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de protégés. Les princes les reconnaissaient encore pour leurs guides spirituels; mais le pouvoir des clefs était lui-même battu en brèche. On ne lui portait plus que cette espèce de respect sans conséquence que des enfants parvenus à la maturité témoignent à la vieillesse décrépite de leurs pères. Rome s'était volontairement annihilée, les scandales de ce Conclave lui révélaient l'immensité du mal; mais le principe des concessions avait été posé. Dans tous les rangs de la hiérarchie ecclésiastique, il se rencontrait des hommes qui l'adoptaient comme la dernière planche de salut laissée à l'Église. L'intérêt particulier affaiblissait les courages, il tuait les dévouements. Aux yeux même de quelques Cardinaux et Prélats, on était fanatique par cela seul qu'on répugnait à immoler les droits de la vérité sur l'autel de la philosophie. On n'avait à Rome ni l'audace du devoir ni la résignation dụ martyre. On obéissait aux lois que prétendaient dicter les couronnes, parceque ces lois, fatales au Saint-Siége, permettaient à l'égoïsme de se développer plus à l'aise en se mettant au service des agents diplomatiques. Ces agents parlaient de révolution imminente. Ils rencontraient des esprits timides ou coupables qui grossissaient de pareilles menaces, car c'est toujours par la crainte d'un mal à venir que l'on entraîne les faibles à commettre des injustices présentes.

Les Jansénistes suppléaient au nombre par l'adresse. Ainsi que toutes les sectes, ils s'attribuaient les honneurs de la persécution pour arriver plus vite à persécuter. Ils niaient même leur existence à Rome comme dans le reste du monde, afin d'endormir les tièdes et de ne pas effrayer les peureux; mais au fond de ces hypocrisies que chaque parti, que la révolution surtout prend plaisir à renouveler tantôt sous le manteau politique, tantôt sous la forme religieuse, il existait un principe dissolvant dont personne ne se dissimulait les tendances. D'Aubeterre

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et Azpuru comprenaient admirablement cette position; ils la mettaient à profit contre les Jésuites. La destruction de l'Institut, sanctionnée par un Souverain Pontife, était la consécration la plus solennelle qui pût être accordée à la doctrine des novateurs du dix-huitième siècle. On ne poursuivait plus dans les enfants de Loyola des ennemis de l'impiété ou des régicides systématiques; les coups remontaient déjà plus haut. Les Jésuites étaient proscrits de tous les royaumes; on voulait, en abaissant la Chaire apostolique jusqu'à un trafic honteux, l'isoler du monde chrétien après avoir donné à tous les fidèles le spectacle de sa dégradation.

Ce plan, auquel travaillèrent à leur insu peut-être certains hommes dont jusqu'alors la conscience était restée pure, ce plan allait être mis en œuvre. La Société de Jésus était la proie que se disputaient les ennemis de l'Église. Afin de voir renaître l'âge d'or catholique, il n'y avait qu'à briser le dernier lien qui attachait les Jésuites à la vie. Les couronnes exigeaient ce sacrifice; pour l'obtenir, on essayait d'avilir dans le présent et dans l'avenir la tiare que tous promettaient d'exalter après par un sentiment de reconnaissance unanime. Roda laisse néanmoins, dans l'intimité de sa correspondance, transpirer la pensée qui agite toutes ces âmes de sophistes, d'acheteurs ou de vendus. Il aimerait mieux, lui, un Pape dont la résistance serait avouée, et voici les motifs qu'il allégue de cette préférence. Ces motifs doivent être un grave enseignement pour le Saint-Siége. «< C'est de notre gouvernement que dépend le maintien de la régale et de savoir se moquer de Rome. Car c'est encore un problème de décider si, pour une telle fin, il vaudrait mieux avoir un Pape contraire et fanatique, plutôt qu'un Pontife ami, propice et conciliant, parceque par égard nous devrions céder à ce dernier quelques-uns de nos droits. >>

Le projet des Bourbons et de leurs diplomates n'était plus un mystère. Le cardinal Orsini sent le besoin de mettre sa conscience à l'abri, Il est ambassadeur du Roi de Naples, mais à peine âgé de trente-quatre ans, il ne veut pas souiller toute sa vie par un acte coupable. Il prête les deux mains à la destruction des Jésuites; néanmoins il répugne à ce que ses collègues exigent de lui. Pour fortifier les cardinaux français dans leur résolution, il adresse du Conclave le billet suivant à Bernis:

« Éminence, le courrier d'Espagne est arrivé, et j'ai reçu une lettre de M. Azpuru avec la copie ci-jointe. Je l'envoie à Votre Éminence pour qu'elle y réfléchisse. Aujourd'hui, après le scrutin, nous en parlerons. Je persiste dans nos premières conventions. Vous êtes archevêque; moi je suis prêtre. Nous ne pouvons concourir à faire un pape simoniaque. Je ne doute point que l'Éminentissime cardinal de Luynes, également archevêque, ne soit du même avis. Je joins encore un billet de l'ambassadeur pour que Votre Éminence le lise et le fasse lire au cardinal de Luynes. Le vaisseau qui porte les Cardinaux espagnols a mis à la voile, d'Alicante, le 18 mars. »

Le Conclave souffrait de ces tiraillements. Les cardinaux s'indignaient de se voir les jouets d'une conspiration qui ne prenait plus la peine de taire ses espérances; et Bernis, le 1er mai, annonçait au marquis d'Aubeterre : « Orsini nous a dit qu'on lui mandait que le cardinal de Solis n'avait aucun scrupule d'exiger du pape futur une promesse par écrit de la destruction des Jésuites. Nous attendrons qu'il nous en parle; et nous lui déclarerons que, convaincus comme lui de la nécessité d'éteindre cet Ordre, nous pensons différemment sur les moyens à y employer; que nous ne nous opposerons pas à ce qu'il exige cette promesse, si le cas arrive de pouvoir l'exiger', et que nous travaillerons dáns le plus grand concert pour en obtenir l'effet toutes les fois et quand nous

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