantage le bonheur de fes peuples & les contenir, Phoronée leur donna des Loix: il eut foin d'établir en même-temps dans chacun des établiffemens qu'il avoit formés, différens tribunaux pour y administrer la juftice. Enfin, pour achever d'adoucir ces caracteres durs & féroces, ce Prince leur apprit à honorer par un culte public & folemnel la divinité; il inftitua des facrifices, & confacra des Autels. Des fervices fi importans ont mérité à Phoronée d'être regardé par la poftérité comme le premier homme qui eut paru dans la Grece, & le premier des Souverains de cette partie de l'Europe. Après la mort de Phoronée, Apis, fon fils, lui fuccéda. Le Royaume d'Argos fut gouverné pendant quelque temps par une fuite de Rois iffus de cette famille. On en compte neuf depuis Inachus jufqu'à Gélanor, à qui Danaus forti d'Egypte, vint enlever le fceptre, comme je le dirai plus bas. Ces premiers Rois ont été appellés Inachides, pour les diftinguer de ceux qui ont occupé le trône d'Argos depuis Danais. Comme leurs regnes ne contiennent rien de remarquable, je ne crois pas devoir m'y arrêter. Gélanor fut le dernier des Inachides qui porterent la Couronne:

Gélanor avoit à peine régné quelques mois, que Danaüs, à la tête d'une Colonie Egyptienne, vint lui difputer la Couronne. Le peuple fut choifi pour juge de leur différend. Jufqu'à ce moment Danaus n'avoit eu aucun commerce avec les Argiens. Tout fembloit devoir fe réunir en faveur de Gélanor. Danaus étoit à peine connu des peuples, fur lefquels il vouloit régner. Gélanor, au contraire, iffu d'un fang qui depuis long-temps étoit en poffeffion de les gouverner. Le motif qui fit préférer Danaus eft des plus finguliers. Dans le temps que les deux concurrens attendoient la décifion du peuple, un loup fe jetta fur un troupeau de vaches qui paiffoient fous les 'murs de la Ville. It attaqua le taureau qui marchoit à la tête & le terraffa. Les Argiens prirent cet accident pour un augure décifif. Il s'imaginerent

que

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