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» Un état bien exact de cette balance pourroit décider ces conteftations, & nous inftruire des commerces qui font utiles ou préjudiciables à la nation. Mais peut-être ne parviendra-t-on à la connoître que par le fecours de l'Arithmétique politique? Peut-être cet art feul pourra-t-il découvrir les nœuds de cette chaîne générale qui entrelace les diverses branches du commerce l'une dans l'autre, & fixer le degré de leur influence mu

tuelle?

» Au premier afpect tout commerce qui fait fortir notre argent, paroît nuifible; mais lorfque l'on vient à raifonner des chofes par chiffres, on reconnoît qu'un commerce eft utile s'il fait entrer plus d'argent dans l'Etat par une voie, qu'il n'en a fait fortir par une autre.

» Je fuppofe que nous perdions dans notre balance avec un pays; mais peut-être cette perte eft-elle l'occafion d'un commerce deux fois plus profitable avec une autre contrée ? Il ne feroit pas fenfé de blâmer la marche d'une roue dans une machine, fans en connoître le mouvement général.

» Dans les matieres qui ont rapport au commerce, ceux qui veulent cal culer avec fuccès, prennent pour objet de leur combinaison, la richesse le capital, les productions, les confommations, le nombre des vaiffeaux, les exportations & les importations de leur pays, en même-temps qu'ils confiderent l'état & la pofition des autres Etats commerçans.

>>> Le point le plus difficile eft de trouver de bons matériaux, & de raifonner fur un principe bien affùré : car les conféquences font juftes fi les prémiffes font certaines.

» La Chambre des Lords a introduit en 1695 un excellent ufage, dont il eft à fouhaiter que quelque habile homme profite pour fixer enfin cette balance dont on a tant parlé.

» Les Commiffaires des Douanes font obligés de repréfenter tous les ans un compte de toutes les exportations de Londres & des autres ports de chaque Province, avec celui des importations: on a même commencé ce travail à l'année 1694. Chaque marchandise est rangée fous une colonne féparée, les rembourfemens des droits à la réexportation y font exactement marqués. Lorfque les marchandifes ne font point taxées par les Tarifs, on a foin de les évaluer au prix courant, & le tout eft dans un très-bel ordre.

» Il feroit à fouhaiter que l'on fit le même travail pour les années 1672, 1673 & 1674; on en pourroit tirer de grandes lumieres fur la balance générale du commerce, parce qu'alors nous étions neutres dans la guerre, & en poffeffion de ce commerce fi utile d'acheter des marchandises dans un endroit pour les revendre dans un autre.

» Il feroit encore à propos de faire ces recherches pour les années 1686 1687 & 1688; ce font celles où nos affaires ont été à leur plus haut période, & où les capitaux du Royaume ont le plus circulé dans le com

merce.

» Je fuis perfuadé qu'en examinant de près la pofition de notre commerce dans ces trois époques différentes, les changemens qu'elles ont occafionnés dans nos exportations & nos importations, il feroit poffible de conftater par les regles de l'Arithmérique politique, fur quel pied la balance de notre commerce a été autrefois, & celui fur lequel elle doit être à l'avenir avec les autres Etats. "

Parallele des calculs de PETTY, DAVENANT & GRAUNT,

?

SUIVANT le Chevalier Petty, quoique la Hollande & la Zélande ne contiennent pas plus, de roooooo d'arpens de terres & que la France en contienne au moins 8000000, cependant ce premier pays a prefque un tiers de la richelle & de la force de ce dernier, Les rentes des terres en Hollande font à proportion de celles de France, comme de 7 ou 8 à 1. Obfervez qu'il eft question ici de l'état de l'Europe vers 1690; & c'est à cette année fe que rapportent tous les calculs du Chevalier Petty, bons ou mauvais. Les habitans d'Amfterdam font de ceux de Paris ou de Londres; & la différence entre ces deux dernieres villes n'eft, felon le même auteur, que d'environ une vingtieme partie. Le port de tous les vaiffeaux appartenans à l'Europe, fe monte à environ deux millions de tonneaux, dont les Anglois ont 500000, les Hollandois 900000, les François 100000, les Hambourgeois, Danois, Suédois, & les habitans de Dantzic 250000, l'Espagne, le Portugal, l'Italie, &c. à-peu-près autant. La valeur des marchandifes qui fortent annuellement de la France, pour l'ufage des différens pays, fe monte en tout à environ 5000000 livres fterling; c'eft-à-dire, quatre fois autant qu'il en entroit dans l'Angleterre feule. Les marchandifes qu'on fait fortir de la Hollande pour l'Angleterre valent 300000 livres fterling; & ce qui fort de-là pour être répandu par tout le refte du monde, vaut 18000000 livres fterling. L'argent que le Roi de France leve annuellement en temps de paix fait environ 6 millions fterling. Les fommes levées en Hollande & Zélande font autour de 2100000 livres fterling; & celles provenantes de toutes les Provinces-Unies font ensemble environ 3000000 livres sterling. Les habitans d'Angleterre font à-peu-près au nombre de 6000000; & leurs dépenfes à raifon de 7 livres fterling par an, pour chacun d'eux, 42000000 livres fterling ou 80000 livres fterling par femaine. La rente des terres en Angleterre, eft d'environ 8 millions fterling; & les intérêts & profits des biens propres à-peu-près autant. La rente des maifons en Angleterre 4000000 livres fterling. Le profit du travail de tous les habitans fe monte à 26000000 livres fterling par an. Les habitans d'Irlande font au nombre de 1200000. Le bled confommé annuellement en Angleterre, comptant le froment à fchelins le boiffeau, & l'orge à 2 fchelins, fe monte à dix millions fterling. La marine d'Angleterre avoit befoin en 1699, c'està-dire, du temps du Chevalier Petty, ou à la fin du dernier fiecle, de

font

36000 hommes pour les vaiffeaux de guerre, les vaiffeaux de guerre, & 48000 pour les vaiffeaux marchands & autres : & il ne falloit pour toute la marine de la France que 15000 hommes. Il y a en France environ treize millions & demi d'ames; & en Angleterre, Ecoffe & Irlande, environ neuf millions & demi. Dans les trois Royaumes d'Angleterre, d'Ecoffe & d'Irlande, il y a environ 20000 Eccléfiaftiques; & en France, il y en a plus de 270000. Le Royaume d'Angleterre a plus de 40000 matelots, & la France n'en a pas plus de 10000. Il y avoit pour lors en Angleterre, en Ecoffe, en Irlande, & dans les pays qui en dépendent, des vaiffeaux dont le port fe montoit environ à 60000 tonneaux, ce qui vaut à-peu-près quatre millions & demi de livres fterling. La ligne marine autour de l'Angleterre, de l'Ecoffe, de l'Irlande, & des ifles adjacentes, eft d'environ 3800 milles. Il y a dans le monde entier environ 300 millions d'ames, dont il n'y a qu'environ So millions, avec lesquelles les Anglois & les Hollandois foient en commerce. La valeur de tous les effets de commerce ne paffe pas 45 millions fterling. Les manufactures d'Angleterre qu'on fait fortir du Royaume, le montent an nuellement à environ 5 millions fterling. Le plomb, le fer-blanc & le charbon, à 500000 livres fterling par an. La valeur des marchandifes de France qui entrent en Angleterre, ne paffe pas 1200000 livres fterling par an. Enfin il y a en Angleterre environ fix millions fterling d'efpeces monnoyées. Tous ces calculs, comme nous l'avons dit, font relatifs à l'année 1690, & ont dû fans doute bien changer depuis.

Davenant prouve, comme nous l'avons dit, qu'il ne faut pas compter abfolument fur plufieurs des calculs du Chevalier Petty : il en donne d'autres qu'il a faits lui-même, & qui fe trouvent fondés fur les obfervations de M. King. En voici quelques-uns.

L'Angleterre contient, dit-il, 39 millions d'arpens de terre. Les habitans, felon fon calcul, font à-peu-près au nombre de 5545000 ames, & ce nombre augmente tous les ans d'environ 9000, déduction faite de ceux qui peuvent périr par les peftes, les maladies, les guerres, la marine, &c. & de ceux qui vont dans les colonies. Il compte 530000 habitans dans la ville de Londres; dans les autres villes & bourgs d'Angleterre 870000, & dans les villages & hameaux 4100000. Il eftime la rente annuelle des terres à 10 millions fterling; celle des maifons & des bâtimens à deux millions par an; le produit de toutes fortes de grains, dans une année paffablement abondante, à 9075000 livres fterling; la rente annuelle des terres en bled, à 2 millions, & leur produit net au-deffus de 9 millions fterling; la rente des pâturages, des prairies, des bois, des forêts, des dunes, &c. à 7 millions fterling; le produit annuel des beftiaux en beurre, fromage & lait, peut monter, felon lui, à environ 2 millions fterling. Il eftime la laine tondue annuellement à environ 2 millions fterling celle des chevaux qu'on éleve tous les ans à environ 250000 liv. fterling; la confommation annuelle de viande pour nourriture, à environ 335000 liv. fter

ling celle du fuif & des cuirs environ 600000 livres fterling celle du foin pour la nourriture annuelle des chevaux, environ 1300000 livres sterling, & pour celle des autres beftiaux, un million fterling: le bois de bâtimens coupé annuellement, 500000 livres fterling: le bois à brûler, &c. environ 500000 livres sterling. Si toutes les terres d'Angleterre étoient également diftribuées parmi tous les habitans, chacun auroit pour fa part environ 7. arpens. La valeur du froment, du feigle, & de l'orge néceffaire pour la subfiftance de l'Angleterre, fe monte au moins à 6 millions fterling par an, La valeur des manufactures de laine travaillées en Angleterre, eft d'envi ron 8 millions par an; & toutes les marchandifes de laine qui fortent annuellement de l'Angleterre, paffent la valeur de 2 millions fterling. Le revenu annuel de l'Angleterre, fur quoi tous les habitans fe nourriffent & s'entretiennent, & paient tous les impôts & taxes, fe monte, felon lui, à environ 43 millions celui de la France à 81 millions, & celui de la Hollande à 18250000 livres fterling.

Le major Grant, dans fes obfervations fur les liftes mortuaires, compte en 1667 en Angleterre 39000 milles quarrés de terre en Angleterre & dans la Principauté de Galles, 4600000 ames; que les habitans de la ville de Londres font à-peu-près au nombre de 640000, c'est-à-dire, la quatorzieme partie de tous les habitans de l'Angleterre qu'il y a en Angleterre & dans le pays de Galles, environ 10000 paroiffes: qu'il y a 25 millions d'arpens de terre en Angleterre & dans le pays de Galles, c'eft-à-dire, environ 4 arpens pour chaque habitant: que de 100 enfans qui naiffent, il n'y en a que 64 qui atteignent l'âge de 6 ans; que dans 100, il n'en refte que 40 en vie au bout de 16 ans ; que dans 100, il n'y en a que 25 qui paflent l'âge de 26 ans; que 16 qui vivent 36 ans accomplis, & 10 feulement dans 100 vivent jufqu'à la fin de leur 46° année ; & dans le même nombre, qu'il n'y en a que 6 qui aillent à 56 ans accomplis; que 3 dans 100 qui atteignent la fin de 66 ans ; & que dans roo, il n'y en a qu'un qui foit en vie au bout de 76 ans : & que les habitans de la ville de Londres font changés deux fois dans le cours d'environ 64 ans.

Progrès de l'Arithmétique Politique dans le XVIII. Siccle.

Le Maréchal de VAUBAN, l'Abbé de ST. PIERRE, DERHAM, LE MOIVRE, HALLEY, KING, ARBUTHNOT, HOGDSON, MAITLAND, HUME, DU TOT, MELON, DESPARCIEUX, DE BUFFON, &c.

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E XVIII. fiecle a été plus fertile en Calculateurs politiques;, & cette Science, en fortant de l'enceinte de fon pays natal, & s'étendant dans d'autres Contrées de l'Europe, a fait des progrès confidérables dans fa marg Tome VI.

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che. Les principes que les Anglois avoient établis dans cette efpece d'Arithmétique, & la méthode qu'ils fuivoient dans leurs calculs, frapperent plufieurs efprits philofophiques en France, en Allemagne, en Hollande & ailleurs. On fuppofa, avec raifon, que ces principes & ces regles étoient applicables à la plupart des pays de l'Europe, & qu'à mesure qu'on parviendroit à faire plus de découvertes, & à mettre plus de fûreté dans l'exactitude des dates, cet art fe perfectionneroit davantage. M. le Maréchal de Vauban crut cette matiere digne de fon amour pour l'humanité, & de ses fentimens patriotiques. Il compofa non-feulement fa Dixme Royale, mais fit auffi quantité de recherches curieufes fur la population de tous les pays, & examina diverses idées qui fe préfenterent à fon efprit pour le bien du Public. Il a intitulé ce vafte recueil fes Oifivetés, Ouvrage qui n'a point paru encore en entier, mais qui pourroit donner toutes fortes de lumie

fi jamais il voyoit le jour. M. l'Abbé de St. Pierre travailla de fon côté avec un zele infatigable, & fit paroître livre fur livre fur le même objet. On ne fauroit que louer fes intentions, & admirer l'étendue de fes travaux ; mais on découvre à chaque page un Politique purement Théoréticien, qui fuppofe fans ceffe un monde idéal, & qui regardant les établiffemens qu'il propofe du côté où ils paroiffent, favorables, femble ne point envifager les inconvéniens, ni les obftacles, ni l'impoffibilité de l'exécution. Čependant, à force d'écrire, & de faire connoître le dommage que caufent à l'Etat les tailles arbitraires, & quantité d'autres abus dans les Finances, il eft parvenu à éclairer les hommes, les Financiers, les Miniftres, & fes obfervations ont laiffé dans leurs efprits des traces qui ont donné lieu à bien des réformes utiles: car tel eft le génie des gens en place, qu'ils ne veulent point qu'il foit dit que, dans leurs opérations, ils aient puifé leurs idées dans des Livres. Chacun voudroit être original & créateur; mais en lifant, les vérités nouvelles frappent toujours leurs efprits, & au bout d'un certain temps il fe les approprient, & croient en être les inventeurs, ou du moins voudroient le faire accroire aux autres.

Tandis qu'en France & ailleurs on travailloit à perfectionner l'Arithmétique politique, les Anglois ne fe repoferent point fur les lauriers de l'invention; plufieurs grands hommes en traiterent, ou des parties détachées, ou le fyftême en entier. Le célébre Derham, dans fa ThéologiePhyfique, donne un recueil de toutes les obfervations curieufes que fes compatriotes avoient faites jufqu'alors fur les liftes des morts, des mariages, & des enfans nouveaux - nés, & y joint fes ingénieufes remarques. M. le Moivre travailla avec fuccès fur la même matiere, & fur divers autres objets politiques. M. Halley, calculateur profond & admirable, en démontra l'utilité pour la détermination des rentes viageres. King, Arbuthnot, Hogdfon, & plufieurs autres s'avancerent dans la même carriere, & y firent beaucoup de progrès, &c. M. Maitland, Auteur de l'Hiftoire de la ville de Londres, vient de donner encore dans cet Ouvrage une

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