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Qu'on nous permette une remarque au sujet de la Compagnie des Indes, qui figure au chapitre des dépenses pour une somme de 5,500,000 fr.

La Compagnie des Indes, fondée par Colbert, avait été réorganisée en 1764, d'après un plan présenté aux actionnaires par Necker. Elle prenait le nom de « Compagnie Commerciale » et devait se régir elle-même. Mais sous un régime despotique, toute liberté est illusoire. La Compagnie l'avait bientôt appris à ses dépens. Le contrôleur général Laverdy l'avait brutalement replacée sous la tutelle de l'État et l'avait laissée dans la situation la plus précaire en 1769. Son successeur Maynon d'Invau avait chargé l'abbé Morellet de rédiger un mémoire sur l'état de la Compagnie. Celui-ci, dans un livre qui fit grand bruit, avait établi que le gouvernement dépensait, chaque année, plus de 10 millions pour obtenir des marchandises d'une valeur à peine égale à ce chiffre; il avait prouvé que la Compagnie était incapable de se soutenir par ses propres forces; il avait affirmé enfin, au nom des principes économiques, qu'une compagnie privilégiée n'était ni bonne ni nécessaire pour faire utilement le commerce de l'Inde. Bref, le ministre, sans tenir compte de l'irritation des actionnaires, avait suspendu le privilége de la Compagnie par arrêt du 30 août 1769. Par une rencontre singulière, c'est l'abbé Terray qui, d'accord cette fois avec les économistes, avait mis fin au monopole de la Compagnie le 7 avril 1770. Mais cette mesure, que les disciples de Gournay réclamaient au nom de la liberté, n'était dans la pensée de l'abbé qu'une mesure fiscale. On avait pu s'en apercevoir aux conditions qu'il avait faites aux actionnaires dépossédés (1).

Turgot avait trouvé à son arrivée au contrôle les actionnaires de l'ex-Compagnie inscrits au budget pour une somme de 5,500,000 fr. Il l'avait maintenue, se contentant de respecter les engagements pris par l'État, lors de la liquidation de la Compagnie.

Toutefois, la cause de la liberté du commerce dans l'Inde et aux colonies était loin d'être complètement gagnée devant le public, et le régime des compagnies privilégiées comptait encore de nombreux partisans. Turgot voulut s'assurer que le roi ne prêterait point l'oreille aux sollicitations intéressées de ceux qui regrettaient les anciens monopoles. « Dans le dernier conseil, dit la Correspondance Métra, à la date du 16 octobre, M. Turgot a mis sous les yeux du roi un état de comparaison de plusieurs vaisseaux revenus de la Chine et de l'Inde, où ils avaient été expédiés par des particuliers armateurs avec une pareille quantité de marchandises expédiées par notre ancienne Compagnie des Indes. Il paraît en résulter: 1o que la vente des envois de l'armateur s'est faite avec un avantage bien supérieur;

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2o que les retours ont été beaucoup plus prompts; et 3° que les marchandises de retour ont été vendues à un prix plus modéré parce que la feue Compagnie imposait une taxe onéreuse et arbitraire sur les importations. De là M. Turgot est parti pour demander au roi sa parole que d'ici à trois ans au moins ce commerce serait encore libre aux particuliers, et qu'il ne serait accordé aucun privilége exclusif, ni autorisé de compagnie, relativement à ce commerce, et S. M. y a accédé (1). »

On peut s'étonner de cette précaution prise par Turgot au début de son ministère. Mais il ne faut pas oublier que le commerce extérieur n'était pas tout entier dans son département, qu'il relevait en grande partie du ministre de la marine, que le ministre de la marine était alors Sartines, et que Sartines était peu favorable aux doctrines économiques (*).

Il y a lieu de remarquer encore dans le tableau du budget pour 1775, que les dépenses de la marine ne furent pas augmentées, mais diminuées au contraire de près de 200,000 fr., contrairement à une opinion courante dont nous retrouvons l'écho dans la Correspondance Métra : « M. Turgot travaille à fixer les états de recette et de dépense pour l'année 1775; et l'on sait qu'il sera alloué un fonds extraordinaire de 10 millions, pour augmenter le nombre de nos vaisseaux de guerre. Nous sommes effrayés de voir la marine militaire anglaise forte actuellement de 340 tant vaisseaux que frégates, etc..., ce qui présente un ensemble de 1,400 pièces de canon (3). » Turgot ne partageait point l'enthousiasme belliqueux de beaucoup de ses contemporains. Il ne voulait pas de la guerre avec les Anglais (').

En résumé, Turgot avait trouvé la Recette évaluée à 377,287,637 Il l'avait volontairement diminuée, pour alléger le contribuable, et ramenée à.....

Économie pour la Nation...

(1) Corr. Métra, I, 101.

Pour n'avoir pas à revenir sur cette question, ajoutons qu'elle donna lieu, pendant le ministère de Turgot, à une assez vive polémique. Le 21 janvier 1775 les directeurs de la province de Guienne lui adressèrent un mémoire pour obtenir que les vaisseaux de Bordeaux allant dans l'inde ne fussent pas obliges de faire retour à Lorient, en vertu de l'article V de l'arrêt du 13 août 1769. (Arch. dép. Gir.. 6e reg. des Lett. miss. de la Ch. de comm.) - Le maire de Lorient, de son côté, dans une réplique à ce mémoire, essaya de demontrer que le commerce dé l'Inde ne doit pas être assimilé aux autres; que les principes en sont differents; qu'on ne peut pas mettre en parallèle des operations suivies et combinées d'une Compagnie qui

370,167,398 7,120,239

avait le privilége exclusif pour ledit commerce, avec celui de divers armateurs ne pouvant avoir entre eux aucun accord sur leurs expéditions; que l'expérience confirme tous les jours l'erreur où l'on est tombé en détruisant la Compagnie... (Bach., Mém. sec., VIII, 12, 4 juillet 1775.) Le 29 avril les directeurs de la province de Guienne réclamèrent à Turgot une réduction de droits sur les cafés (Arch. dép. Gir., 6 reg. des Lett. miss. de la Ch. de co:um.) Le 2 décembre ils demandèrent la suppression de l'entrepôt des cafes venant des colonies (id.), etc. Les intentions libérales de Turgot n'etaient donc pas universellement combattues; elles étaient approuvées par une partie du public.

(3) Corr. Métr., I, 101.

(4) V. Liv. III, Mémoire sur l'Amérique.

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Il avait trouvé les Déductions élevées à la somme approximative de...

......

Grâce aux retranchements indiqués plus haut sur divers services de l'État, il avait pu augmenter encore ce chapitre des déductions et le porter à....

C'était une augmentation de......

Or, il n'était ni en son pouvoir, ni dans son intention d'accroître les frais de recouvrement de l'impôt. Cette augmentation des déductions ne peut donc signifier qu'une chose remboursement d'une partie des dettes contractées par l'État envers les fermiers généraux, les régisseurs de diverses contributions, la caisse des recettes générales ou les pays d'états, ce qui revient à dire que Turgot avait libéré le Trésor d'une dette. équivalente au surplus des déductions (18,961,337 fr.). Néanmoins le déficit au lieu d'être de... n'était plus que de..

137,742,015'

156,703,352

18,961,337

37,157,526

36,498,710

soit une nouvelle économie, modeste il est vrai, mais s'élevant encore à la somme de...........

658,816

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On peut donc dire que Turgot, soit en diminutions d'impôts, soit en remboursements, soit en économies, améliorait les finances de la France d'une somme de 34,429,447 fr.

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L'administratión de la Ferme générale et la Liste des Croupiers furent l'objet d'un examen sévère de la part de Turgot.

On a décrit maintes fois l'organisation des Fermes (1). Par l'importance des services que les fermiers généraux rendaient à l'État toujours obéré, par leur fortune, leur luxe, le nombre de ceux qui vivaient de leurs prodigalités ou de leurs faveurs, par la multiplicité de leurs agents qu'on trouvait partout, depuis le village le plus misérable jusqu'aux somptueux bureaux de la rue de Grenelle SaintHonoré et de la rue du Bouloi, par l'effroi qu'inspirait cette armée de collecteurs assurés d'une impunité à peu près complète, par l'avantage que des lois fiscales obscures et perfides leur accordaient dans tous les procès, la Ferme était une puissance, elle formait un État dans l'État. Malheur au contrôleur général imprudent qui osait toucher à la Ferme!

Turgot l'effraya tout d'abord par sa seule arrivée au pouvoir. <«< On dit que son projet, racontait la Correspondance Métra, est de tâcher d'avoir une année de revenus dans les coffres du roi, afin de se défaire des fermiers généraux, d'établir ensuite un impôt unique à l'entrée et à la sortie du royaume, et de charger les provinces de verser directement les impositions dans le trésor royal. Amen (*). » C'étaient là, en effet, plusieurs des projets de Turgot divulgués par l'indiscrétion de ses amis; mais il était trop prudent pour vouloir les réaliser dès le premier jour. « On dit que les effets royaux baissent sur la place, et que les financiers meurent de peur, » écrivait l'abbé Baudeau le 16 septembre; mais il ajoutait avec raison : « Ils ont tort; M. Turgot n'est pas assez étourdi pour culbuter sur-le-champ le bail des Fermes, ni les autres arrangements de finances (3).

Le 11 septembre, Turgot adressa au roi des observations sur la Ferme générale qui ont été récemment retrouvées et publiées (*).

(1) Pour l'organisation des Fermes, voir surtout M. de Silhouette, Bouret, les derniers fermiers généraux, 1872, par P. Clément et A. Lemoine, p. 192 et suiv.

(2) Corr. Métr., 1, 68.
(3) Chr. sec., 412.

(4) M. de Silhouette, etc. Bibl. des fin., mss. : Ordres du Roy.

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