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ale territoire dantzicois. Le colonel de Pirch, » voulant faire paffer fur la Viftule un bâtiment » pruffien, fut infulté, avec les foldats qui l'accompagnoient, par la populace, de la manière » la plus groffière, fans que la garnifon du Blo» chauff, qui fe trouvoit tout près de là, eût » cherché à l'empêcher. Le confeiller de la ré- gence, Meyer, fut attaqué dans la ville avec danger de fa vie, & le magiftrat s'excufa fur * ce qu'il ne pouvoit retenir la fougue du peuple. Le magiftrat fe replie toujours dans cette affaire fur la volonté & les réfolutions de la » bourgeoisie, & de ce qu'il nomme le troifième » ordre, duquel il prétend être gêné, & au "point de ne pouvoir agir autrement. Une obfti"nation auffi décidée obligea le roi à donner " aux repréfailles un nouveau degré de force: on interrompit le commerce des dantzicois par ter"re, & on fit arrêter leurs vaiffeaux au Neu

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» troupes du roi n'avoient pas touché jufques-là;
d'enfermer cette ville de tous côtés, par mer &
» par terre, quoique dans une certaine diftance;
d'obferver, du refte, la difcipline la plus fé-
» vère, & de laiffer paffer fans difficulté tous
» les vaiffeaux étrangers. Cette démarche même
» n'a pu encore vaincre l'obftination de la ville
» de Dantzic, & n'a produit qu'une réponse va-
"gue au général d'Eglofstein, dans laquelle le
magiftrat renouvelle fa première déclaration,
qui porte fur un intérémittice de deux mois
» & envisageant comme obligatoires les premières
» offres qu'on n'avoit fait que par condescendan-
»ce, fe plaint de ce qu'on exige maintenant une
» liberté entière & illimitée de la navigation. II
» est vrai que, durant cette conteftation, le roi
"a fait propofer plufieurs fois, tant à la cour de
» Varfovie qu'au magiftrat de Dantzic, d'accor-
» der aux fujets du roi le libre paffage, feule-
» ment falvo jure, & jufqu'à l'époque d'un ar-
"rangement amical; mais, fuivant la nature des
» chofes & l'équité la plus manifefte, ces pro-

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fahrwaffer. Ces nouvelles mesures reftèrent en2 core fans fruit. Le magiftrat crut fe tirer d'affaire, » parla déclaration plaufible qu'il avoit abandonné toute l'affaire à fon fouverain le roi de Pologne. pofitions portoient fur un commerce entiérement » Comme en d'autres occafions, où elle n'y trou- » libre, & non reftreint à un court espace de » voit pas fon compte, elle a toujours évité de » temps. Or le magiftrat les ayant déclinées, & » reconnoître la fouveraineté de la Pologne, par » ne les ayant enfin acceptées que comme par exemple, en rejettant la convention conclue "grace, & en reftreignant fa conceffion d'une » entre la Pruffe & la Pologne, pour l'abolition » manière vague & infidieufe aux denrées de conde la traite foraine, on auroit pu avec raifon » fommation des fujets pruffiens & au court ef » décliner la médiation d'une cour éloignée, par » pace de deux mois inutiles pour la navigation, » rapport à une prétention auffi étrange. Cepen- » & qu'il auroit fans doute laiffé écouler fans » dant on attendit encore l'effet des foins du comte >> arranger l'affaire, après que les repréfailles au» d'Uuruhe que le roi de Pologne avoit envoyé »roient une fois été lévées; fa majesté ne peut à Dantzic; toutes les repréfentations de ce » être rappellée à des offres volontaires & non ac» miniftre n'opérèrent que la déclaration à laquelle » ceptées, & voyant la mauvaise volonté de "la ville fe détermina enfin de vouloir rendre la » la ville de Dantzic, & son obftination à oppri» liberté du commerce & de la navigation aux » mer conftamment les fujets pruffiens, elle ne "fujets du roi ; mais falvo jure, feulement jufqu'à » peut qu'infifter maintenant fur une définition » la fin de cette année, uniquement pour les den- » entière & radicale de l'affaire, & fur la con»rées de confommation, fous condition que tou- » ceffion illimitée du libre paffage de fes fujets "tes les repréfailles cefferoient auffi-tôt. Il étoit » fur le territoire de Dantzic, & jufques-là con> impoffible d'accepter une propofition auffi infi- »tinuer les mesures qu'elle a été obligée d'adop» dieuse, puifque la ville obtenoit par-là une re- »ter. Mais comme elle n'a jamais eu & n'a es ≫ connoiffance indirecte de fa prétention, & la » core aucun deffein hoftile ou contraire aux » ceffation entière des repréfailles que l'on ne re- » traités contre la ville de Dantzic ; qu'elle eft feu» commence pas aiféinent, tandis que les fujets »lement difpofée à foutenir fon commerce d'une » du roi n'obtenoient que pour deux mois d'hiver, » manière conforme aux avantages de fes propres » où la nature même y met obftacle, cette liberté » états, ces repréfailles ne dureront auffi que juf» de commerce & de navigation dont ils ont joui qu'à ce que cette ville ait remis fur l'ancien pied » de tout temps, & qu'on n'auroit pas manqué » le commerce libre des fujets pruffiens, leur » de leur contefter bientôt après. Le roi n'efpéait affuré folemnellement, pour leurs perfonrant plus obtenir, par la voie des repréfen- » nes & marchandifes, le libre paffage par fon ➡tations, de la négociation, & même de repré-» territoire, & ait procuré à fa majesté une fa failles modérées, cette liberté naturelle qu'il »tisfaction convenable pour les procédés infolers qu'on s'eft permis envers fes officiers & fujets ; » ces points accordés, les repréfilles cefferont » auffi-tôt ».

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» réclamoit pour les fujets, s'eft vu avec regret "forcé de paffer à des mefures plus férieufes. Sa » majesté a ordonné en conféquence au général major Baron d'Eglofstein d'entrer avec quatre » bataillons d'infanterie & quatre efcadrons de cavalerie fur le territoire de Dantzic, que les Econ polit. & diplomatique. Tome II.

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Il feroit inutile d'examiner les raifons que donne ce manifefte; il fuffit de dire que le roi de Pruffe a obtenu une fatisfaction complette. Voici

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les articles principaux de la convention définitive, telle qu'elle a été publiée en 1785.

ment,

tement, & ne permettre à aucun de fes fujets de fe meler du commerce d'exportation fur mer. De plus, le roi permettra à la ville de Danizic d'y conftituer pour elle & de fa part un agent qui puiffe avoir l'oeil à ce qu'il ne fe commette aucune contravention à cet égard, & qu'il n'y foit exercé aucun commerce de mer par les fujets pruffiens, foit en productions de Pologne, foit en celles de Pruffe.

commiflaire fe croiroit en droit de faire fur les navires pruffiens, il ne fera point autorifé à en faire ; mais il fe contentera, dans tous les cas où il pourra remarquer ou foupçonner quelque exportation fur mer par un bâtiment pruffien, de faire fon rapport à ce fujet aux officiers du bureau des péages, qui y remédieront fur le champ, finon il en donnera avis au magiftrat même de Dantzic, qui fe fera rendre juftice par la voie du réfident du roi, ou par celle du ministère, s'il le jugeoit néceffaire, lequel ne manquera pas de redreffer promptement tout ce qui aura pu être commis en contravention à cet article.

L Le magiftrat de la ville de Dantzic reconnoît que le procédé de cette dernière envers fa majefté, ainfi qu'à l'égard de fes fujets, a été outré & porté jufqu'à l'offenfe par erreur ou préOccupation d'efprit; &, après cet aveu, il fe croit dans l'obligation de faire des excufes du paffé à fa majeté, au nom de ladite ville, avec promeffe qu'à l'avenir il réglera fa conduite de Pour prévenir tout défordre, difpute ou quemaniére à ne plus donner aucun fujet de mécon-relle qui pourroient réfulter des vifites que ce tentement à S. M. ni de plainte fondée à fes fujets. II. Le commerce & le paffage libres des fujets royaux, tant par eau que par terre, par le territoire de la ville de Dantzic, ayant formé le point principal de la conteftation; le magiftrat déclare par la préfente, & s'engage folemnelleau nom de ladite ville & de tous fes or dres, à accorder dorénavant à tous les fujets du roi, foit par eau ou par terre & fur tous les bras que forme la Viftule, la même liberté de commerce & de navigation par le territoire de la ville, à l'égard de tout ce qu'ils jugeront à propos de tranfporter d'une partie des états du roi dans l'autre, que celle dont jouiffent les habitans mê mes de Dantzic, foit en naviguant fur la Viftule, foit en tranfportant par terre leurs marchandifes, par les états dépendans de fa majefté; ladite ville s'engageant en outre à rétablir le chemin & le paffage par le Ganfekrug, & à en permettre l'ufage aux fujets du roi, à la réferve cependant à fa volonté de féparer ce chemin dans les endroits où il s'approche trop des fortifications; ou, fi cela n'étoit pas faisable, d'y établir des barrières qui fe fermeroient la nuit, & n'en permettroient F'ouverture que de jour, en y attachant un droit de paffage, en conformité de ceux perçus dans d'autres endroits, & auxquels les fujets du roi feront affujettis fur un pied d'égalité avec les habitans de la ville.

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III. En revanche, le roi ayant fincérement cœur le bien-être de la ville de Danizic, & fou haitant de lui conferver particuliérement le commerce des marchandifes de Pologne, fa majefté łui abandonne exclufivement ledit commerce d'exportation fur mer, en tant qu'il peut fe faire fur la Viftule par la ville & le territoire de Dant gic; de manière que les habitans de cette ville jouiront feuls du droit de tranfporter fur la Viftule toutes les productions de la Pologne & autres marchandifes quelconques qui feront destinées pour Dantzic, & qui devront être exportées aul delà fur mer.

En conféquence fa majefté ordonne férieufement à fes fujets de s'abftenir de tout commerce exportatif de mer par la voie de Dantzia & du Fahrwaffer; &, afin qu'on fe conforme d'autant plus à fon intention à ce fujet, elle donnera les ordres les plus mefurés aux officiers du bureau de péage au Neu-Fahrwaffer pour y veiller exac

La ville de Dantzic étant ainfi fuffisamment raffurée contre toute exportation sur mer de la part des fujets pruffiens, ceux-ci en revanche jouiront de la liberté de fe procurer toutes leurs néceflités, effets, marchandises de quels lieux qu'ils jugeront à propos, & de les transporter librement par le territoire de la ville de Danizic; comme celle-ci reconnoît avec gratitude les fentimens de générosité de fa majefté à fon égard, elle promet de ne pas charger lefdites marchandifes ou effets des fujets du roi en paffant par le territoire de la ville, des droits & péages excédans ceux que fes propres habitans ont coutume de payer en pareils cas.

IV. Le commerce d'importation par mer du côté du Fahrwaffer fera libre aux fujets des deux parties contractantes; mais afin d'obferver une jufte balance, fa majefté confent que fur tous les ef fets & marchandifes appartenans aux fujets pruf fiens & importés du côté de la mer, le magiftra de Dantzic foit autorifé à faire percevoir tel droits d'entrée & de tranfit par le Fahrwaffer qu'il jugera à propos, pourvu toutefois qu'ils n'ex cèdent pas ceux qu'on a coutume de payer au bureaux des péages pruffiens. En revanche, ledi magiftrat promet de faire lever les droits fufdit au Blokhaus & non dans la ville, afin que le bâtimens pruffiens ne foient plus dans le cas d décharger leurs cargaifons, ni forcés d'entrer dan la ville: confent en outre ledit magiftrat que le connoiffemens que produiront les maîtres de ce mêmes navires aux douaniers dantzicois, foier reçus & reconnus par ceux-ci comme des doc mens valables, & leurs cargaifons exemptes toute vifite.

Mais dans le cas d'un foupçon fondé que pou

roit former le magiftrat fur l'infidélité de ces connoiffemens, par laquelle ces douanes feroient injuttement fraudées des droits qui leur font dus, il fera en ce cas autorisé à faire arrêter au Blockhaus le navire fufpecté, pour lui faire fubir la vifite felon l'ordre preferit, à laquelle cependant doit affifter néceffairement le réfident du roi, & au défaut de celui-ci, fon chargé d'affaires, lefquels auront été préalablement avertis, afin d'empêcher par leur préfence tout défordre ou violence, & écarter la partialité qui accompagne d'ordinaire une pareille vifite.

Le magiftrat de Dantzic promet de plus d'accorder le paffage libre & exempt de tous droits de péage & de tranfit à tous les effets & biens appartenans en propre à fa majefté pruffienne, tels que les fels communs, porcelaine, fer, tabac, uniformes de troupes, fufils, poudre, & géné-à ralement toutes les munitions & armes de toutes efpèces qu'exige l'entretien de fes armées, ainfi qu'aux tranfports des fels appartenans à la compagnie ou commerce maritime, qui feront munis de paffe-ports fignés par le ministère de Pruffe. Le lecteur obfervera fans doute que les précautions ordonnées par l'article 3 feront tôt ou tard infuffifantes, & que Dantzic ne jouira pas longtemps du droit exclufif fur le commerce d'exportation des grains de la Pologne.

DARIEN (Ifthme de Darien). Cette étroite langue de terre, qui joint l'Amérique méridionale à la feptentrionale, appartient aux efpagnols: elle eft fortifiée par une chaîne de hautes montagnes affez folides pour réfifter à l'impulfion des deux océans oppofés. Le pays eft fi aride, fi pluvieux, fi mal fain, fi rempli d'infectes, que les efpagnols n'auroient jamais vraisemblablement fongé à s'y fixer, s'ils n'euffent trouvé à PortoBello & à Panama des havres favorables pour établir une communication facile entre la mer Atlanti que & la mer du Sud. Le refte de l'ifthme les attira fi peu, que les établiffemens de Sainte-Marie & de nombre de Dios qu'on y avoit d'abord formés, ne tardèrent pas à s'anéantir.

Cet abandon détermina, en 1698, douze cens écoffois à s'y rendre. La fociété unie pour cette entreprise fe propofoit de gagner la confiance du petit nombre de fauvages que le feu n'avoit pas détruits, de leur mettre les armes à la main contre la nation dont ils avoient éprouvé la férocité, d'exploiter des mines qu'on croyoit plus abondantes qu'elles ne le font, de couper le paffage aux galions par des croifières habilement dirigées, & de combiner affez heureusement fes forces avec celles de la Jamaïque, pour prendre l'empire dans cette partie du nouveau-Monde.

Un projet auffi menaçant déplut à la cour de Madrid, qui parut déterminée à confifquer les

effets de tous les anglois qui trafiquoient fi utile ment dans fes royaumes. Il déplut à Louis XIV, qui offrit à une puiffance déja trop affoiblie une efcadre fuffifante pour le faire échouer. Il déplut aux hollandois, qui craignirent que la nouvelle compagnie ne partageât un jour avec eux le commerce interlope dont ils étoient feuls en poffeffion. Il déplut au ministère britannique même, qui prévit que l'Ecoffe devenue riche voudroit fortir de l'efpèce de dépendance où fa pauvreté l'avoit jufqu'alors réduite: cette oppofition violente & univerfelle détermina le roi Guillaume à révoquer une permiffion que fes favoris lui avoient arrachée. Ce fut alors une néceffité d'évacuer l'ifle d'Or, où la nouvelle colonie avoit été placée.

Mais la crainte feule qu'avoient eue les efpagnols de fe voir un pareil voifin, les détermina s'occuper eux-mêmes d'une contrée qu'ils avoient toujours jufqu'alors dédaignée. Leurs miffionnaires réuffirent à forner neuf ou dix bourgades, dont chacune contenoit depuis cent cinquante juf qu'à deux cens fauvages. Soit inconftance dans les indiens, foit dureté dans leurs conducteurs, ces établiffemens naiffans commencèrent à déchoir en 1716; & de nos jours, il n'en refte plus que trois, défendus par quatre petits forts & par cent foldats.

DARMSTADT. (HESSE) Nous renvoyons à l'article HESSE tout ce qui regarde les états de Heffe-Darmstad, ainsi que les détails relatifs aux poffeffions de la maifon de Heffe & des branches de Heffe-Rhinfels, de Heffe - Hombourg, de Heffe-Philipftal & de Heff-Rothenbourg.

DATAIRE.? Voyez le Dictionnaire de Jurif
DATERIE. Sprudence.

DAUPHIN, titre que porte en France le fils ainé du roi.

Charles V, petit - fils de Philippe de Valois, eft le premier qui l'ait porté; & Gui VIII eft le premier prince du Dauphiné qu'on ait appellé dauphin. Ce ne fut d'abord qu'un furnom qu'on lui donna, parce que le cimier de fon cafque avoit la forme d'un dauphin. Ses fucceffeurs le prirent enfuite comme une qualité honorifique, & ils appellèrent leur territoire le Dauphiné, Guigues II ajouta à fon nom le titre de Viennois, & le nomma dauphin de Viennois. Humbert II établit fon confeil à Grenoble, fupprima dans fes armes les deux tours, & n'y laiffa que des dauphins. Ce prince n'avoit point d'enfans, & comme il étoit très-pieux il refolut de quitter le monde & d'entrer dans l'ordre des Dominicains : du confentement du pape, & de celui des peuples & des feigneurs qu'il avoit conquis, ou dont il avoit acheté la vaffalité, il céda fes états à la France par deux traités : le premier eft de 1343 ɔ & le fecond eft de 1349 (1).

(1) Voy: la donation, page zio de la feconde partie du 1er volume du Corps diplomatique. Voyez aufli

Il revêtit Charles V de fon droit, en lui remettant l'ancienne épée du Dauphiné, la bannière de S. Georges & l'anneau. Cette ceffion ne comprenoit que le Viennois, le Grefivaudan, l'Embrunois & le Gapençois. Le Diois, le Valentinois ont été depuis joints au Dauphiné; Louis Aymard, comte de Poitiers, n'ayant point de poftérité inftitua le dauphin de France pour fon héritier en 1419, & les deux comtés furent réunis an domaine delphinal, par tranfaction des 16 juillet 1419, 14 août 1426 & 7 décembre 1454.

A l'égard de la manière dont les dauphins acquirent leur territoire & leur jurifdiction, l'hiftoire nous apprend que Ifarne, évêque de Grenoble, chaffa les farrafins qui s'étoient emparés de cette ville & de fon territoire en 963: en conféquence, Frédéric I donna en 1161 la ville de Grenoble en fief à fes évêques, avec tous les droits de régale ; il qualifia l'évêque du titre de prince. Gui ou Guigues VIII, furnommé dauphin, vint, les armes à la main, & força SaintHugues à lui céder la moitié de la jurifdiction de la ville de Grenoble, & à pofer des limites entre les deux territoires; le fait eft conftaté dans l'acte que l'on appelle le Cartulaire Saint- Hugues. Les dauphins voulurent fe fixer dans Grenoble, & en conféquence ils achetèrent de l'évêque le droit de s'y établir: peu-à-peu ils s'arrogèrent toute l'autorité. Quelques perfonnes croient que les dauphins n'étoient point fouverains, mais feigneurs du Dauphiné; ils obfervent 1°. que les dauphins n'étoient que fimples vicaires de l'Empire, & qu'ils en prenoient la qualité : 2°. ils recouroient à l'empereur pour avoir le droit de faire battre monnoie, & pour obtenir la poffeffion des mines; 3°. quoiqu'ils euffent droit de vie & de mort fur leurs fujets & de faire la guerre à leurs voifins, ainfi que la plupart des autres feigneurs, cependant ils ne jouiffoient pas des droits de grande régale; bien plus, dans les différends qu'ils avoient, ils recouroient à l'empereur pour obtenir juftice de lui feul. Ils n'ont jamais pris la qualité de fouverains, mais de fimples feigneurs de telle ou telle ville.

La ceffion du Dauphiné déclara que les rois de France ne pourroient exiger que les droits & fervices établis, & qu'ils maintiendroient les privilèges du peuple, de la nobleffe & des eccléfiaftiques. Quelque tens après, les peuples du Dau

phiné les menacèrent de les appeller au tribunal de l'Empire.

Lors de la ceffion du Dauphiné, les nobles vouloient fe donner au duc de Savoie, & les eccléfiaftiques préférerent le roi de France, qui étoit un prince plus puiffant. Les jurifconfultes & les écrivains de droit public prétendent que le Dauphiné eft annexé à la France, & qu'il n'y fera incorporé que lorfque les rois de France feront empereurs. Dumoulin dit à ce sujet: Delphinatus non eft de regno, fed annexus eft regno Gallia. Mais cette vaine difcuffion eft aujourd'hui bien inutile.

On trouvera, dans le Cérémonial de la France, les cérémonies qui s'obfervent lors de la naiffance, de l'éducation & des obfèques des dauphins. Au moment où le roi de France meurt, le dauphin elt reconnu pour roi & légitime fucceffeur, quoiqu'il ne foit encore ni facré, ni couronné: le nouveau roi exerce le droit de joyeux avénement, qui confifte dans le droit de créer de nouvelles maitrifes dans les arts & métiers, & de nommer à la première prébende de chaque cathédrale ou collégiale, même au préjudice du droit des gradués: ce droit eft annexé à celui de régner. Les loix fondamentales du royaume nomment les dauphins fucceffeurs à la couronne.

DAUPHINÉ. Voyez l'article précédent. DÉCADENCE DES ÉTATS, nom par lequel on défigne l'anéantiffement ou la chute des nations qui perdent leur indépendance ou leur force. Nous avons traité de l'accroiffement des états (1): nous avons dit de quelle manière les états acquièrent & maintiennent leur profpérité nous allons parler des caufes de leur décadence & de leur chûte.

Le fort a dévoué toutes les chofes du monde à l'inftabilité. Les plus formidables Empires subis fent des révolutions qui commencent par les af foiblir, & qui finiffent par les renverfer. La puif fance romaine, ce coloffe des nations, finit (di M. de Montefquieu) comme le Rhin qui n'e plus qu'un ruisseau, lorfqu'il fe perd dans l'Océan

Si les changemens tombent fur de grands ob jets; fi des royaumes ou des empires font démem brés, affoiblis, détruits; fi des nations s'éteignen & fi la face de l'univers eft, pour ainsi dire, bo leverfée, on les appelle des révolutions. Un peuple peut effuyer deux fortes de révolu

les preuves de l'hiftoire du Dauphiné, par Valbonnay. On s'eft perfuadé que la donation étoit en fave du premier né des rois de France; mais cette condition n'eft pas littéralement exprimée dans la don tion. Confultez l'hiftoire du Dauphiné, par le même Valbonnay, pag. 603 de l'édition de 1732. Dans temps de cette donation faite à Charles, Jean, père de Charles, étoit le fils ainé du roi Philippe de V lois, & fut fon fuccefieur, sous le nom de Jean II. Après la mort du roi Jean II, Charles fon fils, c étoit déja dauphin, lui fuccéda fous le nom de Charles V, dit le Sage ainfi ce ne fut pas le fils ainé roi qui fut le premier dauphin, ce fut Charles, fils de l'ainé. Dans la fuite, nos rois ont toujours f appeller Dauphin leur fils ainé, héritier préfomptif de la couronne. Voyez une longue note fur le Da phiné, dans l'hiftoire de Louis XI par Duclos, liv. I, fous l'an 1446.

(1) Voyez l'article ACCROISSEMENT DES ÉTATS.

tions; les unes naturelles, les autres politiques. Les premières font produites par des bouleverfemens de la nature, par des tremblemens de terre, par des fubmerfions, par des peftes & par d'autres fléaux; de pareilles caufes font étrangères à cet article. Les fecondes doivent être attribuées aux hommes; elles ne font qu'altérer les fyftêmes des états; elles changent la forme de leur gouvernement, ou elles affujettiffent leurs peuples à des loix étrangères. Nous allons tâcher d'indiquer les fources de ces dernières.

Nous ne parlerons pas de toutes les caufes directes ou indirectes qui peuvent abréger la durée d'un gouvernement, changer le fyftême des états & renverfer les empires, nous nous bornerons aux principales & à celles qui produisent les effets les plus foudains; elles font ou étrangères, ou intrinsèques.

1o. On doit mettre au nombre des premières les grandes émigrations des peuples, pareilles à celles qu'on a vu au quatrième & cinquième fiècles. Des hordes innombrables de goths, de vandales & d'autres barbares fortirent du fond du

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nord, inondèrent l'Europe, & pouffèrent leurs conquêtes jufqu'en Espagne, en Italie & même en Afrique. D'autres fois les peuples qui habitoient les pays les plus feptentrionaux attaquèrent leurs voifins vers le midi, & les forcèrent à quitter leur demeure: ceux-ci fe virent contraints de tomber à leur tour fur d'autres peuples qui les avoifinoient au fud; & ainfi de proche en proche, les nations se renverfoient les unes fur les autres, & fe pouffoient toujours vers les climats les plus doux. La même chofe eft arrivée parmi les fcythes, les farrafins, &c. Au milieu de ces révolutions, il falloit que la face de l'Europe, & celle même d'une partie de l'Afie, changeât tout-à-fait. Chaque peuple changea de domicile; des royaumes, des empires, des républiques furent détruits, ou fondés, ou tranfportes ailleurs. On dira peutêtre que cette caufe de la deftruction des états n'eft qu'idéale, & que des révolutions femblables ne font plus à craindre: mais il feroit difficile de le prouver. De pareils événemens ne font ni phyfiquement, ni moralement impoffibles. Le centre prefque inconnu de l'Afrique, de l'Ethiopie, les plateaux de la Tartarie, l'Amérique elle-même vomiront peut-être un jour des effains d'hommes, ou plus forts, ou plus robuftes, ou plus infatigables que les européens; & lorfque la molleffe, la corruption ou la tyrannie auront brifé le reffort dont les nations ont befoin pour fe foutenir, croiton que les tartares, par exemple, manqueront de la force & du courage néceffaires pour opérer une grande révolution? Au refte, il feroit inutile de mettre de l'importance à cette vaine fpéculation; & fi les fciences & la difcipline militaire donnent une fi grande fupériorité, il eft bon de dire qu'il y a des circonstances où les barbares ti

reroient plus de fecours de la force de leur caractère & de leurs paffions exaltées."

2o. La guerre entreprife par un injufte conquérant ou fondée fur l'équité, eft la feconde caufe étrangère qui peut produire la décadence des états. La plupart des changemens arrivés aux empires du monde, n'ont-ils pas été occafionnés par la voie des armes ? Si les guerres heureufes donnent quelquefois de la fplendeur aux états, les guerres très-malheureufes fuffifent pour anéantir une nation. Il eft rare cependant qu'une feule guerre défut détruite qu'à la fin de la troifième guerre putruife un empire. La république de Carthage ne nique; mais comme le moindre échec que reçoit une puiffance l'affoiblit d'abord, & fortifie fon ennemi ou fon rival, c'eft par degrés que les états vont de leur décadence à leur chute.

3°. Lorsqu'une puiffance fait des progrès confidérables, fon agrandiffement peut devenir la troifième caufe, ou prochaine ou éloignée, de la décadence d'un état voifin. Le fyftême politique de l'Europe en général eft tel aujourd'hui, qu'une nation ne peut s'élever, par la voie des conquêtes ou par celle du commerce, &c. qu'aux dépens de quelqu'autre. Chaque degré de puiffance réelle qu'elle acquiert lui donne au moins un degré de puiffance relative de plus, & ce degré qu'elle gagne eft une perte pour fes rivaux. Infenfiblement elle imprime la terreur aux autres fouverains; elle leur donne enfin la loi; & comme c'est une maladie éternelle parmi les fouverains de vouloir agrandir leurs domaines & de contenir des peuples divers fous le même fceptre, elle ne tarde pas à envahir les contrées qui font à fa bienféance. Pref que tous les hommes d'état ont fenti cette vérité. Les longues querelles entre les maifons d'Autriche & de Bourbon, entre les puiffances du nord, &c. n'ont point eu d'autre principes; mais les confeils des rois n'ont pas toujours pris de bonnes mefures pour prévenir cette élévation exceffive des puiflances qui infpiroient une jaloufie bien fondée. On a vu telle nation préférer les petits intérêts aux grands, faire céder l'avantage le plus effentiel & le plus conftant à des avantages momentanés, & conclure quelquefois avec fes rivaux des alliances qui fervoient dans la fuite à les fortifier contre elles-mêmes & contre fes alliés naturels.

La máxime latine, obftare principiis, eft trop négligée par ceux qui conduifent les affaires, & fouvent il faut un fiècle de guerres pour obtenir des arrangemens, dont on fe feroit affuré fans peine quelque temps auparavant.

4°. L'étendue trop vafte d'un empire devient pref que toujours une caufe de décadence. La plupart des monarchies anciennes atteftent cette vérité. La grandeur de celle d'Alexandre caufa fa ruine. Rome s'écroula fous le poids de fes propres forces. Monfieur de Montefquieu traite cette ma

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