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intrigant, et il y a lieu de croire qu'il ne sera pas question de lui.

Mais il ne s'agit pas de faire un pape, il faut se contenter qu'on en élise un qui convienne. On ne voit pas qu'il y ait rien à redouter des cardinaux nommés ci-dessus. Autant qu'il est possible de connoître le caractère d'un cardinal, il n'y en a point parmi eux qui soit noté pour être échauffé. Ils paroissent tous avoir le caractère de modération et de sagesse qu'on doit désirer dans le chef de l'Église. Au surplus il est arrivé très-souvent qu'un cardinal devenu pape, a pris une façon de penser tout autre de celle qu'il avoit laissé paroître auparavant. D'ailleurs tant de circonstances différentes influent sur sa conduite qu'il est impossible de prévoir avec certitude quelle elle sera, il faut absolument s'en tenir sur cet article aux probabilités.

Après le pape, il est question de penser au secrétaire d'État. Depuis que M. le cardinal Torrigiani est en place, son caractère s'est assez fait connoître. Il a de grands défauts, mais on ne sçauroit lui refuser aussi de grandes vertus. Il est naturellement dur et impérieux. Son premier mouvement est toujours pour les partis de force et d'autorité. Ses principes sont favorables aux jésuites; il est de plus ami et parent du père Ricci leur général; mais on ne peut nier qu'il ne veuille le bien; il est capable de le procurer avec fermeté quand on parvient à le lui faire connoître; il a de l'esprit, des connoissances, et il est grand travailleur ; il discute fort bien une affaire; sa probité est à toute épreuve, et il n'y a à craindre avec lui ni fausseté ni dissimulation. Depuis 18 mois son crédit est fort diminué et il est impossible de sçavoir pour combien il est entré pour ce qui s'est passé sous ce pontificat. Il est à cet égard d'un secret impénétrable et on lui a vu partager dans le public

des manœuvres odieuses sans qu'il ait cherché à s'en disculper, auxquelles on a sçu ensuite qu'il n'avoit eu aucune part et qui s'étoient même faites contre son avis. Il avoit beaucoup d'ennemis tant parmi les cardinaux que dans Rome, et il en a encore, mais le nombre en est diminué depuis qu'on sçait qu'il n'est plus aussi bien avec le cardinal Neveu et que souvent il n'entre pour rien dans ce qui se fait. Il faudra voir quelle sera sa conduite après la mort du pape, s'il restera uni au cardinal Neveu ou dans quelle faction il se mettra. Reste à sçavoir si on pense qu'il soit utile de le conserver dans la place de Secrétaire-d'État ou de travailler à l'en ôter, supposez que la circonstance se présente de pouvoir le demander au pape qui sera élu, c'est à la cour de se décider à cet égard. Dans le cas où M. le cardinal Torrigiani ne serait plus continué, les sujets qui paroissent les plus propres pour remplir cette place parmi le sacré collége, sont:

Le cardinal Stopani, le cardinal Spinola.

Si la promotion avait lieu auparavant le conclave, on pourroit y joindre M. Oddi, archevêque de Ravenne, qui sera certainement cardinal.

Ces trois sujets ont été dans les nonciatures, connoissent les cours et les affaires, sçavent comment on doit se conduire vis-à-vis des grandes couronnes et auroient vraisemblablement pour elles les égards qui leur sont dûs. Des trois, le cardinal Spinola qui a été nonce en Espagne paroît celui qui conviendroit le mieux. Il est génois et en cette qualité il devrait être attaché à la France; mais de plus, pendant sa nonciature en Espagne, il a toujours fait paroître des sentimens d'attachement pour la maison de Bourbon.

On ne parle point de la datterie, vu qu'il n'y a pas moyen de penser à en dépouiller M. le cardinal Cavalchini, qu'on

n'a pas lieu d'en être mécontent, et que ce seroit une démarche odieuse de déplacer un vieux cardinal que la France a déjà exclu de la papauté. D'ailleurs il est assez indifférent que cette place soit remplie par qui que ce soit. Un peu plus ou un peu moins de diminution sur le prix des bulles en fait toute la différence. Quelque soit la façon de penser du cardinal chargé de la datterie, il ne sçauroit aujourd'hui se dispenser d'accorder des diminutions. Les exemples sont faits et on ne lui laisseroit pas la liberté de les détruire, mais ce qu'on ne doit pas oublier de demander au pape qui sera élu, s'il est possible avant que son élection soit déterminée, c'est de chasser de Rome M. Giacomelli, le père Forestier jésuite, tête des plus chaudes qu'il y ait, et tous ces écrivains et faiseurs de libelles tant d'un parti que l'autre qui ne servent qu'à échauffer les esprits et à allumer le feu.

de

Arch. des Aff. Étr.

VI

DÉPÊCHES DE MONINO, COMTE DE FLORIDA BLANCA.

Le marquis, puis duc de Grimaldi, au comte de Fuentes, ambassadeur d'Espagne en France.

18 mai 1772.

Monsieur, V. E. nous mande dans sa lettre du 1er de ce mois, no 117, que le cardinal de Bernis avait écrit à M. le duc d'Aiguillon que l'archevêque de Valence avait présenté en dernier lieu au pape un mémoire dans lequel il tâchait de faire voir que S. S. avait manqué deux fois à sa parole. M. de Bernis parlant de ce mémoire, disait qu'il était un vrai radotage, et il ajoute que le pape lui avait dit que le roi, dans une de ses dernières lettres, avait assuré à S. S. qu'il n'ordonnerait plus à ses ministres de la tourmenter par des nouvelles instances pressantes sur l'affaire de l'extinction des jésuites. Vous rendez compte ensuite

de la conversation que vous avez eue à cette occasion avec M. le duc d'Aiguillon que ce ministre n'avait pu s'empêcher d'être surpris de pareilles expressions, lesquelles indiquaient que nous avions tout-à-fait changé de façon de penser relativement à cet objet; que vous aviez tâché de la rassurer à cet égard en lui représentant différentes réflexions qui faisaient voir la fermeté et la force avec lesquelles notre cour s'y était expliquée dans toutes les occasions, ce qui paraissait avec évidence par les lettres du roi au roi T. C.

Vous nous mandez aussi ce que M. le duc d'Aiguillon avait jugé devoir dire à S. M. T. C. à l'occasion des avis du cardinal, et vous finissez votre lettre en nous assurant de nouveau que S. M. T. C. et son ministre se conformeront avec sincérité et avec cordialité aux vues et aux mesures adoptées par le roi.

En réponse à cette dépêche de V. E., je dois commencer par lui dire qu'il est superflu de m'arrêter à vous informer des intentions de S. M. relativement à l'extinction de la Compagnie et des autres affaires pendantes à la cour de Rome. Vous en êtes bien au fait, monsieur, depuis longtemps d'ailleurs vous en aurez été bien convaincu par deux de mes lettres du 28 du mois passé, et nous espérons que M. le duc d'Aiguillon, à qui vous en aurez sans doute fait communication, aura été bien persuadé que notre cour n'a jamais changé à ce sujet le système qu'elle se proposa dès le commencement.

Quant au mémoire que l'on dit avoir été présenté au pape par l'Archevêque de Valence, je dois vous dire franchement, monsieur, que cet avis a tout l'air et l'apparence d'une invention du cardinal de Bernis. Si ce mémoire avait eu lieu, l'archevêque de Valence nous en aurait certainement rendu compte comme il l'a toujours fait dans de pa

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