صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

SECTION VIII.

Détails fur les loix & les tribunaux.

On dit que le code civil des loix danoifes eft peut-être le meilleur de l'Europe; qu'il eft précis & clair. Molefworth, détracteur des établiffemens du Danemarck, rend juftice aux loix de ce royaume. La police y eft très-bien adminiftrée dans toutes fes parties; mais on s'y plaint beaucoup des juges. Un avantage particulier à cet état cft l'uniformité des poids & mefures; on la doit prefqu'en entier aux foins du comte de Bernstorf.

Les danois ne reconnoiffent l'autorité des loix romaines que dans le duché de Holface ou de Holftein, qui eft un fief de l'Empire. Les peuples de ce duché fuivent le droit de Lubeck, tiré de celui de Saxe. Des tribunaux du Holftein, on appelle à la chambre impériale.

Toutes les autres provinces de Danemarck ne reconnoiffent que leurs loix & leurs coutumes. Les danois en ont qui font conformes au droit romain. Ils en ont d'autres qui y font contraires ; mais le droit romain, comme droit romain, n'y a aucune autorité.

confell fupérieur de juftice, le confeil des finan ces, le confeil de la chancellerie, le confeil de la marine & le confeil de commerce. Le roi préfide à tous ces confeils.

Les évêques formoient autrefois la troisième claffe des états, & ils jouiffoient d'un grand crédit dans cette affemblée de la nation; mais aujourd'hui leurs fonctions fe réduifent à-peu-près à celles qu'exercent les furintendans en Allemagne, & c'eft-là auffi le titre que les loix leur donnent. Le roi les nomme, enfuite l'évêque de Sélande les confacre dans l'églife de Notre Dame de Copenhague. On n'en compte que fix en Danemarck quatre en Norwège, & deux en Iflande.

La religion luthérienne domine dans tout le Danemarck, & dans les provinces qui en font partie. Le roi Frédéric I l'embraffa, & fon fils Chrétien II l'introduifit dans fes états l'an 1536. Quoique les évêques aient peu d'autorité dans leur diocèfe, le clergé n'a pas été fans crédit durant plufieurs règnes, & les eccléfiaftiques ont eu une grande influence à la cour, par l'efprit de dévotion qui s'étoit emparé des fouverains. On a été trop luthérien en Danemarck, s'il m'eft permis de m'exprimer ainfi. Les cabales des prêtres ont percé jufques dans la diftribution des princi

bés dans l'indolence, l'inaction, & les petites pratiques qui nuifent à la fplendeur des royaumes. Cependant on a toujours toléré, & l'on tolère encore en Danemarck toutes les autres communions chrétiennes.

SECTION IX.

Waldemar fit compiler les ftatuts de fes pré-paux emplois de l'état, & les princes font tomdéceffeurs; il y joignit les anciennes coutumes du Danemarck, & il y ajouta beaucoup d'autres réglemens, de l'aveu des états. Il en compofa un corps entier de droit, qu'on appella le droit danois. Ce code de droit fut réformé fur la fin du dernier fiècle par Frédéric IV, qui changea toute la jurifprudence, & qui voulut bannir la chicane de fes états, en banniffant des tribunaux toutes les formalités inutiles. Il n'y a depuis ce temps-là Obfervations fur les rapports & les intérêts politiques qu'un feul volume in-4° pour toute la nation danoife, & un autre pareil pour les peuples de Norwège, qui ne diffère de celui-là que dans les cas où les befoins particuliers de la Norwège ont demandé d'autres réglemens que ceux de Danemarck.

du Danemarck.

Le premier objet de la politique du cabinet de Copenhague eft la confervation des duchés de Slefwick & de Holstein, l'un des plus beaux fleurons de cette couronne. Des princes de la maifon de Holftein ocLes loix du Danemarck & de la Norwège font cupent ou vont occuper bientôt lestrônes de Rufécrites en langue danoife; elles offrent tant de qe & de Suède, & c'eft cette maifon que le Dafimplicité, que l'homme du monde le plus igno- nemarck a dépouillée de fon héritage. Quoique les rant peut les entendre & les citer dans fa propre cours de Stochkolm & de Pétersbourg n'aient caufe, fans avoir befoin de confeil ni d'avocat. pas vécu jufqu'ici en trop bonne intelligence, & Auffi y a-t-il peu d'avocats en Danemarck; leurs qu'il y ait entr'elles de la rivalité & des prétendroits font modiques, & les procès y font rares tions fur plufieurs domaines, les chofes peuvent & promptement expédiés. Le juge qui ne pronon-changer de face; l'amitié qui naît des liens du ce pas felon les loix, eft menacé de dédommage-fang, peut l'emporter un jour fur les cabales poment envers la partie condamnée, & celui qui malverfe dans fes fonctions eft menacé d'un châtiment; mais il paroît que la corruption s'eft gliffée dans les tribunaux. Quoique les danois aient trois degrés de jurifdiction, l'affaire la plus épineufe peut être terminée en moins d'un an, à très-peu de frais. Il y a à Copenhague fept collèges ou confeils principaux, dont le roi fe fert pour gouverner fes états: le confeil d'état, le confeil de guerre, le

litiques des miniftres, & ces deux puiffances fe réunir en faveur des intérêts primitifs de leurs maifons. S'il faut parler ici le langage effrayant de la politique, & oublier la paix de l'Europe & les intérêts des autres puiffances, lorsqu'on rédige l'article de l'une d'entr'elles, le cabinet de Copenhague doit veiller fans ceffe fur ce grand objet; troubler, autant qu'il le peut, la bonne intelligence entre la Rufie & la Suède; fe faire de

puiffans amis & des alliés dans toute l'Europe, | & entretenir fi bien fes forces de terre & de mer, que la nation foit à l'abri de toute crainte, & toujours prête à une vigoureufe défenfe. En général, le maintien de l'équilibre dans le Nord eft d'une grande importance pour cette cour. Cet équilibre eft formé par quatre puiffances, le Danemarck, la Suède, la Ruffie & la Pruffe. Depuis le règne de Pierre I, la Ruffie a fait des progrès fi confidérables, que les deux autres royaumes du Nord, même réunis, courroient de grands rifques, fi toutes les forces ruffes venoient à fondre fur eux. Heureufement la puiffance de la maifon de Brandebourg eft telle, qu'une armée pruffienne, affemblée dans le voifinage des provinces que la Ruffie a conquifes fur la mer Baltique pourroit faire diverfion, arrêter les deffeins de la cour de Pétersbourg, & maintenir les choses dans l'état où elles font.

Les rois de Danemarck forment des prétentions fur la ville de Hambourg, & ils ont fait diverfes tentatives pour s'en emparer à main armée. Les titres qu'ils citent, à l'appui de ces prétentions, paroiffent très-foibles; celui de la bienféance eft le plus fort. La jaloufie feule maintient cette petite république; car les autres puiffances voifines auroient de la peine à confentir qu'elle tombât au pouvoir du Danemarck. Le cerele de la baffe Saxe & même l'Empire perdroit beaucoup, fi Hambourg appartenoit à un prince abfolu. C'est le port commun de l'Allemagne, & il ne fauroit être affez libre.

Le cabinet de Copenhague a conçu de nos jours un vaste dessein; c'étoit de faire déclarer le prince royal de Danemarck fucceffeur au trône de Suède; de réunir, après la mort du roi Frédéric, les royaumes de Suède, de Danemarck & de Norwege, & de leur rendre la fplendeur & la puiffance qu'ils avoient du temps de l'union de Calmar. Nous n'examinerons pas fi l'exécution de ce projet étoit poffible, mais nous dirons que les moyens dont on a voulu fe fervir étoient mal imaginés. On a employé la voie de la négociation auprès de tous ceux qui étoient intéreffés à le faire échouer; c'eft-à-dire, auprès des grands: de fecrettes brigues parmi le peuple, & quelques régimens danois pour foutenir à propos les dalécarliens révoltés, auroient pu faire réuffir toute l'entreprife. Au refte, on ne retrouvera peut-être plus une occafion auffi favorable; &, excepté les danois, perfonne en Europe ne doit peut-être le defirer.

Le Danemarck a pen de liaisons avec le Portugal & l'Espagne. Ces puiffances font trop éloignées. Lorfque l'Europe entière eft en guerre, le Danemarck pourroit tirer quelques fubfides de Efpagne. If a préféré jufqu'ici l'argent de la France ou de l'Angleterre. Son commerce avec ces deux nations du midi n'eft pas non plus fort important. Le Danemarck ne fournit àl'Espagne que quelques bois & quelques poiffons fecs, vers le

temps du carême, & prend en échange des vins,
des huiles & des fruits; encore tire-t-il ces den-
rées prefque toutes de la Hollande & de Ham-
bourg. Le comte de Dehn fut envoyé, il y a
quelques années, à Madrid, en qualité d'envoyé
de Danemarck; mais on n'a pas vu jufqu'à pré-
fent que fa négociation ait été fort heureufe.
La France a de bien plus grands rapports avec
le Danemarck. L'une & l'autre de ces puiffances
s'intéreffent aux affaires de l'Allemagne, de la
Pologne & du Nord, & elles font dans un état
de négociation prefque continuelle. Il y a ordi-
nairement deux partis à la cour de Danemarck;
l'un pour la France, & l'autre pour l'Angleterre.
Selon l'afcendant que prend l'un de ces partis,
ou felon les circonftances dans lesquelles fe trou-
vent les pays du Nord, le Danemarck eft dévoué
aux françois ou aux anglois. Au refte, la balance
penche plus ou moins du côté de l'Angleterre,
fur-tout depuis que des mariages ont allié ces
deux maifons. Il faut, ou que les raifons politi-
ques prévalent manifeftement en faveur de la Fran-
ce, ou que fes fubfides foient infiniment plus con-
fidérables, ou que la négociation foit conduite
avec une fagacité merveilleufe, pour mettre le
Danemarck dans le parti françois.

Le commerce avec la France s'accroiffant tous les jours, c'eft une raifon de plus pour engager le Danemarck à fe ménager la bonne amitié de la cour de Versailles, qui peut d'ailleurs lui être d'une utilité infinie, contre les anglois & les hollandois qui lui contesteront tôt ou tard la liberté du commerce dans les Indes.

D'après ce que nous venons de dire, on peut juger des difpofitions du Danemarck à l'égard de l'Angleterre. La bonne intelligence entre ces deux cours, cimentée depuis bien des fiècles, les liens du fang, l'appui de l'Angleterre pour maintenir l'équilibre dans le Nord, & celui de la maifon de Hanovre pour protéger les provinces d'Oldenbourg & de Delmenhorft, qui font ifolées, le commerce réciproque qui fe fait entre les deux nations excitent puiffamment la cour de Danemarck à cultiver l'amitié de celle de Londres. D'ailleurs les deux nations n'ont prefque point de prétentions l'une à la charge de l'autre. Si quelque chofe peut les brouiller, ce fera peut-être le commerce des Indes, & les progrès de la navigation danoife; le but des anglois étant de diminuer ou d'anéantir le commerce maritime des autres peuples, ils emploient toutes fortes de moyens pour cela; ils ne rougiffent pas de favorifer jufqu'aux brigandages des corfaires de Barbarie.

La Hollande a eu de temps en temps des démêlés avec le Danemarck, pour le paffage du Sund, pour la pêche de la baleine au Groenland, pour celle de la morue fur les côtes de Norwège, ou pour la contrebande que les navires marchands des Provinces-Unies faifoient fur ces mêmes côtes à-peu-près comme les anglois la faifoient en Amé

rique dans les mers qui entourent les poffeffions efpagnoles. Lorsque la marine de la république étoit encore refpectable, le Danemarck ne pouvoit lui réfifter. En 1645 & en 1658, les flottes hollandoifes paffèrent le Sund à leur gré, & agirent defpotiquement daos la Baltique, tantôt contre les danois, & tantôt en leur faveur. La décadence de la marine des hollandois met le Danemarck plus à fon aife à cet égard; auffi, lorfqu'en 1737 il furvint quelques conteftations entre ces deux puiffances au fujet de la pêche, les hollandois n'eurent garde de prendre le ton menaçant qu'ils prenoient jadis; mais, après des mémoires publiés de part & d'autre, l'affaire fut terminée à l'amiable. Au refte, le commerce réciproque entre ces nations, eft très-important. Les hollandois tirent une immenfe quantité de bois & d'autres denrées de Norwège, & ils approvifionnent en échange toutes les provinces danoifes. La balance eft très défavorable au Danemarck. La cour de Copenhague & la république fe ménagent avec foin; elles ne doivent pas changer de fyftême. Il y a bien des objets propres à détruire cette harmonie; car, pour n'en citer qu'un exemple, la compagnie des Indes établie à Copenhague excite la jaloufie des Provincet-Unies. Comme le roi de Danemarck poffède une partie du Holftein, & quelques provinces dans le cercle de Weftphalie, il eft à ce titre membre du Corps germanique, & il faut qu'il fuive les révolutions du fyftême général de l'Allemagne. Quand il n'auroit par là d'autre prérogative que celle d'enrôler des foldats dans les villes libres de l'Empire pour recruter fon armée, & fur-tout fon infanterie, ce feroit déja un objet confidérable. Auffi avons-nous vu que, dans toutes les guerres qu'a faites l'Empire, le Danemarck a fourni fon contingent, & au-delà, de bonnes troupes, dont on a tiré de grands fervices. Le renfort que cette puiffance envoya l'an 1734 à l'armée du Rhin, étoit de fix mille hommes. Le roi de Danemarck, en qualité de prince de Holftein de la tige des comtes d'Oldenbourg, a voix & féance à la diète de l'Empire, au banc des princes. L'exercice de ce droit fut interrompu, il eft vrai, par une difpute fur la préféance, furvenue entre la maifon de Holftein & quelques autres membres de l'Empire; mais cette affaire fe termina par une convention fignée le 13 août 1740, entre le roi de Danemarck & les princes d'Allemagne, qu'on nomme alternans. Cette convention admet fa majesté danoife au rang des princes qui alternent, c'eftà-dire, qui préfident alternativement, & on lui rend fa féance à la diète. Le Danemarck n'a de liaifons directes, ni avec la maifon d'Autriche, ni avec les autres princes de l'Allemagne. Nous ne voyons point dans l'hiftoire, que cette puiffance fe foit beaucoup expofée pour don ner du fecours à quelque prince allemand en par ticulier, ou pour faire des acquifitions nouvelles

[blocks in formation]

La fituation & la conftitution de la Pologne n'engagent pas le Danemarck à s'intéreffer beaucoup à fon fort; auffi n'a-t-il prefque aucune liaison avec ce royaume. Je parle de ces liaisons directes que le voifinage, le commerce, ou le fyftême de la politique des états font naître, & non de ces rapports accidentels & momentanés, qui réfultent quelquefois d'un enchaînement bizarre de circonftances. C'est ainsi que le fyftême général fie; & c'eft auffi, par un femblable principe. de l'Europe pourroit réunir le Portugal & la Rufqu'autrefois le Danemarck prit un grand intérêt à ce qui arriva en Pologne, lorfque Charles XII y porta fes armes triomphantes. Le deftin de la Pologne importoit peu à la cour de Copenhague; mais il lui importoit beaucoup que la fortune du conquérant fuédois fut arrêtée.

La Suède eft de tous les états de l'Europe celui avec lequel le Danemarck a eu le plus de démê lés. On a vu ces deux royaumes ne former qu'une même monarchie. Nous avons déja parlé du projet de les réunir de nouveau; mais ils ont été prefque toujours divifés par des jaloufies & des intérêts divers, & fort fouvent en guerre ouverte l'un contre l'autre. Il en eft refulté entre les deux nations une rivalité, une aigreur & une haine plus forte peut-être que celle qui règne entre les turcs & les chrétiens. Le Danemarck, il eft vrai, s'eft occupé long-temps des moyens de fubjuguer la Suède & de la réduire à la condition d'une de fes provinces ; mais les événemens ont fi peu répondu à fes efpérances, que les fuédois ont reconquis le Schouen, & ont couvert la Gothie occidentale, par le moyen du château de Bahus. Les danois ont d'ailleurs fait tous leurs efforts pour ruiner le commerce & troubler la navigation de la Suède; mais ils n'ont pas mieux réuffi. Il paroît que, dans l'état actuel des chofes, le Danemarck ne devroit plus fonger à opprimer la Suè de; il eft de l'intérêt de ces deux puiffances de vivre en bonne harmonie pour leur fûreté mu • tuelle, & pour fe défendre contre la Ruffie dont les rapides accroiffemens ne peuvent que réveiller toute leur attention. Le traité du Nord conclu en 1720 à Friederichsbourg, a mis fin à toutes les méfintelligences; car il a fixé les limites des deux royaumes, ainfi que les droits des deux nations. Quant à la réunion des trois royaumes

du Nord, il n'y a qu'une révolution extraordinaire qui puiffe la faire réuffir.

La Ruffie, ainfi que nous l'avons déja dit, doit attirer toute l'attention' du cabinet de Copenhague. Les acquifitions qu'elle a faites dans la mer Baltique, aux dépens de la Suède, lui ont donné les moyens d'y entretenir une flotte confidérable, & de s'y approprier une partie du commerce. Ces forces maritimes, jointes aux forces de terre qu'elle avoit déja, la rendent redoutable aux danois, qui agiroient contre toutes les règles de la faine politique, s'ils favorifoient l'agrandiffement des ruffes. La Ruffie fubmergeroit tout le nord, fi on-la laiffoit fortir des digues qui la renferment dans fon lit naturel. Tout ce que le Danemerck pourroit efpérer, ce feroit d'être envahi le dernier. Le fyftême général qu'on a formé pour le Nord eft bon, & il faut fe contenter de le maintenir. Il faut que le Danemarck entretienne fes propres forces avec vigilance; il doit envoyer à la cour de Pétersbourg des miniftres habiles, qui fachent pénétrer les deffeins les plus fecrets de la politique ruffe, & qui obfervent foigneufement toutes les démarches du cabinet impérial. Le Danemarck n'a prefqu'aucune liarfon avec la Porte Ottomane, & c'eft ce qui nous difpenfe d'en parler. Il n'y auroit que la Ruffie qui, par des conquêtes qu'elle tenteroit fur les autres peuples du Nord, pourroit mettre la cour de Copenhague dans la néceffité d'entamer une négociation à Conftantinople, & d'exciter les turcs à faire une diverfion, en attaquant les ruffes d'un autre côté.

Les pirates de la côte de Barbarie pourroient inquiéter les navires du Danemarck, fi fa navigation s'étendoit jufques dans la Méditerranée; mais comme les danois n'envoient guères de vaiffeaux qu'aux Indes; qu'ils reftent dans l'Océan, & que ces corfaires paffent rarement le détroit de Gibraltar, il n'y a prefque point d'exemple qu'ils fe foient emparés d'un bâtiment danois.

DANTZIC, ville libre, qui fait partie de la Pologne, & qui eft enclavée dans la Pruffe occidentale.

Cette ville eft dans le Palatinat de Pomérellie fur les rivières de Radaune & de Motlaw, & elle a une fortereffe fur la Viftule à un mille de la mer Baltique. Sa pofition, jointe à la bonté de fon port, l'a rendue une des villes les plus commerçantes du Nord. Il s'y fait un très grand commerce de grains; elle eft par cette raifon extrêmement peuplée, & l'on y compte au-delà de foixante mille habitans. La religion luthérienue eft la dominante; cette ville qui autrefois tenoit un rang diftingué parmi les villes anféatiques, jouit encore aujourd'hui, fous la protection des rois de Pologne, de privilèges & d'immunités confidérables, tels que le droit de battre monnoie, d'affif ter par fes députés aux diètes de Pologne, & d'y donner fon fuffrage pour l'élection d'un roi.

La ville entretient une garnifon, & elle pourroit paffer pour forte, fi, au feptentrion & au couchant, elle n'étoit commandée par des hauteurs qui la dominent, quoiqu'on n'ait rien négligé pour la défendre de ce côté-là. Comme elle fait en quelque façon partie de la Pologne, elle a participé aux différentes révolutions qu'éprouva ce ro yaume.

Les productions de Pologne font le principal objet de commerce d'exportation de cette ville. Elle en reçoit, année commune, so à 60,000 lafts de bled, dont le prix varie beaucoup, & fe règle fur les prix de Hollande. En comparant les divers prix de plufieurs années, les dantzicois le paient 18 ducats le laft; ainfi 60,000 lasts font une fomme de 2,080,000 ducats. On croit que les bois, la cendre, la potaffe, la toile, le cuir le miel, &c. que les négocians de Dantzic reçoivent de la Pologne, montent à-peu-près à la même fomme; & on peut évaluer à fix millions de rixdales les capitaux que cette ville met annuelle ment dans fon commerce, & à 20 pour cent fes bénéfices; mais elle paie 150,000 rixdales au roi de Pologne, à titre d'impofitions & d'autres droits, & une fomme égale pour les intérêts de ce qu'elle doit à l'Angleterre & à la Hollande. Il ne doit lui refter en bénéfice net que 900,000 rixd. qui fervent à payer les ouvrages des fabriques étrangères dont elle a befoin. Malheureusement la plus grande partie de cet argent eft employé pour des objets de luxe, dont le goût augmente tous les jours dans cette petite république. Il paroît que la ville de Dantzic dépenfe ce qu'elle gagne; & que, fi elle ne prend pas d'autres mefures, fon commerce ne fuffira bientôt plus pour payer fes importations. Les anciennes maifons de commerce font les feules qui fe foutiennent encore ; les nouvelles font prefque toutes tombées peu de temps après leur établissement.

La dernière révolution de Pologne a nui beaucoup au commerce de Dantzic. Le traité de partage qui a démembré ce royaume, paroît avoir confervé tous les privilèges des dantzicois; le roi de Pruffe les a reconnus formellement, ainfi que leur indépendance; mais ces privilèges étant trèsdéfavorables, aux intérêts du commerce des pruffiens, il en eft réfulté des divifions & des actes d'hoftilité, qui ont fait craindre l'envahiffement de Dantzic. La ville a été inveftie par les troupes du roi de Pruffe, & ce n'eft qu'après bien des négociations que la difpute s'eft terminée.

Danizic eft à la bienféance du roi de Pruffe ; fes privilèges femblent lui donner un droit exclu fif au commerce de l'une des portions de la Pologne que la cour de Berlin a obtenu dans le traité de partage, & il eft bon de parler ici en détail des prétentions qu'on lui a contefté, & de l'arrangement, peut-être paffager, qui en a été la fuite..

Le manifefte du roi de Pruffe ayant difcuté ces

droits avec beaucoup de fagacité, & avec une modération & une adreffe vraiment dignes d'eloges, nous allons le rapporter.

[ocr errors]
[ocr errors]

כל

» cédés même infultans de décharger à Dantzic: » Par cette nouveauté, on interrompit le com» merce & la navigation libre que les fujets pruf«Sa majefté le roi de Pruffe fe trouve depuis » fiens avoient de temps immémorial fur un fleuve » quelque temps engagé inopinément dans une » qui, à fon embouchure & dans fa plus grande » conteftation avec Dantzic, qui attire l'attention » étendue, appartient à leur fouverain ; & non » de l'Europe, & peut donner lieu à de fauffes " content de cette défenfe de la navigation, on "interprétations de la part du public non inf- » interdit également aux fujets pruffiens, fé » truit. On eft ordinairement porté à donner tort parés par la ville de Dantzic, toute com » au plus puiffant vis-à-vis du plus foible, & à »munication ou échange de leurs produits rés » lui attribuer des deffeins cachés & étendus ; »ciproques par terre. Les fujets du roi, abar» mais il fuffira d'expofer l'origine, les progrès » donnés ainfi aux procédés arbitraires & intéreffés » & l'état actuel de cete difcuffion , avec fes » des négocians dantzicois, en portèrent les » circonftances & les raifons qu'on allègue des plaintes les plus amères à fa majesté. Le roi » deux côtés, pour convaincre que de pareils » fe borna d'abord à faire faire, par fon réfident » deffeins n'exiftent nullement ici; que la ville à Dantzic, des représentations, tant verbales de Dantzic n'a pas même l'ombre de la raifon qu'écrites, au magiftrat ; mais ces repréfenta» de fon côté ; que, par des vues d'une politi- →tions demeurant fouvent fans réponse, & tou» que mal entendue, elle fufcite au roi une que- jours fans réponse fatisfaifante, le ministère du » relle, qu'il n'auroit pu attendre d'un état beau- » cabinet du roi adreffa, le 20 juin & le 24 » coup plus puiffant; & qu'enfin fa majefté en a juillet, au magiftrat de Dantzic des lettres auffi agi, dans cette occafion, avec cette modéra- pleines de modération que bien motivées ; ik tion & cet amour de la juftice dont elle a de» n'en reçut que des réponses vagues, déclina» tout temps donné tant de preuves convainquan- » toires & obfcures, fondées fur des prétextes »tes. Lorfque la république de Pologne, par le » vagues, & qui fe réfutoient d'eux-mêmes. Le » traité de Varfovie du 18 feptembre 1773, cé- » public impartial, qui lira ces pièces telles qu'el» da à fa majefté toute la Pruffe polonoife, on »les out été jointes à cet expofé publié en allen'excepta que les villes de Dantzic & de Thorn» mand, s'inftruira par leur contenu des détails

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

"

» de cette difcuffion, & fe convaincra de l'in» juftice évidente de la prétention de la ville de

[ocr errors]

Dantzic, & de l'équité manifefte de ce que fa majefté exige d'elle. Le ministère fit accom"pagner ces lettres de représentations verbales » du réfident, fommant le magiftrat de Dantzic

כל

"

» avec leur territoire, & hors de là il ne fut rien ftipulé en faveur de la ville de Dantzic. Sa ma» jesté reçut donc les bourgs de Langfurh, Alt, » Neufchottland, Schiedlitz & Stolzemberg » dépendans auparavant de la couronne de Po»logne, & qu'on appelle fauxbourg de Dantzic » à caufe de leur proximité. Les habitans de ces d'indiquer les raifons de fon procédé. On offrit bourgs, lorfqu'ils fe trouvoient encore avec » de fatisfaire à toute prétention fondée, deman"Dantzic fous la même dénomination polonoise, »dant feulement que, jufqu'à l'époque d'un ar» commerçoient librement fur la Viftule, en paf» rangement, on continuât de permettre aux fu"fant Dantzic, & alloient chercher leurs den- »jets du roi l'exercice de la navigation & du »rées des contrées pruffiennes fituées de l'autre » commerce libre par terre, comme ils en avoient » côté, lorsqu'ils ne préféroient pas de les pren- joui auparavant. Mais la ville de Dantzic dé"dre à Dantzic même. Ce commerce & cette »clina toutes ces propofitions. Il ne reftoit donc navigation libre ont, autant que l'on en eft» à fa majefté d'autre voie, pour foutenir fes fu» inftruit, continué comme auparavant, lorsque jets, que celle des repréfailles, qu'on a pour» la Pruffe polonoife & avec elle les villes ci- » tant exécutée avec toute la modération poffi» deffus furent cédées à fa majefté, & féparées » ble, quoique jufqu'à préfent fans effet. Le roi » de Dantzic, Au mois d'avril de cette année » ordonna d'abord, au mois d'août de cette an» (1783), le magiftrat de Dantzic commença à »née, au colonel de Pirch de porter un petit » défendre aux habitans des villes pruffiennes,» détachement de troupes fur l'ifle de Holm & » fituées en-deçà de Dantzic, de tirer directement» territoire pruffien, de s'affurer ainfi du passage leur bled & autres denrées du territoire pruf-» de la Viftule en cet endroit, & de renvoyer » fien fitué au-delà, exigeant que les cargaifons» fans aucune violence tous les bâtimens dantzi» achetées dans ce territoire fuffent vendues au » cois allant de la ville à la mer Baltique, ou » marché de Dantzic pour le prix déterminé par de la Baltique à la ville, laiffant néanmoins » les dantzicois, & que les fufdites villes pruf- » paffer fans difficulté les vaiffeaux des nations fiennes achetaffent d'eux à des prix également étrangères. Ceci ne produifit aucun effet; toute » arbitraires les denrées dont elles ont befoin. » cette difcuffion fembla devenir moins l'affaire Tous les bâtimens des fujets du roi, venant du » d'un magiftrat fage & éclairé, que celle d'une territoire pruffien, furent arrêtés par la milice» populace effrénée. Aucun fujet ou employé postée au Blockaus, & forcés avec des pro- » pruflien n'ofoit plus fe montrer avec fûreté fur

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors][merged small]
« السابقةمتابعة »