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tière avec fa fupériorité ordinaire dans les caufes | de la grandeur & de la décadence des romains, & nous ne pouvons rien faire de mieux que d'y renvoyer les lecteurs.

s'il veut avoir une armée, une marine, une cour, des places fortes, des canaux, des chemins ma gnifiques, & d'autres chofes femblables qui ne font pas proportionnées à fes reffources; loin de fe fortifier, il tombe dans la langueur, & il fe prépare le fort des hommes qui ruinent leur for

tune.

5. La dépendance abfolue où fe met une puiffance à l'égard d'une autre, eft encore une caufe de fon affoibliffement. Cette dépendance peut venir, ou de la pareffe nationale, ou du défaut de police, 8°. Le partage que fait un monarque de fon qui réduit un peuple à chercher des denrées empire, perd quelquefois un état. La monarchie des ouvrages d'art, & à mendier des fecours chez que Philippe, roi de Macédoine, avoit fondée, un peuple riche & formidable. Le Portugal pa- & que fon fils rendit prefqu'universelle, s'anéan roiffoit être, il y a quelques années, dans cette tit peu de temps après que les fucceffeurs d'Afituation à l'égard de l'Angleterre ; & fi le cabi- lexandre l'eurent divifé. Le partage que Théodofe net de Saint-James avoit eu des projets de con- fit de l'Empire romain, entre fes fils Arcadius & quêtes en Europe, ou fi l'indépendance du Por- Honorius, fut la première cause de fa décadence. tugal n'avoit pas été maintenue par les intérêts L'Empire formidable d'occident, que Charledes autres puiffances, il eût été difficile de cal-magne avoit établi avec tant de peine, fut déculer les fuites de l'afcendant qu'avoit pris la namembré ou plutôt anéanti, par le partage que tion britannique fur la nation portugaife. Cette cet empereur en fit entre fes enfans. dépendance commence d'abord par le mauvais fyftême politique d'un gouvernement qui époufe toutes les querelles d'un allié puiffant, qui entre trop dans fes vues, qui attache fa fortune à celle du même allié par des liens prefque indiffolubles, ou qui lui vend, pour ainfi dire, toutes fes forces en recevant des fubfides trop confidérables. Alors, s'il eft permis d'employer ici un langage métaphorique, on navigue fur une mer orageufe, on attache fa barque à un vaiffeau du premier rang avec des chaînes qu'on ne fauroit couper, lorfque ce vaiffeau eft en péril, & l'on eft entraîné avec lui dans l'abîme.

6o. Un état qui affecte une grande indépendance & une autorité capable de donner de l'ombrage aux autres fouverains, peut fe ruiner par fa forfanterie; car la nation qui voudroit fe concentrer en elle-même, rompre toutes fes liaisons de commerce ou d'amitié avec le refte de l'Europe, révolteroit les autres puiffances. Il faut cependant obferver que nous ne parlons ici que des peuples en général, & que cette réfolution conviendroit peut-être à la France. La richeffe de fon fol, l'induftrie & la multiplicité de fes habitans, lui donneroient affez de moyens de braver le refte de l'Europe.

7°. Si un état peut s'affoiblir & fe perdre par l'indolence de ceux qui le gouvernent & qui ne favent pas fe fervir de tous fes avantages, faire valoir fes droits, les faire refpecter par fes voifins, il laiffe auffi miner fes fondemens Jorfqu'un fouverain forme des entreprises vaines, chimériques, dangereuses, & qui furpaffent abfolument fes forces. S'il entreprend un commerce qu'il ne fauroit protéger; s'il veut fe faire rendre juftice, les armes à la main, par une puiffance qui a des moyens de l'écrafer; s'il exige des prérogatives & des honneurs extraordinaires; s'il forme des projets de conquêtes trop vaftes; s'il entreprend des travaux femblables à ceux des romains, des bâtimens dignes de l'ancienne Grèce & de l'Egypte;

Rien n'eft donc plus lage ni plus jufte en po litique, que l'établiffement du droit de primogé niture la raifon & l'expérience démontrent que la fucceffion indivisible qui paffe au premier né des mâles, maintient l'état autant que le partage du pays fert à le ruiner. Lorfqu'il s'agit de l'hé ritage d'une couronne, on ne doit pas dire que des fils nés d'un même père ont un droit égal à fa fucceffion, & que les cadets ont à fe plaindre fi l'ainé hérite de tout. Ces raifonnemens que les écrivains de droit public ont trop employé, ne méritent pas une réfutation férieuse. Au refte, dans prefque toutes les contrées où le droit de primogéniture eft établi, on a réglé 1°. que les cadets participeroient à la fucceffion des biens allodiaux, meubles ou immeubles qui ne font point incorporés à la couronne, mais qui relèvent d'elle 2°. que l'ainé qui hériteroit de la fouveraineté feroit obligé de donner aux autres princes de fa maifon un appanage affez confidérable pour fournir à un entretien digne de leur naiffance; 3°. que le fouverain pourroit faire à chacun de fes enfans un établissement convenable, en leur achetant, de fon épargne, des terres & feigneuries qui les miffent hors de la dépendance abfolue du chef de fa famille; mais que ces terres ou feigneuries ne jouiroient d'aucun droit de fouveraineté. S'il faut montrer la fageffe de ces difpofitions, on peut obferver que le droit de primogéniture eft introduit dans tous les fiefs, & qu'on doit diftinguer la fucceffion des fouverains & celle des particuliers. On ne peut partager des hommes & des peuples, comme on partage les autres biens de 1 fortune; & la fouveraineté n'eft pas un bien don le poffeffeur puiffe difpofer, mais une charge un office dont il eft revêtu. D'ailleurs le droit d primogéniture & la création des appanages fon utiles même aux branches d'une maison régnan te. Suppofons en effet un roi qui gouverne un vafte monarchie, & qui la partage entre nombreuse famille ; fi chaque branche conferve c

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droit de partage, au bout de quatre ou cinq générations les portions fubdivifées fe trouveront fi petites, que ces princes qui defcendent d'une fouche refpectable, ne feront que de petits fouverains expofés à toute l'avidité de leurs voifins plus puiffans. Quoique fouverains, ils n'auront plus de grandeur réelle; ils fe trouveront au-deffous des princes appanagés des grandes maisons royales. D'un autre côté, l'état perd peu de chofe ta contribuant aux appanages des princes, lorfqu'ils font obligés de dépenfer, dans le pays même, l'argent qui leur eft fourni pour leur entretien leur luxe met une plus grande valeur en circulation, & cet argent retombe dans la maffe totale des richeffes publiques. S'ils poffèdent des terres, ils les poffèdent à titre de fujets, & de fujets aifés qui peuvent améliorer & embellir ces terres, & en rendre les cultivateurs heureux. Enfin, de quelque côté qu'on confidère l'établiffement des appanages & de la primogéniture, on doit approuver cette invention de la politique.

9. C'eft un axiome en politique que la fouveraineté ne fouffre aucune divifion, parce que tout pouvoir divifé s'affoiblit, & il en résulte que deux princes ne fauroient à la fois occuper le même trône. Toutes ces affociations à l'Empire, fi communes dans l'hiftoire des empereurs, étoient bien mal calculées. Le prince Iwan & Pierre I, placés enfemble fur le trône de Ruffie, auroient fait des maux inexprimables à cet Empire, fi la co-régence eut duré plus long-temps. Un pareil arrangement devient donc une caufe directe de la décadence d'un état. L'hiftoire en fournit mille preuves, & les fimples lumières de la raifon peuvent en convaincre. Il s'agit ici de deux fouverains régnans avec une autorité égale; car lorfqu'un monarque affoibli par l'âge ou par des infirmités, une princeffe qui fuccombe fous le fardeau des affaires publiques, affocie à la régence un fils, un époux, un frère, & fe remet à lui des foins du gouvernement, c'est un autre cas, & les fuites n'en font pas fi dangereufes. Ce prince affocié n'eft alors qu'une espèce de vifir, de premier ministre, qu'on peut dépofer, & qui doit rendre compte au moBarque de fes actions.

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volutions, il eft conftant qu'un pays perd les avantages de fa fituation primitive & que de pareils défaftres mettent en danger la puiflance de l'état. Il n'eft pas befoin de dire qu'un fouverain fage doit prévenir, autant que les forces humaines peuvent le faire, les effets de pareils fléaux, & en réparer les dommages.

La puiffance d'opinion s'affoiblit, & tombe. felon que l'opinion fur laquelle elle eft établie, s'affoiblit dans l'efprit des hommes: voilà pourquoi ceux qui font à la tête d'un pareil état cherchent toujours à perpétuer cette opinion, vraie ou fauffe.

Enfin la puiffance acceffoire s'anéantit, lorfque les provinces éloignées qui la donnent font enlevées par une force étrangère, & paffent en d'autres mains, ou que leur peffeffion devient plus à charge qu'utile à l'état. Si le Portugal venoit à perdre le Brefil & fes poffeffions en Afie; fi les illes & les provinces de Terre-Ferme, qui appartiennent encore à la république de Venife, lui étoient enlevées, le Portugal & Venife fe trouveroient bien affoiblis; la métropole doit donc faire les plus grands efforts pour s'en affurer la confervation. Mais il eft des provinces dont la confervation même devient fi onéreufe, que cette charge énerve l'état & devient la fource de fa foibleffe. L'ifle de Corfe, dont les habitans inquiets, mécontens, mettoient depuis fi long-temps la répu blique de Gênes au défefpoir, en fournit un exemple remarquable. Si la rébellion eût continué dans ce royaume, & que les génois ne l'euffent pas cédé à la France, il eft vraisemblable que l'état de Gênes fe feroit ruiné.

Telles font en général les caufes étrangères de la décadence des états. Examinons quelles en peuvent être les caufes intrinsèques ; 1°. la conftitution vicieuse de l'état : nous dirons ailleurs quelle efpèce de conftitution vicieufe peut détruire un gouvernement.

-L'état le plus réguliérement conftitué peut courir à fa ruine, lorfqu'il eft gouverné par un fouverain infenfé. Les fautes continuelies que fait un prince extravagant, perdent une nation, avant que les miniftres les plus fages puiffent les réparer.

10o. La puiffance d'un état eft réelle ou rela- Malheur à toi, terre, quand ton roi eft jeune tive, ou fondée fur fa fituation locale, ou d'opi- dit l'Eccléfiafte dit l'Eccléfiafte, &c. (1); mais il ne faut pas Dion, ou acceffoire; après avoir développé les prendre cette maxime à la lettre, & l'expreffion principales caufes qui concourent à la décadence de jeune eft bien vague. Les loix naturelles & podes deux premières efpèces de puiffances, exa- fitives éloignent, il eft vrai, de la régence, les rois minons comment les trois dernières peuvent s'af- & les princes mineurs, & leur donnent des tufoiblir par des caufes étrangères. Lorfque la nateurs. Ces cas ont été prévus par-tout, & il n'y ture brife les barrières qui fervent de rempart a guères de pays où les loix ne déterminent l'âge un pays; que les mers & les rivières font impra- que le fouverain doit avoir pour régner & les cables par des bancs de fable; que les campa- perfonnes auxquelles fa tutelle & la régence de gnes font fubmergées ; que les montagnes s'écrou- l'état font confiées, jufqu'à ce qu'il foit parvenu lent; en un mot, quand le fol éprouve des ré-à fa majorité : mais les maux qu'entraînent ordi

1) Ecclefiafte, chap. x. verf. 16,

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nairement ces minorités, défolent les peuples & les provinces. Ce font des temps orageux où toutes les paffions s'enflamment, & où chacune produit de funeftes effets.

2o. Il ne fuffit pas que la forme d'un gouvernement foit régulière & le prince fage; il faut encore, pour conferver l'état, des miniftres fidèles.

3°. Le relâchement dans les moeurs, dans le maintien du bon ordre & de la fociété, & dans l'obfervation des loix eft encore une caufe directe & intrinsèque de la decadence d'un état. C'eft le peuple qui fait l'état; fi le peuple s'abandonne au vice, une ou deux générations fuffiront pour l'énerver: l'expérience de tous les fiècles attefte ce fait.

4°. Dans les pays où la liberté naturelle des hommes eft opprimée fous un joug defpotique, l'état ne fauroit être bien formidable. Il n'y a pas un inftant où le defpote ne foit en danger de périr fur fon trône, & il en coûte mille fois plus de fe faire obéir par le pouvoir abfolu que par le pouvoir des loix.

5°. Il eft affreux de le dire; mais l'homme doit s'accoutumer aux plus triftes vérités : une trop grande liberté devient quelquefois la caufe de la décadence d'un état. Lorsque la liberté arrive à l'excès de la licence, c'eft le plus dangereux excès où une nation puiffe tomber. L'extrême foibleffe du royaume de Pologne & la léthargie de la république de Hollande n'ont prefque d'autre

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8°. A quoi fert-il que l'état foit bien conftitué, le prince fage, les mniftres excellens, les mœurs bonnes, fi les loix font ridicules? Les loix doivent être non-feulement pleines de fageffe en ellesmêmes, mais auffi convenables au pays pour le quel on les a faites. Une feule loi infenfée furtout lorsqu'elle porte fur un objet relatif à la conftitution de l'état, peut faire des maux inexprimables. M. de Montefquieu remarque (1) avec beaucoup de jufteffe que Conftantin fit une faute infigne, lorfqu'en transférant le fiége de l'Empire à Conftantinople, & voulant que fa nouvelle ville reflemblât en tout à l'ancienne, il voulut qu'on y diftribuât auffi du bled au peuple, & ordonna celui d'Egypte y feroit déformais envoyé.

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() Grandeur & décadence des romains, chap. XVII,

Cette loi devint une des caufes de la décadence de l'empire d'Orient.

9. Les colonies trop fortes que l'état envoie dans des provinces éloignées, & fur-tout en d'autres parties du monde, l'affoibliffent & deviennent une cause intrinsèque de fa décadence. Je dis trop fortes; car il ne s'agit pas icr des co lonies que la Hollande, l'Angleterre & la France, par exemple, entretiennent dans leurs poffeffions d'Afie & d'Amérique : car, outre que ces nations font nombreuses par elles-mêmes, & qu'elles y portent beaucoup de fujets étrangers, il faut obferver que ces colonies procurent à la métropole cinq efpèces d'avantages qui compenfent la perte plus apparente que réelle qu'elle fait de quelques-uns de fes citoyens. Ces avantages font, 1°. une plus grande confommation des productions de fes terres que la métropole y envoie ; 2°. l'augmentation d'un plus grand nombre de manufacturiers, artifans, &c. qui s'occupent des befoins des colonies; 3°. l'accroiffement de la navigation & de tous les ouvriers qui y concourent; 4°. l'exportation d'une plus grande quantité de denrées, & 5. un plus grand fuperflu de denrées & marchandifes que ces colonies rendent, & que la métropole fournit de fon commerce. Nous entendons ici par colonies trop fortes ces espèces d'émigrations, telles que l'Espagne les ordonna ou les permit après la découverte du nouveau-Monde.

10°. Le relâchement dans la difcipline militaire conduit auffi un état à fa perte. Prefque toutes les monarchies anciennes ou modernes fe font brifée contre cet écueil.

11o. Un état peut avoir deux efpèces de dettes les unes occafionnées par des fecours donnés au utiles, & au foulagement des peuples, &c. le manufactures, au commerce, à des établissemen autres viennent des dépenfes mal calculées du fou verain. L'excès de cette dernière efpèce de dett ne peut qu'énerver l'état, & le mener à une ruin certaine. Si le pays même n'a aucun équivale pour la dette contractée fur fon crédit; s'il n pas affez de moyen pour regagner, par la balan de fon commerce, les intérêts des capitaux e pruntés, que l'état paye annuellement, il ne tard pas à manquer à fes engagemens, & perfonne peut calculer les fuites funeftes que produit banqueroute d'un fouverain. Nous ofons préd ici que cette caufe de décadence fi moderne b leverfera l'Europe dans quelques fiècles.

12°. Dans les monarchies, les démêlés co nuels entre les miniftres, les généraux & les tres perfonnes en place; dans les républiques divifions entre le fénat & le peuple, entre les giftrats & les chefs du gouvernement › peu mener facilement l'état à fa décadence, & d décadence à sa chûte.

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Outre les caufes générales de la décadence des, nous avons fi peu de monumens de fes annales, états, il y en a plufieurs de particulières; mais qu'il feroit difficile d'entrer ici dans des détails elles font fi indirectes & en fi grand nombre, que bien fuivis & bien exacts. Il paroît qu'il étoit les bornes de cet article ne nous permettent pas gouverné depuis plufieurs fiècles par des rois ; de les développer. Nous dirons, avant de le termi- mais ces rois n'étoient-ils que des vicerois du moner, à quels indices on peut reconnoître fi un état gol ou des foubahs? c'eft ce qu'on ne peut dés'élève ou s'affoiblit. Ces indices, femblables aux brouiller. Quoi qu'il en foit, celui qui donnoit fymptômes de la fanté ou des maladies du corps des loix au Decan étoit tributaire du mogol, furhumain, font intérieurs, ou fe manifestent au tout depuis le règne d'Idal-Schah. Cette exprefdehors. L'accroiffement ou la diminution des re- fion de tributaire fuppoferoit l'indépendance des venus publics forme le thermomètre le plus fûr de gouverneurs du Decan; mais il ne faut peut-être la profpérité d'un pays; mais, pour en bien ju- pas la prendre à la lettre. Chavas, homme d'ef ger, il faut qu'ils foient perçus en tems de paix prit & de coeur, parvenu de l'esclavage à des par les voies ordinaires de recouvrement, fans charges confidérables, étoit régent du royaume exactions, fans nouveaux impôts, fans des tailles pendant la minorité de ce prince. Il payoit exacarbitraires, fans capitations, ou fans aucune opé- tement aux commiffaires du mogol, les trente ration forcée. L'accroiffement de la population, millions de pagodes que le maître du Decan lui qu'il ne faut pas cependant admettre ici comme devoit alors de tribut annuel; mais, lors de leur une règle générale, ainfi que l'ont fait quelques retour, il les faifoit attaquer par des gens apof écrivains, puifqu'en Afrique & en Afie on voit tés, qui lui rapportoient tout l'argent. Sa males hommes fe multiplier outre mefure, fous la verge noeuvre fut découverte. Le mogol entra dans le de la tyrannie; les progrès de l'induftrie qui fe royaume avec deux cents mille hommes, & fut font fans efforts, l'accroiffement du commerce arrêté deux ans au fiège du Château de Perinda, que l'on peut connoître par un fimple dépouille- que des hollandois qui s'y trouvoient prifonniers, ment des regiftres de la douane, la profpérité des aidèrent à défendre. On dit que le Decan pou manufactures anciennes ou nouvelles, quelquefois voit mettre aifément fur pied deux cents mille l'agrandiffement de la capitale, la conftruction hommes. On ne trouvoit autant d'artillerie dans des nouveaux édifices ou la réparation des vieux, aucune contrée de l'Inde; mais depuis que les le fuccès des arts, l'humeur contente du peuple, européens y ont porté ou excité la guerre, dele bon état de l'armée & de la marine, la cherté puis les bouleverfemens qu'y ont caufé les prinproportionnelle des vivres, le cours du change, ces de l'Inde, il y a lieu de croire que ce difl'arrivée des étrangers qui viennent s'établir dans trict n'eft plus en auffi bon état. Le mogol le pays, la liberté & le bon ordre qui y règnent, eft cenfé pofféder aujourd'hui ce pays, qui ces diverfes chofes annoncent la profpérité de l'é- n'a plus de roi particulier. Il y entretenoit autat, & le contraire prouve fa décadence. L'in- trefois huit mille chevaux de garnifon, & il en fluence que le fouverain acquiert dans les affaires tiroit pour fes domaines un crore, foixante-deux générales de l'Europe, la recherche empreffée que lacs, quatre mille fept cents cinquante roupies, d'autres princes font de fon alliance, la gloire c c'eft-à-dire, 10,204,750 roupies. Un crore vaut qu'il obtient par fes armes, les traités avantageux cent lacs; un lac vaut cent mille roupies, & une qu'il obtient dans les affaires politiques ou pour roupie environ trente fous de France. Ainfi le le commerce de fes fujets, fon pavillon que l'on mogol tiroit chaque année du Decan quinze milvoit flotter dans toutes les mers & dans tous les lions trois cents fept mille cent vingt-cinq livres. ports étrangers, les égards & les diftinctions que On fait que le grand - mogol eft aujourd'hui l'on montre dans d'autres cours à fes miniftres; à la folde & à la merci des anglois & des princ'eft par là que les nations étrangères reconnoif- ces de l'Inde. Le foubah gouverne le Decan pour fent le degré de profpérité, de grandeur où de lui-même & par lui-même. foibleffe où fe trouve chaque peuple, & l'homme d'état doit avoir fans ceffe les yeux ouverts fur ces objets. DECAN, contrée des Indes dans la prefqu'ifle en-deçà du Gange, au midi du Mogol; elle formoit autrefois un royaume féparé; mais aujourd'hui les indoux donnent ce nom aux provinces les plus méridionales de l'empire mogol: le foubah du Decan devroit exercer les fonctions de viceroi dans ces provinces; mais les rajahs, les nababs & les princes qui fe font formés des états indépendans ne refpectent guères fon autorité.

L'hiftoire politique du Decan eft fi obfcure;

Le Decan eft divifé en huit farcars ou provin ces, & chaque farcar en foixante-dix-neuf perganas ou gouvernemens : ce feroit la contrée de

Inde la plus formidable pour les européens, fi elle fe trouvoit plus près des côtes.

Nader Scha, roi de Perfe, vulgairement appellé Thamas Koulikan, avant de quitter Delhy pour retourner dans fes états, fit un traité avec Méhémet-Scha, empereur des mogols, dans le quel il fut ftatué que la charge de grand-vifir & toutes les foubabies ou vice-royautés (1), alors

(1) On ne peut mieux définir le titre, le pouvoir & les prérogatives du foubah qu'en traduifint ce mot Econ. polit, & diplomatique. Tom. II. E

au nombre de neuf, feroient héréditaires dans les ! familles qui les poffédoient le monarque perfan calcula très-bien fes intérêts, en ordonnant cet article; il voulut divifer l'empire ogol, dont il avoit appris à connoître la force; l'armée de 1,200,000 hommes, qu'on venoit de raffembler contre lui, auroit pu, fous un autre empereur que Méhémet-Scha, venger les infultes faites au fouverain qui régnoit dans l'Inde: il paroit que Nader Scha fut bien aife d'ailleurs de fervir l'ambition de Nizam-el-Moulouc, grand-vifir & foubah du Decan, qui, pour fe venger d'une infulte qu'il avoit reçue de Méhémet-Scha, avoit attiré le roi de Perfe dans l'Empire, & l'avoit fauvé dans une entreprise auffi téméraire.

Outre les royaumes & autres pays tributaires la foubabie du Decan comprenoit différens gouvernemens, plus ou moins grands, qui étoient amovibles, & que le foubah avoit le pouvoir de donner; mais dont la nomination devoit être confirmée par les empereurs.

Lorfque la foubabie devint héréditaire, les foubahs prétendirent avoir le droit de nommer irré-vocablement les gouverneurs, que les européens appellent nababs, fans qu'il fût néceffaire d'aucune confirmation ou ratification de la cour de Dehli.

Un écrivain qui a parcouru les diverfes contrées de l'Inde, a trouvé dans le Decan de belles pièces d'artillerie de fabrique européenLa foubabie du Decan, telle que Nizam-el- ne; il y vit au moins trente canons fondus en Moulouc la poffédoit, faifoit au moins le tiers France fous le règne de Louis XIV; c'étoit le refte de l'empire mogol, puifque tout le pays qui s'é- de l'artillerie perdue dans le naufrage de l'efcadre tend du golfe de Cambaye au Bengale, apparte- de M. de la Haye, dans la rade de Mafulipatnam; noit à cette foubabie, dont Aurengabad & Ay- cette place appartenoit alors aux rois de Golconderabad étoient les villes capitales; il paroît auffi de, qui étoient foubahs du Decan, & qui qu'elle s'étendoit fur toutes les côtes de la pref-firent retirer du fond de la mer les canons des qu'ifle, depuis Cambaye jufqu'au golfe de Ben- vaiffeaux françois. gale.

Ce vafte gouvernement étoit divifé en plufieurs diftricts, parmi lesquels ou comptoit des royaumes ou des états prefqu'indépendans régis par leurs chefs, qu'on appelloit des rois, & par leurs loix particulières : ces rois n'étoient, pour ainfi dire, que tributaires de l'Empire; ils devoient fournir un certain nombre de troupes à l'armée du foubah, & ils fe faifoient très-fouvent un honmeur de les conduire en perfonne : les principaux de ces royaumes étoient ceux des marattes, de Canara & de Mayffour.

Le principal commerce du Decan eft le poivre, que l'on transporte en Perfe, à Surate & en Europe. Il fournit des vivres aux provinces voisines, & il fait un commerce par terre avec l'Indoftan, le royaume de Golconde & la côte de Coromandel, où fes fujets portent des toiles de coton & des étoffes de foie.

l'arc & la flèche avec autant d'adreffe que les hommes; enforte qu'ils ne craignent ni les rasboutes ou foldats, ni les couliers, qui font des voleurs qu'on trouve ordinairement fur cette route.

Les venefeurs font une peuplade du pays : ils achètent le bled & le riz qu'on apporte dans les villes une fois par femaine, & ils le revendent dans les pays voifins, où ils vont en caravanes de cinq ou fix, & quelquefois de neuf ou dix mille Quelques-uns de ces rovaumes & de ces états bêtes de fomme. Ils emmènent alors leurs familétoient peu foumis; le Canara, par exemple, défendules, & particuliérement leurs femmes qui manient par fes forêts & fes montagnes qui rendent ce pays de difficile accès, montroit peu de refpect pour le foubah; les marattes ne paroiffoient foumis que lorfqu'ils étoient d'accord avec le foubah fur le paiement du chotaie, ou cinquième du revenu du Decan que l'empereur Aurengzeb leur avoit accordé ; & leur population confidérable leur fourniffoit de nombreufes & fortes armées, & furtout une cavalerie dont il étoit difficile d'arrêter les incurfions enfin d'autres états, quoique compris dans la foubabie du Decan, n'avoient point encore été fubjugués. Tels étoient le petit empire de Calicut ou du Samorin, & les domaines des princes noirs fur la côte Malabare, où les montagnes, les gorges & les forêts avoient empêché les armées des mogols de pénétrer.

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Voyez les articles ARCATE, CALICUT, CANARA, COROMANDEL, MAISSOUR, MALA BAR, MADRASS, SEIRRA & TANJAOUR.

DÉCEMVIR, magiftrat romain qu'on chargea de faire des loix, & qu'on revêtit d'une autorite fouveraine fur cet objet.

Les décemvirs furent ainfi nommés, parce qu'il étoient au nombre de dix: leur autorité devoi finir après une année d'exercice; mais le pouvoi eut pour eux tant de charmes, qu'ils s'engagèren par ferment à faire tous leur efforts pour le gar der toute leur vie. Nous allons rappeller ici le

par celui de vicaire-général de l'Empire; cette charge donnoit à celui qui en étoit révêtu, de l'autorité fu les rois & vaflaux de l'Empire; le foubah leur conmandoit, ainfi qu'a l'empereur lui-même, à-peu-pre comme le vicaire général de l'Empire commanderoit en Italie, fi cette dignité fubfiftoit encore. Le fouba a l'air de recomoître le mogol pour fon maître; au refte il réclameroit en vain les titres de fa charge, & ne s'en avife plus.

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