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Schifmatiques ou Hérétiques, & même des Juifs; des Catholiques Latins, tant en Chine, que dans les Royaumes voisins, & dans les pays, où les Princes Catholiques de l'Europe ont des établissemens, des Grecs dans la Mofcovie Afiatique, & enfin des Proteftans dans le pays, où les Anglois, les Hollandois & les autres Peuples, qui profeffent cette Religion, fe font établis. On voit encore en Perfe des reftes de la Religion des anciens Mages ou des difciples du fameux Zoroaftre qui adoroient le feu. On les appelle Gaures ou Guebres. Les langues les plus générales de l'Asie sont l'Arabe, le Tartare, & le Chinois. Il y en a plufieurs autres moins générales, comme l'Arménien, le Japonois, le Malabare, Malayois, &c.

On confidere l'Afie comme le berceau du genre-humain fur ce Globe. C'eft-là que les Arts & les Sciences ont commencé à germer & à fe développer; c'eft dans l'Arabie heureuse que les premiers hommes réfléchirent, comparerent & imaginerent. Le temps & l'induftrie leur amenerent enfuite l'idée d'y bâtir des Villes. Ils formerent fur les bords de l'Euphrate de puiffantes Monarchies, comme celles des Affyriens, des Babiloniens, des Medes & des Perfes. La Côte Occidentale de l'Afie étoit couverte de Villes Grecques: les Rois d'Afie firent des irruptions dans la Grece & tenterent plufieurs fois de l'affujettir. Les Grecs à leur tour pénétrerent en Afie, & fous la conduite d'Alexandre vinrent fubjuguer les Perfes. Des débris de ce nouvel Empire fe formerent de puiffans Royaumes toujours en guerre entr'eux & avec les étrangers. Bientôt les Romains s'emparerent de toutes ces Provinces divifées qu'ils furent enfuite obligés de défendre contre les Parthes, les Perfans, & les Sarrazins, à qui elles refterent en partie. Les Princes de l'Europe accoururent à leur tour fur la fcene de l'Afie, & y apporterent une guerre de Religion, qui faillit à les ruiner & à dépeupler leurs Etats. Enfin les Turcs, fortis de la grande Tartarie, chafferent tous les concurrens, & fe rendirent maîtres de la plus grande partie de ces vaftes contrées, dont ils ont formé l'Empire Ottoman, tandis que les Sophis & les Mogols établiffoient d'un autre côté leur Trône, & leur Puiffance telles que nous les connoiffons aujourd'hui.

L'Afie Mineure, (aujourd'hui l'Anatolie) ce vafte & beau pays, autrefois fi célébre & fi floriffant, n'eft plus reconnoiffable, depuis qu'il eft fous la domination des Turcs. L'air y eft tempéré, & communément fain, ext cepté fur les côtes où la pefte fait fouvent de grands ravages; & il ferojt très-fertile, s'il étoit cultivé. Mais fes habitans, qui font en partie Turcs, & en partie chrétiens Grecs ou Arméniens, en négligent extrêmement la culture; les premiers, par la pareffe qui leur eft naturelle, & les autres, par la fervitude dans laquelle ils gémiffent; enforte que les Turcs ont laiffé prefqu'entiérement détruire un fi beau climat. En effet, les campagnes, à moitié incultes, ont perdu la plus grande partie de leurs habitans; & on ne trouve plus dans une Région qui a produit un fi grand nombre d'hommes illuftres, & où on voyoit des Souverainetés & des Monarchies,

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qui ont été fi célébres, que quelques villes fans défense, un grand nombre de Villages, de vieux Châteaux à moitié détruits, & les ruines des divers monumens qui ont fait l'admiration de l'antiquité; ce qu'on doit attribuer principalement à la défolation que les troupes Turques, qui ne font pas foudoyées, caufent ordinairement dans les campagnes, lorfqu'elles y paffent. Il faut néanmoins en excepter les côtes maritimes ou les échelles du Levant, où il refte encore quelque commerce, qui y eft même affez floriffant.

Les habitans ne manqueroient pas de génie & d'efprit; & ils pourroient marcher fur les traces de ces anciens Afiatiques, qui ont fait tant d'honneur à la littérature & aux fciences. Mais la conftitution du Gouvernement ne leur donne aucune émulation, & ils font plongés dans une profonde ignorance. Ils font d'ailleurs naturellement lâches; & de toutes les troupes du Grand-Seigneur, celles d'Afie font les plus mauvaises.

Comme la liberté de confcience eft permise dans les Etats du Grand-Seigneur, chacun y profeffe fa Religion fans contrainte, en payant au Bacha un tribut, dont les François font exempts. Outre les Chrétiens & les Turcs, il y a auffi beaucoup de Juifs dans la Natolie. Ils s'habillent tous, ainfi que les Chrétiens & les étrangers, à la maniere des Turcs, excepté la coëffure qui eft différente. Les Femmes Grecques s'y mettent d'une façon fort propre & fort galante.

Enfin, les Européens ont différens établissemens en Afie, principalement dans l'Inde & dans les Ifles de l'Inde. Les Hollandois, les Anglois & les Espagnols, ont les plus confidérables. Les François y font auffi le commerce, mais celui du Levant ou de la mer de Syrie eft plus confidérable pour eux & plus important, d'autant mieux qu'il eft très-poffible de faire le commerce des Indes par l'Ifthme de Suez & la voie des Caravanes. (a) Ce qui éviteroit de longs voyages & rabattroit bien de l'orgueil & de la préfomption des Anglois & des Hollandois. Cet objet eft plus effentiel pour la France, que l'on ne pense. Nous parlerons de tous ces objets fur leur mot propre.

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Des Maurs & Ufages des premiers habitans de l'Afie.

Ous fommes trop peu inftruits des événemens arrivés dans la plus grande partie de l'Afie dans les anciens temps, pour être en état de faire connoître exactement les mœurs de fes premiers habitans. L'Ecriture Sainte eft le feul monument duquel on puiffe extraire quelques faits relatifs à cet objet ; & encore ce qu'elle dit ne regarde-t-il que les peuples de la Pa

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(a) Voyez le Mémoire préfenté à la chambre de commerce de Marseille par Mr. de Perdrian, Conful de France à Alep.

leftine & des Contrées adjacentes. On doit donc s'attendre à beaucoup de féchereffe & à une grande ftérilité dans cette premiere époque. Il faut même defcendre jufqu'au temps d'Abraham pour trouver de foibles traces des ufages obfervés anciennement chez ces Peuples dans le cours ordinaire de leurs actions. A l'égard des idées qu'ils pouvoient avoir alors de la morale & des devoirs de la Société, il n'en fera pas même queftion. Nous fommes dans une ignorance totale & abfolue fur cet article, fi important & fi effentiel à connoître. La fimplicité faifoit le caractere diftinctif de ces premiers âges.

La maniere dont on fe nourriffoit alors en fait preuve. On ne voit paroître ni sauce ni ragoûts, ni même de gibier, dans la description que l'Ecriture fait du repas donné par Abraham aux trois Anges qui lui apparurent dans la vallée de Membré. Ce Patriarche leur fert un veau rôti, ou pour mieux dire grillé, du lait de beurre, & du pain frais cuit fous la cendre. Voilà tout le feftin. Ce fait montre que les repas alors étoient plus folides que délicats. Abraham avoit certainement intention de traiter fes hôtes du mieux qui lui étoit poffible, & il faut obferver que ce Patriarche poffédoit de très-grandes richeffes en or & en argent, en troupeaux & en esclaves. On peut donc regarder le repas qu'il donne aux trois Anges, comme le modele d'un feftin magnifique, & juger en conféquence quelle étoit de fon temps la maniere de traiter fplendidement.

On pourroit croire au furplus que les premiers hommes devoient être de prodigieux mangeurs. N'eft-il pas étonnant de voir fervir à trois personnes un veau entier & près de cinquante-fix livres de pain. Rebecca, pour un feul repas, apprête à Ifaac deux chevreaux. Cette circonftance eft d'autant plus remarquable que dans les pays chauds, tels que la Paleftine, on a beaucoup moins befoin de nourriture, que dans les climats froids ou tempérés. J'aimerois donc mieux attribuer l'ufage de fervir une fi énorme quantité d'alimens à l'efprit de ces premiers fiecles, qui faifoit vraisemblablement confifter la magnificence des repas à préfenter aux conviés infiniment plus de nourriture qu'ils n'en pouvoient prendre.

A mefure que les Sociétés fe policerent, & que les Peuples fe trouverent dans une plus grande aifance, le goût pour la bonne chere & la délicateffe s'introduifit dans les repas. On en peut juger par le difcours qu'Ifaac tient à Efau pour l'inviter à fe rendre digne de fa bénédiction. » Allez » à la chaffe, lui dit-il, & quand vous aurez pris quelque chofe, faites-en » un mets dans le goût que vous favez qui me plaît.« La fuite de cette Hiftoire prouve encore mieux l'ufage où l'on étoit dès lors d'apprêter les viandes de différentes façons. Rebecca qui entendit ce difcours, & dont l'intention étoit de fubftituer Jacob à la place d'Efau, lui ordonna de prendre deux des meilleurs chevreaux qu'elle accommoda, de maniere qu'Ifaac s'y trompa, & les prit pour de la venaifon. L'Ecriture ajoute que Jacob préfenta du vin à fon pere, & qu'il en but.

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Moïfe ne nous fournit point d'autre connoiffance fur la maniere dont fe nourriffoient les Patriarches. Je préfume que le luxe des tables ne devoit pas être plus recherché chez les autres nations. On ne voit point qu'il foit jamais queftion de volailles ni d'œufs chez les premiers peuples dont l'hiftoire nous eft connue. Il eft par conféquent plus que probable qu'ils n'en faifoient point ufage.

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On n'en peut pas dire autant des fruits & des légumes. Les Patriarches, fuivant toutes les apparences, en mangeoient. Les fruits font une nourriture fi naturelle, qu'on les aura certainement connus dès les premiers temps. y a plus. Parmi les préfens que Jacob recommande à fes enfans de porter à Jofeph pour gagner fa bienveillance, l'Ecriture parle d'amandes, ou de piftaches, preuves qu'alors ce fruit étoit non-feulement connu, mais même recherché. 11 eft auffi fait mention dans ce paffage du miel, comme d'un préfent qu'on pouvoit offrir.

A l'égard des légumes, tous les Interpretes de la Bible & la plupart des Commentateurs s'accordent à dire que le mets qui tenta Efau au point de vendre fon droit d'aîneffe, étoit un plat de lentilles. On n'a pas dû en effet ignorer long-temps l'art de cultiver les légumes & celui de les préparer.

Quant au poiffon, il n'en eft jamais parlé dans la Genese. On ne peut cependant pas conclure du filence de Moïfe, que les habitans de la Palestine n'en faifoient point alors ufage. Car Sanchoniaton, qu'on doit regarder comme un des plus anciens Ecrivains de l'Antiquité, met expreffément l'art de pêcher au nombre des premieres inventions que les peuples attribuoient à leurs Héros.

On voit que du temps d'Abraham l'usage ordinaire étoit de faire deux repas par jour. Ce Patriarche donne à manger aux trois Anges vers le milieu du jour, & Loth leur fert à fouper le foir du même jour. Il est vraifemblable qu'alors on mangeoit affis. Je ne crois pas que la coutume de fe coucher fur le lit pour prendre fes repas, fût encore introduite.

Les uftenfiles de ménage, tels que les plats, les pots & les coupes auront été originairement de terre ou de bois. A mesure que les peuples firent quelques découvertes dans les arts, & qu'ils vinrent à fe policer, le goût qui nous porte naturellement aux recherches & à la magnificence, fe développa. L'invention de la Métallurgie fournit bientôt les moyens de fatisfaire ce penchant. On ne tarda pas à fubftituer des vafes d'or & d'argent aux vaifseaux de terre ou de bois, dont il avoit fallu d'abord fe contenter. Ce luxe remonte à la plus haute antiquité. On lit dans la Genese qu'Eliézer fit préfent à Rebecca de vafes d'or & d'argent.

Il y a bien de l'apparence qu'on a ignoré pendant fort long-temps l'ufage des fourchettes & des cuillers. On connoît encore à préfent quantité de peuples qui ne s'en fervent point. Les doigts, ou deux petits bâtons faits exprès, leur en tiennent lieu. Je ne crois pas non plus qu'on ait connu origi

nairement les affiettes. On mangeoit alors ou fur des écorces, ou fur des grandes feuilles d'arbres, comme on en ufe encore dans plufieurs Pays. A l'égard des couteaux, les Anciens n'en avoient pas. Une espece de poignard qu'ils portoient toujours à la ceinture, leur en tenoit lieu.

On ne connoiffoit point alors le fecret de laiffer mortifier la viande quelque-temps avant que de la manger. Abraham, pour régaler les Anges, court à fon troupeau, choifit un veau, le donne à fon efclave pour le tuer & le faire cuire fur le champ. Ifaac voulant manger du gibier, dit à Esaü de prendre fon arc & fes fleches, & de lui apprêter à fon retour un mets de ce qu'il aura pû rapporter. Rebecca, pour le tromper, tue incontinent deux chevreaux qu'elle lui fait manger. J'aurai encore occafion d'infifter sur cette pratique qui marque bien la groffiéreté des premiers Peuples, lorfque je parlerai des mœurs des anciens habitans de la Grece.

La fimplicité des vêtemens aura répondu, dans les premiers fiecles, à celle de la nourriture. On ignoroit alors l'art de donner aux habits des façons & des graces. On prenoit un morceau d'étoffe plus long que large, & on s'en couvroit, ou pour mieux dire, on s'en enveloppoit. Car originairement on ne se servoit point d'attaches pour retenir les habits. Ils n'étoient contenus que par les différens tours que l'on faifoit faire à l'étoffe fur le corps. Plufieurs Peuples encore aujourd'hui ne s'habillent pas autrement. Succeffivement on imagina des manieres de fe vêtir plus commodes & plus propres à couvrir le corps. Il paroît que l'habillement des Patriarches confiftoit dans une tunique à manches larges, fans plis, & dans une espece de manteau fait d'une piece. La tunique couvroit immédiatement la chair, le manteau fe mettoit par-deffus la tunique, & s'attachoit probablement avec une agraffe. Les chaleurs exceffives qu'on éprouve dans la grande partie de l'Afie, font cause que de tout temps on s'y eft peu mis en peine de couvrir les bras & les jambes. La chauffure n'y a jamais confifté que dans des efpeces de fandales attachées avec des corroies. L'ufage en avoit lieu dès le temps d'Abraham.

L'habillement étoit extrêmement fimple. Il n'y avoit prefque rien à tailler, & peu à coudre. Les modes ne changeant point alors comme elles ne changent point encore aujourd'hui dans le Levant; & ces fortes d'habits pouvant convenir prefque indifféremment à toutes les tailles, les perfonnes riches en avoient toujours un grand nombre de réserve, dont elles faifoient des préfens. L'ufage en étoit établi dès le temps d'Abraham. Moïfe met les habits au nombre des préfens, qu'Eliézer fit à toute la famille de Rebecca. Cet ufage fe pratique encore aujourd'hui dans tout l'Orient.

Il y avoit dès le temps des Patriarches, une forte de luxe & de magnificence dans les habillemens. Rebecca, pour mieux déguifer Jacob, lui fait prendre les habits d'Efau qu'elle gardoit foigneufement. Moïfe dit qu'ils étoient fort beaux; mais il n'en fait aucune defcription. Jacob qui ai

moit

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