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tre en juftice celui qui avoit commis l'excès: par cette ordonnance, il vouloit accoutumer fes Citoyens à fentir les maux les uns des autres, comme membres d'un feul & même corps.

Par une autre loi, ceux qui dans les différens publics ne prenoient aucun parti, & attendoient le fuccès pour fe déterminer, étoient déclarés infames, condamnés à un banniffement perpétuel, & à perdre tous leurs biens. Solon avoit appris par une longue expérience & de profondes réflexions, que les riches, les puiffans, les perfonnes fages même & les gens de bien, font ordinairement les plus réfervés à s'expofer aux inconvéniens que les diffentions & les troubles peuvent caufer dans la Société, & que le zele du bien public les rend bien moins vifs pour le défendre, que la paffion des factieux ne les rend ardens pour le détruire que le bon parti fe trouvant ainfi abandonné par ceux qui pourroient lui donner, par leur réunion, plus de poids, d'autorité & de force, devient foible contre l'audace & la violence d'un petit nombre de méchans.

Le même Législateur ordonna que les mariées qui n'étoient pas filles uniques, héritieres des biens paternels, ne porteroient à leurs maris, outre la dot qui leur étoit donnée, ou qui devoit leur revenir, (a) que trois robes & quelques meubles de peu de valeur car il ne vouloit pas, dit Plutarque, que le mariage devînt un trafic & un commerce d'intérêts; mais qu'il fût regardé comme une fociété honorable pour donner des fujets à l'Etat, pour vivre enfemble agréablement, pour fe témoigner une confiance & une tendreffe réciproques. Avant Solon, il n'étoit point libre de tefter; les biens du mourant alloient toujours aux perfonnes de la famille il permit de donner tout à qui l'on voudroit, quand on étoit fans enfans, préférant ainfi l'amitié à la parenté, le choix à la néceffité & à la contrainte, & rendant chacun véritablement maître de fon bien, par la liberté qu'il lui laiffoit d'en difpofer à fon gré. Il n'autorifa pourtant pas indifféremment toutes fortes de donations; il n'approuva que celles qu'on avoit faites librement, fans aucune violence, fans avoir l'efprit aliéné & corrompu par des breuvages, par des charmes, ou par les attraits & les careffes d'une femme: perfuadé, avec justice, qu'il n'y a aucune différence d'être féduit & d'être forcé, il mettoit au même rang la furprife & la force, la volupté & la douleur, comme des moyens qui peuvent également en impofer à la raifon, & captiver la liberté.

Il diminua la récompenfe de ceux qui remporteroient la victoire dans les Jeux Ifthmiques & dans les Olympiques, en la fixant pour les premiers à cent drachmes (50 livres,) & pour les feconds à cinq cens drachmes 250 livres) il trouvoit que c'étoit une chofe honteufe de donner à des

(a) Nous avons ajouté ces mots, outre la dot qui leur étoit donnée, ou qui devoit leur revenir; on en verra la raifon par la fuite, lorfque nous parlerons des dots & des mariages

Athletes & à des Lutteurs, gens non-feulement inutiles, mais dangereux à leur patrie, des récompenfes confidérables, qu'il falloit réferver à ceux qui mouroient à la guerre pour le fervice de leur pays, & dont il étoit jufte de nourrir & d'élever les enfans, dans l'efpérance qu'ils fuivroient un jour l'exemple de leurs peres.

Afin de mettre en vigueur les arts, les métiers, & les manufactures, il chargea le fénat de l'Aréopage du foin d'informer des moyens dont chacun fe fervoit pour fubfifter, & de punir ceux qui menoient une vie oifive. Outre cette premiere vue de faire fleurir les arts & les métiers, l'établiffement de cette loi étoit fondée fur deux autres raifons encore plus importantes. Premiérement Solon confidéroit que ceux qui n'ont rien & ne travaillent pas pour gagner de quoi vivre, font préparés à employer toutes fortes de voies injuftes pour en avoir; que le befoin de fubfifter les difpofe aux malverfations, aux rapines, aux artifices, aux fraudes; ce qui forme dans le fein de la République une école de vices, & y entretient un levain qui ne manque pas de s'étendre & de corrompre peu-àpeu les mœurs publiques. En fecond lieu, les plus habiles dans l'art de gouverner ont toujours regardé ces hommes ennemis du travail, comme une troupe dangereufe d'efprits inquiets, avides de nouveautés, toujours prêts aux féditions & aux troubles, intéreffés aux révolutions de l'Etat qui peuvent feules changer leur fituation. Ce font toutes ces vues qui porterent Solon à déclarer par la loi dont nous parlons, qu'un fils ne feroit pas tenu de nourrir fon pere, s'il ne lui avoit fait apprendre aucun métier.

Il difpenfoit du même devoir, les enfans nés d'une courtifane: car il eft évident, difoit-il, que celui qui méprife ainfi l'honnêteté & la fainteté du mariage, n'a pas en vue la fin légitime qu'on s'y doit propofer, mais n'a fongé qu'à affouvir fa paffion; s'étant donc fatisfait lui-même, il ne s'eft réfervé aucun droit fur ceux qui font venus de ce commerce, & dont il a rendu la vie, auffi - bien que leur naiffance, un opprobre

éternel.

Il étoit encore défendu par les loix de Solon, de dire du mal des morts, parce que la Religion porte à tenir les morts pour facrés, la justice à épargner ceux qui ne font plus, la politique à ne pas fouffrir que les haines foient éternelles. Il étoit aufli défendu de dire aucune injure à perfonne dans les temples, dans les lieux où fe rendoit la juftice, dans les affemblées publiques, & aux théâtres pendant les jeux : car de ne pou voir être nulle part maître de fa colere, c'eft l'effet d'un naturel trop indocile & trop effréné; comme de la retenir en tout temps & en toute occafion, c'est une vertu au-deffus des forces humaines, & une perfection réfervée à la Loi Evangélique.

Cicéron obferve que le Législateur d'Athenes, dont les réglemens étoient encore en vigueur de fon temps, n'avoit fait aucune loi contre le parri

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cide comme on lui en demandoit la raison, il répondit qu'il lui fembloit que faire des loix & ftatuer des peines contre un crime inconnu & inoui jufques-là, c'eût été l'enseigner plutôt que de le défendre.

Il faut maintenant entrer dans quelques détails, comme je l'ai annoncé, je parlerai d'abord des formes à obferver pour abolir une Loi ancienne, ou pour en établir une nouvelle; enfuite des Loix, pour les mariages, des Loix concernant les filles les femmes, & les enfans mâles jufqu'à ce qu'ils fuffent infcrits fur le regiftre des Citoyens ; des Loix pour les tutelles, pour l'adoption, pour les teftamens, pour les fucceffions & pour le

commerce.

Formes à obferver pour abolir une Loi ancienne, ou pour en établir une nouvelle.

NOUS

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Ous avons parlé fuffifamment, ci-deffus, du Sénat des cinq cens : nous avons dit que dans le cours de chaque Prytanie, qui duroit trente cinq jours, il y avoit de regle, trois affemblées du Peuple, à quelque diftance l'une de l'autre. Dans la premiere affemblée de la premiere Prytanie, qui fe tenoit le onze d'Hécatombéon, ou de Septembre, on s'occupoit de la révision des Loix. Si le Peuple, fur la propofition qui lui en étoit faite, vouloit abolir quelques-unes des Loix exiftantes, les Prytanes affignoient la troifieme affemblée, dans laquelle le Peuple examinoit de nouveau fi la loi devoit être rejettée : les Prytanes lui demandoient dans cette troisieme affemblée, s'il vouloit élire les Nomothetes, ou Légiflateurs qui étoient au nombre de mille & un, & ne pouvoient être pris que parmi les Juges qui avoient prêté le ferment Héliaftique. Voy. HÉLIEE. C'étoient eux qui décidoient en dernier reffort & fans appel, fi la Loi devoit être rejettée; c'étoit devant eux qu'on plaidoit pour cet objet. La Loi étoit attaquée, par un ou plufieurs Citoyens; elle étoit défendue par cinq perfonnes, qu'on élifoit dans la premiere affemblée, fous le nom de Syndics, & dont la charge confiftoit proprement à être les Avocats de la Loi, qu'on vouloit abroger. Lorsqu'on vouloit établir une Loi nouvelle, celui qui la portoit, devoit la propofer au Sénat avant la premiere affemblée; fi le Sénat l'approuvoit, on la faifoit lire par un greffier dans la premiere affemblée. Dans İ'intervalle entre cette premiere affemblée, & la troifieme, l'Auteur de la Loi devoit la faire afficher devant les ftatues des dix héros, qui avoient donné leurs noms au dix tribus d'Athenes, & en remettre une copie au greffier, qui en faifoit de nouveau la lecture dans l'affemblée du Peuple. Le jour de la troifieme affemblée, le Peuple, fur le rapport des Prytanes élifoit, s'il le jugeoit à propos, les Nomothetes qui décidoient fouverainement, fi la Loi nouvelle feroit établie. La premiere attention, que devoit avoir celui qui portoit une Loi nouvelle, étoit d'examiner fi elle n'étoit point contraire à quelqu'une des Loix exiftantes; car dans ce cas, il

falloit avant tout demander l'abrogation de la Loi ancienne, à laquelle on fubftitueroit l'autre. On couroit des rifques en propofant une Loi nouvelle, on pouvoit être cité, & accufé devant le Peuple, comme ayant porté une Loi nuifible à la République, ou contraire aux Loix reçues ; fi on étoit condamné, la Loi étoit abrogée, & on fubiffoit une peinè: on ne pouvoit néanmoins être condamné que dans le terme d'un an, à compter du jour, où l'on avoit porté la Loi; après l'an révolu, la Loi pouvoit encore être attaquée, mais fon Auteur ne pouvoit être recherché. De tout ce que nous venons de dire, on peut conclure, que le Peuple feul étoit Souverain Législateur, puifqu'il dépendoit de lui de nommer, ou de ne pas nommer des Nomothetes, pour abolir ou pour établir des Loix; qu'une Loi nouvelle devoit être propofée d'abord au Sénat, & enfuite au Peuple qui élifoit des Nomothetes, pour qu'elle fût reçue ou rejettée. Nous avons deja obfervé, qu'il falloit diftinguer les Nomothetes, des Thefmothetes. Les Thefmothetes étoient fix des neuf Archontes, qui étoient proprement les Gardiens & les Confervateurs des Loix leur principale fonction étoit de les examiner avec foin chaque année; s'ils en trouvoient qui fuffent oppofées entre elles, ou qui euffent été mifes au nombre des Loix, fans en être réellement, ils devoient travailler à corriger ce défordre; ils faifoient afficher les Loix où ils avoient remarqué quelqu'un de ces défauts; les Prytanes convoquoient l'affemblée du Peuple, les Proëdres ou Préfidens en expofoient le fujet, l'Epiftate ou chef des Préfidents, faifoit décider à la pluralité des fuffrages, quelles étoient les Loix qu'on foumettroir au jugement des Nomothetes, pour les abroger ou pour les ratifier. Il étoit défendu de porter une loi pour un homme feul, une loi qui ne s'étendit pas à tous les Athéniens, à moins que fix mille Citoyens, choisis parmi tout le Peuple, n'en euffent décidé autrement en donnant leurs fuffrages par fcrutin. Il est beaucoup parlé dans Démofthene, des loix portées avant & depuis Euclide; cet Euclide fut Archonte, immédiatement après l'expulfion des Trente, il faut favoir que Solon n'avoit porté fes loix que pour cent ans une année environ après l'Archontat d'Euclide, un nommé Dioclès, porta une loi par laquelle toutes les loix, portées avant Euclide lorfque la République étoit libre, qu'elle n'étoit dominée par aucune puiffance illégitime, devoient être ratifiées pour toujours; par rapport à celles qui avoient été ou qui feroient portées, depuis Euclide, il voulut qu'elles euffent force, du jour qu'elles avoient été ou feroient portées, excepté celles qui avoient déja été portées, & pour lefquelles leurs Auteurs avoient fait marquer qu'elles n'auroient force que depuis tel temps. Quant à tous les actes des Trente qui avoient précédé Euclide, il avoit été ordonné par le Peuple qu'ils feroient infirmés, regardés comme nuls & non

avenus.

Tout ce que nous venons de dire des formes à obferver pour abolir une loi ancienne, ou pour en établir une nouvelle, regarde les loix en

général

général nous allons nous occuper de quelques loix, en particulier. Parlons d'abord des loix pour les mariages. :

Loix pour les mariages. Loix concernant les filles & les femmes.

CECROPS, Roi d'Athenes, fut le premier qui foumit le mariage à des

ex

loix, & qui ordonna que chaque Citoyen eût fa femme dans la fuite, il ne fut pas même permis à un Citoyen d'époufer une étrangere, ni à une Citoyenne d'époufer un étranger. La Poligamie étoit défendue, cepté dans des cas urgens, ou à caufe de la rareté des Citoyens, ou parce que la République fe voyoit épuifée de Peuple après quelque défaite confidérable. Le mariage étoit permis entre les enfans du même pere; mais non entre les enfans de la même mere. C'étoit un grand déshonneur pour les deux époux de fe féparer, à moins qu'ils n'euffent les raifons les plus fortes fi c'étoit le mari qui renvoyoit fa femme, il étoit obligé de lui rendre fa dot, ou de lui en payer la rente; fi c'étoit la femme qui vouloit quitter fon mari, elle ne pouvoit le faire fans en avertir l'Archonte, & fans lui préfenter une requête, où étoient détaillés tous fes griefs.

Je n'ai vu nulle part qu'il fallût le confentement des parens pour que les enfans mâles fe mariaffent, & fuppofé que ce confentement fût requis, à quel âge ils pouvoient s'en paffer. Une fille ne pouvoit jamais fe marier de fon chef; il falloit qu'elle eût le confentement, ou de fon pere ou de fon frere; ou fi elle n'avoit ni pere ni fiere, un des parens lui fervoit de tuteur, & elle ne pouvoit fe marier fans fon confentement : une femme même qui n'étoit plus fous la puiffance de fon mari, ou parce que ce mari étoit mort, ou parce qu'il l'avoit répudiée, ou parce qu'elle l'avoit abandonné, ne devenoit pas maîtreffe d'elle-même; elle tomboit dans une efpece de tutelle, comme fi elle eût été encore fille : fon mari quelquefois la léguoit en mourant avec une dot. Lorfqu'un pere laiffoit une ou plufieurs filles avec ou fans fucceffion, dans le premier cas, le plus proche parent pouvoit revendiquer la pupille ou une des pupilles avec fa fuccellion, mais il ne pouvoit revendiquer l'une fans l'autre. Dans le fecond cas, le même parent étoit obligé d'époufer la pupille ou une des pupilles, ou s'il ne l'époufoit point, il étoit tenu de la marier & de lui fournir une dot fuivant fes revenus; s'il y avoit plufieurs parens au même degré, & qu'aucun ne voulût époufer la pupille, ils contribuoient chacun pour leur part à fa dot. Si un mari pouvoit léguer fa femme en mourant, à plus forte raifon un pere pouvoit léguer fa fille ou fes filles avec une dot ou avec leur fucceffion. Nous avons dit plus haut, d'après Plutarque, que Solon ordonna que les mariées ne porteroient à leurs maris que trois robes & quelques meubles de peu de valeur; mais cette loi a befoin d'explication. Il eft certain, fur-tout d'après les plaidoyers de Démofthene, qu'on donnoit une dot, même aux filles qui n'étoient pas uniques; mais Tome VI.

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