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ainsi que l'escadre de 18 bâtimens, par M. d'Albert de Reims; le pavillon royal y était. Le roi, accompagné de M. d'Hector, commandant de Brest, a visité le vaisseau dans le plus grand détail, et a témoigné le plus grand contentement. Il a vu ensuite manoeuvrer l'escadre d'évolution qui a fait tous les simulacres de combat corps à corps et en ligne, tous les signaux étant faits par le vaisseau amiral. Le roi n'a pas bougé de dessus la lunette. Il s'est aperçu que son bâtiment ne tirait point, il en a demandé la raison; on lui a dit qu'il n'était point d'usage qu'il y eût ni feu ni poudre sur un bâtiment où était S. M. Il a sur-le-champ secoué cette éliquette, et a ordonné qu'on tirât à boulets plusieurs pièces de 18 et de 36, pour voir l'effet du ricochet dans l'eau.

Le roi se rembarqua à six heures sur son canot, et trouva plus de vingt mille personnes sur le quai qui l'attendaient, et qui voulaient marcher dans l'eau pour amener le canot à terre, s'il ne l'eût empêché.

Le 25, le roi étant parfaitement content de tout ce qu'il avait vu à bord, y retourna déjeûner sur le Patriote, où il fit ressentir à l'escadre l'effet de ses bontés.

Le roi est parti le 26 pour Caen, où il a éprouvé de nouveaux effets de l'attachement de ses sujets. Cinquante jeunes gens, tous en uniforme et en écharpe, furent au-devant lui demander la permission de dételer ses chevaux et de l'amener à la ville, ce qu'il refusa; mais il leur

permit d'entourer sa voiture, ainsi qu'à cinquante jeunes filles qui lui présentèrent des fleurs, et l'accompagnèrent chez lui, ayant de la musique à leur tête.

Le roi, craignant les accidens des chevaux, avait fait ordonner qu'on lui envoyât un détachement de troupes pour le précéder; la compagnie des chasseurs du régiment d'Artois fut au-devant de lui, et entoura sa voiture jusqu'à l'hôtel d'Harcourt, où il trouva son bataillon de gardes, commandé par M. de Guerchy, mestrede-camp. S. M. fut descendre de voiture aux casernes, accompagnée des grenadiers qui la précédaient, car elle défendit que personne fût autour d'elle, ce qui rappelle le propos qu'elle tint aux groupes de Valogne: Laissez-les approcher, ce sont mes enfans. Le roi entra aux casernes, accompagné de son capitaine des gardes, du colonel de garde et de M. le duc d'Harcourt.

S. M. fut de là, toujours à pied, visiter les travaux de la rivière, qu'elle passa dans un petit bateau avec six personnes. Les plans des opérations qu'on a faites pour la rendre navigable lui furent présentés par M. de Brou et M. Le Fêvre, ingénieur de la province. Le roi, après avoir ordonné qu'on mît la plus grande diligence dans ces travaux, rentra chez lui par les jardins de l'Intendance et de l'hôtel d'Harcourt, qui étaient illuminés.

des

Tous les de S. M. ont été marqués par pas bienfaits. MM. les administrateurs de l'hôpital

lui représentèrent les besoins des pauvres; elle leur accorda 8,000 liv. Les officiers municipaux lui présentèrent une orpheline, elle la marie et lui donne une dot. Huit paroisses ont été grêlées depuis son passage, elle donne 20,000 liv. à M. l'intendant.

S. M. est partie ce matin aux acclamations du peuple, en emportant les regrets de tout ce qui l'a vue, et laissant l'espoir à ses bons sujets normands de la revoir dans quelques années.

La reine, qui n'a point quitté Versailles, a reçu tous les jours des nouvelles du roi. Par un des derniers courriers, S. M. lui mandait : « Vous » serez, j'espère, contente, car je ne crois pas » avoir fait encore une seule fois ma grosse » voix..... » Il y a dans cette attention et dans ce souvenir une grâce et une bonté qui ne sauraient échapper aux âmes sensibles.

On a donné, le mardi 13 juin, au théâtre Français, la première représentation de l'Inconstant (1), comédie en vers et en cinq actes, de M. Collin; c'est un jeune homme qui n'était connu que par quelques jolies pièces fugitives insérées dans l'Almanach des Muses et dans d'autres recueils.

Cette pièce a obtenu un succès décidé à la représentation, et l'a mérité à beaucoup d'é

(1) Le dénouement, qui n'en est pas un, a été changé plusieurs fois. Kerbantan et Eliante ne reparaissent plus, c'est tout

gards. Malgré les défauts qu'on peut lui reprocher, elle est faite pour donner l'idée la plus avantageuse du talent de l'auteur; peut-être même les défauts de la pièce tiennent-ils tellement au sujet, qu'il était difficile de les éviter. L'inconstance proprement dite est un travers dont le ridicule paraît sans doute fort comique et fort théâtral; mais comment réussir à présenter naturellement les différens traits qui le prononcent dans un intervalle aussi borné que celui des vingtquatre heures? Lorsqu'il faut, pour ainsi dire, entasser dans cinq actes de comédie ces variations des sentimens, de goût, de conduite, qui peignent un inconstant, la rapidité avec laquelle ces variations se succèdent en détruit la vraisemblance, et donne à ce caractère une physionomie qui ressemble plus à la folie qu'à toute autre chose. C'est le reproche dont on ne saurait justifier la manière dont M. Collin a conçu et traité son sujet; les situations dans lesquelles il présente son inconstant sont accumulées les unes sur les autres; il le fait changer à chaque instant de projets, de passions, de maîtresses; il revient trois fois à la même ; et ces retours, que leur promptitude rend plus que ridicules, donnent vraiment à ce rôle, tout variable qu'il est, une sorte de

uniment le départ de Florimon qui termine la pièce ; le jour de la première représentation, il partait pour l'Amérique, en disant : On ne voit pas deux fois naître une république. Depuis il sort de la scène, résolu d'aller s'ensevelir dans un couvent; cette dernière variante est assurément la moins heureuse.

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tion;

par eux

monotonie assez pénible. Un caprice peu naturel lui fait renvoyer son domestique, un caprice plus étrange encore le lui fait reprendre. Il faut des hasards peu communs pour rassembler dans le même hôtel tous les personnages de la pièce; il est d'ailleurs trop évident que ces personnages ne sont là que pour mettre en jeu le caractère principal, ils n'ont rien qui puisse soutenir mêmes l'attention du spectateur dès que l'inconstant cesse d'être sur la scène. On peut reprocher encore à cette comédie quelques longueurs, des incidens tout-à-fait inutiles à l'intrigue, et qui semblent n'être amenés que pour prolonger l'acmais tous ces reproches ne détruisent point le mérite qui distingue cet ouvrage; et si l'Inconstant n'est pas cette œuvre si difficile à concevoir et à exécuter, une bonne comédie de caractère, on ne saurait trop louer la manière ingénieuse dont l'auteur a su nous amuser, pendant cinq actes, avec un seul personnage qu'il fait, pour ainsi dire, pirouetter sans cesse sur lui-même. mais qui trouve presque toujours une raison spécieuse ou un mot plaisant pour justifier l'extrême mobilité de ses sentimens, de ses idées, de ses projets. Cet ouvrage, qui annonce de l'imagination et beaucoup de facilité, doit laisser concevoir d'autant plus d'espérance que l'auteur est un jeune homme de vingt-six à vingt-sept ans, qui n'a pas encore vu le monde, ayant presque toujours vécu dans une petite ville de province, à Chartres, où son père était procureur.

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