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Tu autem assecutus es meam doctrinam, institutionem, propositum, fidem, longanimitatem, dilectionem, patientiam, persecutiones, passiones, qualia mihi facta sunt Antiochiæ, Iconii, et Lystris: quales persecutiones sustinui, et ex omnibus eripuit me Dominus.

Et omnes qui pie volunt vivere in Christo Jesu persecutionem patientur. (II Tim. ch. III).

(Epitre de la fête de saint Ignace).

31 juillet 1906.

HARVARD UNIVERSITY

LIBRARY

MAR 0 5 1991

AVANT-PROPOS

I

C'est une histoire étrange que celle de la Compagnie de Jésus. Elle n'existe pas encore: celui qui la fondera un jour, et qui n'a, des vues de Dieu sur lui, que des idées assez flottantes, est déjà accusé, calomnié, jeté d'un tribunal à l'autre. Bien vite, il comprend que c'est là son lot partout où il ira, essayant de faire du bien aux âmes, il verra la persécution se dresser devant lui : Il s'y attend si bien, qu'à l'avance, il prend ses mesures en vue des procès à venir : il demande et il exige qu'on lui délivre les sentences d'absolution en due forme et par devant notaire. C'est que si l'épreuve est une bénédiction pour le persécuté, elle ne va guère sans scandale des faibles, et sans perte des âmes. Il faut donc l'écarter dans la mesure du possible. Si elle vient, saint Ignace ne s'en étonne, ni ne s'en afflige. Si elle ne vient pas, il s'inquiète et se demande : « Est-ce donc que mes fils ne

combattent plus? » Jésus n'a-t-il pas prédit aux siens la haine, la trahison, les malentendus, les flétrissures juridiques, la dispersion et jusqu'au déni du droit d'association? mais, beati!... Beati cum separaverint vos (Luc, VI, 22).

Donc pas une forme de persécution ne manquera à l'Ordre nouveau, ni celle qui va jusqu'au sang et fait des martyrs, ni celle qui rompt les entreprises et fait des désœuvrés; ni les grossières accusations de gens sans aveu qui finiront par se faire noter d'infamie; ni les préjugés qui naissent on ne sait d'où, dans les meilleures têtes et dans les meilleurs cœurs; ni ces haines instinctives des ennemis de Dieu, qui peuvent faire souffrir, mais dont on est saintement fier, ni ces rivalités entre frères d'armes, autrement douloureuses, qui font couler le sang de l'âme, et auxquelles il n'est pas de compensation.

Et la lutte ira s'accentuant toujours. C'est à l'Eglise toute entière qu'il a été dit par Jésus-Chrit : « Puisqu'ils m'ont persécuté, ils vous persécuteront aussi » (Joan. XV. 20). A ne considérer que le sang répandu pour la foi, la Compagnie de Jésus n'a été ni plus ni moins favorisée que les autres ordres religieux. Comme les fils de saint Dominique et ceux de saint François, comme les Carmes et les Augustins, comme les Lazaristes et les Prêtres des Missions Etrangères, partout où les Jésuites ont été porter la foi, il s'en est trouvé parmi eux qui ont eu la joie de donner leur sang. Mais s'il est une bénédiction évangélique qui leur est propre, à laquelle, du moins, ils ont eu plus de part que qui que

ce soit, c'est bien celle-ci : « Beati estis cum..... dixerint omne malum adversum vos mentientes propter me. Bienheureux, quand on accumulera sur vous tous les mensonges, à cause de moi » (Mat. V. 11).

L'histoire de la Compagnie de Jésus, c'est, pour une bonne moitié, l'histoire des calomnies au milieu desquelles il lui faut marcher. Pendant quelque temps elle les réfuta sans se lasser. Puis elle se fatigua de ce labeur stérile. Aujourd'hui, la plupart du temps elle laisse dire, sourit pour elle-même de ces inventions grotesques et méchantes; elle en gémit pour les autres.

De là vient qu'une littérature envahissante et malsaine a pullulé autour d'elle. Les bibliothèques sont encombrées de livres et de brochures pour ou contre les Jésuites, surtout contre. Dans celle du British Museum, l'article Jésuites du Catalogue est si riche que l'administration, honneur assez rare, l'a fait imprimer à part et mettre en vente. Pamphlets et romans, drames et discours, chansons et histoires, vers et prose, in-folios et brochures: productions éphémères le plus souvent et qui ne sont guère la joie que du bibliophile, mais parfois productions durables. Il en est qu'on réimprime périodiquement, chaque fois qu'un certain public est repris de ses accès de jésuitophobie: et l'on voit alors reparaître dans les gares de chemin de fer, ou au rez-de-chaussée des journaux à un sou, le Juif Errant et les Monita secreta. Tel autre de ces ouvrages est devenu classique : tant qu'il y aura des Français, les fins lettrés dégusteront les Provinciales, et si quelque malavisé a le mauvais goût de s'y ennuyer, comme

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Mme de Grignan, c'est tant pis pour lui: Bossuet n'était pas si difficile.

On aura beau s'insurger maintenant, le pli est pris; le préjugé est dans le sang; Pasquier et les Arnauld, Pascal et d'Alembert, Michelet, Quinet, pour ne parler que des chefs de file, ont tant fait, et si bien, que les plus impartiaux des livres, les dictionnaires, ne peuvent que le constater: « Jésuite... pris en mauvaise part, famil. hypocrite dont il faut se défier; Jésuitisme, conduite, langage hypocrite... (Darmesteter) ». Nous n'y pouvons plus rien, dans le langage européen, Jésuite, Jésuïtique, Jésuitisme, ces mots impliqueront toujours une idée fâcheuse.

Et voilà qui n'est pas pour aplanir la tâche de l'historien. Le scrupule d'impartialité qu'on appelle aujourd'hui « point de vue objectif » est, en face de la Compagnie de Jésus, terriblement difficile. Quel que soit le sujet qu'il aborde, s'il touche à l'Institut des Jésuites, aux oeuvres, aux doctrines, aux hommes, immédiatement la polémique est là qui s'impose.

Car on a tout attaqué chez eux. Ils ont des saints, on a essayé de les leur enlever saint François Xavier n'était pas de la Compagnie, saint François Régis est mort chassé de son Ordre, et saint Stanislas congédié du noviciat (1).

Saint Ignace n'est pas, ou est à peine l'auteur des

(1) Sur St F. Xavier, voir Bartoli, Vie de saint Ignace, t. II, ch. VI (Trad. Michel, t. I, p. 175); sur St F. Régis, voir Cros. S F. Régis, Documents nouveaux, 1894, p. 182; sur St Stanislas, Analecta Bollandiana, t. XI, p. 451.

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