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Ces mots ont répandu fur le front de la Belle
Une officicufe pudeur,

Qui femble reprocher à fa langue infidelle
D'avoir fi mal gardé le fecret de fon cœur.
Pour Hippocrate, une telle affurance,
Un difcours fi bien apprêté, -
Lui rendit l'efpérance

Et la fanté.

Bientôt même à la Cour on le vit reparoître,
Et fon amour, toujours mieux écouté,
Se crut heureux ou près de l'être.
Eh bien! dit-elle un jour, trouvez-vous un moyen
Qui nous procure un fecret entretien ?
Non, répond-il avec trifteffe,
Vainement j'y fonge fans ceffe;

Mon efprit ne me fournit rien.

J'ai donc plus de bonheur, dit-elle, ou plus d'adreffe. Ecoutez-moi vous n'avez qu'à venir

Ce foir fous ma fenêtre, à l'heure où tout fommeille 5 Mais apportez une corbeille

Capable de vous contenir.

Ma coufine a promis d'aider mon stratagême;
Une corde fur vous defcendra pour lier

Dès

L'anfe de l'utile panier

Où vous devez entrer vous-même.

que vous y ferez, le panier montera,

Et doucement vous portera

Dans une chambre où l'on pourra

Dire fans crainte & prouver qu'on vous aime.
Bien loin de craindre un malin tour,
En proie à ferreur qui l'abuse,

Le Docteur aveuglé croit voir dans cette rufe
Un prodige à la fois de génie & d'amour.

Il fut ravi, cria merveille,

Remercia cent fois de fon rare bonheur,
Et s'en alla bien vite acheter fa corbeille.
Que ce jour marche avec lenteur!
La nuit vient, plus riante aux regards du Docteur
Que l'aurore fraîche & vermeille.

Au rendez-vous il court foudain
Avec fon panier à la main.

quel bel horizon devant lui fe déploie! Rendu fous la fenêtre où l'amour l'attendoit, Il trouve, jugez quelle joie !

La corde qui déjà pendoit,

En attendant la corbeille & fa proie.
La corbeille attachée, il s'y place auffi-tôt.
Un fignal fait tirer la corde par le haut.

Le panier monte, monte, & fait monter fon Maître,
Mais las à mi-chemin, revers inattendu!
La corbeille s'arrête; il refte fufpendu

Entre la rue & la fenêtre.

Il refait le fignal, il parle; on n'entend rien.
Une voix qu'il reconnoît bien
Lui laiffe pour adieux un rire Sardonique,
Lui souhaitant d'un ton fort peu touché,
Sommeil benin, fonge érotique;
Et le Docteur refte là-haut perché
Dans fa cage aéroftatique.

Il y maudit cent fois les femmes & l'amour;
Mais trop tard; il fallut dans cet étroit féjour

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Attendre en enrageant le lever de l'aurore.
La nuit lui parut longue, & cependant au jour
Il eût voulu la voir durer encore.

Il fut reconnu des paffans,

Quoique dans les deux mains il cachâr fon visage
On s'étonna d'abord; puis vint le perfiflage,
Des bons & des mauvais plaifans...
Le peuple curieux que ce fpectacle attire
Vient en foule autour du panier.

Chacun dit, en paffant, fon mot au prisonnier,
Accompagné d'un grand éclat de rire.
Il y refta le jour entier.
Heureufement, au retour de la chaffe,

En paffant, le Roi courroucé

De voir un fi grand Homme à ce point offense,
Jura de punir tant d'audace ;
Mais quand il fut que c'étoit l'efcalier
Par où montoit le Docteur téméraire ;
Quand il fut, avec ce panier

Quelle vendange il vouloit faire,
Il fongea moins à s'affliger

De fon malheur dont on pouvoit médire :
Il le confola, non fans rire,

Et le plaignit fans le venger...

:

Pour Hippocrate, il n'ofa plus paroître.
Même on ceffa de croire à fon favoir diving
D'un ridicule feul tel eft l'effet certain;

Il fembloit au peuple malin
Qu'il étoit impoffible d'être
Amant gauche & bon Médecin.,

Ce récit eft femé de détails à la fois piquans & fenfés. On ne peut mieux narrer. Mais j'avoue, & cette critique ne regarde que l'Auteur original, que le fonds du Conte me fait de la peine. C'est celui d'Ariftote amoureux, de M. Piis, & du Philofophe amoureux, de M. Marmontel. On a beau y répandre tous les agrémens que ces Auteurs ont fu lui prêter, ainfi que M. Imbert; il en résulte au bout du compte, que l'on y joue la Vertu & la Science. C'eft peindre Socrate au milieu des nuées. Quel eft d'ailleurs le Sage ou le Héros qui puiffe réfifter aux féductions de la beauté Turenne lui-même n'a pas fu s'en défendre.

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L'efpace fi bien rempli par ce Fabliau, n'en laiffe plus pour annoncer, fi ce n'eft par leur titre les autres Pièces de ce genre contenues dans ces Etrennes tels que l'Ombre d'Etienne, Yvain & Rofamonde, la Nouvelle Mappemonde, le Danger de la Liberté, le Mifanthrope. Mais il eft jufte de tranfcrire du moins ici le Préambule des cent louis, Conte par M. Mugnerot. Cette préférence lui eft due d'autant mieux qu'il a fourni au Recueil un très-grand nombre de Pièces.

Depuis la mort de ce bon La Fontaine,
Joyeux devis, plaifans narrés,

De nos Rimeurs n'exercent plus la veine.
Nos Conteurs d'à préfent font froids & manierés,

Par-ci, par-là, deux ou trois mots dorés ;
Et puis c'eft tout. Point de grace naïve ;
Sur-tout point de franche gaîté.

A la fin du Conte on arrive

Sans que dans l'ame aucun trait foit resté ;
J'appréciois ainfi tout moderne Bocace.
Pardon, Robbé, j'étois un étourdi.

Qui mieux que toi d'un Conte bien curdi
Nous fait fentir & la force & la grace,
De plus de fel qui peut affaifonner
Gentil récit de galante aventure ?
Si joliment tu fais nous crayonnet
Groupes d'amour en gaillarde pofture.
Tu nous peins fi gaîment leur charmante luxure,
Qu'en les voyant poliffonner,

Pudeur, qui tout haut en murmure,
Sourit tout bas, prompte à te pardonner
Ces tableaux faits d'après Nature.
Mais j'oublie, en parlant de toi,
Que j'ai moi-même un Conte à faire.
Y clouer ce préliminaire,

C'est donner verges contre moi.

Mieux, beaucoup mieux auroit valu je croi,
Tout bonnement te conter mon affaire.

Or la voici, fans autre commentaire
Si je t'endors, je faurai bien pourquoi.

On ne doit pas être étonné du goût que l'Auteur montre pour M. Robbé. C'est une affaire de fympathie. Il a beaucoup de

fa

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