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CHAPITRE XII

Les Provinciales (Suite).

I.

II.

III.

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CALOMNIATEUR PAR IMPRUDENCE ET PROBABILISTE

SANS LE SAVOIR.

- PASCAL ET Les textes.

THÉORIE DES MENSONGES LITTÉRAIRES.

IV. CE QUI RESTE DES Provinciales. UN LIVRE EN

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LAMBEAUX.

DISCUSSION D'UNE PAGE DE M. LANSON. LA CASUIS

TIQUE.

- ROLE DES JESUITES DANS L'EGLISE MODERNE.

SI PASCAL A NUI A LA CAUSE QU'IL CROYAIT DÉFENDRE.

I

On n'attend pas de nous une réfutation en règle des Petites Lettres. Le travail a été fait, et il ne faudrait qu'une mise au point pour que l'ouvrage de l'abbé Maynard répondit à toutes les exigences actuelles. Celui qui voudrait le reprendre par la base, pourrait faire à

la bonne foi du polémiste la part un peu plus large. Il accepterait pour sincère au fond la déclaration : « Je puis dire devant Dieu qu'il n'y a rien que je déteste tant que de blesser tant soit peu la vérité » (11o Prov.). Que si, en maints endroits, la vérité absolue semble blessée, et profondément, on aurait sur qui rejeter la faute, la polémique elle-même, la passion, l'inexpérience théologique, les préjugés, les collaborateurs. On prendrait pour ce qu'elle vaut la fameuse restriction mentale : « Je suis seul, je ne suis pas de Port-Royal » (17e Prov.), simple ruse de guerre qui, certainement, ne trompait personne. Bref, tout ce qui, dans son œuvre, serait susceptible d'une interprétation bénigne, serait bénignement interprété; et, si l'on ne peut sauver l'œuvre, à tout le moins on sauverait l'auteur. Aussi bien c'est l'attitude actuelle des plus orthodoxes parmi les amis de Pascal, et elle a pour elle la vraisemblance morale.

A ces indulgences pourtant, il est une limite. Consentons volontiers à ce qu'on épargne à l'auteur des Pensées, le gros mot de mensonge. Mais, comme l'imprudence est parfois homicide, n'y a-t-il pas aussi des mensonges par imprudence?

Et n'est-ce pas le cas, lorsque l'honneur du prochain étant mis en jeu, ce prochain fût-il un Jésuite, on se fait son dénonciateur sans préparation prolongée et scrupuleuse, sans examen préalable des pièces, sur des renseignements épars et souvent de seconde main; quand on aborde à ce propos les problèmes les plus ardus sans autre initiation qu'une théologie d'homme du monde; et que, ainsi armé, on ridiculise ses adversaires et on

les livre à l'indignation du public comme des criminels de lèse loi divine? Quelque génie qu'on ait, quelque confiance que méritent ceux qui vous inspirent, ne risque-t-on pas alors d'être calomniateur par imprudence? Qu'en eussent pensé les théologiens rigides de Port-Royal, si l'imprudent eût été un Jésuite? (1)

Veut-on prendre sur le fait cette dangereuse incompétence en une matière fort simple, et où rien n'était plus facile à Pascal que de se renseigner?

C'est dans la 8e Provinciale. Il en est venu à parler de la dévotion jésuitique. Le sujet à traiter n'était pas difficile. Il suffisait de fermer les in-folios de Suarez et de Lessius, avec les manuels d'Escobar et de Bauny, pour se rejeter sur les ascètes.

Or, la littérature ascétique des Jésuites était considérable déjà. Sans parler de la grande école jésuitique

(1) Pour ne pas sembler avoir deux poids et deux mesures, disons ici que les polémistes de la Compagnie, obligés de se défendre, ne le firent pas toujours avec le discernement nécessaire.

Ils ont cru au projet de Bourg-Fontaine un peu vite et un peu longtemps, mais avec beaucoup d'autres. Sainte-Beuve (t. I, p. 789) affirme, mais sans ombre de preuve, qu'ils sont les vrais auteurs de la légende. Ils en furent les propagateurs, et, eux aussi, ont sur ce point manqué d'esprit de finesse. Ils eussent dû sentir que, telle quelle, la version courante du fameux projet était invraisemblable.

Et de même le Père Meynier, arguant de textes très authentiques mais à tout le moins équivoques, au lieu de dire simplement, ce qui était la vérité, que le jansénisme conduisait logiquement au calvinisme, en conclut que Port-Royal ne croyait pas à l'Eucharistie, d'où les colères de la xvi Provinciale. C'était excessif, et le Père Rapin le note clairement dans ses Mémoires, t. II, p. 437. Lui-même, Rapin, écoutait un peu trop aux portes, ce qui n'est pas toujours le meilleur moyen d'entendre.

qui, précisément vers ce temps-là, s'élaborait dans le secret des collèges et des maisons professes, et comprenait des hommes comme Lallemand, Surin, Huby, Rigoleuc, etc., bien des livres avaient été édités en France. J'ignore ce que la bibliothèque de Port-Royal en pouvait contenir. Il n'est pas possible pourtant qu'il n'y eût là quelqu'un des opuscules de Bellarmin, ou les élévations dogmatiques, si pleines et si chaudes, de Lessius. Cela valait bien le Chapelet secret du SaintSacrement. Le traité de La Perfection chrétienne, par Rodriguez, dans lequel Sainte-Beuve consent à reconnaître une « quantité de choses fort élevées et d'une spiritualité très vive » (1), en était déjà, pour sa traduction française du Père Duez, à sa 18o édition. Avant 1650, les méditations du Père Louis Dupont (De la Puente) comptaient aussi une vingtaine d'éditions françaises; sans parler de ses autres œuvres, sans parler surtout de sa Vie du Père Balthasar Alvarez, confesseur de sainte Thérèse, appelé par Bossuet « un des plus sublimes contemplatifs de son siècle. »

La liste serait longue des ascètes, ou mystiques de la Compagnie, que Pascal aurait dû connaître : Saint-Jure, Surin, Caussin, Balinghem, Hayneuve, Suffren, tous ayant déjà publié quelque chose en français; Le Gaudier, Lancicius, Platus, etc., qui écrivaient en latin, et des éspagnols, da Palma et Nieremberg. Pour ceux qui s'occupent de la vie spirituelle, tous ces noms sont classiques.

(1) III, p. 137.

J'ai dit que Pascal n'était pas grand liseur : c'était un méditatif à qui sa vie intellectuelle, intime, suffisait. Essentiellement autodidactè, il redécouvre les mathématiques, il se fait tout seul sa logique, sa rhétorique, son apologétique, sa morale, son ascèse... Mais on ne se fait pas tout seul son histoire ou sa critique; et, puisqu'il voulait s'en prendre à la dévotion des Jésuites, pouvait-il s'abstenir de feuilleter au moins quelquesuns de leurs livres les plus importants? Il ne parait pas y avoir songé. Ses amis lui donnent trois petits opuscules sans portée; cela lui suffit, les Jésuites sont condamnés dans leur dévotion. Elle est frivole, superficielle, remplace les actes sérieux de la vertu par de mes uines pratiques, autorise la vie large et facile, réduit les vertus chrétiennés à une sorte d'honnêteté mondaine sans austérité ni profondeur. Voilà ce que j'appellerai être calomniateur sans le savoir (1).

Or, de cette erreur, s'il faut rejeter la faute sur quelque chose, c'est sur le probabilisme inconscient et spontané de l'auteur.

Mettant sa plume au service d'une cause qu'il pré

(1) A propos de la Dévotion aisée du Père Lemoine, M. Molinier écrit « A vrai dire cet ouvrage ne me parait pas tellement répréhensible..... Cette grande dame (qui suivrait les conseils du Jésuite)..... n'est-elle pas plus aimable, plus humaine qu'une Jacqueline Pascal ou une Mère Agnès? Femmes admirables, ces dernières, soit; mais il est à souhaiter qu'il y en ait aussi peu que possible. Une dame n'est pieuse, au dire des jansénistes, que si elle néglige sa toilette, si elle se rend ennuyeuse en société, si elle évite toute conversation futile ou profane, si elle s'interdit les distractions les plus innocentes. Plus pratique et plus avisé, le Père Lemoine permet,... etc. », p. cII, cv.

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