Etendroit-il enfin son pouvoir sur votre ame? JULIE. Quoi! vous m'accuseriez d'un vain déguisement? Julie, à la raison vous vous seriez rendue!... Quoi! si j'avois été... ce que je m'en vais être... CLITANDRE. En doutez-vous, Julie? Ah! mon cœur tout entier... Quoi ! j'aurois pu toucher!... Ah! je suis trop punie, Oubliez... un indiscret aveu. CLITANDRE, aux genoux de Julie. Non, je tombe à vos pieds: non, l'amour le plus tendre.... JULIE. Aurois-je eu le malheur de vous toucher, Clitandre? Orphise vous perdroit!... Quel prix de ses bontés! CLITANDRE. Orphise vous dira... SCENE VI. CLITANDRE, ORPHISE, dans le fond, JULIE. Oui, je veux t'accabler de toute ma tendresse. JULIE. Eh! ma tante, il se trompe, et son cœur vous est dû. ORPHISE. C'est trop te tourmenter d'un remords superflu. JULIE. Orphise! est-il bien vrai? Je n'ose encor vous croire. CLITANDRE. On m'a daigné choisir pour tenter cette gloire. Quoi! de votre amitié mon bonheur est l'ouvrage ! (à Clitandre.), Que de biens je vous dois!... Vous, mon cher bienfaiteur, Je vous dois ma raison, mes plaisirs, et mon cœur. EIN DE LA COQUETTE CORRIGÉE. EXAMEN DE LA COQUETTE CORRIGÉE. C'EST à la Coquette corrigée que commence véritablement la décadence de l'art de la comédie, préparée, comme nous l'avons observé, par La Chaussée et Boissy. A la force comique de nos chefs-d'œuvre succedent une délicatesse ou une sensibilité affectées: la peinture énergique et vraie des caracteres est remplacée par des esquisses de portraits dont les nuances légeres ne peuvent être senties que par une certaine classe de spectateurs; le vice a perdu ses traits difformes; on croiroit manquer au bon ton si, comme Moliere, on frappoit les ridicules; tout est pallié, tout est excusé, pourvu que dans les expressions il ne se trouve rien qui choque une sorte de décence convenue. Le germe de tous ces défauts se fait remarquer dans la Coquette corrigée : les quatre premiers actes offrent, au lieu de comique, les développemens de cette morale que la régence avoit mise à la mode. Le Marquis, que l'auteur s'est efforcé de faire ressortir, n'est point un personnage ridicule; c'est un homme dont les succès dans le monde ne peuvent qu'encourager les jeunes étourdis qui voudroient l'imiter. Le dernier acte est sur le ton du drame; le repentir subit de Julie a un apprêt et ane |