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Et maintenant, pour conclure, contentons-nous de poser une question.

Je me demande jusqu'à quel point le grand évêque, – lequel, je ne l'oublie pas, ouvrait la liste des censures de 1700 par quatre condamnations visant les jansénistes - ne subissait pas lui-même, dans sa campagne contre la morale relachée l'influence secrète du jansénisme. On a dit que, dans toute cette affaire, se retrouvait la main de Quesnel et de ses amis. Fénelon allait jusqu'à écrire en 1705 dans son mémoire secret au Pape : « Si on excepte quelques actes dirigés aussi légèrement que possible contre le jansénisme par les meneurs de l'assemblée, il est constant que tout le reste a été pris, mot à mot, des notes fournies par Quesnel ». Fénelon ignorait que, depuis dix-huit ans, Bossuet avait dans ses cartons un projet de censure. Il n'avait pu le présenter en 1682, il le reprit en 1700 et y ajouta une vingtaine de propositions nouvelles. Mais la question est toute

autre.

Ce n'est pas impunément qu'on est de son temps et de son pays. Or au XVIe siècle, en France, l'atmosphère était tellement saturée d'idées et d'impressions jansénistes que les plus orthodoxes ne s'en défendaient pas toujours. Il ne serait pas très difficile, peut-être, d'en trouver la trace jusque chez les ascètes de la Compagnie. Il est certaines duretés et outrances de doctrines qui s'expliqueraient assez facilement par là. Je laisse à d'autres le soin délicat de chercher si le cas s'applique à Bossuet, et si, par exemple, quelquefois, entre saint Augustin et lui, ne viennent pas à certains moments

s'interposer les idées du jour. Mais il s'agit ici d'antijésuitisme.

Bossuet vivait entouré de gens à qui les Jésuites étaient fort antipathiques. A en juger par le Journal de le Dieu, on en parlait souvent chez lui, et souvent en mauvais termes. Jusqu'à quel point son robuste génie a-t-il pu se dérober à l'influence de l'injustice ambiante? Jamais on ne le voit préoccupé de défendre ce qu'il y avait de défendable dans la morale des Jésuites. Il loue les Provinciales: évidemment, à lire le contexte, il ne ne s'agit que de la forme. « Quelques-unes, dit-il, ont beaucoup de force et de véhémence, et toutes une extrême délicatesse ». Cela ne dépasse pas les qualités littéraires. Mais la restriction sur le fond n'y est pas. Croyait-il cependant à toutes les allégations de Pascal? (1).

Dans l'oraison funèbre de Nicolas Cornet (1663), sa justice distributive est, semble-t-il, sans défaillance. Il est sévère pour les Jansénistes. Il l'est aussi pour les laxistes. Tout ce qu'il dit de la « pitié meurtrière » de ces derniers «< qui leur fait porter des coussins sous les coudes des pécheurs » est parfaitement juste. Il a raison de blåmer la vaine subtilité qui « fatigue les casuistes par des consultations infinies », les « questions de néant qui ne servent qu'à faire perdre parmi des détours infinis la trace toute droite de la vérité », les « chicanes raffinées, ces subtilités en vaines distinctions, qui sont véritablement de la poussière soufflée et de la terre

(2) Ecrit composé pour le card. de Bouillon, 1669.

dans les yeux », tout cela devait être dit. Dans sa pensée il faisait la distinction avec les casuistes modérés, tempérants et sages, dont le docteur Cornet était, à ses yeux, un type achevé. Mais il y a un mot que les Jésuites eussent voulu entendre, et qui les eût empêchés peutêtre de prendre le change sur les intentions de l'orateur : et ce mot n'a pas été dit. Combien, parmi les auditeurs, ont pu croire alors que Bossuet flagellait en même temps et les jansénistes et leurs victimes (1).

Et je me contente de demander: ce procédé, qui n'était pas propre à Bossuet, n'est-ce pas un peu le procédé janséniste? N'y a-t-il pas du Pascal dans cette manière de faire? Bossuet a-t-il pu échapper complètement aux préjugés de l'époque? La réponse à cette question, si toutefois on peut la donner avec précision, permettrait d'en résoudre une autre plus générale et que nous posions au début de ce travail. « Certain antijésuitisme, chez des catholiques sincères, ne s'explique-t-il pas en grande partie par l'atmosphère qui les entoure, tout saturé d'antijésuitisme sectaire? >>

(1) Godefroy Hermant écrivait : « Il donna furieusement sur ces gens là, c'est-à-dire sur les Jésuites, dont il y avait bon nombre dans l'assemblée qui n'y prirent pas assurément plaisir ». Les jansénistes en furent-ils beaucoup plus satisfaits?

D'après Jean Deslions, docteur de Sorbonne, il y avait seulement deux Jésuites présents. (Etudes, 1874, p. 275, art. du P. Gazeau. Doc. inédits sur l'or. fun. de N. C.).

BIBLIOGRAPHIE

N. B. Chacune des études qui composent cet ouvrage étant précédée de quelques notes bibliographiques, nous ne donnons ici le titre que des livres de portée plus générale ou cités plusieurs fois et en des chapitres différents. Nous indiquons en caractères gras, sur les principales matières, à quelle page on en trouvera la bibliographie.

Allemagne. (Antijésuitisme en...), p. 23.
Angleterre. (id.), p. 197.

Annales des soi-disant Jésuites, voir Gazaignes.

A. Arnauld (l'Ancien). Plaidoyé pour l'Université... contre les Jésuites..., Paris, 1594 (Annales des soi-disant Jésuites, t. 1).

Franc et véritable discours du Roy sur le rétablissement qui lui est demandé pour les Jésuites, Villefranche (la Rochelle) 1602.

Antoine Arnauld (le docteur). OEuvres complètes, 1775, Lausanne. 45 vol. in-4°.

A. Astrain, S. J. Historia de la Compania de Jesus en la Asistencia de Espana. Tome I: San Ignacio de Loyola, 1540-1556. Madrid, 1902, in-8°.

Aug. et Al. de Backer. Bibliothèque des Ecrivains de

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D. Bartoli, S. J. Histoire de saint Ignace, traduction du Père L. Michel, Société de Saint-Augustin, 1892, 2 in-8°. Traduction du Père J. Terrien, Lille (Taffin et Lefort) 1893, 2 in-8°.

Baudrillart. L'Eglise catholique, la Renaissance, le Protestantisme, Paris, 1904. 6o édition, Paris, 1905.

Bayle. Dictionnaire critique (1697). Edition Beuchot, 1820, Paris (Desoer), 16 in-8°.

Becanus, S. J. Aphorismi Doctrinæ Calvinistarum ex eorum libris, dictis et factis: cum brevi responsione ad aphorismos falso Jesuitis impositos, Mayence, 1608. (Dans les Opuscula theologica, Paris, 1633, 2 in-fo.

Bonzon. La vente d'une congrégation sous Louis XV; la suppression des Jésuites, Paris, 1901.

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A. Carayon, S. J. Bibliographie historique de la Compagnie de Jésus, Paris, 1864, in-4°. (Une refonte de cet ouvrage est en préparation).

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Documents inédits sur la Compagnie de Jésus, 18631886, 23 vol. in-8°.

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