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Je dis inaliénable, parce que si les derniers Bourbons ont été 178 ans sans convoquer des états-généraux, le comble des abus et des malheurs publics, et les grandes catastrophes dont-ils sont juste ment les victimes, démontreront à la postérité qu'on ne viole pas impunément les droits sacrés qu'a une nation libre au pouvoir législatif et au vote libre de l'impôt.

Je dis enfin droit inalienable parce que toutes les classes de citoyens chargerent en 1789, expressement leurs députés aux états-généraux de prononcer la prémanence et la périodicité du pouvoir législatif, et que toutes les instructions s'accorderent a demander le vote annuel et libre de l'impôt. Cette garantie que la nation s'est toujours réservée, et qu'elle exerce dans ce moment se consolide donc en rendant héréditaire le pouvoir exécutif ea France dans une famille, dont les services, la gloire et la fortune ont pour origine ce principe exercé ou reclamé dans la prospérité comme dans l'adversité, pendant 1400 ans ; principe cimenté de nouveau aujourd'hui, pendant quinze années, par les triomphes des héros et le sang d'un million de Français.

Enfin la garantie de la nation dans l'exercice du pouvoir législatif, et le vote annuel et libre de l'impôt étaut identique avec les titres qui conduisent au rang suprême, Napoléon Bonaparte et sa famille et l'union intime de cette illustre famille avec l'universalité des citoyens Français, avec nos institutions civiles, politiques et militaires, devant assurer la stabilité du gouvernement, et devenir le germe de la prospérité publique en France, je vote pour l'examen par une commission, de la motion d'ordre de notre collégue Curée.

Discours du Citoyen Carrion Nisas.

J'ai besoin de toute l'indulgence de l'assemblée, en me voyant forcé d'improviser à cette tribune sur des notes recueillies à la hâte pendant le discours du citoyen Carnot, dans lequel j'ai observé quelques erreurs que je crois pouvoir réfuter. Je me ferai aussi un devoir de la plus exacte modération, et du seul language qui convienne au caractere dont nous sommes revêtus.

Le citoyen Carnot craint que les mesures qu'on propose (la nomination d'un empereur et l'institution de l'hérédité) ne soient la destruction totale et absolue de la république, et que ceux qui appuient ces mesures n'aient l'intention ou du moins le malheur de livrer la liberté et la patrie en proie à un despote. Quoi! parce que le premier magistrat s'appelera empereur, parce qu'il sera héréditaire, il n'y aura plus en France ni patrie, ni liberté ! nous n'aurons donc ni lois ni pacte social; et selon son opinion, ces premiers besoins des peuples sont incompatible avec telle domination et telle forme de magistrature suprême : ainsi ne pensait pas J. J. Rousseau, ce zélé républicain. Il a dit formellement, que tout gouvernement légitime, c'est-à-dire régi par les lois, était républicain. Eh! qui parle ici de mettre un homme au dessus des lois ?

Salluste avait eu, long-tems avant, la même pensée, et il s'explique très-clairement en parlant du gouvernement des premiers rois de Rome; c'était, dit-il, un gouvernement légitime, avec un titre royal, imperium legitimum nomen imperii regium habebant.

Quel gouvernement est plus légitime que celui qui se propose, s'organise, s'accepte, se consent avec la liberté, la maturité, la solennité qui a précédé, qui a inspiré les mesures que nous adoptons et qui préside à leur discussion.

Le citoyen Carnot croit voir revenir l'ancienne royauté de France. La royauté féodale, propriétaire. Avec un peu de réflexion il est cependant facile d'appercevoir qu'entre cette espece de royauté et la forme d'empire que nous proposons, il y a autant de différence qu'entre la lumiere même et les ténebres.

La royauté procédait par la prise de possession du territoire à l'envahissement du corps même des hommes qui l'habitaient. Homme de pacte, homines potestatis addicti glebæ. C'était sur cette monstrueuse fiction qu'elle établissait ses droits, les titres, le jus de son gouvernement. Le roi des Français, tel que voulut le faire l'assemblée constituante, l'empereur de la république Française, tel que nous voulons l'établir, n'est le propriétaire ni du sol, ni de ceux qui l'habitent ; il est le chef des Français, par leur volonté, son domaine est moral, et aucune servitude ne peut légalement découler d'un tel systême.

Enfin, pour me faire entendre par une comparaison prise dans le droit civil, et appliquée au droit politique, l'autorité du roi de France, cette autorité originairement toute féodale, ressemblait au domaine matériel d'un citoyen; et originairement aussi le royaume se partageait entre les enfans du roi.

Au contraire, l'empire, cette autorité toute morale, toute légitime, que nous établissons, ressemble au droit de tutelle dans les familles, lequel ne suit point le bien, ne saurait se partager, va toujours à celui qui est presumé le plus digne, par une marche certaine et indépendante de toute volonté, et enfin, est de sa nature purement spirituel et aussi inoppressif qu'il est indivisible.

Le citoyen Carnot semble croire que le résultat auquel nous touchons, est de longue main préparé par le premier Consul, avec un art aussi droit qu'une volonté constante et infatigable. Cependant il est vrai, et j'en atteste tous ceux qui peuvent, et il en est beaucoup, avoir les mêmes connaissances de détail que moi, que le premier Consul a été le dernier à entrer dans cette sorte de conspiration sainte en faveur de la patrie, conçue depuis le 18 Brumaire, par un petit nombre dont je m'honore d'avoir fait partie, petit nombre qui s'est successivement grossi et qui est devenu bientôt une innombrable multitude, le peuple Français, enfin, auquel il est désormais impossible de ne pas obéir.

Il est vrai qu'on a caché d'abord, montré ensuite avec ménagement le but qu'on voulait atteindre, précautions nécessaires pour marcher sûrement et pour arriver à bon port. Il y avait, et le citoyen Carnot en est encore un exemple, beaucoup de citoyens,

dont le nombre a tous les jours diminué, qui, pleins de préjugés et d'erreurs révolutionnaires n'avaient pas encore mûri les leçons de la réflexion et de l'expérience, et qui n'étaient pas encore capables de recevoir la vérité. C'est ainsi qu'on rend, avec des ménagemens délicats, la lumiere du jour à un malade qui en a été long-tems privé.

Au milieu de ce mouvement des opinions saines qui avançaient, des opinions erronées qui revenaient sur elles-mêmes, le premier Consul a montré une résistance et une répugnance aussi sincere que long-tems invincible au résultat dont il sent aujourd'hui la nécessité.

Mais il l'a sentie le dernier, et depuis quelques jours à peine, forcé par le cri public, vous le voyez publier ces adresses qui, depuis six mois, lui arrivent en foules de toutes les parties de la république, appuyées des vives sollicitations de tous les magistrals et de tous les fonctionnaires publics, et qu'il a long-tems retenues captives.

Les alarmes inspirées par les assassinats tentés contre la personne du premier Consul par la perspective des maux affreux qui s'en seraient suivis, ont mûri toutes les résolutions, pressé toutes les mesures.

Le premier Consul est ambitieux de gloire, il en est jaloux; mais il s'en faut de beaucoup qu'il traite le pouvoir comme la gloire. Un mot de lui, un mouvement de cette grande âme, qu'il faut révéler à la patrie, rendra cette vérité plus palpable que les détails et toutes les assertions que je pourrais ajouter.

Un jour le premier Consul parlait avec la plus profonde sensibilité des malheurs de la révolution. Quelqu'un sembla vouloir combattre son émotion par le tableau des résultats de cette grande crise; enfin, lui dit-il, citoyen Consul, ce n'est pas à vous affliger de la révolution; sans elle vous ne seriez pas au rang où vous êtes, et vous n'auriez pas acquis cette gloire immense dont vous êtes

couvert.

Eh! plût à Dieu, s'écria Bonaparte, que la France n'eût jamais entendu parler de moi, et que son gouvernement n'eût jamais fait de telles fautes, et son peuple éprouvé de tels malheurs.

Non, l'homme dont le cœur a laissé échapper ces paroles, que je confie à l'histoire, ne voit dans l'accroissement de son pouvoir, que des moyens nouveaux de félicité publique il ne cherche dans sa grandeur que la gloire de sa nation; il accepte le rang qu'on Jui confie, et il n'en a pas eu soif: une certaine ambition est audessus de certains caracteres.

Le citoyen Carnot a voulu nous effrayer par l'exemple des Cesars et des désordres de l'empire Romain. Cette crainte est peu fondée, et cette comparaison est peu juste. En effet, le grand malheur, le grand vice de l'autorité des Césars, vient de ce qu'elle n'a pas été héréditaire; l'adoption y corrompait tout, l'élection y troublait tout, et ce sont précisément ces inconvéniens auxquels s'oppose le plus directement le système que nous voulons intro

duire aujourd'hui. En persistant dans un système à peu près semblable à celui de Rome, la Pologne, a été détruite en adoptant à peu près le nôtre, le reste de la Russie a fait un grand pas vers sa conservation.

J'ajouterai que le mal vint à Rome de l'hypocrisie ou de la pusillanimité d'Auguste, qui affecta de ne rien changer dans la dénomination des institutions républicaines, tout en retenant une autorité d'autant plus absolue qu'elle était vague, sans limites connues, sans aveu public. De là suive la position fausse et désastreuses où se trouverent ses successeurs vis-à-vis des peuples, et les peuples vis-à-vis de ses successeurs; on conspirait contre les Césars au nom d'une république qui n'était pas également détruite, et eux s'opposaient aux conspirations au nom d'une monarchie qui n'était pas légalement établie, de sorte qu'on mettait beaucoup d'audace et de force à les attaquer, aux beaucoup de fureur, de violence, de cruauté à prévénir ou à repousser l'attaque. Voilà pourquoi il y eut à Rome, sous les Césars, tyrannie immodérée, immodérée servitude ou furiguse révolte, et que tout dépendit dans l'état du caractere personnel du prince. Ce qui est un danger toujours imminent.

Le citoyen Carnot est remonté ensuite à la république Romaine, et nous a fait voir un parfait gouvernement et une liberté sagement conservée dans ce vaste état; sans doute, il devient immense, mais à mesure qu'il s'aggrandit, que devint sa démocratie? Ne sentit-il pas la nécessité d'un gouvernement ferme, d'un gouvernement d'un seul ? Le citoyen Carnot en convient, et il admet le remede temporaire de laldictature; temporaire, oui; pour le peuple qui ne prétend pas l'établir autrement que pour un tems trèscourt, mais éternel pour un dictateur habile et ambitieux, passage sanglant de la licence démagogique à un empire improvisé et sans constitution, c'est-à-dire, à un véritable despotisme.

Le citoyen Carnot a reproché au systême héréditaire un inconvénient réel et impossible à nier; il est certain que ces sortes de gouvernemens font quelques fois entrer les peuples dans des intérêts domestiques et leur font épouser des querelles de familles. Voilà sans doute un danger véritable, et quelle chose humaine n'en a pas? Mais ces intérêts au moins ont quelque réalité, quelque utilité pour les peuples eux-mêmes, et ce danger est moindre que le danger où sont exposés les gouvernemens populaires d'épouser les passions, les querelles et les intérêts personnels de leurs magistrats ou de leurs orateurs. Péricles n'était pas un prince héréditaire et pour une insulte faite à Aspasie, la Grece républicaine fut

Dans les plus beaux tems de la république Romaine, le peuple, épousant tantôt l'intérêt d'un tribun, tantôt celui de tout autre factieux, donnait des alarmes perpétuelles au sénat, et le sénat à son tour, immolant le peuple à son propre intérêt et à sa propre querelle, le lançait au déhors, le jetait sur les voisins offensifs ou inoffensifs, et le prétexte d'une guerre étrangere ne man

quait jamais quand le sénat craignait quelque discorde civile, et le sang du peuple coulait toujours.

Ceci me ramene aux considérations que le citoyen Carnot a mis en avant relativement aux puissances étrangeres; certes, il suffit des simples lumieres du bon sens pour sentir qu'elles aimeront mieux mille fois un gouvernement analogue à leur propre gouvernement, qu'un gouvernement toujours menaçant, parce que son principe serait opposé et par conséquent ennemi; le gouvernement d'un seul a pour garantie au déhors, la sagesse, la maturité, l'expérience du prince, il n'y a ni sagesse, ni maturité, ni expérience, dans un prince sans cesse renouvellé; et cette éternelle effervescence des gouvernemens populaires, en proie à toutes les passions, menace et choque sans cesse tous les intérêts de voisinage et bouleverse toutes les relations de politique extérieure. Et ceci me rappelle le mot profond et prophétique d'un homine d'état serviteur de la maison d'Autriche, à qui, vers les tems de la plus grande effervescence révolutionnaire, on demandait s'il croyait serieusement, avec des armées Allemandes, remettre sur le trône de France la maison de Bourbon; et s'il ne valait pas mieux laisser la république tranquille, et se gouverner comme elle voudrait.

Nous savons bien, répondit ce sage politique, que nous ne ferons pas accepter, à la Frauce, des maîtres qu'elle ne veut plus, nous savons bien aussi que ses armées, toutes récentes et inexpérimentées qu'elles sout, battront plus d'une fois les nôtres et nous causeront de grandes pertes; nous supporterons ces revers, et nous continuerons à nous battre, tantôt en avant, tantôt en retraite, selon la fortune; au bout de quelques années il s'élevera nécessairement en France, un général, homme d'état, qui s'emparera du gouvernement, qui ramenera toutes choses à une forme réguliere, et alors nous ferons la paix avec lui; elle serait impossible, elle serait frivole, avec un oligarchie qui menacerait toujours d'incendier l'Europe.

J'avoue que cet homme d'état me paraît plus prévoyant plus sage que notre collegue qui nous propose de nouveau sérieusement, l'exemple des Etats-Unis de l'Amérique.

Ce n'est pas la premiere fois que cet exemple est proposé, ce n'est pas la premiere fois qu'il est combattu.

Lors de la fuite honteuse et perfide du dernier roi à Varennes, on proposa (c'était Vadier) à l'assemblée constituante, l'exemple du gouvernement Américain, et on invita cette assemblée a en donuer à la France un semblable.

Barnave s'éleva contre cette proposition: pourquoi cette victime si regrettable des proscriptions décemvirales n'a-t-elle pas été préservée, et ne peut-elle pas ici répondre avec cette éloquente facilité que nous avons tant admirée ou que n'ai-je assez bien retenu moi-même ses argumens et ses paroles pour pouvoir les produire ici à notre collegue: si je m'en conviens il disait qu'une population rare sur un sol immense, un peuple neuf sur une terre vierge, un peuple dont l'activité sera long-tems, facilement assou

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