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Les Affociés fe doivent réciproquement une entiere fidélité, & une grandeapplication à ménager les affaires communes. Sur quoi il y a un beau paffage: de Cicéron » C'eft, dit-il, une des plus grandes infamies, que de trom» per, en la moindre chofe, une perfonne qui s'eft affociée avec nous » dans l'efpérance qu'on lui aideroit à faire valoir fes propres biens. A qui »se fiera-t-on, fi l'on eft trompé par ceux-là même, fur la bonne foi » de qui on se repofe entiérement? Les crimes qui méritent d'être punis » avec plus de rigueur, ce font fans contredit ceux contre lefquels il eft » le plus difficile de fe précautionner. Or on peut fe garder des étrangers. >> Il eft impoffible que ceux qui nous fréquentent familiérement, ne voient >> bien des chofes; ce ne font pourtant pas les plus fecretes. Mais le moyen » d'éviter les fripponneries d'un Affocié, duquel il n'eft pas même per» mis de fe défier, jufqu'à ce qu'on les ait découvertes, puifqu'un fimple » foupçon de mauvaife foi bleffe ce que l'on doit à une perfonne » avec qui on a contracté une liaison de cette nature? C'eft donc avec raifon que nos ancêtres regardoient comme un très-mal-honnête hom» me celui qui avoit trompé fes Affociés «. Orat, pro Sext. Rofc. Ame rino, cap. XI.

Quoique pour le bien de la paix on ne doit pas être contraint de demeurer toujours dans une fociété, où l'on eft une fois entré; cependant la fidélité extrême que les Affociés fe doivent réciproquement, demande qu'aucun d'eux ne s'avise de rompre lui feul le traité à contre-temps, & au préjudice des autres, fans quoi ils font fondés à lui demander des dédommagemens. Voyez les Articles COMPAGNIE & SOCIÉTÉ, où nous parlerons de tout ce qui concerne les Affociations ou Compagnies de Commerce & autres.

Dans le droit Anglois, l'Affociation eft l'adjonction de nouveaux juges aux juges ordinaires d'une Affife, Affociation que le Roi fait en envoyant, foit de fon propre mouvement, foit à la requête d'un complaignant, une patente à celui ou à ceux qu'il donne pour Affociés aux Juges dans le jugement de tel procès. Le Roi joint à cette patente un écrit adreffé aux Juges de l'Affife par lequel il leur ordonne d'admettre ceux qu'il indique. ASSOCIATION DES IDÉES, Collection Arbitraire d'idées qui n'exiftent pas naturellement dans le même fujet.

ARRÊTONS-nous fur les Affociations des idées, objet important

d'où dépendent ordinairement nos fentimens, nos opinions, nos jugemens, nos actions, & généralement toute l'habitude de notre vie. Examinons quelles font les caufes de ces Affociations d'idées, leur influence fur notre maniere de fentir, de penfer & d'agir.

Caufes principales des Affociations d'idées.

Il y a quatre caufes principales des Affociations d'Idées, les fens, le

L raifonnement, l'imagination & l'instruction. Pour peu que nous fassions attention à ce qui paffe par nos fens, nous découvrirons plufieurs idées affociées, ou plutôt plufieurs Affociations d'Idées; telles font par exemple les idées de l'arc-en-ciel, d'un spectacle, d'un combat, d'une avenue, d'une montre, &c. Dans chacun de ces fujets il y a diverfes chofes diftinctes les unes des autres, qui peuvent exifter féparément, & qui ne font point néceffairement unies, mais dont l'une rappelle l'autre dès que je pense à l'arc-en-ciel, je me rappelle le foleil, la pluie, les couleurs, & la forme de l'arc-en-ciel. Par le moyen du raifonnement nous combinons plufieurs idées fimples & complexes, pour en former des idées affociées: telles font toutes les conclufions que nous tirons d'après un enchaînement d'idées; les fyftêmes des fciences & des arts, &c. Quand je me trace par le raifonnement un fyftême de gouvernement, je me rends préfentes à l'efprit, l'idée de certains principes phyfiques & moraux; celle des conféquences qui en décou lent, celle des cas divers auxquels je les applique. L'imagination est une fource féconde d'idées affociées; telles font les Affociations des Poëtes, des Peintres, des Philofophes qui préferent les hypothefes aux expériences, & tout ce que nous appellons châteaux en Efpagne, &c. Ainfi les tourbillons de Descartes, le temple du goût de De Voltaire, le combat des démons contre les anges par Milton, font des Affociations d'idées produites par l'imagination. Enfin les inftructions nous accoutument à faire des Affo ciations d'idées. De cette claffe font les opinions, les vérités, les préjugés, &c. que nous apprenons des parens, du peuple, des maîtres, &c. Če font les contes de ma nourrice qui font que je me représente la nuit un cimetiere, avec des fantômes & des revenans.

Il faut remarquer encore une autre différence entre les idées complexes & les idées affociées : c'eft que la collection des idées qui compofent une idée complexe, ne peut jamais être arbitraire, parce que cette collection ne doit contenir que les idées qui font naturellement unies dans le fujet de l'idée complexe; tandis que les idées affociées peuvent être arbitraires & contraires à la nature des idées qui entrent dans l'Affociation. Telles font les hypothefes, les vifions des fantastiques, les fictions des poëtes, des peintres, &c.

L'idée complexe d'un gouvernement demande néceffairement celle de gens qui gouvernent, de gens gouvernés, de regles, d'accord, de droit, d'obligations. Sans cela je n'aurai pas une idée de gouvernement. Au contraire je puis affocier dans mon imagination, une tête de lion ou de bouc avec le corps d'un fanglier ou d'un éléphant, les jambes d'un cheval ou d'un cerf, la queue d'un crocodile ou d'un mouton, parce que l'Affociation des idées eft arbitraire.

CES

Differentes Affociations d'idées.

Es Affociations arbitraires peuvent au refte être vraies ou fauffes. Elles font vraies, fi elles s'approchent de la nature des chofes; telles font celles d'une conclufion néceffairement contenue dans les prémiffes, quelque forme qu'elles aient; celles d'un poëte ou d'un peintre qui imitent avec leur art la nature, qui repréfentent une perfonne avec toutes les proportions qu'elle peut admettre, quand même aucune perfonne n'a reffemblé à ce portrait. Mais les Affociations arbitraires font fauffes, lorfque l'entendement combine des idées fimples ou complexes, dont la nature ne demande pas l'union. Telles font les defcriptions des monftres fabuleux, comme l'hydre de Lerne, le chien Cerbere. Cette combinaifon d'idées qui n'eft pas cimentée par la nature, eft formée par l'efprit, ou volontairement, ou par hafard : & delà vient qu'elle eft fort différente en diverfes perfonnes felon la diverfité de leurs inclinations, de leur éducation, & de leurs intérêts. La coutume forme dans l'entendement, des habitudes de penfer d'une certaine maniere, tout comme elle produit certaines déterminations dans la volonté, & certains mouvemens dans le corps.

Influence des idées affociées fur nos fentimens.

CETTE connexion irréguliere

connexion irréguliere qui fe fait dans notre cfprit, de certaines idées qui ne font point unies par elles-mêmes, ni dépendantes l'une de l'autre, a une fi grande influence fur nous, & eft fi capable de mettre du travers dans nos actions tant morales que naturelles, dans nos paffions, dans nos raifonnemens, & dans nos idées mêmes, qu'il n'y a peut-être rien qui mérite davantage notre attention, pour le prévenir ou le corriger le plutôt que nous pourrons, fur-tout dans la jeuneffe. Un homme, par exemple, reçoit une injure de la part d'un autre homme, il pense & repenfe à la perfonne & à l'action; & en y penfant ainfi fortement ou pendant long-temps, il cimente fi fort ces deux idées enfemble, qu'il les réduit prefqu'à une feule; l'idée de la perfonne ne s'offre jamais à lui fans celle de l'injure, ni celle de l'injure fans celle de la perfonne; l'une réveille la haine tout comme l'autre l'idée de Cromwel, meurtrier de fon Roi, ambitieux, hypocrite, s'offre à l'efprit d'un Anglican avec l'idée de Puritain; bientôt les mots puritain, hypocrite, ambitieux, fourbe, rebelle, deviennent fynonimes, & réveillent toujours dans fon efprit une idée odieufe. Un homme a fouffert de la douleur, ou a été malade dans un certain lieu il a vu mourir fon ami dans une telle chambre; quoique ces chofes n'aient naturellement aucune liaison l'une avec l'autre, l'impreffion cependant étant une fois faite, lorfque l'idée de ce lieu fe préfente à fon efprit, elle porte avec elle une idée de douleur & de déplaifir: il les confond ensemble, ou redoute également l'une & l'autre. Plufieurs enfans liant

l'idée des mauvais traitemens qu'ils ont effuyés dans les écoles, avec celle de leurs livres qui en ont été l'occafion, joignent fi bien ces idées, qu'ils regardent un livre avec averfion, & ne peuvent plus concevoir de l'inclination pour l'étude & pour les livres de forte que la lecture qui peutêtre auroit fait le plus grand plaifir de leur vie, leur devient un véritable fupplice.

:

Influence des idées affociées fur nos opinions.

Les habitudes intellectuelles qu'on a contractées par de pareilles Affociations d'idées, ne font pas moins fortes, ni moins fréquentes, pour être moins obfervées. Que les idées de l'être & de la matiere foient fortement unies enfemble, par l'éducation ou par une trop grande application à ces deux idées, pendant qu'elles font ainfi combinées dans l'efprit; quelles notions, & quels raifonnemens ne produiront-elles pas touchant les fubftances fpirituelles? Qu'une coutume contractée dès la premiere enfance ait une fois attaché une forme & une figure à l'idée de Dieu, & de l'ame humaine; dans quelles abfurdités une telle penfée ne nous jettera-t-elle pas à l'égard de la fpiritualité de Dieu & de l'ame?

Influence des idées affociées fur notre croyance.

ON trouvera, fans doute, que ce font de pareilles Affociations d'idées,

mal fondées & contraires à la nature, qui produifent ces oppofitions qu'on voit entre différentes fectes de philofophie & de religion; car nous ne faurions imaginer que chacun de ceux qui fuivent ces différentes fectes, fe trompe volontairement lui-même, & rejette contre fa propre conscience la vérité qui lui eft offerte par des raifons évidentes. Quoique l'intérêt ait beaucoup de part dans cette affaire, on ne fauroit pourtant fe perfuader qu'il corrompe fi univerfellement des fociétés entieres d'hommes, que chacun d'eux, fans exception, foutienne des fauffetés contre fes propres lumieres. On doit reconnoître qu'il y en a au moins quelques-uns, qui font ce que tous prétendent faire, c'est-à-dire, qui cherchent fincérement la vérité & par conféquent il faut qu'il y ait quelque autre chofe qui aveugle leur entendement, & les empêche de voir la fauffeté de ce qu'ils prennent pour la vérité toute pure. Si l'on prend la peine d'examiner ce que c'eft qui captive ainfi la raifon des perfonnes les plus finceres, & qui leur aveugle l'efprit jufqu'à le faire agir contre le fens commun, on trouvera que ce font quelques idées indépendantes, qui n'ont aucune liaison entr'elles, mais qui font tellement combinées dans l'efprit par l'éducation, par la coutume & par l'approbation qu'elles obtiennent dans leur parti, qu'elles s'y montrent toujours ensemble: de forte que ne pouvant pas plus les féparer en eux-mêmes, que fi ce n'étoit qu'une feule idée, ils prennent l'une pour l'autre.

Difficulté

Difficulté de détruire l'erreur qui naît de l'Affociation des idées.

C'EST ce qui fait paffer le galimathias pour bon fens, & les difcours

les plus inconfiftans pour des raifonnemens folides & bien fuivis. C'eft le fondement de toutes les erreurs qui regnent dans le monde, ou au moins des plus dangereufes; puifque par-tout où il s'étend, il empêche les hommes de voir, & d'entrer dans aucun examen. Lorfque deux chofes actuellement féparées paroiffent à la vue conftamment jointes, fi l'œil les voit comme collées enfemble, quoiqu'elles foient féparées en effet, par où commencerez-vous à rectifier les erreurs attachées à deux idées que des perfonnes, qui voient les objets de cette maniere, font accoutumées d'unir dans leur efprit, jufqu'à fubftituer l'une à la place de l'autre, fans peutêtre s'en appercevoir elles-mêmes? Pendant tout le temps que les chofes leur paroiffent ainfi, ils font dans l'impuiffance d'être convaincus de leur erreur, & s'applaudiffent eux-mêmes comme s'ils étoient de zélés défenfeurs de la vérité, quoiqu'en effet ils foutiennent le parti de l'erreur; & cette Affociation de deux idées différentes, que la liaifon qu'ils ont ac coutumé d'en faire dans leur efprit, leur fait prefque regarder comme une feule idée, leur remplit la tête de fauffes vues, & les entraîne dans une infinité de mauvais raifonnemens.

Néceffité de fe défier de bonne heure de l'Affociation des idées.

PAR ce que nous venons de dire fur les Affociations d'idées, l'on sent

affez la grande importance d'en prévenir à temps les influences fur les enfans. C'eft le temps le plus fufceptible d'impreffions durables. Il y a des perfonnes qui mettent une attention fcrupuleufe aux Affociations d'idées qui fe rapportent à la fanté du corps; mais il s'en faut bien qu'elles prennent le même foin par rapport à celles qui fe rapportent principalement à l'ame & qui fe terminent à l'entendement ou aux paffions. Cependant je crois que c'eft en cela principalement que confifte le grand art de l'éducation raifonnable.

ASSURANCE, f. f.

L'ASSURANCE eft un fentiment de l'ame, qui la porte à ne rien craindre de fa conduite, & lui fait affronter les plus grands périls. Cette impreffion n'eft connue que des ames éclairées, & elle eft fupérieure dans les ames fupérieures; cette Affurance de la part d'une bonne confcience produit à l'extérieur le même effet que l'effronterie de la part d'un homme vicieux; mais elle a des caracteres diftinctifs. L'homme vertueux eft Tome VI.

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