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Haftings n'avoit certainement mieux défini le pouvoir arbitraire. Mais étoit-ce dans ce fens qu'il falloit entendre le contrat paffé entre la Compagnie & le Rajah? M. Haftings pouvoit-il dire au Rajah: » Payez-moi le tribut; foyez obéif» fant; donnez-moi tout ce que je vous deman» derai, & je vous affure que je ne vous deman» derai plus rien enfuite. » Mais dans ce cas, où étoit la compenfation qui doit fe trouver dans tous les contrats? Quoi! le Rajah devoit payer fon tribut, obéir à tous les ordres qui lui étoient donnés, & s'entendre dire, s'il avoit ofé murmurer: » ma volonté, comme fouverain, est tout ; & vos droits, comme fujet, ne font rien. » Avoiton eu en vue ce pouvoir arbitraire, lorfqu'on avoit accordé au Rajah le privilége de faire battre monnoie, & d'exécuter la juftice criminelle dans fon diftrict? La claufe même par laquelle M. Haf

» Benarès étoient réglés, appuyés, établis par les Loix, » par les Coutumes, par les Ulages de l'Empire Mogol, » & non par les Statuts du Parlement d'Angleterre. Mon » devoir me conftituoit l'inftrument involontaire de l'exer»cice de ces droits, tels que je les avois reçus. »«L'histoire » del Inde, pourfuit-il p. 38, eft celle du defpotifme; le def

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potifme conduit néceffairement à la rébellion. Vérité qui » m'avoit décidé à tirer Cheyt-Sing de l'aviliffante condition "de Zémindar, pour l'élever à celle de Prince tributaire & Vafal de la Compagnie. » Voilà dans quels termes M. Haftings a été l'apologifte du defpotifme oriental. Apprenons ici au Public, puifque l'occafion fe préfente, l'histoire de cette défenfe de l'Accufé devant les Communes. Ce ne fut ni trois mois, ni trois semaines qu'on donna à M. H. pour dreffer cette minute de 90 pages in-folio, mais trois jours! trois jours pour répondre à 280 pages in-folio d'Accufations, trois jours pour rendre compte de 13 années d'Administration suprême ! Encore n'eut-il que 24 heures avant,connoiffance de quelques-unes des dernières charges. Cependant c'est à épier, à citer, à agraver les moindres contradictions, les plus minutieufes erreurs de cette minute, rédigée précipitamment par cinq perfonnes diffé rentes, que fe dirige l'adreffe de fes Accufateurs.

tings s'étoit réfervé le pouvoir d'impofer une amende au Rajah, fi l'argent monnoyé fe trouvoit être au-deffous d'un certain tarif, ne prouvoit-elle pas que le Rajah devoit jouir de ce droit de fouveraineté? Se réfervoit-on une pareille claufe, lorfque la volonté du fouverain étoit tout? Le dernier traité qui confirmoit les droits du Rajah de Benarès, avcit été conclu en 1775, & ce n'avoit été qu'en 1778, c'eft-à-dire, trois ans après, que M. Haftings avoit jugé à-propos de le violer, en demandant au Rajah une fomme additionelle de 5 lacks de roupies, (50,000 1. ft.) fous prétexte de bruits de guerre avec la France, dans un moment où il y avoit dans le tréfor un furplus de deux crores de roupies, ou deux millions fterlings (5); mais la caufe réelle de cette extorfion, étoit le reffentiment perfonnel que M. Haftings avoit contre le Rajah, depuis que celui-ci avoit eu l'imprudence de faire féliciter Sir John Clavering, fur le bruit qui s'étoit répandu qu'il devoit être bientôt nommé Gouver neur général. Inde ire, & la victime devoit être immolée (6). Le malheureux Rajah avoit été, en

(5) Ces bruits de guerre, ce prétexte, étoient tout fimple mentune lettre officielle de M. Baldwin, Conful Britannique au Caire, qui donnoit avis à M. Haftings de la rupture. A entendre l'Auteus quelconque de ce Difcours, on croiroit que le caprice du Gouverneur-général fuppofoit un danger fictif pour piller le Rajah.

(6) Dites, pour être vrai, qu'arrivés dans l'Inde avec le projet de perdre M. Haftings, & de lui fuccéder, fes trois Oppofans dans le Confeil, & qui en formoient la majorité, ne cefsèrent de lui fufciter des obftacles, des réfiftances, des défobéiffances de la part des Sujets de la Compagnie; qu'ils avoient porté Cheyt-Sing à oublier,avec une atroce ingratitude, les bienfaits de M. Haftings, à intervenir dans ces démêlés, & à le regarder d'avance comme expulfé du Gouvernement-général. Nous allons voir fi le reffentiment de cette conduite eut quelque part aux évènemens fuivans.

conféquence de cette haine, dépouillé de toute fon autorité, & exilé de fes poffeffions. Quel avoit été fon crime? N'avoit-il pas payé nonfeulement fon tribut, mais même l'amende qui lui avoit été impofée les deux années précédentes (7)? Comment M. Haftings avoit-il juftifié fon infraction des droits du Rajah? En difant que M Francis y avoit concouru, & que la cour

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(7) Quelle réputation réfifteroit à une pareille diffection d'époques, de faits, de circonftances intermédiaires ! La guerre étant certaine, M. Haflings remit le 9 juillet 1778, au Confeil de Bengale, le plan général des augmentations de forces militaires que néceffitoit l'occurrence, il fut agréé à l'unanimité. Tous les diftri&ts fubordonnés à l'autorité de la Compagnie furent appelés à fupporter leur part de la défenfe générale. Quel motif auroit fait excepter le Rajah de Benares de ce fubfide univerfel? Comme Zémir.dar, comme Tributaire de la Compagnie, fa taxe, fixée par un traité formel, ne pouvoit être augmentée; elle ne le fut jamais, ni en temps de paix, ni en temps de guerre. Mais outre cette relation de Zémindar, il en avoit une feconde avec la Compagnie celle de Vafal. Or, en cette qualité de Prince ou de Seigneur, dont il étoit redevable à la politique de M. Hastings, il étoit tenu, en temps de guerre, au fervice militaire envers fon Souverain. Les loix, la coutume conftante, le fyftême de féodalité reçu dans l'Indoftan, le lui impofoient, comme elles l'impofent en cas pareil aux Princes tributaires de la Porte Ottomane, comme en Europe même, les taxes ordinaires ne difpenfent pas les Sujets de la levée des milices en temps de guerre. M. Haf tings ne fit donc rien que de jufte, de régulier, de néceffaire, en demandant à Cheyt-Sing d'entretenir trois bataillons de Cipayes pour fa quote-part: ce Rajah defira que -cette charge fût acquittée en argent, & on la régla à cinq lacks de roupies, pendant la guerre uniquement. Obfervez bien que le quadruple fardeau & la durée de cette guerre, qui devoit effacer de l'Inde le nom Anglois, M. Haftings dut les foutenir, fans recevoir une guinée de la Métropole. Et ce font des Membres du Parlement, de ce même Parlement qui prodiguoit deux cents millions ft. à perdre l'Amérique, qui déclarent M. Haftings criminelde n'avoir pas fu défendre l'Inde contre les François, les Marattes, le Soubah du Decan & Hyder-Ali, avec deux CRORES DE ROUPIES. }

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des directeurs l'avoit approuvée. M. Francis n'avoit donné fon confentement qu'à fa réquifition (8), croyant que ce pouvoit être un préfent volontaire du Rajah; mais il s'étoit oppofé formellement à ce que cette fomme s'exigeât comme un droit, quant à l'approbation des directeurs; c'étoit un moyen de défense bien foible; on étoit affuré dobtenir leur approbation, pour tout ce qui faifoit valoir leurs intérêts; & un acte d'injuftice ne ceffoit pas d'être injufte, malgré l'approbation des directeurs (9). »

»M. Fox obferva enfuite que le confeil du Bengale avoit recommandé au Rajah de lever deux mille hommes de cavalerie qui devoient être envoyés pour la défense commune de fes Etats, & qu'ils devoient être payés à un certain taux, s'ils venoient à être employés au fervice de la compagnie. Cet arrangement s'étoit fait comme entre deux puiffances égales; c'étoit à tous égards un traité fubfidiaire; & cependant M. Haftings avoit fondé fur cette convention, fes prétentions à un pouvoir arbitraire fur le Rajah: ne vaudroit-il pas autant dire que S. M. peut réclamer la fouveraineté de Heffe-Caffel, parce qu'elle a conclu un traité fubfidiaire avec le prince qui gouverne ce pays (10)? M. Haf

(8) Qui croira que M. Francis, ennemi mortel de M. Haftings, ait confenti, pour lui faire plaifir, à une injuftice qui lui étoit démontrée? Comment pouvoit-il regarder ce fubfide militaire comme un préfent volontaire du Rajah, puifque le droit de l'exiger fut difcuté dans le Confeil? &c. &c.

(9) Il eft à préfumer néanmoins que les Directeurs de la Compagnie font de meilleurs juges de leurs intérêts que les Orateurs du Parlement. Or fi, comme ils le difent, M. Haftings avoit mis à feu & à fang, dépeuplé, pillé, anéanti les domaines de la Compagnie par des extorfions à fon profit, cette Cour l'eût-elle remercié pour la troifième fois, le 28 juin 1785, de fes bongs, fidèles & fignalés fervices?

(10) Quelle comparaison, bon Dieu ! d'un traité de

tings, après avoir employé tous les moyens pour provoquer le Rajah à la défobéiffance (11), voyant que fa foumiffion & fa patience n'avoient point de bornes, avoit converti la recommandation du confeil en demande péremptoire, & avoit exigé que le Rajah fournît à fes propres dépens, & non à ceux de la compagnie, les deux mille hommes de cavalerie: le Rajah avoit repréfenté qu'il lui étoit impoffible de fournir ce nombre; on l'avoit alors réduit à celui de mille; & Cheyt-Sing avoit offert treize cents hommes, y compris 500 fufiliers; il avoit fait plus : pour fe mettre à l'abri de toute autre oppreffion, il ávoit cherché à fe concilier l'amitié & la protection de M. Haftings, en lui faifant un préfent de 20,000 livres sterlings (12)."

"Permettez-moi de vous faire. obferver, continua M. Fox en terminant Souverain à Souverain, avec l'arrangement d'un Vaffal à l'égard de fon Suzerain.

(11) M. Haftings employa au contraire tous les moyens de le faire rentrer dans l'obéiflance, en ne ceffant de l'avertir des fuites dont le menaçoit fon refus de contribuer au fubfide militaire, & les vains prétextes dont il les étayoit.

(12) Sans doute l'Analyfte Anglois de M. Fox a jugé fuperflu de donner l'hiftoire complette de ce préfent. Il a cru inutile d'ajouter que pas un fchelling de ces 20,000 1. fterl. n'entra dans les mains de M. Haftings, qu'elles furent livrées par l'Agent même de Cheyt-Sing à M. Croftes, Sous-Tréforier de la Compagnie, déposées dans fa caiffe, employées pour fon compte, annoncées à la Cour des Directeurs par M. Haftings. Deux fois antérieurement le Gouverneur-général avoit refufé cette fomme; mais le Confeil, fous prétexte d'économie, s'étant opposé au projet infiniment fage d'une expédition contre Madajee Scindia, pour repouffer ce Chef des Marattes jufqu'au territoire de fa Nation, & faciliter ainfi les Négociations de paix, M. Haftings fut forcé de recourir à l'offre qu'il avoit rejetée. Tous ces faits, & ceux qui précèdent, feront prouvés dans le temps, par des témoignages & des pièces justificatives authentiques.

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