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COMÉDIE.

ACTE PREMIER.

SCENE PREMIERE.

DORISÉE, MÉLANIDE.

MELANIDE.

J'AURAI fait à Paris un voyage inutile!

DORISÉE.

Mais auriez-vous mieux fait de demeurer tranquille Au fond de la Bretagne, où depuis si long-tems Vous avez essuyé des chagrins si constans?

MÉLANIDE.

Ils étoient ignorés; et le secret console.

Je ne crains que l'éclat.

DORISÉE.

Quelle crainte frivole!

N'êtes-vous pas ici comme au fond d'un désert?

Aucun de vos secrets n'y sera découvert.

MÉLANIDE.

S'ils étoient divulgués j'en serois désolée.
DORISÉE.

Sachez qu'à Paris même on peut vivre isolée.
Dès que l'on fuit le monde, il nous fuit à son tour;
Ainsi, ne craignez point l'éclat d'un trop grand jour.
Dans votre appartement reculé, solitaire,

A tous les importuns vous pourrez vous soustraire.
Il vous est fort aisé, si vous le trouvez bon,
De n'admettre que moi, ma fille, et Théodon.
Je vous l'ai toujours dit, ma chere Mélanide,
Comptez que mon beau-frere est un ami solide,
Un homme essentiel : je l'éprouve aujourd'hui.
Hélas! je deviendrois bien à plaindre sans lui.
Daignez donc l'honorer de votre confiance,
Et vous en rapporter à son expérience.

MÉLANIDE.

J'ai suivi ses conseils, mais sans trop espérer
Que ses soins généreux pussent rien opérer.
Je crois même entrevoir qu'il n'oseroit m'instruire...
DORISÉE.

Par de fausses terreurs vous vous laissez séduire.
Ah! vous méritez trop pour espérer si peu.
Mais permettez qu'enfin je vous fasse un aveu
Qui depuis quelque tems m'embarrasse et me pese.

MELANIDE.

D'où vient?

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Oui, sans doute. Apprenez

Celui de mes chagrins qui m'est le plus sensible.

Ma fille en est la cause.

MÉLANIDE.

Ah! seroit-il possible?

DORISÉE.

Je l'aime, elle en est digne. A son goût comme au mien
Je voudrois la pourvoir; et vous concevez bien
Le sujet douloureux de mes peines secretes.
Est-ce avec peu de bien, des procès et des dettes,
Que je puis à mon gré lui choisir un époux?

Je crois que le plus sûr, s'il n'est pas des plus doux,
Seroit de ne penser qu'à gens d'un certain âge.
Parmi ceux que m'attire ici le voisinage

Il seroit un parti qui rassemble à la fois

Tout ce qui peut d'ailleurs déterminer mon choix;
Gloire, faveur, emplois, opulence, noblesse,
Tout s'y trouve, excepté la premiere jeunesse.

MÉLANIDE.

Est-ce un homme de guerre?

DORISÉE.

Oui, mais très estimé.

MELANIDE.

Aime-t-il Rosalie ?

DORISÉE.

Il m'en paroît charmé.

Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'il en est la conquête :
Mais je crois entrevoir l'obstacle qui l'arrête ;
Et s'il n'a pas encore osé se proposer,

J'ai lieu de soupçonner qu'il craint de s'exposer...

MELANIDE.

Madame, il faut l'aider; vous ne pouvez mieux faire. DORISÉE.

Vous me conseillez donc de suivre cette affaire?

MELANIDE.

Quoi! c'est un avantage, et vous vous consultez !

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Si je poursuis le bien que m'offre la fortune,
Monsieur votre neveu sera désespéré.

A tout autre parti je l'aurois préféré;

Car enfin son amour, dont il n'est pas le maître,
Depuis plus de deux ans s'est fait assez connoître.
Cet heureux mariage eût resserré les nœuds
De la tendre amitié qui nous joint toutes deux.
Darviane et ma fille étoient nés l'un pour l'autre :
Mais vous connoissez trop mon état et le vôtre;
Tant de félicité n'est pas faite pour nous :
Madame, cependant parlez, qu'ordonnez-vous?

MÉLANIDE.

Darviane sans doute a grand tort de prétendre
Au bonheur de pouvoir être un jour votre gendre:
S'il ose s'en flatter je ne sais pas pourquoi.

Il manque de fortune; et, comme il n'a que moi
Sur qui puisse rouler toute son espérance,
Il poursuit un bonheur hors de toute apparence.
Mais d'un enchantement plus fort que mes discours
Je vois bien qu'il est tems d'interrompre le cours.
N'ayez pour Darviane aucune complaisance;
Et comme son amour, et sur-tout sa présence,
Pourroient nuire aux projets dont vous m'entretenez,
Mes ordres absolus lui vont être donnés.

Comment?

DORISÉE.

MÉLANIDE.

L'occasion en est fort naturelle.

N'est-il pas tems qu'il aille où son devoir l'appelle? Quoiqu'il prétende encor éloigner son départ,

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