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I. RELAT, celui des hommes; & elle obtint avec pei ne de M. Arnauld fon pere, à qui fa conservation étoit precieuse, que l'on retireroit ces Gardes qui faifoient même une grande depense à l'Abbaye, quoique le Roi payât leur nourriture. Depuis qu'ils n'y furent plus on fut encore long-tems obligé de prendre plufieurs precautions pour garder la Mere Angelique. Il falloit fermer les fenêtres par où elle paffoit, & obferver ceux qui s'approchoient de l'Abbaye, parce qu'il Y en venoit encore avec de mauvais deffeins. Mais quand Madame d'Eftrées eût été decouverte & renfermée de nouveau aux Fil→ les Penitentes, tout cela ceffa, & la Mere Angelique demeura en paix, & continua à s'occuper au reglement de cette Abbaye.

LXVI.

Madame de la Serre & une autre confidente de Madame d'Eftrées, nommée Madame de Ricarville, furent enlevées de Maubuiffon par ordre de M. de Citeaux & renfermées dans d'autres Couvents de l'Ordre. On verra ailleurs ce qui leur arriva depuis, & comment Dieu les convertit.

Quelle fut la Pour Madame d'Eftrées, elle fut diverses in de Mad. fois renfermée & s'échapa plufieurs fois. Ses defor. Elle fut même quelque tems prifonniere au

d'Eftrées.

dres.

Châtelet, où le celebre Pere Bernard contoit qu'il l'avoit vue dans un état bien deplora→ ble. Car il la trouva un jour dans le lit,

une

Dans l'hiftoire de la Mere Marie des Anges Suireau Religieufe de Port-Royal, qui fut depuis Abbeffe de Maubuiffon pendant vingtdeux ans. On l'a imprimée en partie à Paris en 1737.

une bouteille de vin & des fauciffes auprès I. RELAT d'elle, tous fes malheurs ne l'ayant point fait penfer à entrer dans la penitence. Elle paffa toute fa vie à plaider pour rentrer dans fon Abbaye, qui lui payoit douze cens livres de penfion, qui ne la mettoient gueres à fon aife, parce qu'elle les confumoit en frais de procès. Elle mourut enfin dans une petite Maison, d'un Fauxbourg de Paris, fort miferable. On n'en a rien fu de particulier, finon que la Mere Marie des Anges qui étoit deja Abbeffe de Maubuiffon,

il

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y avoit treize ou quatorze ans, eut foin de faire retirer fes papiers, parce qu'elle avoit detourné plufieurs titres de l'Abbaye; & elle trouva dans fa caffette quelques Livres de devotion, d'où elle voulut prendre fujet d'efperer que peut-être cette pauvre Dame avoit pensé à elle, parce qu'en toute fa vie elle n'avoit jamais ouvert un Livre de pieté avant cela.

Je n'ai ofé marquer ci-devant qu'elle étoit l'horreur de sa vie. Cependant je doute s'il ne falloit point dire en general ce qui en peut donner l'idée. Il n'y aura qu'à le fupprimer, fi on le juge inutile. C'eft affez dire que de remarquer que fon abandonnement étoit tel que Madame Gabrielle fa fœur lui en faifoit affez fouvent des remontrances, & qu'elle pouvoit paffer pour avoir encore de l'honneur en comparaison de Madame d'Eftrées. On dit qu'elle avoit douze enfans, dont elle avoit quatre grandes filles auprès d'elle, qui paffoient pour fes Demoifelles. Et quand la Mere Angelique y fut petite fille, n'ayant pour lors que neuf

ans,

I. RELAT. ans, elle jouoit ordinairement à la chambre de Madame avec une autre petite creature qu'elle élevoit avec elle. Comme fes filles n'étoient pas toutes de même condition. elle les traitoit différemment: l'une d'elles qui étoit fille d'un Seigneur de qualité & la plus jeune, étoit élevée dans l'Abbaye en perfonne de qualité, & Madame la deftinoit à être fa Coadjutrice. Quand elle eut été enlevée de Maubuiffon, les Religieufes garderent encore quelques années cette petite fille; mais enfuite fon pere la retira de là; lorfqu'il vit qu'il n'y avoit plus rien à espeLXVII. rer pour elle.

Converfion

de la plus jeune fille de M. Arnauld, qui depuis vint à P. R.

Nous avons vu ci-devant comme la Mere Angelique avoit deja offert à Dieu trois de fes fœurs pour être Religieufes avec elle. Il n'en reftoit plus que deux dans le monde l'aînée & la plus jeune de toutes. L'aînée (Madame le Maître) ne pouvoit pas la fuivre alors, étant engagée dans le mariage; mais la providence de Dieu l'y acheminoit deja, par les afflictions qu'elle y eut à fouffrir, qui la detacherent entierement du monde. Dès le tems même que la Mere Angelique alla à Maubuiffon en 1618. elle étoit deja feparée par Arrêt de la Cour d'avec fon mari, & demeuroit avec ses enfans chez M. Arnauld fon pere. Il lui reftoit encore dans le monde une petite foeur Magdeleine, qui en ce tems-là n'avoit pas encore dix ans. Le pere & la mere l'aimoient tendrement, tant parce qu'elle étoit la derniere & la feule fille, qu'à caufe qu'elle leur avoit couté plus de peine & caufé plus d'inquietudes que les autres, car Madame Ar

nauld

nauld avoit été très malade aux deux cou- I. RELAT ches precedentes, dont les enfans n'avoient pas vecu, & elle étoit encore accouchée avant terme de celle-ci, qui vint au monde à sept mois & demi; de forte que cet enfant étoit alors fi foible qu'on ne la put pas porter à l'Eglife, & qu'il la fallut baptifer dans le logis, croyant qu'elle dût mourir auffitôt. Cependant elle vecut, & fut élevée avec tant de foin, qu'elle devint aufli forte & auffi puiffante que pas une autre.

Le deffein de M. Arnauld étoit de referver cette cadette pour le monde. Elle avoit beaucoup d'avantage pour cela. C'étoit une fort belle fille, d'une humeur gaie & enjouée, qui la rendoit le divertiffement de toute la famille. La Mere Angelique qui n'a jamais fu faire de partage entre Dieu & le monde, avoit une extrême envie d'arra-. cher cette petite proie au demon, avant qu'il l'eût encore pu corrompre. Mais elle n'y pouvoit en rien contribuer que par fes prieres; car elle l'eût demandée inutilement à M. Arnauld, qui n'avoit plus que ce divertiffement; outre que l'enfant avoit beaucoup d'éloignement pour la Religion.

Il arriva dans le tems de cette premiere année que la Mere Angelique demeura à Maubuiffon, que Madame Arnauld fa mere, l'ayant été voir, avoit mené avec elle une fille de chambre qui avoit envie d'être Religieufe, & qui n'en avoit pourtant rien temoigné. Elle fe declara à la Mere Angelique, & lui fit de grandes inftances pour obtenir qu'elle lui donnât place à Maubuiffon. La Mere Angelique fachant que c'é

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I. RELAT. toit une bonne fille, efpera que puifqu'elle aimoit la Religion, elle pourroit être utile à fa petite foeur qu'elle fervoit, pour lui en ôter peu à peu l'éloignement; & ainfi elle n'eut pas envie de la recevoir fi-tôt. Mais comme cette pauvre fille pleuroit, & lui faifoit de grandes inftances, la Mere Angelique lui dit :,, Allez ma fille, pleurez au», près de Dieu, & le priez bien qu'il faffe la grace à ma fœur Madelon de vouloir être Religieufe, alors je vous promets que je vous recevrai avec elle. " Cette fille fort confolée de cette bonne parole, fe retira dans le deffein de bien prier Dieu, comme la Mere le lui avoit dit, puifque fon bonheur étoit attaché à cette condition. Il y a apparence qu'elle le fit avec une grande foi, puifque dès la nuit même elle fut exaucée.

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Elle étoit comme j'ai dit à Maubuiffon où elle coucha cette nuit, & la petite Ar nauld étoit à Andilly avec Madame le Maître fa foeur, qui la faifoit coucher auprès d'elle. La nuit cet enfant fe reveilla & appella Madame le Maître, pour lui dire qu'elle vouloit être Religieufe. Elle affez furprise d'entendre cette nouvelle à telle heure, lui dit qu'elles auroient plus de tems de s'en entretenir le lendemain. La petite lui voulut dire tout à l'heure d'où lui venoit ce changement, & cette refolution fi prompte. Elle lui conta donc qu'elle venoit de voir en fonge Sainte Magdeleine fa Patrone, dans le fond d'un defert tout plein d'épines, & qu'elle lui avoit tendu la main, qu'elle avoit fort blanche & fort belle, & lui avoit fait

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