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du sieur Perrault était de montrer par une prodigieuse collection de textes les Jésuites profanant tous les sacrements, détruisant toutes les vertus, autorisant tous les vices.

A ces quelques livres de morale, où les Jésuites sont directement pris à partie, on pourrait en ajouter beaucoup d'autres. Les livres jansénistes pullulaient : Lettres, Disquisitions apologétiques, Règles, Avis, Extraits, Illusions, Nullités, pamphlets de toute forme et de tout titre. Le journal d'un de leurs imprimeurs portait qu'un seul personnage de leur secte avait pris un jour 3.000 exemplaires d'une de leurs lettres. Ils tenaient partout des imprimeries clandestines et des bureaux de distribution. Il y avait, dans cette insistance, de quoi énerver les gens les plus patients du monde. Sept ans à peine après les Provinciales les choses en étaient venues déjà à ce point que les Pères se demandèrent s'il était à propos de continuer cette lutte où l'on n'arrivait qu'à s'exaspérer les uns les autres, où après les raisons on en venait très vite aux injures, où toute accusation, précise ou non, de la part des « Molinistes >> était immédiatement taxée de calomnie. Fallait-il continuer à écrire? La Compagnie n'en tirerait-elle pas plus d'inconvénients que de profit? Le Père Annat consulta le R. Père Général, J.-P. Oliva (16 avril 1663). Il lui disait «< Depuis trois ans, personne de nous n'a écrit, que je sache, contre les jansénistes. Depuis ce temps, ils ont publié une telle quantité de livres et de libelles que je pourrais à peine en faire le catalogue ». Et le Père Général assez embarrassé répondait : « Il est

certain qu'on écrit beaucoup, trop peut-être; mais enfin la prudence étant sauve, il faut passer par dessus les inconvénients possibles, nous exposer à être calomniés, injuriés, mais poursuivre à défendre l'Eglise. Tous les Saints Pères en face des hérétiques en ont ainsi agi »> (1).

Les Jésuites allèrent donc de l'avant et continuèrent la lutte, moins pour se défendre eux-mêmes que pour défendre le dogme et l'autorité. Mais il se passa ce qu'ils avaient prévu, les ennemis n'étaient pas en humeur de désarmer.

Survint la fameuse paix de Clément IX (1669). On sait ce qui se cache sous cette formule. Lorsque ce Pape monta sur le trône pontifical, un groupe important d'évêques français le supplia de rendre la paix à l'Eglise de France. Or cette paix ne dépendait que de la signature par les jansénistes du formulaire d'Alexandre VII. Seuls, quatre évêques résistaient encore. Enfin l'on put croire que tout était fini. Clément IX avait expédié une lettre de pacification. Mais s'il y eut dans l'Eglise une Journée de Dupes, ce fut celle-là. Le premier dupé fut le Pape en personne. On lui fit croire que les récalcitrants avaient signé purement et simplement, quand leurs procès-verbaux portaient les restrictions dont Rome ne voulait pas. Il y eut là, jouée par tel et tel prélat, une petite comédie qui étonne de la part de ces rigoristes scandalisés de la moindre

(1) Voir dans Port-Royal, I, p. 545-547, la consultation du P. Annat, et la réponse du général J.-P. Oliva, 1663. (Mémoire du Père de Montezon). Maynard, II, p. 381.

restriction mentale. Les autres, espérons-le, furent plus dupés que dupeurs. Mais les vrais dupes furent surtout les Jésuites, en cachette de qui l'on avait mené l'affaire, qui en avaient cependant soupçonné quelque chose, et l'avaient dénoncée à Rome, et qui, un beau matin, se réveillèrent, ayant perdu sans combat le fruit de vingt ans de travaux (1).

Mais déjà, le 23 octobre 1668, pour assurer cette paix un peu étrange, un ordre du roi avait interdit les polémiques. Il défendait de ranimer les querelles, de se jeter à la tête les épithètes d'hérétiques, jansénistes, semi-pélagiens et autres noms de parti, et même de publier des libelles sur les matières contestées. Arnauld lui promit à lui-même, en audience privée, de ne plus écrire, de ne plus parler, de ne plus rien dire qui put troubler la paix. Il y eut donc une sorte de trêve dans les discussions doctrinales. Chacun, par ailleurs, gardait ses positions. Les jansénistes s'abritaient derrière un dernier stratagème de leur invention, le «< silence respectueux ». Quant aux Jésuites, ils rongeaient leur frein. Il est vrai qu'en ce temps-là Dieu leur donnait une belle compensation. Bourdaloue commençait à prêcher (1669).

Ses brillants débuts inquiétèrent les jansénistes. Ce fut pour eux le revers de la médaille. A voir les foules assiéger les églises où parlait le vigoureux apôtre, ils sentirent d'instinct que leurs adversaires venaient de

(1) Voir dans le Dictionnaire de théologie catholique, t. III, col. 89-90, l'article de J. de la Servière sur Clément IX.

trouver un puissant renfort. Leurs craintes devaient être dépassées. Bourdaloue n'avait qu'un tort, il venait douze ans trop tard, car il était « une revanche, la revanche des Provinciales ».

Mais les Jésuites pouvaient-ils avoir leur part dans la pacification? C'est une loi de leur histoire que, lorsqu'ils ont été engagés, simples soldats, dans une lutte où toute l'Eglise donnait, et que l'heure sonne de signer une trève, presque toujours les adversaires. mettent à la paix cette condition que la Compagnie de Jésus en sera exclue. Ce fut le cas en 1669.

Cette année de la « paix Clémentine » n'était pas écoulée que les jansénistes lançaient un nouveau pamphlet: La morale pratique des Jésuites, représentée en plusieurs histoires arrivées dans toutes les parties du monde, extraitte ou de livres bien autorisez et fidellement traduite, ou de mémoires très seurs et indubitables.

II

Depuis vingt ans qu'on servait au public les casuistes jésuites, mis en hachis, et accommodés avec plus ou moins de littérature, il y avait lieu, semblait-il, de varier un peu le menu, d'autant qu'on n'avait pas toujours un Pascal pour lui donner de la saveur. Donc, après les doctrines, les anecdotes, et après les Théologies morales, la Morale pratique.

On eût sans doute à Port-Royal exploité beaucoup

plus tôt ce genre d'accusation sans les événements qui amenèrent à interrompre les Provinciales. Tout était prêt, Pascal avait ses notes prises. Il en avertissait les Jésuites : « Les lettres que j'ai faites jusqu'ici ne sont qu'un jeu avant un véritable combat! Je n'ai fait encore que me jouer, et vous montrer plutôt les blessures qu'on peut vous faire que je ne vous en ai fait >> (11e Prov.). Il devait examiner leurs Constitutions, et montrer que, faute de les suvre, les Jésuites en étaient venus au dernier degré de la décadence. Cent ans plus tard, on les accusera de les observer avec excès; mais il importe peu de quelle arme on les frappe, pourvu qu'on les frappe. Déjà, Arnauld avait lu pour lui un recueil de lettres des Pères Généraux, et noté les passages à exploiter. En des termes fort éloquents, Aquaviva et Mutius Vitelleschi signalaient les infractions aux règles et les abus à réprimer. Un ami eût admiré l'active vigilance des supérieurs, et leur zèle pour le maintien de l'Institut. Il eût conclu que les déficits étaient personnels, et que l'Ordre tout entier, par l'organe de ses chefs, ne s'y résignait pas. Il eût fait la part aussi d'un certain pessimisme inévitable chez ceux qui ont le zèle de la justice, et qui leur fait accentuer les défauts contre lesquels ils combattent. Il eût noté enfin avec quelle franchise, dans l'intimité, les Jésuites faisaient leur examen de conscience, et prenaient au sérieux les plaintes qu'on articulait contre eux au dehors. Mais comment demander aux Port-Royalistes, cet effort de sympathie qui n'eût été ici que loyauté d'historien?

Voici plus grave. Pour lui permettre d'étudier les

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