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DANS des chars transparens où le luxe se joue,

J'ai vu des dieux nonchalamment portés ;

J'ai mieux fait que les voir, ils m'ont couvert de boue, Noble émanation de ces divinités.

J'AI vu multiplier les Muses et les Grâces;
J'ai vu sur cinq ou six Parnasses

Le chaste Chérubin et le décent Jeannot,
Les prisons de Sedaine et les cercueils d'Arnaud.

DANS un temple de la Magie,

Où les Arts alliés joignent leur énergie,
J'ai vu des palladins qui, par un rare effort,
Dansaient à l'agonie, et même après la mort.

J'AI vu des nymphes surannées

Inscrire sur leur front le chiffre de vingt ans ;
J'ai vu des fleurs d'hiver et des roses fanées
Disputer la fraîcheur aux filles du Printems.

J'AI vu plus d'une aventurière
Afficher le plaisir, le chagrin dans le cœur,
Et des Vénus dans la misère
Crier Venez ici, nous vendons le bonheur !

:

ENFIN dans ce Paris chacun veut aller vivre;
C'est le rendez-vous des souhaits;
Cependant je n'y vis jamais

Un seul homme content, à moins qu'il ne fût ivre.

On a donné, mardi 26 juin, sur le théâtre Italien, la première représentation de la Double clef ou Colombine commissaire, comédie-parade en deux actes et en vers. Les paroles sont de M. Desfaucheret, l'auteur du Mariage secret,

de l'Avare cru bienfaisant, etc. La musique est de M. Louet, de Marseille, amateur, qui a fait des pièces de clavecin et de piano très-agréables. Cet ouvrage est le premier qu'il ait hasardé au

théâtre.

A peine l'impatience du public a-t-elle permis d'achever cette nouvelle comédie - parade. Le défaut d'invraisemblance est le moindre reproche qu'on ait à lui faire. On eût volontiers pardonné à l'auteur les moyens forcés qu'il em ploie pour amener des situations plaisantes, s'il eût animé au moins son dialogue de ce mélange de finesses et de balourdises, de ce ton tour à tour grave et burlesque qui fait rire quelquefois même en dépit du bon sens; mais on ne peut concevoir qu'un homme dont les autres productions annoncent quelque mérite ait pu hasarder un ouvrage si froid, silong, si dépourvu de toute espèce d'esprit et de goût.

Quant à la musique, elle n'a presque jamais le caractère piquant et comique qui convient à une comédie-parade, on sent partout l'effort de l'imitation. Les accompagnemens seuls justifient quelquefois l'idée avantageuse que l'auteur avait donnée de son talent par ses pièces de clavecin et par la manière brillante dont il les exécute. Il est attaché au concert de la reine, et a souvent l'honneur d'accompagner sa majesté.

Virginie, tragédie en cinq actes, représentée pour la première fois au théâtre Français, le mardi

11 juillet, a reçu de grands applaudissemens, et mérite d'être distinguée de cette foule d'ouvrages dramatiques qu'on voit paraître et disparaître chaque année; la conduite en est sage, le style en général noble, simple et pur; s'il n'est pas également soutenu, s'il manque quelquefois de chaleur et d'énergie, si l'on peut lui reprocher même des parties fort négligées, il n'est du moins jamais ni obscur, ni précieux, ni déraisonnable. C'est ce qui a fait dire, avec quelque soin que l'auteur ait voulu garder jusqu'ici l'anonyme, que la pièce était trop bien pour n'être pas de M. de La Harpe, et qu'elle était encore plus sûrement de lui parce qu'elle n'était pas mieux.

Le sujet de Virginie, comme celui de Coriolan, offre de belles scènes, des caractères imposans, une situation très-dramatique ; il n'est donc guère étonnant que l'on ait tenté si souvent de le traiter. Nous connaissons une Virginie de J. Mairet, celle de Le Clerc, de La Beaumelle, de M. de Chabanon, etc. Ce fut, comme on sait, le premier essai de Campistron. Mais comment aucun des grands maîtres de la scène ne s'est-il emparé d'un trait d'histoire si célèbre, et qui présente à l'imagination des beautés si frappantes? Cela seul ne ferait-il pas présumer que ce sujet, tout séduisant qu'il est, pourrait bien n'être pas aussi heureux qu'il semble l'être au premier aperçu? Si le peu de succès qu'ont eu jusqu'ici toutes les Virginie connues n'en est pas une preuve suffisante, on peut penser du moins que c'est une présomption peu favorable.

Est-il facile, en effet, d'inventer une fable où les circonstances qui ont préparé cette catastrophe terrible se développent d'une manière naturelle et attachante, où les différens caractères que rassemble cette scène n'occupent que la place qu'il leur con vient d'occuper, où l'intérêt qu'inspire Virginie soit assez vif, assez touchant, et ne l'emporte pas cependant sur cet amour de la liberté, sur cet héroïsme patriotique qui paraît devoir être le ressort principal de l'action? De quel art n'aura-t-on pas besoin pour lier heureusement ces deux intérêts, pour en ménager le mouvement et les progrès de manière qu'au lieu de nuire à l'effet l'un de l'autre, ils servent encore à se renforcer mutuellement? Que faire ensuite du rôle d'Appius? Comment sauver la bassesse de son crime, et comment le punir après? Que l'atrocité en est froide et révoltante si elle n'est pas motivée par le plus violent amour et comment peindre le décemvir amoureux sans qu'il paraisse ridiculé et par son amour même, et par l'indignité des moyens dont il ose se servir? Que de difficultés à vaincre! que d'écueils à éviter!

L'analyse de cette pièce, en laissant trop voir tous ses défauts, ne suffirait pas pour en rappeler toutes les beautés. Sans offrir un intérêt fort attachant, la conduite est au moins fort supérieure à celle de toutes les Virginie que nous avions vues jusqu'à présent; aussi la pièce a-t-elle été en général bien reçue; on a demandé l'auteur à grands cris aux deux ou trois premières représentations.

A la dernière, un des acteurs étant venu assurer encore que l'auteur était absolument inconnu à la comédie, on lui a répondu en chœur : C'est M. de La Harpe, c'est M. de La Harpe. Une voix, perçant ce cri presque universel, s'est permis d'ajouter J'ai reconnu un vers de Pharamond, souvenir dont M. de La Harpe se serait bien passé, et qui a égayé les applaudissemens plus que de raison. On n'a donné la pièce encore que cinq fois, et toute applaudie qu'elle est, cette nouveauté n'a pas encore pu produire ce que les comédiens appellent une bonne chambrée.

Il y a six mois que M. de La Harpe a désavoué publiquement cette tragédie dans le Journal de Paris, et l'a désavouée de la manière la plus formelle; mais on sait ce que peut permettre à cet égard la morale des poètes, et pour justifier celle de M. de La Harpe, il suffira peut-être de dire que sans ce mensonge le public aurait été privé du bonheur de voir sa pièce. Le rôle de Plautie ne pouvait guère être rempli que par Mile Raucour, et cette actrice, qui a recouvré depuis quelque tems la faveur publique, avait donné sa parole d'honneur à M. le prince d'Hénin, de ne jamais jouer dans aucune pièce de M. de La Harpe. Ce n'est pas sur des objets si graves qu'une femme sensible voudrait se permettre de manquer à sa parole.

L'autre jour, à l'Académie, M. de La Harpes'était défendu encore très-vivement d'être l'auteur de Virginie. Eh bien, lui dit M. Sedaine, dans l'em

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