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SCENE X.

LE BARON, LA COMTESSE.

LA COMTESSE.

Croyez-en ses conseils; venez, suivez mes traces;
Fuyez votre maison et reprenez vos graces.
Ne soyez plus ami, ne soyez plus amant;
Soyez l'homme du jour, et vous serez charmant!

FIN DES DEHORS TROMPEURS.

EXAMEN

DES DEHORS TROMPEURS.

DANS les caracteres qui reposent sur des vices ou des passions, un auteur dramatique ne risque rien à beaucoup approfondir; jamais son génie ne lui. fournira de traits qui surpassent la nature : l'Avare, dans la comédie de ce nom, n'exagere pas lorsqu'après avoir examiné les deux mains de celui qu'il prend pour un voleur, il s'écrie, et l'autre? De même, dans le Tartuffe, Moliere n'a pas épuisé toutes les combinaisons sous lesquelles on peut présenter l'hypocrisie, la crédulité, et l'ingratitude. Mais dans les caracteres qui ne reposent que sur des goûts frivoles, et dont les ridicules ne peuvent être sentis que par ceux qui ont une grande habitude du monde, un auteur est presque toujours obligé d'exagérer pour se mettre à la portée de la plus grande partie des spectateurs. Certainement il est fort ordinaire de rencontrer des gens qui négligent les devoirs les plus essentiels de l'amitié, qui sacrifient leurs propres intérêts à des futilités brillantes; mais nous croyons qu'on ne trouveroit point d'exemple d'un homme qualifié brusquant le pere de sa maîtresse pour aller entendre un concerto de violon, et lui faisant manquer un gouvernement pour

se trouver à la représentation d'une piece nouvelle. Notre observation n'a pas pour but de blâmer Boissy d'avoir donné des motifs aussi légers à la conduite de son principal personnage; nous sommes persuadés au contraire qu'il ne pouvoit faire autrement pour mettre les défauts du Baron en évidence pour tout le monde. C'est un inconvénient attaché au développement de ces caracteres qui ne présentent que des superficies; et l'on doit admirer les ressources d'un auteur qui, avec aussi peu de fonds, a établi une intrigue fort bien liée dans toutes ses parties, et fait une comédie en cinq actes digne de l'estime des connoisseurs.

D'excellens critiques ont prétendu que cette piece ne répondoit pas à son titre, parcequ'en montrant le Baron dans l'intérieur de sa maison, elle ne laissoit voir que l'homme maussade, et point du tout l'homme aimable, l'homme du jour en réputation: nous pensons que ces observations sont peu fondées. Dès les premieres scenes l'auteur a bien établi le caractere de son principal personnage, en donnant une idée positive de ses goûts, de son humeur, et des sacrifices qu'il est toujours prêt à faire au desir d'être distingué dans le monde : l'engouement dont il se prend pour le Marquis, cette amitié qu'il lui jure positivement parcequ'il est pour lui une connoissance nouvelle, les conseils qu'il donne à ce jeune homme, sa liaison intime avec la Comtesse pour laquelle il n'a aucun attachement quoiqu'il cede toujours à ses vclontés, la maniere aimable dont il termine la querelle que cette femme extravagante fait à la raison; tout

cela constitue très bien le caractere de l'homme du jour, et se passe sous les yeux des spectateurs: ainsi on ne peut pas dire que rien dans la piece ne réponde au titre du principal personnage, quoiqu'il soit certain qu'il paroisse plus souvent maussade que séduisant; mais cette combinaison entroit dans le plan de l'auteur, et elle est trop heureuse pour qu'on puisse l'en blâmer.

Le trop haut prix qu'on attache à l'opinion des sociétés dont le plaisir est l'unique affaire, annonce toujours une ame vuide, un esprit facile à se prévenir; il est donc naturel que le Baron, malgré ses succès dans le monde, se trompe sur le caractere des gens qui l'entourent, et particulièrement sur celui de Lucile. Pensant trop avantageusement de lui-même pour soupçonner qu'une jeune personne qui sort du couvent puisse ne pas s'enthousiasmer de l'espoir de lui appartenir, il ne lui vient pas dans l'idée qu'elle soit capable de le juger, ou qu'elle ait déja engagé ses affections; et il met de bonne foi sur le compte de la bêtise le silence qu'elle garde avec lui. Cette combinaison est juste, et c'est pour cela qu'il en résulte des effets d'un excellent comique; car l'aveuglement du Baron est si bien motivé qu'il devient dupe sans être ridicule: il se trompe beaucoup plus lui-même qu'il n'est trompé par sa maîtresse et son ami; ce qui conserve à Lucile toute la décence et l'ingénuité qui conviennent à son âge et à sa position.

Jusqu'à présent aucun critique n'a remarqué avec quel art Boissy a placé cette jeune personne dans la

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